Les points forts
- L’engagement dans la vie associative des étudiants permet de développer des compétences attendues par les milieux professionnels, notamment le travail en équipe. Toutefois le cadre de l’association ne permet pas d’appréhender la prise de risque et la gestion de l’incertitude propre à l’entrepreneuriat.
- Le poste occupé au sein de l’association et l’investissement dont font preuve les étudiants interviennent dans le développement des sentiments d’auto-efficacité entrepreneuriale et professionnelle, et cela quel que soit le type d’association.
- Un suivi et une adaptation de l’encadrement aux besoins des étudiants dans ce cadre associatif peuvent permettre une acquisition plus importante des compétences et une meilleure préparation à la vie professionnelle.
1Les établissements d’enseignement supérieur, Écoles ou Universités, ont notamment pour objectif, de former les salariés ou entrepreneurs de demain. Ils doivent donc être capables de proposer des solutions innovantes et adaptées pour développer les sentiments d’auto- efficacité entrepreneuriale et professionnelle des étudiants.
2Le sentiment d’auto-efficacité fait référence à la croyance d’un individu en sa capacité à accomplir les tâches spécifiques qu’il entreprend pour atteindre certains objectifs [1]. Ainsi, la perception d’auto-efficacité ne concerne pas le nombre d’habiletés qu’un individu possède mais la croyance de ce qu’il peut faire avec les habiletés qu’il possède dans une variété de circonstances. Cette perception est importante car il apparaît que les étudiants capables de repérer les compétences acquises (techniques ou comportementales) au cours de leur cursus transiteraient plus rapidement et efficacement vers l’emploi (salarié ou par création d’entreprise) [2].
3L’éducation entrepreneuriale peut permettre de développer, chez les étudiants notamment, « un ensemble dynamique d’attitudes, de valeurs et de compétences transversales qui caractérisent les entrepreneurs et les intrapreneurs au sein d’une organisation existante », c’est-à-dire leur esprit d’entreprendre [3]. Son rôle est donc double : permettre aux étudiants d’accroître leur chance d’obtenir un emploi ou de le créer mais aussi développer une agilité nécessaire « pour adapter à un environnement turbulent leurs apprentissages, leurs connaissances, leurs réseaux, leurs compétences et aptitudes transversales comme la créativité, l’esprit d’initiative, la ténacité, le travail en équipe, la compréhension des risques et le sens des responsabilités » [4].
4Au-delà des enseignements proposés et des cours dispensés au sein des Écoles et Universités, la vie associative peut aussi intervenir dans l’apprentissage des étudiants. Les associations offrent, en effet, des possibilités d’apprentissage par la pratique (ou « learning by doing ») à travers l’action et l’expérience [5]. Elles peuvent alors apparaître comme une solution aux problèmes de légitimité que rencontre parfois l’éducation en entrepreneuriat [6].
5Voyons dans quelle mesure et sous quelles conditions l’investissement dans une activité associative permet aux étudiants de développer leurs sentiments d’auto-efficacité entrepreneuriale et professionnelle…
La vie associative dans l’enseignement supérieur en France
Depuis la rentrée universitaire 2017/2018, tous les établissements d’enseignement supérieur français doivent mettre en place un dispositif de reconnaissance des compétences et aptitudes acquises par les étudiants dans l’exercice des activités associatives, sociales ou professionnelles. Chaque établissement d’enseignement supérieur est libre de la définition et de la mise en place des modalités de validation de l’engagement étudiant : Unité d’enseignement attribuant des crédits E.C.T.S [8], inscription d’un supplément au diplôme, octroi de bonus…
Nous entendons par « vie associative » en études supérieures la possibilité pour un étudiant de s’engager, dans une association de type loi 1901 à but non lucratif. L’association de loi 1901 est définie par le droit des associations comme « une convention par laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs connaissances ou leur activité, dans un but autre que le partage de bénéfices ». Il s’agit très généralement de rejoindre bénévolement ou non une association sportive, culturelle, évènementielle ou encore humanitaire.
D’après Loïck Roche, Directeur Général à Grenoble École de Management depuis 2012 « participer à la vie associative de l’école est un quasi incontournable pour un parcours réussi et une scolarité épanouie : facilitateur d’intégration, terrain d’expérimentations professionnelles, lieu de rencontres et lieu de vie… la vie associative, c’est avant tout une aventure humaine unique ».
