Les points forts
- Les femmes sont minoritairement concernées par la transmission successorale des entreprises, mais encore moins nombreuses – à peine 5 % – à racheter une entreprise « de l’extérieur ».
- L’exemple de Tolix, rachetée au tribunal de commerce par une salariée de l’entreprise et redressée avec succès, démontre que les compétences et capacités nécessaires pour redresser une entreprise ne sont pas « genrées ».
- Le véritable levier qui permettrait de débrider l’enthousiasme féminin en matière de transmission-reprise d’entreprise réside dans un meilleur partage des tâches familiales liées à la parentalité.
1Majoritaires dans la population française avec un taux de 51,4 %, en quasi parité dans la population active occupée avec un taux de 46,7 % (Insee, 2012)? [1], les femmes se retrouvent minoritaires à la direction des entreprises. Selon le rapport « Women Matter » (2010)? [2] de McKinsey, la France compte 15 % de femmes dans les hautes sphères du CAC 40, rejoignant les USA, mais loin derrière la Norvège qui a déjà un tiers de femmes dans le top management de leurs grandes structures. Aussi, les pouvoirs publics viennent-ils de s’engager avec la loi Zimmermann-Copé? [3] à des pratiques positives. La mesure phare de cette loi est la mise en place de quotas en vue de féminiser les comités de direction et les conseils d’administration. Dès 2012, 2 500 des plus grandes entreprises doivent parvenir à un seuil de représentation à 20 % de femmes et à 40 % en 2016. Bien que ces mesures soient de nature à vouloir changer les mentalités, la barrière du genre au détriment des femmes semble encore résister lorsqu’il s’agit d’accéder à la direction des entreprises quels que soient leur taille et leur secteur.
Femmes et entrepreneures : une réalité en demi-teinte
2En tant qu’entrepreneur, les femmes sont également loin d’atteindre la parité (Rapport Bel? [4], 2009). Si nous considérons comme entrepreneur celle qui dirige et possède la majorité du capital de son entreprise, alors elles ne représentent qu’un tiers du total (APCE, 2009? [5]).
La place des femmes à la direction des entreprises
3Compte tenu des méthodes d’enregistrement concernant les entreprises, leurs propriétaires et leur mode de gouvernance, il reste difficile d’accéder avec précision aux chiffres de l’entrepreneuriat féminin? [6]. En outre, et bien que les estimations recensées varient entre 25 et 30 %, le plus inquiétant est la stagnation sur vingt ans? [7]. Davantage présentes à la tête des entreprises individuelles (32 %) que des sociétés (21 %), elles se situent essentiellement dans des micro structures. Il s’agit généralement de leur première entreprise puisque plus de 4 femmes sur 5 n’ont jamais créé ou dirigé une firme dans leur passé professionnel (APCE, 2009). De plus, bien que détentrices d’un diplôme plus élevé que les hommes, à 44 % de l’enseignement supérieur, elles s’installent souvent dans des secteurs peu contraignants en termes de barrières à l’entrée? [8]. Les secteurs d’activités privilégiés sont le commerce de détail, les services aux entreprises et aux personnes, la santé et l’éducation en majorité.
4L’ensemble de ces points converge pour montrer que la ressource féminine est présente mais encore insuffisamment développée et valorisée (Observatoire Fiducial, 2006). Les principales causes sont connues et régulièrement explicitées.
5Tout d’abord, une éducation spécifique liée à un statut idéalisé de femme et (future) mère, elle-même éducatrice, les fige encore dans un rôle domestique non partagé et conduit à une socialisation différente des filles fondée sur des stéréotypes (Bourdieu, 1998)? [9]. Schématiquement, cela commence dès l’enfance (la segmentation des jouets en fonction du sexe en étant une illustration presque caricaturale), puis par une scolarité perçue comme une valeur ajoutée à condition de ne pas être supérieure à celle du futur conjoint (avec une orientation moins ambitieuse? [10]).
