Les points forts
- Un chômage endémique touche les diplômés marocains de l’enseignement supérieur et particulièrement les titulaires des diplômes universitaires généralistes (Lettres, Sciences, Droit et Économie).
- Le modèle coopératif peut constituer pour eux un mode d’insertion privilégié.
- Une analyse menée sur un grand nombre de coopératives de jeunes diplômés révèle que beaucoup d’entre elles sont inactives, créées par pur effet d’aubaine pour bénéficier des subventions publiques et des aides des ONG.
1À l’instar des pays en développement, le Maroc connaît un fort taux de chômage de ses jeunes diplômés. Cette situation, préoccupante pour toute une classe d’âge, a poussé les pouvoirs publics à s’impliquer en matière de politique de l’emploi et à promouvoir des modalités différentes des canons habituels pour entreprendre. Partant du constat que l’écart entre le rythme de création d’emplois dans le secteur public, longtemps considéré comme étant la filière d’insertion de prédilection des diplômés, et celui de la croissance de l’offre du travail diplômé ne peut que s’accentuer vu la conjoncture, la politique de l’emploi initiée vise à faciliter l’insertion des diplômés dans le secteur privé et à trouver de nouvelles voies de formation et d’accès à l’emploi et à l’activité économique. Tous les diplômés ne sont pas toutefois aptes à suivre cette voie puisqu’une bonne partie est prise dans un chômage endémique, lequel touche les diplômés du supérieur et frappe tout particulièrement les titulaires des diplômes universitaires généralistes (Lettres, Sciences, Droit et Économie). D’autres filières d’insertion alternatives sont ainsi à envisager en vue de résorber un tel chômage et créer de l’activité. Parmi ces alternatives, le secteur coopératif présente de fortes potentialités compte tenu du rôle économique et social qu’il doit jouer.
2Il est à souligner que cette initiative n’est pas récente puisque l’entité responsable de la promotion des coopératives : « l’Office de Développement de la Coopération (ODCO) » a vu le jour en 1962, soit six années seulement après l’indépendance. À la fin de 2011 (ODCO, 2012) [1], 289 coopératives de jeunes diplômés [2], encadrant 3252 diplômés (soit une moyenne de 11 adhérents par coopérative) et engageant un capital de 44644703 DH (soit une moyenne de 154480 DH par coopérative et 13737 DH par adhérent) ont été répertoriées. Cependant, malgré l’intérêt affiché par les pouvoirs publics, le développement de ce type de coopératives reste en deçà des espérances (Fath Allah, 2011) [3]. L’impact de cette forte dynamique constatée au niveau de la création des coopératives devrait être relativisé eu égard à l’existence d’une proportion non négligeable de coopératives en situation d’inactivité ou de manque d’activité.
3Les déterminants de cette inactivité proviennent d’une multitude de facteurs ayant trait à la nature des coopératives et à ses aspects juridiques, organisationnels et matériels intrinsèques. D’autres contingences pèsent également sur leur action. C’est ainsi que les logiques comportementales et cognitives des acteurs, sans parler des objectifs entrepreneuriaux de création de valeurs qui pourraient les animer, devraient recevoir beaucoup plus d’attention car ils constituent des vecteurs d’action et des variables déterminantes de succès pour « entreprendre dans la diversité ».
4Partant de ce constat, la présente étude s’interroge sur la capacité réelle de ce secteur à assurer le rôle de développement socio-économique central qui lui est assigné. Sur la base de données nationales et d’enquêtes qualitatives, nous cherchons à dégager les principales contingences (aléas) qui pèsent sur ce secteur. Sur le plan méthodologique, ce travail combine les démarches quantitatives et qualitatives. Les bases de données constituées permettent d’élargir de façon novatrice le champ d’analyse en étudiant les déterminants de la survie d’une coopérative, questions, très peu abordées dans la littérature mais appréhendées ici à l’aide des modèles dit de « variable dépendante limitée ».
5Dans la première section, un cadrage des principales caractéristiques propres au marché du travail des diplômés au Maroc est effectué en vue de mieux cerner l’intérêt de promouvoir les coopératives en tant qu’acteurs socioéconomiques de développement local et modalité alternative d’entrepreneuriat social issu de pratiques régionales et culturelles originales. Dans une deuxième partie, l’étude du « régime entrepreneurial coopérative » et ses incarnations diverses permettra une brève présentation typologique des formes de coopératives à destination de jeunes diplômés et de leurs réalisations respectives. La dernière section sera consacrée, quant à elle, à une analyse spatiale du secteur coopératif combinée à une analyse économétrique afin de dégager les meilleures pratiques susceptibles d’initier et de nourrir un débat sur les dysfonctionnements, les potentialités, les accomplissements de ce secteur de l’entrepreneuriat lorsqu’il est mis au service du développement socioéconomique local et national. Les implications stratégiques et politiques de cette évaluation des formes de coopératives et de leur efficacité au Maroc étant présentées sous forme de conclusion.
Le marché du travail des diplômés et l’émergence de l’entrepreneuriat social
6Dans une situation de chômage croissant et de problèmes sociaux qui s’accumulent, la recherche de pratiques innovantes et économiquement efficaces est devenue un souci majeur des décideurs publics et des ONG. Le Maroc a entrepris un certain nombre de réformes pour stimuler l’emploi. Elles ont abouti à des mutations certes progressives mais certaines ont provoqué un réel dynamisme entrepreneurial surtout social.