6Nous souhaitons, par cette étude, pouvoir dégager des recommandations utiles dans le cadre de l’accompagnement des étudiants durant leur passage dans la vie associative de manière à ce qu’ils puissent tirer pleinement profit de cette expérience. Ils pourront alors plus aisément avoir conscience de ce qu’elle a pu leur apporter et la valoriser sur leur curriculum vitae, durant des entretiens ou encore pour convaincre des investisseurs. La question de la transition entre vie étudiante et vie professionnelle est aussi une question à fort enjeu pour les établissements du supérieur.
7Notre objectif est aussi d’enrichir la littérature sur l’Éducation en Entrepreneuriat en nous concentrant sur la vie associative et ses apports. Cela a peu été fait jusque-là sur un public français. De plus, nous ne nous concentrons pas ici sur l’intention d’entreprendre mais sur le développement des sentiments d’auto-efficacité entrepreneuriale et professionnelle.
La vie associative pour préparer les professionnels de demain
8Les étudiants engagés dans la vie associative occupent des fonctions d’« apprentis managers » : ils organisent des événements, recherchent des partenaires financiers, travaillent le marketing et la communication de leurs activités, et apprennent à travailler en équipe [9]. Ils mettent, ainsi, en pratique ce qu’ils apprennent durant leurs cours. Ils pourront, par la suite, faire valoir ces expériences de manière à faciliter leur transition vers l’emploi [10].
9L’engagement dans la vie associative durant le cursus scolaire est également vu comme une des manières, pour un étudiant, d’acquérir des compétences comportementales [11], c’est-à-dire « un ensemble de compétences particulières qui permettent à l’individu d’adopter des comportements satisfaisants pour l’organisation » [12]. En effet, l’apprentissage de ces compétences se fait plutôt par l’exemple et par l’expérience, que par la transmission formelle (cours en face-à-face). Si ces compétences sont intimement liées à la notion d’esprit d’entreprendre et sont centrales pour l’entrepreneuriat, elles sont aussi très recherchées par les recruteurs et interviennent de plus en plus dans la gestion et l’orientation de carrière. Selon un article paru dans « Les Échos » [13], on retrouve dans « le top 5 » : la rigueur, l’autonomie, le dynamisme, l’esprit d’équipe et la motivation. Lorsqu’elles sont maîtrisées, elles sont un atout majeur en entreprise. À diplôme égal, les candidats se démarquent par leur capacité à mettre en avant les compétences comportementales acquises au cours de leur scolarité ou de leur vie extrascolaire [14].
10L’activité associative peut aussi accroître le sentiment d’acquisition de compétences plus techniques en lien avec la création d’entreprise. En effet, selon les études antérieures [15], l’engagement dans la vie associative stimulerait les capacités entrepreneuriales des étudiants en leur donnant la possibilité de mener un projet de bout en bout en autonomie. Ces résultats montrent d’ailleurs qu’à la suite d’un engagement associatif l’intention d’entreprendre des étudiants augmente significativement.
Évaluer les sentiments d’auto-efficacité
11Pour ce travail de recherche, nous avons réalisé une étude quantitative auprès d’étudiants d’une même école de management française proposant des cursus en management de niveau Bac + 3 à Bac +5. La méthode quantitative nous a permis de collecter de nombreuses données et de garantir un maximum d’objectivité à notre enquête [16].
Personnes interrogées pour l’étude
L’échantillon se présentait ainsi :
- Sexe : 68 femmes (50,4 %) / 67 hommes (49,6 %).
- Âge : 78 % ont entre 19 et 21 ans et 20 % ont 22 ou 23 ans.
- Pôle d’appartenance durant l’année (poste) : 29 % des répondants appartenaient au pôle Présidence, 20 % au pôle Partenariat, 18 % au pôle logistique, 16 % au pôle Communication, 10 % au pôle Trésorerie et 7 % au pôle Secrétariat.
- Types d’associations : 35 % des étudiants ayant répondu étaient investis dans une association culturelle, 28 % dans une association sportive, 20 % dans une association humanitaire et 16 % dans une association professionnelle.
12L’ensemble des étudiants d’une promotion de 3e année (Undergraduate 3), 425 en tout, devaient s’engager dans un projet associatif durant l’année scolaire dans le cadre de leur enseignement en « Gestion de projets associatifs ». Cette matière est évaluée, créditée et fait partie d’un module « Développement personnel ». L’intérêt de cette discipline est d’inciter les étudiants à s’engager dans la vie associative de l’École, de leur donner une expérience-terrain du travail en équipe. Les étudiants sont encadrés par une équipe (le Link Office), chargée de les accompagner dans la conduite de leur projet (coaching individuel, team building, formations diverses…). Les projets pouvaient être au choix : sportifs, culturels, professionnels ou encore humanitaires et les étudiants pouvaient, dans chaque association, appartenir à différents pôles (Présidence, Trésorerie, Secrétariat, Communication, Logistique, Partenariat). Au total, 45 projets associatifs ont été développés cette année-là. Un questionnaire a été administré en fin d’année (mai 2018), après un an de travail au sein de l’association.
