Les points forts
- Le politique n’ose plus revendiquer la notion d’innovation pour son propre compte ; alors même qu’il existe, localement surtout, des expériences et initiatives originales.
- La posture de suiveur contraint le politique à s’approprier tardivement des solutions connues. Redonner la primauté au raisonnement de conception innovante sur les succédanés technologiques lui restituerait son propre espace d’invention.
- La théorie C-K fournit un cadre permettant d’intégrer de l’inconnu à des concepts fondateurs propres au politique, définissant un territoire d’innovation spécifiquement politique. L’exemple du Revenu Universel illustre sa capacité à ouvrir les perspectives tout en structurant la démarche de conception.
1Le politique se présente volontiers comme « à l’écoute ». À l’écoute de ses administrés, des préoccupations des Français... Cette connaissance du terrain, comme garantie de réalisme, comme rempart contre les dogmatismes, est une figure convenue des débats d’idées. De même que la prétention à la nouveauté et l’annonce de la rupture.
2Ce souci croissant de se montrer en prise avec son temps est remarquable tant le politique prétend par ailleurs continuer à inspirer et conduire le changement. Évoquer l’avenir comme la conjonction de convictions, de courage et d’écoute laisse notablement de côté les capacités d’invention de l’innovation. Peter Drucker [2] ne décrit-il pas l’innovation comme « l’instrument le plus important de l’entrepreneur, peu importe son domaine d’activité » ?
3Pourquoi alors n’est-elle pas plus fréquemment présentée comme une ressource naturelle du politique, dont le champ d’action est fondé sur la promesse de renouvellement ? Le politique se sent-il illégitime à revendiquer l’innovation comme levier de refondation de ses idées et de ses méthodes ? L’innovation appartiendrait-elle, pour le politique, à l’air du temps et aux sujets à observer ?
4Une représentation restrictive de l’innovation, marquée par les produits technologiques, les services en réseau et une audace disruptive, semble en effet avoir dépossédé le politique de son pouvoir d’inspiration de l’avenir. Si la sphère politique revendique des initiatives et se déclare ouverte à des expérimentations, on ne lui reconnaît pas la capacité à l’innovation qu’on attribue diffusément à la société civile et aveuglément aux entrepreneurs et aux start-up.
5Ainsi, les changements climatiques posent des défis qui nécessitent, entend-on souvent, « du courage politique et de l’innovation technologique ». Pourquoi pas « innovation politique et courage d’entreprendre » ? Le politique est-il condamné à être perçu, par les citoyens, comme extérieur à un mouvement accéléré qui établirait le rythme, le sens et la valeur du changement ? Comment regagner de la souveraineté sur l’avenir en redevenant un acteur innovant sur son territoire ?
6En théorie de la conception, Armand Hatchuel et son équipe [3] ont souvent évoqué ce qu’ils décrivent comme « la remise en cause de l’identité de l’objet », qui incite à le bousculer ou le repenser. L’approche C-K appliquée à des concepts et contextes spécifiques au politique fournirait les ressorts d’une innovation qui lui serait propre. L’expansion du raisonnement en grammaires de concepts ouvre en effet un espace de conception permettant de dépasser la fixation sur les bonnes pratiques ou la recherche de « la » solution. Dans une approche C-K, « taxer les robots » ou « le revenu universel » ne constituent pas directement des propositions, mais des concepts fondateurs d’un raisonnement.
7Ce travail du politique sur le politique représenterait une alternative originale à l’idée que la solution est ailleurs, que seule une approche technologique peut désormais renouveler nos modèles. Avec humour – et peut-être un peu de détresse – le premier forum des Civic Techs [4] d’octobre 2016 avait été intitulé « Des geeks pour sauver la politique ? » !
Une innovation confisquée par les approches « technologiques »
8La science politique s’est construite sur une connaissance éprouvée des interactions au sein de la société, qui, en association avec une certaine finesse politicienne, autoriserait à entrevoir et influencer l’avenir par l’action publique. Cette expérience des hommes, du terrain et de l’administration se heurte aujourd’hui à une mutation accélérée des usages.
9Cette « complexification » du monde correspond avant tout à une mise en réseau des systèmes d’information et des marchés, qui remet en cause la capacité d’instances centralisées à influencer les comportements individuels. Une impuissance croissante devant l’imprévu entame la crédibilité de la responsabilité politique : indécision, « indécidabilité » ou inconnu n’existent qu’en creux dans le champ politique.
