1Tous les ans, 550 000 nouvelles entreprises environ voient le jour, parmi lesquelles 95 % sont des entreprises unipersonnelles et 56 % reposent sur le régime de l’auto-entrepreneur [1]. Le mirage des chiffres ne doit pas nous égarer, en fait ils dissimulent une grande variété de contextes et de situations entrepreneuriales. Cette hétérogénéité s’incarne dans les différentes natures des activités engagées : services à la personne, exploitation d’un nouveau brevet technologique, activité artistique... Elle s’incarne également dans la multiplicité des statuts mais aussi et surtout dans la diversité des profils des femmes et des hommes qui créent en fonction de leurs parcours, de leurs situations, avec leurs ressources plus ou moins limitées, leur capacité à en mobiliser d’autres...
2Le dossier de ce numéro est consacré à la diversité, qui est abordée à travers des articles, des entretiens et des résumés d’ouvrage.
3Tout d’abord, il nous a semblé essentiel de poser une interrogation sur la notion même de diversité. Qu’entend-on par là ? Est-ce judicieux de mettre dans la « diversité », les femmes, les jeunes, les seniors ? Ces trois catégories doivent déjà représenter bien plus de 50 % de la population française ! L’article de Jacques-Henri Coste a pour objectif de faire réfléchir autrement, différemment sur ce concept de diversité. Séverine Le Loarne – Lemaire, ensuite, questionne la diversité appliquée à l’entrepreneuriat en ouvrant un débat assez provocateur et en soutenant la thèse qu’aujourd’hui encore, en France, la diversité entrepreneuriale n’existe pas puisque la capacité à faire croître l’activité semble être l’apanage d’une « élite », issue de lignées d’entrepreneurs. Constatant des inégalités de chance dans la réussite entrepreneuriale, Christel Tessier s’intéresse justement à ceux qui ne font pas partie de cette élite et qui créent sous la contrainte : celle de trouver un emploi pour vivre (et souvent survivre !). À partir d’une typologie d’entrepreneurs « par nécessité », elle évoque quelques pistes pour faciliter la démarche de chacun d’entre eux. Benjamin Le Pendeven quant à lui se focalise sur le point de vue du capital investissement pour aborder la diversité des situations entrepreneuriales. La contribution suivante complète la réflexion sur la diversité entrepreneuriale. Adnan Maâlaoui y soulève les enjeux de l’entrepreneuriat chez les seniors et la spécificité de leur accompagnement.
4Dans un second temps, le dossier propose une série d’entretiens pour illustrer davantage et mieux traduire la diversité entrepreneuriale. Le premier entretien, réalisé par Caroline Verzat, est celui de Norbert Alter, sociologue et auteur de nombreux ouvrages dont La force de la différence. Itinéraire d’un patron atypique, dont un résumé est également proposé. Le second entretien, qu’Olivier Toutain a réalisé avec Delphine Zénou, porte sur le rôle des Régions et des instances publiques dans la promotion et le soutien de la diversité entrepreneuriale. Le dernier entretien, réalisé par Adnane Maâlaoui, concerne Didier Roche et dresse le portrait d’un handipreneur, dont le parcours est celui d’une personne handicapée parvenant à créer un fonds d’investissement. Enfin, André Letowski nous livre une représentation chiffrée de la diversité dans le champ de l’entrepreneuriat, à travers la rubrique qu’il anime.
5Dans les contributions intervenant hors dossier, un article de Wadid Lamine et Alain Fayolle montre l’importance des compétences sociales dans la création de réseaux utiles au développement des jeunes entreprises technologiques. Aomar Ibourk s’intéresse à une « autre forme entrepreneuriale », celle des jeunes diplômés qui s’associent pour créer une coopérative sur le sol marocain. Nous espérons que ce numéro apportera de la matière à tous ceux qui s’intéressent à la pluralité des profils d’entrepreneurs et à la multiplicité des situations dans lesquelles ces derniers sont engagés.