6Ensuite s’ajoutent leurs qualités perçues dans les entreprises et le positionnement global dans la Société, qui tend à accentuer la supériorité, voire la domination masculine (Bourdieu, 1998). Dans l’ensemble, ces facteurs assortis des croyances, valeurs et cultures, contribuent à forger une image et une identité de la femme plus souvent dévalorisée, voire négative en dehors de la maternité et de son foyer. Dès lors, ce statut infériorisé du travail à l’extérieur explique à la fois les inégalités mais aussi un sentiment latent de culpabilité? [11], poids supplémentaires pour un entrepreneur au féminin qui n’en a guère besoin (Duchenéaut et Orhan, 2000 ; Lee-Gosselin, 2009)? [12]. Dans ces conditions, c’est souvent après une phase de rupture (changement dans la vie privée et/ou professionnelle, maternalité? [13], congé parental, chômage, formation…), agissant comme un déclencheur positif ou négatif, que les femmes dépassent cette vision de rôles contradictoires, reconstruisent leur image d’elles (fin de l’inégalité salariale et du plafond de verre) et se revalorisent à travers le projet entrepreneurial (par la création de leur emploi et de leur statut, voire de ceux d’autres personnes grâce au recrutement de personnel).
Femmes repreneures : un statut à choix multiple
7Bien que globalement proches à première vue des motivations qui prévalent pour la création d’entreprise, celles qui poussent un entrepreneur à vouloir reprendre une organisation existante diffèrent sur le fond. Certes, il faut vouloir se réaliser en étant son propre patron, saisir et développer de nouvelles opportunités… mais surtout être prêt à acheter un outil de production qui existe déjà et dans l’état où il se trouve. Or, les entreprises à reprendre n’affichent pas toutes le même état de santé : la répartition serait autour de 60 % de firmes saines, 25 % de « saines en apparence » et 15 % en difficulté? [14].
8Il existe différentes modalités de reprise pour les femmes non intéressées par la création ex nihilo. Trois formes sont présentées ici : la succession, la reprise par une salariée de l’entreprise (RES), la reprise par une femme personne physique extérieure (RPP)? [15]. D’un côté, la succession intervient lorsque l’entreprise appartient à la famille, ce qui transforme la fille en héritière et en successeur, avec une continuité de la dimension familiale par le transfert de la propriété et de la gestion? [16]. De l’autre côté, c’est par le rachat d’une entreprise existante que l’entrepreneur féminin réalise ses ambitions. Elle peut profiter du départ à la retraite de son patron ou d’une situation difficile l’entreprise qui l’emploie pour la racheter : il s’agit alors d’une reprise par une ou plusieurs salariés (RES) et lorsque le repreneur et l’entreprise n’ont aucun lien initial, il s’agit d’une reprise par une personne physique (RPP). En France, 20 % des femmes reprendraient une entreprise par héritage ou par donation (APCE, 2009) avec deux types de situations observés. Dans un premier cas, les femmes reprennent l’entreprise de leur conjoint qui part en retraite, pour compléter leurs propres trimestres (elles participaient déjà à l’activité). Dans le second cas, elles reprennent l’activité héritée (conjoint ou famille) en attendant de pouvoir céder cette entreprise. Concernant les chiffres de reprise externe, le phénomène semble encore plus réduit et confine à être ultra-minoritaire puisque seulement 5 % des repreneurs externes potentiels sont des femmes (Observatoire du CRA, 2006).
9Autrement dit, quelle que soit la forme de transmission, les cas sont plutôt rares. C’est pourquoi, il paraît intéressant de mettre en exergue trois cas pour montrer, au-delà de leur singularité, leur exemplarité. L’objectif poursuivi est d’aller contre les a priori et d’illustrer le spectre des situations rencontrées tant du côté de la femme (et des choix qui l’ont conduite à cette situation) que de celui de l’entreprise transmise compte tenu de son état de santé.
Trois femmes relèvent le défi
10Le premier cas s’intéresse à la succession d’une PME familiale saine (la Société Artésienne de Minoterie), le deuxième cas décrit la reprise par une salariée d’une PME familiale en difficulté (l’entreprise Tolix Steel Design) et le troisième cas concerne une TPE saine en apparence (la société Hermès Maintenance)? [17].