10En parallèle, l’air du temps crédite l’innovation, comprise comme un écosystème créateur, de l’invention de nouveaux modèles responsables de changements de paradigmes. L’innovation « de rupture » apparaît dans l’inconscient collectif comme la source de solutions pour des systèmes à bout de souffle. Elle est d’autant plus impressionnante qu’elle annonce ses ruptures en désignant ses victimes : « le blockchain va tuer les banques », « l’intelligence artificielle va rendre obsolètes les modèles de décisions actuels »…
11Ce perspectivisme tonitruant tend à disqualifier toutes les « institutions », les gouvernants en premier lieu. Ils sont les tenants d’un « dominant design » [5], certes capables d’optimisations marginales mais toujours en retard et condamnés par la radicalité des ruptures à venir. Cet agenda de l’innovation spectaculaire contraint le politique à commenter, à prendre parti, à légiférer. À réagir. Et à attendre… puisqu’une prochaine vague est annoncée. Si le blockchain doit « tout changer », autant ne rien faire et laisser venir. Comment se confronter au réseau planétaire, au « transhumanisme » ou au « deep learning » ? À des entités décentralisées et des notions émergentes ?
12Le politique est pris en défaut et reconnaît, parfois, l’impuissance de son arsenal traditionnel. L’efficacité de la régulation est remise en cause lorsqu’elle cible des technologies et des usages en constante mutation. Par exemple, en ciblant les phénomènes les plus spectaculaires ou les plus valorisants pour l’image, sans prendre le temps de comprendre leurs fondements, les députés réagissent parfois avec des textes si spécifiques qu’ils sont contournés ou inapplicables. Le rapporteur de la loi pour une République numérique déclarait, en décembre 2015 devant la commission des lois de l’Assemblée nationale [6], que certains travaux législatifs sur le numérique ne s’adressaient en réalité qu’à deux acteurs en particulier : Amazon ou Uber.
13Dans cette opposition, le politique apparaît parfois comme une somme de rouages menacée par l’intégration et l’imbrication croissante de systèmes qui affectent la vie des individus. Tandis que les entreprises innovantes et la société civile sont les inventeurs, que l’horizon s’ouvre grâce à des avancées technologiques étroitement confondues avec le Progrès.
14Vision, progrès, anticipation peuvent être ainsi revendiqués par le champ de l’innovation, qui dépossède le politique de ses missions fondamentales, pour trois raisons entr’aperçues : la confusion entre avancées technologiques et innovation, la complexité croissante des systèmes interagissants et le rejet de l’inconnu par le politique.
15« Des geeks pour sauver la politique ? » traduit ainsi cette perception généralisée que les nouvelles technologies peuvent offrir des pistes de réponse (même lorsque la problématique initiale n’est pas clairement formulée) pour un champ politique qui ne dispose pas de capacité de renouvellement endogène. La représentation du politique-suiveur, ou « late-adopter » dans la langue vernaculaire des nouvelles technologies, est devenue un nouveau « dominant design ».
16Dans ce mouvement général, les décideurs semblent soumis à une sorte de compression du temps, qui finit par confondre, en une séquence optimisée, décision, action et évaluation de l’action. Cet ersatz de conception favorise la recherche de solutions éprouvées et limite la perspective d’innovation à l’horizon des bonnes pratiques.
17Si le partage d’expériences est un formidable accélérateur de la circulation des connaissances, il provoque des fixations sur des initiatives perçues comme des vitrines ou succédanés d’innovation : à l’échelle des collectivités locales, par exemple, les élus délégués aux nouvelles technologies sont en charge d’une forme d’innovation. Par défaut, si l’on considère qu’aucun des 600 élus de 15 communes d’Île-de-France regroupant 1,5 million d’habitants ne porte la responsabilité de l’innovation !
18En naviguant dans l’air du temps, en reproduisant des solutions mises en œuvre ailleurs, on néglige les cheminements du raisonnement de conception, dont la théorie C-K nous présente toute la richesse.
19Pour restaurer un espace d’invention original, propre à sa mission, le politique doit séparer la démarche d’innovation de ses manifestations symboliques. Se réapproprier la première et se détacher des secondes. Autrement dit, ménager du temps de conception.