Des niveaux de chômage importants
7L’économie marocaine ne crée pas suffisamment d’emplois pour absorber à la fois le stock de chômage existant et les flux des jeunes qui arrivent chaque année sur le marché. En moyenne, entre 2000 et 2004, les créations nettes d’emplois [4] sont de l’ordre de 185 300 par an, soit un taux de croissance de 4,36 % alors qu’entre 2005 et 2010 les créations nettes ont atteint 155 400 emplois par an, soit une croissance de 4,55 %. Aussi, les emplois (salariés déclarés à la CNSS [5] y compris) ont-ils connu, durant la décennie 2000-2010, une faible croissance, par rapport au PIB courant et surtout à la FBCF [6], qui enregistrent tous les deux une progression beaucoup plus élevée.
8Par ailleurs, force est de constater que les emplois créés s’adressent peu aux diplômés. En effet, la structure de la demande de travail est caractérisée par une prédominance des travailleurs sans diplôme qui représentent 65,5 % de l’emploi total en 2010. La part des titulaires d’un diplôme de niveaux moyen est passée de 18,4 % à 23,7 % entre 2000 et 2010 et la part des diplômés de niveau supérieur est passée de 8,4 % à 10,8 % sur la même période. Les créations nettes d’emploi ont profité davantage aux personnes ayant un diplôme de niveau moyen ou étant sans diplôme. Le marché du travail est aussi caractérisé ces dernières années par une salarisation croissante de l’emploi (rémunéré).
9D’un autre côté, la structure de la population en chômage par niveau de diplôme révèle que les actifs diplômés sont les plus touchés. En 2010, le taux de chômage relatif à cette catégorie se situe à 18,1 %, soit près du quart de l’ensemble des chômeurs. Le taux de chômage des diplômés de niveau moyen est relativement moins élevé : 16 %. Quant aux chômeurs sans diplôme, leur taux de chômage ne dépasse pas 4,5 %. Par type de diplômes, les taux de chômage restent très élevés pour les diplômés de l’enseignement supérieur (facultés) et pour les bacheliers. En revanche, les titulaires de diplômes des grandes écoles et des instituts supérieurs sont les mieux lotis, avec un taux de chômage qui atteint à peine 3,9 % en 2010.
10Le chômage de longue durée, quant à lui, est prépondérant chez les diplômés, en particulier ceux de niveau supérieur (77,6 %), contre une proportion qui n’est que de 44 % pour les sans diplôme. Si la durée moyenne du chômage est d’environ 32 mois en 2010, plus le niveau de diplôme s’améliore et plus la durée moyenne du chômage s’élève. Un diplômé de niveau supérieur a une durée moyenne de chômage d’environ 40 mois, soit près de 17 mois de plus qu’un sans diplôme et 6 mois de plus qu’un diplômé de niveau moyen. La durée de chômage se caractérise aussi par le fait que les écarts sont moins grands entre les hommes et les femmes pour les diplômes de niveau supérieur que pour les autres niveaux de diplôme.
Vers un mode alternatif de l’entrepreneuriat
11Les statistiques citées plus haut témoignent d’une concomitance au sein des diplômés d’un chômage de primo-insertion et d’un chômage de longue durée. Cet état de fait interpelle tant sur le plan individuel que collectif quant à l’adéquation formation/emploi mais aussi sur les effets pervers de long terme induits par cette corrélation négative. D’un point de vue individuel, cette situation peut être difficilement vécue par les personnes concernées. Le chômage des diplômés se traduit également par une dépréciation rapide du capital humain et des compétences d’action. Les périodes de chômage plus fréquentes à l’entrée dans la vie active réduisent considérablement les chances, pour les jeunes, de concrétiser leurs projets professionnels initiaux, basés sur l’obtention du diplôme. Cette situation est génératrice chez eux de sentiments de découragement et/ou d’insatisfaction difficiles à éliminer même en cas d’accès à l’emploi qui peut mener à une perte de confiance en soi et une image négative de soi.
12Elle remet in fine en cause le mécanisme des transferts intergénérationnels entre les membres d’une famille qui contribuait à pallier l’absence d’un système de retraite généralisé au Maroc. En effet, au sein d’un ménage, les études supérieures représentent une forme de capitalisation pour la génération précédente. L’obtention d’un emploi « convenable » à l’issue de ses études permet au jeune de bénéficier de cette capitalisation et de venir en aide aux membres de sa famille. La situation de chômage prolongé ou de déclassement important remet en cause ce mécanisme de « retraite ». À long terme, cette tendance risque de provoquer un dysfonctionnement structurel au sein de la société marocaine.
13D’un point de vue collectif, cette situation de chômage soulève des questions de fond tant ses répercussions d’ordre économique et social sont importantes. Sur le plan économique, c’est la question de la valorisation individuelle et collective des investissements en capital humain qui est posée. Le chômage des diplômés est source, pour la collectivité, de trois coûts : le coût direct de la formation du diplômé ; le coût de financement des politiques de l’emploi que l’État met en place ; le coût lié au manque à gagner dû à l’inutilisation des compétences des jeunes chômeurs.
14Les difficultés persistantes des diplômés pour accéder à l’emploi engendrent un manque à gagner pour l’économie. Pis, ces difficultés risquent de favoriser, à terme, l’émergence d’attitudes individuelles négatives vis-à-vis de l’investissement en capital humain rendant encore plus hypothétique la compétitivité de l’économie nationale. Sur le plan social, ce sont les fondements même de l’équilibre social qui sont remis en cause. L’exclusion prolongée de l’emploi, induite par le chômage de longue durée, augmente les chances de l’exclusion sociale et remet en cause le système de redistribution dominant basé sur les transferts intra et intergénérationnels entre les membres d’une famille. Le chômage de longue durée détruit les capacités de la famille à assurer son rôle d’assurance contre le chômage et la vieillesse.
15En somme, le chômage, que connaît le Maroc exerce des effets néfastes sur l’intérêt individuel qui s’amplifient, d’une manière exponentielle, au niveau de « l’intérêt général ».