Cas 1 - La succession au féminin : (ap)prendre et trouver sa place dans une entreprise saine
11Candidates invisibles, qualifiées de successeurs par défaut, de la dernière chance ou de second choix, voire dans certains cas de solution temporaire, les femmes arrivent très souvent à la tête de l’entreprise familiale de façon presque fortuite, à la suite d’une succession mal ou non préparée. Le cas de Martine Tartar à la tête de la Société Artésienne de Minoterie (SAM) est assez illustratif de ce type de circonstances (Cf. Encadré 1). Enfant unique et dernier espoir d’un père déjà âgé, elle se retrouve propulsée à la direction de la SAM à peine ses études d’ingénieur terminées (en 1976). « Au départ, je n’étais pas du tout câblée pour être meunier et pour reprendre l’entreprise familiale, mon père était âgé ; donc le problème de la succession s’est posé ; je suis arrivée en disant si cela me plaît je reste, sinon je m’en vais ». Cependant, une fois en place, cette héritière va vite se révéler être la femme de la situation.
Encadré 1 : La SAM, une succession par la fille (héritière)
Pionnière dans le développement de la filière qualité, elle engage très tôt son entreprise dans plusieurs démarches de certification, obtenant en 2003 les certifications HACCP (alimentation humaine) et GMP (alimentation animale), puis les référentiels ISO 22000 en 2006 et ISO 14001 en 2009. Convaincue et opiniâtre, Martine Tartar prône depuis ses débuts une politique de développement responsable fondée sur une zone d’activité de proximité (clients et fournisseurs régionaux).
12La position « insolite » de Martine Tartar, femme chef d’entreprise aurait pu la déstabiliser mais elle a su déployer et faire reconnaître la palette de ses compétences techniques, managériales, humaines et entrepreneuriales à l’ensemble de sa profession. « C’est un milieu très masculin. ( ) Il n’y a pas une femme dans notre métier, alors il y a 35 ans, vous imaginez mais je suis arrivée jeune femme et, tout compte fait, cela s’est bien passé ». C’est pourquoi, et quand les conditions le permettent, la gestion progressive du successeur (homme ou femme) par une immersion précoce dans l’entreprise peut faciliter la succession. L’objectif est de permettre à chacun de se convaincre des compétences de l’héritièr(e), de sa réelle envie d’assumer la continuité et de son engagement affectif pour assurer la pérennité sans de la structure familiale? [18]. Ce point est fondamental lorsqu’il s’agit d’une femme, le but étant alors de la légitimer dans son rôle de dirigeante, car elle est souvent perçue de façon moins affirmée que ne pourrait l’être un successeur mâle.
Cas 2 - La reprise par une salariée d’une entreprise en difficulté
13En cette période de crise, le nombre de PME en difficultés ne cesse d’augmenter? [19]. Ainsi, après le dépôt de bilan qui facilite la mise en œuvre des mesures de sauvetage, le stade ultime des procédures collectives est la mise en liquidation judiciaire. Il appartient alors au mandataire ad hoc et/ou à l’administrateur judiciaire de trouver un repreneur ou à défaut d’établir un bilan économique et social à l’attention du Tribunal qui fera alors cesser l’activité. Il faut donc une certaine dose de courage, de lucidité et d’engagement au repreneur pour racheter dans de telles conditions, surtout quand il s’agit d’un ou plusieurs salarié(s) qui engage(nt) leurs indemnités de licenciement. Tel a pourtant été le cas de Chantal Andriot, salariée de Tolix Steel Design lorsqu’elle a décidé de reprendre l’entreprise, figure emblématique dans le secteur de la tôle emboutie et du design industriel (Cf. Encadré 2).
Encadré 2 : Tolix, une entreprise galvanisée par la reprise d’une salariée
14Ce renouveau spectaculaire est dû à une femme qui s’est refusée à la résignation. « L’idée [de la mort de Tolix] m’était insupportable ! La société était en liquidation judiciaire, j’ai donc proposé un plan de reprise, très modeste, au tribunal de commerce. Sur les trois propositions de reprise, c’est mon offre qui a été retenue () C’est aussi simple que cela ! ». Elle a fait preuve d’une grande modestie dans l’action et a mené son projet de reprise comme celui de l’évidence. « Il fallait sauver cette entreprise qui souffrait surtout d’une mauvaise gestion. Je n’ai pas fait la révolution, juste des aménagements. Mais nos clients distributeurs ont vu le changement ». Chantal Andriot a parié sur les valeurs qui ont toujours prévalu, l’innovation et la qualité. « Les chaises cultes sont fabriquées exactement de la même façon qu’en 1930. J’y tiens ». Mais cette femme entrepreneur n’est en rien passéiste. Avec l’inauguration d’une 3e usine en 2012, elle continue d’assurer l’expansion et se propose de façonner un nouveau destin familial à cette PME en y intégrant progressivement ses deux enfants.