La théorie C-K
Dans ce cadre théorique, la conception est le processus de raisonnement par lequel un concept génère d’autres concepts qui peuvent devenir connaissances.
Les opérations qui relient le connu et l’inconnu conduisent à l’expansion, en parallèle, de l’arbre des concepts et du champ des connaissances. Aller de K vers C revient à ajouter des propriétés aux concepts, à créer de l’indécidable à partir du connu ; aller de C vers K conduit à prototyper des concepts, créer du savoir nouveau pour valider les concepts et faire exister le désirable.
Le formalisme illustré ci-dessous rend génériquement compte de parcours de conception pilotés par des méthodes issues de la théorie C-K, comme le DKCP.

Tracer le raisonnement, favoriser l’expansion des lignées de concepts plutôt que de précipiter rapidement une idée en solution à tester, sont deux des propriétés distinctives du C-K ; elles en font un instrument et un cadre d’innovation particulièrement adaptés aux enjeux et rythmes de conception du politique.
Raisonner autrement grâce aux démarches issues du C-K
20La force d’un raisonnement de conception innovante est d’extraire le potentiel d’un concept qui contient de l’inconnu, de l’indécidable, et de générer des grappes et des lignées de concepts qui élargissent l’espace des connaissances disponibles. La chance du politique est de disposer de terrains d’exploration multiples et variés. Le service aux administrés, la solidarité, la transparence dans la vie publique, la préservation de nombreux équilibres de gestion sont, par exemple, des chantiers permanents pour une commune. Chaque axe de la vie politique – avec et malgré ses contraintes de normes, règlements, statuts – offre des opportunités d’associer une mission à un inconnu du monde d’aujourd’hui pour formuler un concept… et anticiper demain.
21Car il est possible de conserver la trace du raisonnement qui a conduit à telle ou telle proposition, puis de la réexplorer ou réinterroger en fonction d’un contexte nouveau ou d’une avancée dans le champ des connaissances accessibles. N’est-ce pas une des missions du politique que de concevoir un programme de campagne issu de concepts que l’on peut remobiliser en une feuille de route ou en modes d’administration originaux et cohérents en accédant aux responsabilités ?
22Laisser un temps pour l’expansion de concepts en un raisonnement génératif d’idées, de solutions, de nouveaux concepts, de nouvelles connaissances, garantit l’innovation politique, plus durablement que les simples retours d’expériences partagés ou les recensements de bonnes pratiques. En marge de la remise des prix de l’association Villes Internet en 2016, le mathématicien philosophe Michel Authier décrivait une vision inspirée des premiers développements de l’Internet dans laquelle « chaque collectivité serait un serveur, avec à sa tête un leader serviteur » [7]. Ce concept porte ainsi une vision de la circulation des connaissances et de la responsabilité, qui donne une profondeur nouvelle au partage d’initiatives : une capacité de réinvention.
23En s’intéressant à la participation citoyenne, au patrimoine immatériel de la commune, une équipe municipale découvrirait que certaines collectivités ont mis en place des outils wiki, pour facilement intégrer les contributions d’habitants volontaires. Plutôt que de se fixer sur cette solution, il serait pertinent d’initier un raisonnement à partir de la notion de co-écriture qui conduirait à s’intéresser, par exemple, aux techniques d’écriture collective dans l’histoire de la littérature, de la chanson de geste aux surréalistes. Un champ de connaissances qui nourrirait peut-être des concepts permettant à cette commune en particulier de renouveler profondément et durablement la place du patrimoine immatériel au sein de la communauté.
24Annoncer la « digitalisation de la mairie » peut passer, a priori, pour une position audacieuse et un programme innovant. Pourtant, son potentiel d’invention est limité puisque l’ambition initiale ressemble à un cahier des charges. Explorer, en revanche, les ramifications d’un concept inspirant et fécond, comme « c’est partout la Mairie » ou « la Mairie qui vous veut du bien », promet de cartographier un espace beaucoup plus ouvert, qui comprendra, sans doute, des scénarios digitaux… et beaucoup plus.