16L’orientation du Maroc vers un modèle économique basé sur les coopératives n’est pas récente. En effet, depuis l’indépendance, les autorités publiques encouragent l’organisation de la production sous forme de coopératives témoignant l’importance que jouent les coopératives dans la croissance nationale et par conséquent l’amélioration des conditions de vie de la population. Ainsi, l’Office de Développement de la Coopération (ODCO) a vu le jour en 1963 [7]. Il s’agit d’une structure administrative dont le but est d’assurer une mobilisation nationale pour la modernisation et le développement des secteurs traditionnels, notamment l’agriculture. Les missions de l’ODCO sont régies par la loi 24-83 (article 77).
17À ce stade, il est primordial de souligner que les efforts déployés par les décideurs publics doivent s’orienter vers une croissance plus élevée, plus créatrice d’emplois de qualité mais aussi d’activités innovantes menant vers des projets entrepreneuriaux à plus ou moins forte valeur ajoutée. Il s’agit de créer de l’activité et pas seulement de créer des emplois « convenables ». En effet, l’accent doit être mis sur la recherche d’un modèle de croissance qui intègre explicitement la composante « emploi » dans les politiques macroéconomiques, les politiques sectorielles, la politique commerciale, les politiques d’encouragement des PME et les politiques visant à assainir le climat d’affaires. Dans ce cadre, des types d’entrepreneuriat sont apparus et sont devenus très dominants au Maroc. Il s’agit des types : coopératif, associatif-solidaire et activité génératrices de revenus (Bouchafra, 2011) [8].
18Historiquement, l’entrepreneuriat social est un phénomène ancien, puisque son essor s’est opéré avec celui de l’économie sociale et solidaire dont les origines datent du milieu du 19e siècle. Il fait aujourd’hui l’objet d’un nouveau débat avec l’avènement de la crise économique, qui touche actuellement aussi bien les pays développés que les pays en voie de développement ; et la persistance du chômage. Il est vu aujourd’hui comme « la solution » à la crise de confiance que connaît le système capitaliste.
19Cette crise est principalement causée par le déséquilibre réel croissant entre la production réelle et la production virtuelle à des fins spéculatives. Dans une telle optique, le rôle des coopératives comme forme de l’entrepreneuriat social mais aussi comme mode d’accompagnement peut s’avérer une variable prépondérante dans l’équation de résorption du chômage dans le sens où elle fournit les leviers de développement imprégnés par un aspect social (Nations Unies, 2003) [9]. Les coopératives, par nature de leur organisation, peuvent mieux supporter les conséquences des crises que les autres formes d’entrepreneuriat. Cette qualité de résistance aux crises est due à certaines particularités telles que l’absence de spéculation, la primauté de l’humain, l’écologie et la primauté de la solidarité sur la concurrence.
L’entreprenariat coopératif : un levier pour l’auto-insertion
20Les coopératives constituent un mode d’organisation prometteur tant au niveau collectif qu’individuel en raison de ses caractéristiques intrinsèques. En effet, l’adhésion volontaire, l’exercice démocratique du pouvoir par les membres, la participation économique, l’autonomie, la formation et l’engagement sont autant d’éléments qui définissent l’identité des coopératives (Côté, 2005) [10]. Tel que documenté dans la littérature, les coopératives offrent une multitude d’avantages en se proposant comme une solution efficace face aux échecs de la coordination de marché (Côté, 2000) [11] ainsi qu’une réponse aux limites des entreprises capitalistiques (Côté, 2007) [12].
21De surcroît, les valeurs et les principes coopératifs permettent d’atténuer les comportements opportunistes et l’asymétrie d’information entre les membres. Ainsi, le système coopératif a un impact positif sur les coûts de transaction et d’agence tout en stimulant l’entraide entre membres, servant ainsi de rempart contre les « abus » du marché. Dans cette perspective, les coopératives constituent un capital social, qui se manifeste, entre autres, par la solidarité, la confiance partagée ainsi que la responsabilisation, dont bénéficie la communauté dans son ensemble. En outre, un tel capital social [13] contribue à l’amélioration de la performance économico-financière. Grâce à son approche participative, le système coopératif tisse des liens forts entre les membres de la communauté, assurant ainsi une autonomie de ces derniers tout en garantissant une utilisation efficace de leurs ressources.
22Par ailleurs, selon le CoopZone [14], il est possible également de distinguer deux types d’avantages du système coopératif : les avantages philosophiques et les avantages pour la communauté. En effet, le premier type permet à tous d’avoir de modestes économies plutôt que d’entraîner l’enrichissement excessif de certains, limitant ainsi le risque de l’établissement d’une inégalité béante des revenus.
23En plus, l’entraide, créée par le système coopératif, offre un appoint solide au renforcement des liens communautaires. Enfin, les coopératives permettent aux membres de définir leurs propres besoins plutôt que de laisser un conglomérat le faire à leur place. Tous ces éléments favorisent le développement de produits et de services par les membres et pour les membres d’une part, et donnent lieu à des pratiques d’affaires conformes à l’éthique d’autre part. Une telle pratique constitue une garantie contre l’homogénéisation des biens et services découlant du marché de masse. Quant aux avantages pour la communauté, ils permettent un meilleur accès à des produits et des services de qualité tout en renforçant la loyauté de la clientèle. De plus, l’épanouissement de ce type d’organisation offre de plus grands débouchés d’emplois. Dans une optique plus collective, les coopératives engendrent une croissance économique et sociale dans la communauté tout en ouvrant l’accès à de nouveaux marchés.
24La constitution d’un capital social collectif actionnable par les membres est appelée également à favoriser l’entrepreneuriat collectif grâce à deux types de mécanismes : d’une part des mécanismes de propagation de l’information, qui mettent en jeu un capital social distant caractérisé par des liens faibles ; et d’autre part des mécanismes basés sur l’instauration d’une confiance interpersonnelle et reposant sur un capital social fortement local et marqué par des liens forts (Aubert et al., 2008) [15].