Cas 3 - La reprise par une femme extérieure à l’entreprise : le pari de l’expertise
15Le repreneur personne physique externe est un entrepreneur sans lien avec l’entreprise rachetée. Au début, ses seules informations proviennent du cédant et son entourage, sauf s’il a été précédemment en relation en tant que client, fournisseur ou banquier par exemple. À partir de ces éléments factuels juridiques, financiers et commerciaux, le repreneur identifie les forces et les faiblesses de la cible, effectue une analyse stratégique et estime sa valeur afin de confirmer ou d’infirmer son intérêt. Puis une fois son choix arrêté, il constitue son dossier de reprise à partir de son diagnostic et des réflexions stratégiques retenues pour l’activité future de l’entreprise. Enfin, il définit les cadrages juridiques et financiers afin de pouvoir opérer le transfert de propriété et de management selon des modalités acceptées par les deux parties. Ce processus mobilise l’intervention de multiples acteurs spécialisés, requiert une excellente compréhension de la dimension humaine pour prendre en main l’entreprise et en devenir le dirigeant avec une équipe déjà en place. C’est effectivement ce qui s’est passé pour Carine Rouvier lorsqu’elle décide de reprendre Hérés Maintenance Bâtiment et ses trois salariés, entreprise d’apparence saine (Cf. Encadré 3).
Encadré 3 : D’Hérés Maintenance Bâtiment à Europamiante : une femme repreneuse dans un univers masculin
Son secret : la formation dans les métiers de la démolition et du désamiantage afin de disposer d’ouvriers et techniciens qualifiés, de tous âges. Elle a d’ailleurs reçu en novembre 2010 l’agrément RQE (Recherche Qualité Environnement) qui reconnaît l’ensemble des démarches améliorant ses pratiques professionnelles, la protection des hommes et la réduction des polluants. Une belle progression qui n’est pas sans risque ! « Mais nous avons la chance d’avoir un banquier qui nous suit, et des conseillers qui nous entourent ».
16Pari un peu fou et pas facile au départ, Europamiante est une entreprise qui a su se positionner sur un marché de niche en plein développement. « Nous sommes peu nombreux en France à avoir cette activité, le marché est relativement peu concurrentiel ». Et pour cause, métier dangereux et « typiquement masculin », être une femme dans le milieu de l’amiante permet à Carine Rouvier de proposer un autre regard sur des problématiques asexuées comme l’emploi et la trésorerie : « Nos principales difficultés sont liées au recrutement de personnel compétent et expérimenté. [Alors], nous investissons beaucoup dans la formation ». Il s’agit d’expliquer en communicant et en maintenant une rigueur stricte tout en faisant confiance et en déléguant : « je suis une maniaque du suivi strict de l’administratif et des opérationnels ». Avec le recul, elle ne changerait rien à son parcours de repreneuse et entrepreneuse : « Rien, pas un iota… ni les galères ni les échecs qui m’ont permis de capitaliser et d’avancer ».
Faciliter la transmission des PME pour les femmes
17Coïncidence ou convergence ? Dans les trois cas, ce n’est pas la femme repreneure qui pose problème mais plutôt les circonstances qui amènent celle-ci à la reprise et complexifient les conditions de son exercice.
Passer de l’extra à l’ordinaire
18Condition première mais non suffisante, les femmes doivent souvent compter sur l’absence d’un frère (non né ou désintéressé) pour postuler ou être désignées. Avant tout processus successoral, il convient de ne pas minorer l’état des relations antérieures parents-fille et père-fille? [20], qui déterminent largement le rôle et la place de la fille dans la famille et dans l’entreprise, ainsi que la qualité du transfert managérial et patrimonial. Le cas 1 illustre un cas de succession familiale mal (et non) préparée. Mais l’unique héritière Martine Tartar a su faire preuve de pragmatisme et démontrer sa capacité à proposer et à mettre en place des choix stratégiques et techniques résolument différents. Dans le cas 2, c’est la passion et la fidélité à une entreprise qui ont poussé l’ex-directrice financière, Chantal Andriot à reprendre son organisation en liquidation. Elle a su fédérer avec elle une poignée de salariés et établir un projet cohérent, affirmant une assurance tranquille de réussite. À travers son parcours, il ressort beaucoup d’humilité, qualité en lien avec une estime de soi souvent peu affirmée. C’est la réussite de l’entreprise, le développement des produits appuyé sur le savoir-faire de ses salariés qui sont mis en avant et non son action. Dans le cas 3, Carine Rouvier fonde sa réussite sur le respect de l’humain. Pour elle, cela signifie la reconnaissance des équipes, l’écoute, la formation et l’évaluation. Sensible également aux problématiques d’intérêt général, elle a mis en place des actions de formation autour de l’égalité professionnelle, l’acquisition des savoirs de base, l’emploi des travailleurs handicapés et des seniors. À partir de son expérience, elle conseille aux femmes de « se libérer des carcans éducatifs dans lesquels on nous a souvent enfermées avec des obligations pesantes ». Ainsi, avec un marché de la reprise de l’ordre de 700 000 entreprises, il convient d’ouvrir le réservoir de femmes comme des repreneures crédibles.