25Ce « beaucoup plus » tiendrait à la culture, la vision de l’innovation partagée par la mairie pour rester à cet échelon d’exécutif. La recherche d’ajustements et d’optimisation de l’administration communale s’inscrit, à bien des égards, dans une approche industrielle traditionnelle, qui repose sur des bureaux d’études et de méthodes et des usines de production. Cette conception dite « réglée » [8] est efficace dans la gestion de ressources spécialisées et peut produire des innovations incrémentales indéniables. Mais l’horizon s’ouvrirait si l’innovation était perçue comme une démarche collective, transverse et générative : elle pourrait émerger au-delà des silos traditionnels de l’organisation, dans le cadre d’une mairie « ouverte à la découverte », curieuse et capable de ménager des espaces d’invention dans l’exercice de ses missions.
26Pour aller plus loin, il faudrait d’ailleurs idéalement échanger les concepts fondateurs, qui sont les sources de raisonnements génératifs. L’équipe de la chaire Théorie et méthodes de la conception innovante de Mines Paris Tech décrit d’ailleurs certaines formes de collaboration comme des « collèges de l’inconnu », dans lesquels les concepteurs partagent les concepts et inconnus dans leur champ d’innovation davantage que les connaissances [9].
Des concepts du politique au révélateur du C-K
27Il existe une proximité générique entre un raisonnement ouvert et l’élaboration d’un programme politique ; une familiarité entre un collège de l’inconnu et des valeurs politiques, en ce qu’ils sont mobilisés comme points de départ d’une démarche d’expansion.
28Le Design Thinking ou le Problem Solving, pour ne citer que deux exemples d’approches de l’innovation, offrent des cadres de conception efficaces, adaptés à l’optimisation de prestations ou à l’invention de services ; le cadre C-K ajoute une dimension permettant de révéler la portée ou la profondeur d’un concept politique en parallèle de la recherche d’une solution applicable.
29Prenons l’exemple du Revenu Universel, débattu, en particulier, par les candidats à la primaire socialiste. Ils l’évoquent et le jugent alternativement comme ambition, solution, marqueur politique, en étant contraints, dans le temps du débat, de le sanctionner : faisable/infaisable, fédérateur ou pas auprès des électeurs, utile dans la lutte contre les inégalités / sclérosant pour la société…
30Or ce concept possède une valeur pour l’incertitude, l’inconnu qui le caractérisent encore : cette absence de statut logique indiscutable – vrai ou faux – en fait un concept « générique » et générateur ; le point de départ d’un cheminement qui intégrerait des connaissances en expansion au fur et à mesure que le raisonnement se déploie.
31Poser d’emblée la question du montant de ce revenu épuise la richesse potentielle d’un concept à peine soumis au débat public. En revanche, dans une logique de type collège de l’inconnu, il est possible de le faire vivre en confrontant les principes et ramifications d’un revenu universel conçu comme un droit, une rente, un capital, un travail ou, bien entendu, encore autre chose.
32Dans le schéma qui suit, le concept n’est pas considéré a priori comme possible ou impossible ; il est envisagé au travers de propriétés issues de champs de connaissances existants, par exemple le droit international, les fonds souverains, le marché du travail alternatif dans certaines communautés, etc. Les partitions successives laissent toujours la place à une option « autre », explorable et « développable » plus tard. Ces partitions répondent à des acquisitions de connaissances nouvelles.
Exemple de partition du concept de Revenu Universel, nourrie par l’expansion du champ des connaissances

Les ramifications deviendront des propositions ou des projets lorsqu’ils pourront être présentés et discutés dans l’espace K des connaissances.
Cet exercice laisse entrevoir que l’on peut, dans le cadre formel C-K, conduire un raisonnement original ou représenter a posteriori le chemin de conception d’une solution connue pour revisiter les branches du raisonnement issues du concept fondateur.
Il serait également pertinent et fécond de le mener pour la taxation des robots dans l’économie contemporaine : cette proposition a, en réalité, tous les attributs d’un excellent concept projecteur pour un raisonnement de conception innovante.
33La théorie C-K [10], ainsi que les différentes démarches qu’elle a inspirées, permettent de piloter la conception d’une politique raisonnée et ouvrante. Cette expansion autorise l’exploration de champs de connaissances variées (et parfois inattendues), qui servent de point d’appui et de relais et non de fin au raisonnement.
34La mairie de Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) a initié, au début de cette année, une réflexion sur la mutualisation des services de restauration collective avec trois autres communes, Bourg-la-Reine, Sceaux et Montrouge. Cette mission, menée avec l’appui d’un groupe de stagiaires du Master MTI (Dauphine, MinesParisTech et INSTN), a suivi une approche C-K, plus précisément la méthode DKCP.