Les coopératives des jeunes diplômés : une croissance quantitative
25Le nombre de coopératives au Maroc a progressé de 137,12 % durant la période allant de 2000 à 2011 et de 71,46 % entre 2006 et 2011.
26Le nombre des coopératives des jeunes diplômés a considérablement augmenté ces dernières années, passant de 199 coopératives en 2005 à 289 en 2012. Toutefois, le nombre des coopératives crées a baissé plus ou moins considérablement entre 1996 et 2011 (voir graphique 1). En parallèle, on observe sur la même période, une évolution des adhérents en dents de scie (graphique 2).

Évolution du nombre de coopératives et leurs adhérents au Maroc entre 2000 et 2011

Évolution du nombre de coopératives et leurs adhérents au Maroc entre 2000 et 2011
27Le tableau 2 présente la répartition des coopératives des jeunes diplômés par secteurs d’activité pour les années 2005 et 2012, sachant que les gros secteurs, l’agriculture et l’artisanat, regroupent une diversité de branches.
Répartition des coopératives par secteurs d’activité (2005 et mars 2012)

Répartition des coopératives par secteurs d’activité (2005 et mars 2012)
28L’incitation à la création de coopératives de diplômés se traduit par une série de mesures : l’organisation d’ateliers et de campagne de sensibilisation sur la coopérative, l’accompagnement des jeunes à l’élaboration des études de faisabilité des projets coopératifs, la possibilité d’accéder aux crédits pour le financement des projets coopératifs, l’encadrement pendant la période de constitution et d’agrément, les exonérations fiscales (EL Boubekri, 2006) [16], l’ouverture du champ d’activité des coopératives à toutes les branches de l’activité humaine, et la non-exigence d’un capital minimal pour la création d’une coopérative (Ahrouch, 2011) [17].
Environnement socio-économique et dynamique des coopératives des jeunes diplômés
29L’objet de cette section est de présenter les résultats empiriques portant sur l’analyse des coopératives des jeunes diplômés au Maroc
Cartographie socio-économique régionale
30Les résultats de la classification ascendante hiérarchique ont abouti à la constitution de quatre groupes distincts consignés dans le tableau 3. Cette étape permet de procéder à la caractérisation de ces groupes par les indicateurs relatifs au secteur coopératif.
La répartition des régions selon les quatre groupes issus du CAH

La répartition des régions selon les quatre groupes issus du CAH
31L’analyse des données socio-économiques régionales par l’ACP permet de constituer une cartographie de développement socio-économique relative aux régions. La projection par la suite des quatre groupes constitués sur cette cartographie permet d’appréhender les résultats de l’analyse typologique à la lumière des indicateurs socio-économiques régionaux [18].
32La position des quatre groupes sur la cartographie socio-économique permet d’aboutir aux conclusions suivantes :
33Premier groupe. Du point de vue des indicateurs relatifs au secteur coopératif, la principale caractéristique de la région de Souss-Massa-Drâa réside dans le nombre élevé des coopératives de femmes créées au sein de cette région. De même, le recours à la cartographie socio-économique régionale permet de constater que cette région à vocation agricole est caractérisée par un niveau de pauvreté supérieur à la moyenne nationale (Direction des études et des prévisions financières, 2006). Par ailleurs, cette région souffre d’un taux d’analphabétisme parmi les plus élevés du pays. Les étendues pastorales dont dispose cette région lui permettent de réaliser une part importante du cheptel national arrivant à un pourcentage de 14,1 % (Direction des études et des prévisions financières, 2006). L’essor de ce type d’activités, dans une région rurale comme celle-ci, est plus souvent accompagné par des activités relatives aux femmes. Ces activités s’inspirent depuis longtemps du principe de « Jmaâ » qui prend la forme d’un travail collectif qui assure le soutien et la solidarité au sein des structures sociales les plus défavorisées. Cette réalité prise conjointement avec un environnement socio-économique détérioré a permis l’émergence et le développement des coopératives des femmes. En effet, la richesse agricole dont bénéficie cette région permet la création d’un nombre important des coopératives de femmes opérant dans le secteur agricole. Ainsi, dans cette région seule, 170 coopératives des femmes opèrent dans la production d’huile d’argan et ses dérivés en produits cosmétiques (Ahrouch, 2010) [19].

34L’adhésion des femmes au secteur coopératif ne se limite pas seulement aux coopératives féminines. En effet, les femmes sont également des membres actifs de coopératives mixtes (Ait Haddout, 1999) [20].
35Deuxième groupe. Le deuxième groupe (régions de Doukkala-Abda, Meknès-Tafilalet, l’Oriental et Tanger-Tétouan) se caractérise essentiellement par le nombre des coopératives créées par les jeunes. Toutefois, ces coopératives souffrent d’un degré élevé d’inactivité : presque 50 % de celles-ci restent inactives.
36L’analyse de la cartographie socio-économique a montré que ces régions se distinguent essentiellement des autres, non seulement, par le nombre élevé des coopératives de jeunes opérant dans le domaine de l’agriculture, mais aussi, par un taux élevé de l’inactivité des coopératives de jeunes. Les taux de pauvreté et d’analphabétisme restent en général élevés au sein de ce groupe. Les régions qui forment ce dernier se caractérisent en général par un niveau de développement socio-économique moyen au niveau national, exception faite de la région de Doukkala-Abda qui est l’une des régions ayant un faible niveau de développement socio-économique (Direction des études et des prévisions financières, 2006). L’analyse des principaux indicateurs du marché du travail a révélé que dans ce groupe les taux du chômage et du sous-emploi sont relativement élevés.