Passer du discours à la concrétisation
19En écho à cette réalité et dans un cadre plus global, les pouvoirs publics ont commencé à proposer des actions en faveur de l’entrepreneuriat féminin? [21]. La création d’un Observatoire par exemple devrait permettre de mieux quantifier pour mieux connaître l’entrepreneuriat féminin? [22]. De plus, des actions de communication et de sensibilisation auprès des jeunes filles quant à la diversification des métiers devraient notamment favoriser le goût d’entreprendre et lutter contre les stéréotypes. Il conviendrait également de renforcer les dispositifs de soutien et d’aide à l’accompagnement à la création et à la reprise. Mais sans objectif chiffré ni calendrier précis, ces pistes d’actions risquent de rester du domaine virtuel.
20En écoutant des femmes qui ont repris, il faut encourager les femmes à « savoir oser, aller de l’avant, ne pas hésiter » avec des mesures concrètes simples comme des aides à la garde des enfants et aux tâches ménagères (ce qui créerait des emplois de proximité et compenserait le coût initial). En fait, il faut aller dans le sens d’une meilleure prise en compte de la réalité des femmes au quotidien nécessitant d’intégrer dans les dispositifs d’aide à l’entrepreneuriat féminin les contraintes induites par leurs missions familiales et parentales? [23].
21Pour conclure, il convient de réitérer un point essentiel : les femmes, créatrices ex nihilo, successeur ou repreneur, doivent être considérées au titre de leur contribution économique majeure et non comme un simple enjeu de parité entre les genres. Leur participation à la création de richesse, d’emplois et d’organisations mérite plus qu’un discours et devrait se concrétiser par des politiques réelles d’aide à un rééquilibrage global de la parentalité.
Notes
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[1]
Insee Références, Fiches thématiques « Travail, emploi » - Regards sur la parité - édition 2012.
-
[2]
McKinsey, Women Matter, Women at the top of corporations: making it happen, octobre 2010.
-
[3]
Loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d’administration et de surveillance et à l’égalité professionnelle.
-
[4]
Bel G. L’entrepreneuriat au féminin, Avis et Rapports du Conseil Économique et Social, République française, octobre 2009.
-
[5]
APCE, Les créatrices d’entreprises, octobre 2009.
-
[6]
PME/TPE en Bref, Une photographie de l’entrepreneuriat féminin au-delà des clichés, n°30, février 2008 ; http://www.pme.gouv.fr
-
[7]
Observatoire Fiducial de l’entrepreneuriat féminin, 2006 ; http://www.fiducial.fr/files/fiducial/pdf/observatoire2006.pdf
-
[8]
Carrier C., Julien P.A., Menvielle W. « Un regard critique sur l’entrepreneuriat féminin : une synthèse des études des 25 dernières années », Gestion, 2, Vol.31, 2006, p. 36-50.
-
[9]
Bourdieu définit l’habitus en lien avec la socialisation, comme un système de disposition durable et structuré acquis dès l’enfance (par transmission, inculcation, imitation, observation et interactions), qui conditionne les schèmes individuels de perception, de pensée et d’action. Bourdieu P. (1998), La domination masculine, Seuil : Paris, 142 pages.