35Les prestations traditionnelles de préparation de repas dans les écoles et les crèches, de distribution de repas à certains citoyens en situation de fragilité, ont été envisagées à la lumière de connaissances issues de nombreux domaines connexes : fabrication, distribution, pédagogie, citoyenneté, développement durable, lien social, santé, « gamification », open data et même les exemples originaux de restauration au cinéma !
36La démarche a ainsi fait émerger des familles de concepts innovants [11], dont certains ont été développés jusqu’à l’identification de projets envisageables pour une mise en œuvre. Des concepts comme « je joue avec la nourriture », « la faim de l’individualité », « datavore » et « je ne joue pas avec la nourriture » ont permis d’envisager la restauration collective sous des angles ludique, anti-gaspillage ou créateur de valeur, en proposant des outils et des approches nouvelles. La richesse et la diversité des résultats obtenus ont été largement saluées par les participants.
37Autre résultat, non négligeable, elle a également permis d’impliquer les parties prenantes – élus, administration, experts – dans une nouvelle forme de raisonnement collectif. Cet impact culturel se prolonge par une deuxième mission C-K autour de la conception de nouveaux mécanismes de démocratie participative.
38Dans les deux cas, l’approche C-K mobilise les acteurs de la réflexion autour de sa capacité à l’expansion – des champs de connaissances sans utilité a priori pour la restauration collective ont ainsi été explorés – et la génération. De nombreux concepts ont émergé que les parties prenantes ont pu saisir et décliner en projets selon leur agenda et leurs capacités.
39Ainsi, un parti politique, une organisation citoyenne, une collectivité, une association peuvent-ils développer des « grammaires de concepts » qui n’ont pas tous vocation à se transformer en projets opérationnels en même temps, mais qui peuvent être réinterrogés en fonction des évolutions du contexte.
40À condition de laisser une place à l’inconnu, le concept politique aura toujours plus de potentiel que la réplication des idées qui en sont issues. Cette primauté du raisonnement de conception innovante sur la technologie, du temps de conception sur le symbole de nouveauté pourrait être le mode de revendication de l’innovation par le politique.
41En augmentant « sa capacité d’innovation », le politique se donne les moyens d’inventer des modalités vertueuses de l’action publique et des visions du bien commun qui seraient, avec et sans les geeks, un écho innovant à la formule d’Aristide Briand : « La politique est l’art de concilier le désirable avec le possible [12]. »
Notes
-
[1]
Le Masson, P. et McMahon, C. (2016), « Armand Hatchuel et Benoit Weil. La théorie C-K, un fondement formel aux théories de l’innovation », in T. Burger-Helmchen, C. Hussler et P. Cohendet (dir.), Les grands auteurs du management de l’innovation et de la créativité (pp. 588-613), Cormelles-le-Royal, Éditions Management et Société.
-
[2]
Drucker, P. (1985), Innovation and Entrepreneurship: Practice and Principles, Oxford, Butterworth-Heinemann.
-
[3]
Le Masson, P. et McMahon, C. (2016), « Armand Hatchuel et Benoit Weil. La théorie C-K, un fondement formel aux théories de l’innovation », op. cit.
- [4]
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[5]
Par « dominant design », nous entendons l’ensemble minimal des éléments qui identifient un objet sans ambiguïté (un résumé en sorte de ses caractéristiques et propriétés).
- [6]
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[7]
Congrès des Élus des Territoires, Villes et Villages Internet, https://www.youtube.com/watch?v=4ePqtPFGMsM.
-
[8]
Conception à base de règles comme dans un cahier des charges.
-
[9]
Le Masson, P. et Weil, B. (2014), « Réinventer l’entreprise : la gestion collégiale des inconnus communs non appropriables », in B. Segrestin, B. Roger et R. Vernac (dir.), L’entreprise, point aveugle du savoir (pp. 238-253), Paris, Sciences humaines.
-
[10]
Agogué, M. et al. (2013), Introduction à la conception innovante : éléments théoriques et pratiques de la théorie CK, Paris, Presses des Mines.
-
[11]
Le chantier C-K a permis de générer 18 champs d’innovation dont 6 ont été approfondis pour proposer une vingtaine de projets.
-
[12]
Briand, A., Paroles de Paix, 1927.