37Dans un environnement socio-économique marqué par une rareté de ressources comme celui de ce groupe, la création de coopératives semble être un remède au chômage des diplômés. Cet environnement est propice à la création et au développement des coopératives de jeunes. En effet, les régions de l’Orientale, Meknès-Tafilalet et de Tanger Tétouan concentrent, à elles seules, 50 % des lauréats diplômés (Zouhir, 2011). Toutefois, presque la moitié de ces coopératives restent inactives. Ceci met à l’ordre du jour la question des contraintes (Zouhir, 2011) rencontrées par les jeunes diplômés. Ces derniers rencontrent de multiples contraintes qui ne leur permettent pas d’atteindre les objectifs assignés à ce secteur.
38Troisième groupe. Le troisième groupe présenté par la région du Grand Casablanca, est caractérisé par le nombre de coopératives le plus faible du pays. Ces coopératives sont généralement créées par les femmes. La région de Casablanca a maintenu un niveau de développement socio-économique élevé par rapport au niveau national. Il s’agit d’une région urbaine (taux d’urbanisation = 92,02%) plutôt riche avec un PIB par tête atteignant 35300 dh et un développement humain important (IDH=74%). Le niveau faible de la création des coopératives dans cette région s’explique surtout par l’environnement socio-économique relatif à la région. En effet, la création des coopératives s’épanouit dans des régions ayant des niveaux de développement socio-économique dégradés où la rareté des ressources est la principale cause de la création.
39Quatrième groupe. Le quatrième groupe (Chaouia-Ouardigha, Fès-Boulmane, Gharb-Chrarda-Bni Hssen, Marrakech-Tansift-Al Haouz, Rabat-Salé-Zemmour-Zaër, Région du Sud, Tadla-Azilal et Taza-Al Houceima-Taounate) est caractérisé par sa performance moyenne vis-à-vis des indicateurs relatifs au secteur coopératif. La prédominance des coopératives de jeunes opérant dans le domaine de l’alphabétisation est beaucoup plus perceptible dans ce groupe. L’analyse de la position qu’occupe ce groupe sur la cartographie socio-économique est confirmée par la propagation de l’analphabétisme au sein de ce dernier, un analphabétisme qui est accompagné par un taux important d’activité. En effet, au Maroc le taux d’activité est beaucoup plus présent dans des régions généralement pauvres à vocation rurale où l’analphabétisme est prédominant. L’essor des coopératives de jeunes opérant dans le domaine de la lutte contre l’analphabétisme dans un groupe comme celui-ci s’explique par la philosophie même qui sous-tend la création de la coopérative. En effet, la création de celle-ci doit répondre en premier lieu aux besoins locaux et immédiats de la communauté. Il est donc normal que les coopératives opérant dans le domaine de l’analphabétisme soient les plus importantes dans ce groupe.
40Cette première analyse a révélé que l’impact de l’environnement socio-économique régional sur le fonctionnement du secteur associatif demeure une réalité incontestable. Son effet est différent selon la typologie des régions. En effet, le nombre important de coopératives créées par les jeunes était la caractéristique principale des régions plutôt pauvres où l’analphabétisme est important et/ou le taux d’activité, de sous emploi et de chômage sont très perceptibles. Toutefois, ces coopératives (des jeunes) souffrent d’un degré d’inactivité très élevé. Ce qui nous amène dans ce qui suit à analyser ce problème par le biais d’une analyse économétrique.
L’inactivité au cœur des dysfonctionnements des coopératives des jeunes diplômés
41L’analyse typologique précédente a montré que presque la moitié des coopératives de jeunes créées au sein du deuxième groupe – qui absorbe une grande partie des coopératives de jeunes à l’échelle nationale – restent inactives. D’où l’enjeu d’une analyse des déterminants de l’inactivité des coopératives des jeunes [21].
42? Les fonctions de survie selon la taille de la coopérative :
43La configuration qu’illustre ce graphique confirme le fait que la survie des coopératives est fonction de la taille de celles-ci en termes d’effectifs. Ainsi plus le nombre d’adhérents augmente, plus la coopérative a des chances de ne pas sombrer dans l’inactivité.
44? Les fonctions de survie selon la date de création de la coopérative :


45Il ressort du tableau de l’analyse des données que la probabilité d’être inactive est plus élevée pour les coopératives jeunes (création après l’initiative de développement humain). Les jeunes créent des coopératives pour bénéficier des subventions et des aides de l’État et des ONG. Aussi doit-on constater que le rythme de création des coopératives augmente là où il existe un programme ou une ONG qui accorde des subventions aux coopératives, ce qui ne fait qu’amplifier l’esprit d’assistanat et de dépendance des coopératives vis-à-vis de l’État et des donateurs. En fait, coopératives ne se créent plus spontanément (c’est-à-dire à l’initiative des coopérateurs), mais elles relèvent généralement d’une impulsion de l’administration publique, des programmes de développement et des ONG. Ainsi, on observe l’émergence de coopératives fantômes durant les dernières décennies et partant l’apparition de coopératives inactives sur plus de deux ans, voir même des coopératives qui n’ont exercé aucune activité dès leur création.
46? Les fonctions de survie selon le secteur d’activité de la coopérative :
47D’après ce graphique on note que les coopératives opérant dans les secteurs de l’agriculture et l’alphabétisation sont celles qui présentent les meilleures durées de vies.

Les déterminants de l’inactivité des coopératives : une approche par les modèles à choix discrets
48Une autre réponse concernant les déterminants de l’inactivité des coopératives provient de l’approche par les modèles à choix discrets [22].
