On a beaucoup parlé ces dernières années du logement insalubre et des drames qu’il occasionne. Lors de l’été 2005, à Paris, une vague d’incendies meurtriers dans des immeubles dégradés faisait de nombreuses victimes. Au-delà des morts, l’insalubrité a des effets délétères sur la santé. Le saturnisme infantile est la manifestation pathologique la plus connue, mais il existe bien d’autres implications sanitaires (affections respiratoires, dermatologiques, maladies chroniques, allergies, etc., sans parler des effets sur la santé mentale). Cette situation est dénoncée depuis le xixe siècle, quand Engels parlait déjà à ce sujet de « meurtre social ». De fait, le logement des couches les plus basses de la société a presque toujours été un problème.
La collectivité a pourtant tenté de remédier à ce fléau de différentes façons : en agissant auprès des populations, en légiférant, en démolissant les locaux insalubres, en tentant d’inciter les propriétaires à réhabiliter et en construisant des logements sociaux. Comment expliquer malgré tout cette incapacité récurrente de la société à abriter ses membres les plus fragiles ? Il s’agit dans cet article non pas de donner des solutions toutes faites au problème du logement insalubre, mais de dresser certains constats qui pourraient rester comme des « balises » pour l’action. À cette fin, je m’appuierai sur un travail de recherche mené à Paris de 2004 à 2009. En 2001, plus de mille immeubles insalubres étaient recensés dans la capitale. C’est dans ce contexte que la mairie de Paris a mis en place l’année suivante un plan de résorption du logement dégradé (voir encadré) dont a été chargée la Société immobilière d’économie mixte de la ville de Paris (…