Questionnaire et méthodes d’analyse
Les questions ont été adaptées en amont au public et validées au cours d’un entretien collectif avec des étudiants de Master 2 (cinquième année).
- Pour évaluer le développement du sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale, l’étude se déroule en deux temps et utilise deux échelles de mesure différentes. Elle se concentre, dans un premier temps, sur les compétences comportementales listées par Loué (2012) [17]. Celles-ci sont assez générales et sont donc adaptées à un profil d’étudiants (par exemple : Être créatif, Faire preuve d’enthousiasme, d’optimisme, Faire preuve de persuasion…). Dans un second temps, elle porte plus spécifiquement sur l’acte d’entreprendre en utilisant des échelles de mesure développées par De Noble et al. (1999) [18] et Anna et al. (2000) [19] puis reprises notamment par St-Jean et Mathieu (2011) [20] : Être capable de percevoir des besoins non-comblés, Être capable de gérer des dépenses…
- Pour évaluer le développement du sentiment d’auto-efficacité professionnelle, les chercheurs ont utilisé un questionnaire dont l’objectif est d’évaluer l’auto-efficacité des étudiants par rapport à la transition vers l’emploi [21], comprenant l’auto-efficacité relative à l’adaptation au travail, l’auto-efficacité relative à la régulation émotionnelle et l’auto-efficacité relative à la recherche d’emploi [22]. Celui-ci a été adapté au public : Être capable de travailler comme membre d’une équipe, de répondre à des offres de stage…
Les résultats ont été l’objet de discussions entre les étudiants et leur responsable de projet afin de valider les analyses et interprétations proposées.
13La recherche vise à évaluer les sentiments d’auto-efficacité entrepreneuriale (qui intègre les compétences comportementales et les capacités à créer une entreprise) et professionnelle (qui intègre les capacités à trouver et conserver un emploi) des étudiants, à la suite de leur passage dans la vie associative. Il leur a donc été demandé de s’autoévaluer sur la base de compétences préalablement identifiées. Cette méthode est très utilisée dans la littérature pour mesurer le sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale des étudiants notamment [23].
Des étudiants plus professionnels et entreprenants…
14Une année d’investissement dans la vie associative a un impact positif sur les sentiments d’auto-efficacité entrepreneuriale et professionnelle des étudiants. Le tableau 1 rassemble les scores obtenus sur 7 des différents types de compétences. Il apparaît que les étudiants se sentent plus capables de rechercher un emploi ou de se projeter en tant que futurs salariés (5,41), grâce à leur engagement dans la vie associative, que de se lancer dans l’entrepreneuriat (5,26). Finalement, ils ont le sentiment de plus développer des compétences comportementales (5,29) que des compétences directement en lien avec la création d’entreprise (5,19).
15Globalement, les étudiants ont donc le sentiment de pouvoir mieux « s’entourer » à la suite de leur passage dans la vie associative. L’étude met en avant qu’ils considèrent avoir appris à travailler comme membre d’une équipe mais aussi à trouver les personnes compétentes pour travailler avec eux. Cela leur sera sans aucun doute précieux pour leur activité professionnelle future quelle qu’elle soit. En revanche, ils n’ont pas le sentiment d’avoir développé leur capacité à maîtriser leur peur de l’échec ou à faire face aux difficultés. De même, une année de vie associative semble n’avoir que peu joué sur leur sentiment d’être capable d’effectuer les tâches administratives liées directement à la création d’entreprise (formalité ou obtention d’un financement). Ainsi, les étudiants, après une année d’investissement dans leur vie associative se sentent plus professionnels et entreprenants mais pas forcément prêts à entreprendre.
