Nous construisons un modèle de décision de portée générale permettant de prédire le choix entre l’entrée en guerre et rester en paix d’un décideur rationnel. Ce modèle articule des causes profondes comme le risque de guerre future et d’autres paramètres comme les gains potentiels en cas de victoire, les pertes potentielles en cas de défaite et la probabilité de victoire et les pertes humaines liées au conflit. Nous appliquons et calibrons ce modèle au cas des décideurs allemands et français à la toute fin de juillet 1914, compte tenu des décisions déjà prises par l’Autriche-Hongrie et la Russie et de l’incertitude entourant la décision de la Grande-Bretagne. Nous nous situons dans l’hypothèse d’une guerre courte ne se prolongeant pas au-delà de l’année 1914. Notre modèle prédit l’entrée en guerre de l’Allemagne et de la France, l’argument de la guerre préventive (faire la guerre aujourd’hui plutôt que demain) se révélant déterminant pour les deux pays, avec en plus pour la France les bénéfices non négligeables liés à la récupération potentielle de l’Alsace-Moselle en cas de victoire. La calibration révèle que des deux pays, c’est la France qui semblait avoir le plus intérêt à la guerre, permettant d’expliquer le comportement passif des dirigeants français, Raymond Poincaré en tête, qui, s’ils n’ont pas provoqué la guerre, n’ont pas vraiment non plus cherché à l’éviter.
Mots clés
- guerre de 14-18
- guerre préventive
- modèle de décision rationnelle
- Raymond Poincaré
- Bethmann-Hollweg