-
[10]
Demouge (2006 : 206) parle de « ségrégation scolaire qui se modifie peu » entre hommes et femmes, et malgré certains progrès, « la qualification des femmes reste inférieure à celle des hommes ». Demouge N. (2006), « L’orientation et la problématique du genre », In Danvers F. (2006), Modèles, concepts et pratiques en orientation des adultes, Les Presses Universitaires du Septentrion : Villeneuve d’Ascq, p. 179-222.
-
[11]
Pour Corbeil, Descarries, Gill et Séguin (1990 :106), les femmes se trouvent dans « une situation d’ambivalence et de culpabilité envers leur mère, leur conjoint, leurs enfants, leur employeur et leurs collègues. Or, ( ), ce n’est pas la maternité en soi qui pose problème, mais bien ses conditions sociales d’exercice. Autrement dit, ce n’est pas tant l’expérience maternelle qui rend si difficile l’articulation du travail salarié au travail maternel, mais bien l’assignation quasi exclusive des femmes aux travaux domestiques et à la prise en charge des enfants, d’une part, et l’incapacité de repenser les responsabilités à l’égard des enfants en matière de responsabilités conjointes des parents et de la société, d’autre part ». Corbeil C., Descarries F., Gill C. et Séguin C. (1990), « Des femmes, du travail et des enfants : des vies dédoublées », Nouvelles pratiques sociales, vol. 3, n° 2, p. 99-115.
-
[12]
Duchéneaut B., Orhan M. Les femmes entrepreneurs en France, Editions Seli Arslan, Paris, 2000.
Lee-Gosselin H. « Les femmes entrepreneurs : des questionnements à renouveler », in Gasse Y. (Ed.), L’entrepreneuriat francophone : évolution et perspectives, L’Harmattan, 2009, p. 63-72. -
[13]
Par maternalité, il est entendu l’ensemble de processus psycho-affectifs qui se développent chez une femme à l’occasion de ses maternités successives (Racamier, 1961).
-
[14]
Deschamps B. et Paturel R. Reprendre une entreprise, saine ou en difficulté, Dunod, Paris, 2002, 2005 et 2009
-
[15]
Nous excluons ici la reprise par une personne morale (filiale, fusion et acquisition) ainsi que la vente et/ou la liquidation de l’entreprise.
-
[16]
Constantinidis C. « Entreprise familiale et Genre : les enjeux de la succession pour les filles », Revue Française de Gestion, 2010, p. 143-159.
Richomme-Huet K., De Freyman J. « Father-Daughter Succession in France: the ONET Group Case Study » in Halkias D., Thurman P., Smith C., Nason R. (Eds) Father-Daughter Succession in Family Business: A Cross-Cultural Perspective, Gower Publishers, London, 2011, p. 109-115 -
[17]
Nous avons collecté les informations à partir d’entretiens menés auprès de ces femmes repreneurs (au total, nous disposons de 7 entretiens de 10 à 20 minutes). Nous avons privilégié la démarche de la réutilisation des données qualitatives (Chabaud et Germain, 2006) puisqu’elle permet de (re)lire avec un filtre nouveau une même réalité. De plus, nous avons complété nos données avec des sources documentaires secondaires afin de mieux contextualiser les éléments mis en avant.
Chabaud D. et Germain O. « La réutilisation des données qualitatives en sciences de gestion : un second choix ? », M@n@gement, vol. 9, no. 3, 2006, p. 199-221. -
[18]
Ici, sans doute parce qu’instruite de sa propre expérience, le processus successoral a été planifié par la chef d’entreprise. On peut seulement noter qu’il s’agit de Matthieu, le fils de Martine et non pas de sa fille également ingénieur.
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[19]
Environ 60 000 entreprises ont fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire en 2010 / Cabinet Altares, Défaillances et sauvegardes en France : Bilan de l’année 2010, 18 janvier 2011.
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[20]
Voir le récent ouvrage de Halkias et al. (2011) sur la succession père-fille dans une perspective internationale.
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[21]
Voir les 10 pistes d’action du Gouvernement présenté par Hervé Novelli, http://www.gouvernement.fr/gouvernement/encourager-l-entreprise-au-feminin, mars 2008.
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[22]
Cet Observatoire de l’entrepreneuriat féminin est piloté par l’APCE (préalablement réalisé par Fiducial entre 2002 et 2006).
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[23]
Cornet A, Constantinidis C., « Entreprendre au féminin. Une réalité multiple et des attentes différenciées », Revue française de gestion, N°151, 2004, p. 191-204.