49Ce modèle estime pour une coopérative de jeunes la probabilité d’être inactive par rapport à la situation d’être active. Les résultats des estimations sont consignés dans le tableau suivant :
Déterminants d’inactivité des coopératives

Déterminants d’inactivité des coopératives
50Deux effets importants sont à signaler :
511. Effet de la taille (too big to fail) : Plus le nombre de l’effectif est important et plus la coopérative a de chance de ne pas devenir inactive.
522. Effets de dynamique impulsée : La dynamique constatée dans les créations peut être parfois impulsée fondamentalement, par l’INDH [23] et par les autres programmes qui soutiennent les coopératives. En fait, force est de constater l’évolution quantitative enregistrée après l’avènement de l’INDH. Cette évolution est d’autant plus remarquée dans les provinces qui exigent que les porteurs des projets générateurs de revenus se regroupent en coopératives pour pouvoir bénéficier du financement de l’INDH [24]. le dynamisme enregistré, ces dernières années, dans l’évolution du secteur coopératif des jeunes est renforcé essentiellement par la volonté de réussir.
53En somme, nous pouvons synthétiser l’ensemble des résultats par trois points majeurs :
54Esprit d’assistanat : Les jeunes créent parfois des coopératives pour bénéficier des subventions et des aides de l’État et des ONG. Le rythme de création des coopératives augmente là où il y a un programme ou une ONG qui accorde des subventions aux coopératives. Certains jeunes prétendent même qu’on leur a dit, notamment dans le cadre de l’INDH, « créez une coopérative et on va financer votre projet ». Il y a même des coopératives qui expliquent dans les rapports moraux, présentés à l’occasion des assemblées générales qu’elles n’ont réalisé aucune activité puisqu’elles n’ont pas encore reçu de subventions. D’autres revendiquent « voilà, nous avons créé notre coopérative mais l’État ne nous a rien donné, comment voulez-vous alors qu’on réalise notre projet ? ». Ces faits ne font qu’amplifier l’esprit d’assistanat et de dépendance des coopératives vis-à-vis de l’État et des donateurs.
55L’utilisation des coopératives comme instrument de politique nationale. Les pouvoirs publics continuent à développer les coopératives pour atteindre des objectifs spécifiques. À titre d’exemple, nous pouvons comprendre l’encouragement de la création des coopératives dans les provinces du Nord du Royaume en vue de lutter contre la drogue et l’émigration clandestine. Ainsi les coopératives d’argan sont impulsées dans le cadre d’un programme de préservation de l’arganier.
56Opportunismes des adhérents. Certaines coopératives se sont fragilisées, d’autres sont actuellement inactives à cause du manque de fidélité de la part de leurs membres. Dans ce contexte, les coopératives sont appelées également à faire face au handicap lié à la rétention des adhérents (Barraud-Didier et Henninger, 2009) [25].
57De plus, l’analyse économétrique a permis de confirmer d’une part les aboutissements de l’analyse typologique précédente en ce qui concerne le degré important de l’inactivité des coopératives des jeunes. D’autre part, elle a mis en exergue les facteurs qui déterminent l’inactivité des coopératives au Maroc tels que la taille, le secteur d’activité, et la date de création.
58De l’enquête qualitative, il ressort que les adhérents des coopértives présentent des trajectoires professionnelles marquées par le chômage de longue durée et l’absence d’expérience professionnelle. L’implication dans le projet de coopérative est motivée par le souci d’échapper au chômage et/ou par le souhait d’exercer une activité en situation d’indépendant (auto-emploi). L’esprit d’assistanat domine également, et les jeunes porteurs de projets de coopératives ne sont généralement pas conscients de l’utilité de l’étude préalable, et évoquent comme explication par rapport à cela, certaines coopératives ont un capital très faible. Faute de quoi, elles ne peuvent aucunement engager d’opérations d’investissement à moyen ou à long terme ou participer à des actions pouvant déboucher sur de bonnes retombées commerciales et économiques. Il faut par ailleurs souligner le défaut de bonne gouvernance : un nombre considérable de coopératives est mal géré et présente des bilans en deçà des attentes de leurs membres et de leurs partenaires. Certaines fonctionnent sans un plan prévisionnel ou une stratégie malgré la présence de possibilités financières. D’autres ne respectent pas les statuts relatifs aux réunions de leurs instances dirigeantes et présentent une défaillance en termes de compétences et de ressources humaines qualifiées.
59Presque la totalité des adhérents interrogés affichent une attitude d’insatisfaction par rapport à leur emploi au sein de leurs coopératives respectives. Les difficultés de surmonter les problèmes administratifs, logistiques (local), l’insuffisance des recettes de la coopérative, le manque d’entente entre les adhérents sont les principales raisons avancées pour justifier cette attitude d’insatisfaction. Cette situation d’insatisfaction est reflétée également par le pourcentage élevé (60 %) des adhérents qui se déclarent à la recherche d’un autre emploi. Cette recherche en parallèle d’un autre emploi est susceptible d’enclencher et/ou de renforcer un processus du détachement (baisse du degré d’implication) des adhérents par rapport à leurs emplois d’adhérents-salariés. Les coopératives souffrent également d’une concurrence rude. Aussi, elles ont difficilement accès au marché (marchés publics) en raison d’un manque de référence et de coordination requises. De plus, il y a un problème d’absence de synergie éventuelle entre les coopératives. Enfin, l’absence d’infrastructure routière et de moyens de communication et de désenclavement de plusieurs zones pose de sérieuses difficultés : cherté de l’approvisionnement et de l’acheminement de la production. Cela condamne ainsi de nombreuses coopératives situées dans ces zones, à la stagnation et à l’inactivité.