Synthèse des résultats obtenus
Les compétences avec les moyennes les plus élevées | Les compétences avec les moyennes les plus faibles | |
---|---|---|
Sentiment d’auto-efficacité professionnelle (5,41) | La capacité à travailler comme membre d’une équipe (5,78) | La capacité à ne pas désespérer face aux difficultés pour obtenir un stage, une alternance ou un emploi (5,12) |
Sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale (5,26) | ||
– Compétences comportementales (5,29) | Être capable de se surpasser (5,81), Faire preuve d’une grande motivation (5,7), Faire preuve d’enthousiasme et d’optimisme (5,69), Être capable de travailler en équipe (5,6) et Être capable de connaitre ses forces et ses faiblesses (5,6) | Être capable de se concentrer fortement (4,64), Être rigoureux (4,5) et Maîtriser sa peur de l’échec et celle de perdre la face (4,16) |
– Compétences directement en lien avec la création d’entreprise (5,19) | La capacité à trouver des personnes compétentes pour travailler avec moi (5,67) ou encore La capacité à manager des hommes (5,49) | La capacité à effectuer les formalités administratives liées à la création de mon entreprise (4,83) ou encore La capacité à obtenir un financement (4,78) |
Synthèse des résultats obtenus
Deux variables-clé : l’investissement dans l’association et le poste occupé
16L’étude met en exergue deux grandes variables pouvant jouer sur les sentiments d’auto-efficacité (entrepreneuriale et professionnelle) des étudiants : son niveau d’implication dans l’association et le poste occupé. En revanche, le type d’association ne semble pas intervenir.
17Plus un étudiant a le sentiment de s’être impliqué dans son association, plus ses sentiments d’auto-efficacité (entrepreneuriale et professionnelle) sont importants (ce résultat est significatif au seuil de 1 %).
18Le lien, représenté par le coefficient de corrélation, est particulièrement fort pour les compétences comportementales et parmi elles les suivantes : Être capable d’anticiper, Faire preuve de persévérance, Être capable de se fixer des objectifs réalisables, Faire preuve d’initiative et de débrouillardise et Être capable de se concentrer fortement.
19Le développement des compétences comportementales nécessite que les étudiants acceptent de s’investir totalement dans leur projet, qu’ils se sentent responsables de la réussite de celui-ci.
20Il apparaît que le poste occupé dans les associations, ou le pôle d’appartenance intervient dans le développement du sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale des étudiants (ce résultat est significatif au seuil de 5 %). Concernant le sentiment d’auto-efficacité professionnelle, la différence entre les postes n’est pas significative.
21Nous observons, en effet, que les scores obtenus sont significativement différents entre pôles. Trois pôles ressortent plus spécifiquement : la présidence, le secrétariat et le pôle Partenariat.
22Les scores de ces trois pôles sont représentés dans le tableau 2 ci-dessous.
Résultats de l’étude en fonction du pôle d’appartenance
Président | Secrétaire | Partenariats | |
---|---|---|---|
Sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale | |||
Compétences comportementales (5,29) | 5,47 | 5,34 | 5,01 |
Compétences directement en lien avec la création d’entreprise (5,19) | 5,47 | 5,57 | 4,96 |
Résultats de l’étude en fonction du pôle d’appartenance
En gras les scores les plus élevés et en italiques les plus faibles.23En y regardant de plus près, le poste joue spécifiquement sur le sentiment d’acquisition de compétences comportementales. De ce point de vue, les présidents, en première ligne pour communiquer sur le projet et rassembler autour d’eux, bénéficient particulièrement de leur expérience. Il n’est alors pas étonnant que les recruteurs soulignent qu’ils ont une préférence pour un ancien président d’association, dont ils pensent qu’il est a priori « motivé », qu’il a une « forte personnalité », une « aisance relationnelle », qu’il est « dynamique » [24].
24Les secrétaires, quant à eux, ont surtout le sentiment d’avoir développé des compétences techniques en lien avec la création d’entreprise. Leur poste leur permet, en effet, d’avoir accès à une vision globale du projet et surtout les a amenés à se confronter à des tâches très diverses.
Des projets inspirants, terrain d’apprentissage de compétences
25L’objectif de l’étude est de mettre en avant des recommandations destinées, notamment, aux équipes pédagogiques des établissements d’enseignement supérieur. Les résultats conduisent à une réflexion sur différents points. Voici quelques pistes pour optimiser les apports d’un investissement dans la vie associative.