60La priorité accordée à l’insertion professionnelle des diplômés par les décideurs publics se justifie doublement. D’une part, le chômage est difficilement acceptable au niveau social. D’autre part, le chômage des diplômés induit des effets visibles tant sur le plan social que sur le plan économique. Cette ampleur prise par le chômage des diplômés dans la nouvelle configuration du marché du travail marocain [26] conduit les pouvoirs publics à intensifier et à diversifier leurs actions en matière de politique de l’emploi. La promotion des coopératives des jeunes diplômés est considérée alors comme une des filières alternatives prometteuses. Ces dernières permettent la création d’emplois décents, c’est-à-dire des emplois capables de satisfaire les besoins vitaux et assurent l’exercice des droits fondamentaux à travers des revenus durables qui peuvent contribuer de façon pérenne à maintenir ces emplois même en période de crise (Barbier, 2006) [27].
61Les coopératives détiennent des avantages qui ne caractérisent pas les autres formes d’organisation classiques. En effet, par définition, elles sont autorisées juridiquement à octroyer à leurs membres une partie de leurs bénéfices. Elles concluent des contrats d’affaires avec leurs propres membres. Elles limitent la responsabilité légale de leurs membres et, en cas de dissolution, les biens privés de leurs membres sont épargnés. Par conséquent, on peut affirmer que la coopérative cumule un avantage comparatif pour contribuer à l’éradication de la pauvreté par rapport aux formes d’organisation.
62Cependant le développement de ce type de coopérative reste en deçà des espérances. Les trois principales raisons sont :
633. L’absence d’infrastructures pour cette forme d’entrepreneuriat : dans les régions plus défavorisées, les mécanismes d’appui (incubateurs, réseaux d’investisseurs providentiels, fonds de réplication) dont les entrepreneurs sociaux ont besoin pour se développer sont rares ;
644. Le cadre juridique et législatif qui est moins développé : les lois régissant les marchés financiers doivent être modifiées si l’on veut inciter les fonds d’investissement social à intervenir dans les régions les plus défavorisés. De plus, la réglementation sous sa forme actuelle entrave l’autonomisation — à travers des modèles hybrides — des ONG, qui restent donc fortement tributaires des bailleurs de fonds ;
655. Les habitudes culturelles et le système éducatif, qui n’encouragent pas un environnement favorable au développement de cette forme d’entrepreneuriat. En effet, l’action d’entreprendre est généralement perçue par la société marocaine comme une action proprement masculine. De plus, les programmes scolaires ne permettent pas aux élèves d’acquérir les compétences pour développer et stimuler leur capacité entrepreneuriale (Potter, 2008) [28].
66De prime abord, l’analyse des statistiques révèle l’essor considérable du secteur coopératif, porté principalement par le secteur agricole, si l’on se réfère au taux de créations enregistrées ces dernières années. Toutefois, cette analyse élude une grande part de la réalité que connaissent les coopératives marocaines. Si ces dernières enregistrent des taux de création élevés, il n’en demeure pas moins que leur inactivité sévit de plus en plus. Ceci a pour effet une inefficience qui touche le système coopératif dans son ensemble.
67Les analyses empiriques dévoilent plusieurs fléaux qui émanent des pouvoirs publics mais aussi des membres eux-mêmes et qui rongent le tissu coopératif. Pour certains, l’adhésion à une coopérative découle souvent d’un esprit d’opportunisme et d’assistanat, ce qui va à l’encontre du principe entrepreneurial porté par beaucoup de coopératives. Les principaux résultats, issus de notre analyse empirique, ont identifié ce comportement comme étant un déterminant clef de l’inactivité des coopératives. Dans un tel cas de figure, ces dernières sont mal-gérées et ne répondent ni aux besoins de la communauté ni aux besoins des membres eux-mêmes. D’un autre côté, les pouvoirs publics utilisent les coopératives à mauvais escient dans la mesure où ils exercent une ingérence qui pèsent sur la pérennité des coopératives d’une part, et promeuvent ces dernières dans des régions plutôt que dans d’autres pour réaliser un agenda purement politique d’autre part. Ajoutons à cela l’enclavement de certaines coopératives qui freinent leur développement. Il paraît clair que le système coopératif, dans son régime actuel, est voué à l’échec.
68Plusieurs actions doivent être envisagées en vue de sauver ce secteur :
- D’abord, la culture entrepreneuriale doit être promue à tous les niveaux, à commencer par l’entourage familial et scolaire.
- L’instauration d’une politique macroéconomique nationale de promotion des coopératives, accompagnée d’une législation propice et d’un cadre institutionnel favorable, représente la condition sine qua non à l’émergence d’un tissu coopératif apte à faire face à la crise de chômage et par conséquent contribuer à la relance économique ;
- Mettre en œuvre des mesures d’accompagnement des jeunes à la création de leurs coopératives, elle comprend la création de fonds d’aide et de soutien, la révision de la fiscalité (le gouvernement marocain n’offre plus d’exonérations en matière d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée aux coopératives regroupées de façon semi-industrielle et qui enregistrent un chiffre d’affaires supérieur à un million de dirhams et ce depuis 2005), l’encouragement à l’investissement par allégement des taxes, l’amélioration de l’accès au crédit, qui contribue à l’acquisition de terrain et de locaux professionnels, l’instauration d’un guichet unique et la création de forums et de rencontres pour les jeunes entrepreneurs.
- Instaurer la bonne gouvernance coopérative à travers la mise en place d’un système transparent de normes, règles et démarches garantissant la souveraineté des droits de ses membres ;
- Mettre en œuvre un système de contrôle interne/externe pour éviter tout déraillement des objectifs des coopératives ;
- le soutien et le renforcement des capacités des gestionnaires de coopératives dans le domaine de la gestion, la commercialisation, l’organisation, etc. ;
- l’appui technique par les différents départements ministériels et par les ONG nationales et internationales ;
- le soutien et l’incitation à la commercialisation des biens et services produits par les coopératives à travers des mesures spécifiques telles que : la labellisation, l’appui aux produits du terroir, l’organisation de salons de produits de l’économie sociale et solidaire au niveau national et régional, l’ouverture de grandes surfaces destinées aux produits des coopératives, … ;
- L’accès équitable à des subventions, soumises à suivi rigoureux, accordées par les organismes publics et les ONG en vue de lutter contre l’esprit d’assistanat et l’opportunisme.