26Tout d’abord, il est important d’inciter les étudiants à s’engager dans la vie associative et à valoriser cet investissement. Cela peut passer par l’intégration de la matière au sein des programmes de formation, son évaluation et l’obtention de crédit ECTS (European Credits Transfer System). L’objectif est alors de donner un cadre institutionnel reconnu à cette activité ne devant pas être considérée comme périphérique dans le parcours de formation. Cependant, cela n’est pas suffisant si l’on souhaite que les étudiants jouent le jeu et s’approprient pleinement le projet. L’expérience ne sera pleinement bénéfique que si les projets sont choisis par les étudiants et les inspirent véritablement : ils doivent donc avoir accès à une vraie diversité de projets et pouvoir en proposer de nouveaux dont les enjeux leur tiennent à cœur. L’équipe d’encadrants doit être à l’écoute de leur envie, de leur inspiration et prendre le temps de les accompagner dans leur choix. Seul un étudiant investi pourra tirer pleinement profit de l’expérience et développer des compétences solides.
27Ensuite, il serait bon de créer un portefeuille de compétences destiné aux étudiants. Il est possible, pour cela, de s’inspirer d’outils existants comme le cadre européen des compétences entrepreneuriales (EntreComp) [25] ou encore « Valorise-toi » des Scouts et Guide De France [26]. L’association apparaît alors comme un terrain d’apprentissage de compétences. En amont de leur investissement, les étudiants pourront choisir celles qu’ils souhaitent développer lors de leur passage dans la vie associative. Un dialogue avec le corps enseignant à cette étape serait particulièrement pertinent. Durant l’année, il sera possible d’orienter les étudiants vers la bonne association, le bon pôle, le bon poste selon les compétences choisies. Après l’expérience, il est aussi important que les étudiants verbalisent les compétences qu’ils pensent avoir acquises et celles qu’ils regrettent de ne pas avoir développé durant des débriefings organisés à cet effet. Le problème est que, si les étudiants de l’enseignement supérieur sont souvent capables de savoir s’ils ont acquis ou non certaines compétences techniques liées aux divers enseignements pédagogiques [27], il leur semble plus compliqué de verbaliser les compétences comportementales acquises. Il s’agit souvent pour eux d’une notion floue [28]. Cela est préjudiciable car ce sont surtout elles qu’ils développent par la vie associative et qui sont recherchées par les recruteurs. Ils ont donc clairement besoin d’un encadrement pour les aider à identifier les compétences comportementales et les accompagner dans leur développement. L’utilisation de ce « portefeuille » permet aussi d’amener les étudiants à prendre conscience des compétences qu’ils développent et de leur intérêt pour leur vie professionnelle future. Ils pourront alors prendre confiance en eux et seront plus capables de se « vendre » dans le cadre de leur activité professionnelle.
28Finalement, l’étude met clairement en exergue ce que les étudiants ont le sentiment de ne pas avoir acquis ou pas suffisamment. Ils ont ainsi particulièrement besoin d’être accompagnés dans la gestion de l’échec d’un projet. Celui-ci ne doit pas être stigmatisé. Pour cela, il est possible de mettre en place des tutorats individuels pour débriefer suite au non aboutissement d’un projet, discuter de l’échec et mettre en avant ce qui a aussi fonctionné. De même, l’organisation de conférences collectives pour discuter librement de la non-réussite du projet peut-être d’une grande aide pour les étudiants.
29Parallèlement à cela, il apparaît qu’il est important de valoriser mais aussi favoriser le travail d’équipe et les projets collectifs. Cela passe par le fait de valoriser l’équipe entrepreneuriale et le leadership social et non l’individu et la réussite individuelle. Cela peut aussi passer par le fait d’accompagner le positionnement de chaque étudiant dans l’équipe en fonction de ses besoins ou encore de proposer une rotation de postes dans l’association durant l’année (Président puis Secrétaire…). Plus les étudiants auront eu accès à des tâches diverses et plus ils auront conscience des enjeux du travail de chacun, plus ils développeront de compétences. En ne se concentrant pas sur une tâche seulement (recherche de partenaire ou de financement, recrutement…), ils pourront alors avoir une vraie expérience d’entrepreneuriat et donc développer leur sentiment d’auto-efficacité entrepreneuriale.
30Pour aller plus loin, dans le cadre d’une étude future, il pourrait être intéressant de proposer le questionnaire à la même population en deux temps. L’objectif serait alors de mesurer les différents sentiments d’auto-efficacité en amont de la gestion de projets associatifs et ensuite en aval, afin de vérifier plus précisément si le fait de s’engager dans la vie associative en études supérieures aide au développement de ces sentiments. Il serait également profitable de mesurer des échantillons d’étudiants différents (le premier avec des étudiants investis et le second sans activité associative) et comparer les résultats. Enfin, il serait riche d’enseignements de tester la maîtrise des compétences sur le terrain pour aller au-delà des sentiments d’auto-efficacité des étudiants.
Notes
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