- S’aligner avec les recommandations de l’Organisation Internationale du Travail en promettant l’enseignement des principes et pratiques coopératifs et la formation relative à tous les niveaux appropriés des systèmes nationaux d’éducation et de formation.
Notes
-
[1]
ODCO, 2012, Revue « Attaaaoun », vol.100
-
[2]
Selon l›ODCO une coopérative est qualifiée de « coopérative de jeune diplômé » si elle réalise une activité génératrice de revenu et si au moins 50 % de ses adhérents ont le Baccalauréat ou plus.
-
[3]
Fath Allah A., 2011, « Le Secteur Coopératif au Maroc », Revue Marocaine des Coopératives, vol.1
-
[4]
Sources : rapports du Haut Commissariat au Plan.
-
[5]
Caisse Nationale de la Sécurité Sociale
-
[6]
Formation Brut du Capital Fixe
-
[7]
Cet office a été restructuré en 1975 et devenu une entreprise publique jouissant de la personnalité morale et d’autonomie financière et administrative.
-
[8]
Bouchafra M., 2011, Le secteur coopératif marocain durant les cinq dernières années : Une dynamique à soutenir, Revue Marocaine des Coopératives, vol.1.
-
[9]
Nations Unies, 2003, le rôle des coopératives dans le développement social, Rapport du Secrétaire Général de l’Assemblée Général. New York.
-
[10]
Côté D., 2005, « Loyauté et identité coopérative : l’implantation d’un nouveau paradigme coopératif », RECMA, vol.295, p. 50-69.
-
[11]
Côté D., 2000, Des jardins, entre rupture et continuité… L’identité coopérative, handicap ou avantage concurrentiel, Centre de gestion des coopératives, École des HEC, Cahier n° 4, 2000.
-
[12]
Côté D., 2007, « Fondements d’un nouveau paradigme coopératif : Quelles incitations pour les acteurs clés », RECMA, vol. 305, p. 72-91.
-
[13]
Il est à signaler que la définition du capital social est source de plusieurs controverses et ce concept peut être analysé à différentes échelles, du niveau microéconomique (Burt, 2000) à celui macroéconomique (Zak, 2001). Par conséquent, sa délimitation est loin de faire l’objet d’un accord.
-
[14]
Coop Zone est une coopérative de consommateurs, à Québec, qui offre à la communauté universitaire et au monde de l’enseignement une gamme de produits et de services de haute qualité adaptés aux besoins de ses membres tout au long de leur parcours éducatif et professionnel http ://coopzone.coop/fr/book/print/15
-
[15]
Aubert et al., (2008), Capital social et entrepreneurs touristiques ruraux, 2èmes journées de recherches en sciences sociales, INRA- SFER –CIRAD, LILLE, France
-
[16]
EL Boubekri M., 2006, L’Expert Comptable et les contrôles spécifiques dans les coopératives agricoles dérogeant à la règle de l’exclusivisme, Mémoire d’Expertise Comptable, Institut Supérieur de Commerce et d’Administration des Entreprises ‘ISCAE.
-
[17]
Ahrouch S., 2011, « Les coopératives au Maroc : enjeux et évolutions », RECMA, vol.322, p 23-26
-
[18]
Les deux premiers axes factoriels résument, à eux seuls, 62,15 % de l’information. Cela laisse à penser que nous obtiendrons une meilleure représentation des proximités entre les régions. L’analyse du diagramme de composantes dans l’espace après rotation nous permet d’interpréter les deux axes factoriels. Le premier axe oppose les régions riches urbaines ayant un développement humain élevé (IDH), contre les régions pauvres ayant un taux d’analphabétisme élevé. Le deuxième axe (en haut) regroupe les régions se caractérisant par la prédominance des coopératives inactives opérant dans le secteur agricole (Graphique 3).
-
[19]
Ahrouch S., 2010, Les enjeux de l’attractivité des coopératives : cas du Maroc, Colloque européen du comité de recherche de l’ACI (Alliance coopérative internationale) sous le thème « Les contributions des coopératives à une économie plurielle », Lyon, France.
-
[20]
Ait Haddout A., 1999, Les coopératives de femmes au Maroc : État des lieux, Étude coopératives, vol.4.
-
[21]
En présence de données censurées, le recours aux méthodes statistiques d’analyses des durées s’impose. La formulation technique du modèle peut être obtenue sur demande auprès de l’auteur.
-
[22]
La formulation technique du modèle peut être obtenue sur demande auprès de l’auteur
-
[23]
Initiative Nationale de Développement Humain
-
[24]
Certaines provinces financent les activités génératrices de revenues présentées par des associations. Dans ces provinces la dynamique est enregistrée notamment de la part des associations.
-
[25]
Barraud-Didier V., et Henninger M.C., 2009, « Les déterminants de la fidélité des adhérents de coopératives agricoles », RECMA, vol.314, p. 47-62.
-
[26]
Caractérisée par le désengagement de l’État en tant qu’employeur et le rôle grandissant alloué au secteur privé.
-
[27]
Barbier J.P., (2006), L’intermédiation sur le marché du travail dans les pays du Maghreb : Étude comparative entre l’Algérie, le Maroc et la Tunisie, BIT, première édition 2006.
-
[28]
Potter, J., 2008, Entrepreneurship and Higher Education, OCDE, Paris.En ligne