1La France et le Luxembourg ont récemment mis en œuvre une réforme fiscale assez similaire. Ces deux réformes se distinguent cependant par le type de mesure d’accompagnement choisi : la Prime pour l’emploi en France, une majoration exceptionnelle des Allocations familiales au Luxembourg. Les deux réformes ont fait l’objet d’évaluations ex ante en recourant à des simulations dont les résultats sont retracés dans cet article. L’évaluation est menée, d’une part, du point de vue de la redistribution verticale et, d’autre part, du point de vue de la redistribution horizontale selon la structure familiale. L’accent est plus particulièrement mis sur l’analyse comparative de l’impact des deux mesures d’accompagnement, notamment par une simulation à budget donné.
2En 2001-2002, l’impôt sur le revenu des personnes physiques a été réformé au Luxembourg et en France. À bien des égards, ces deux réformes sont d’inspiration assez proche. Au Luxembourg comme en France, les taux marginaux ont été baissés. Au Luxembourg, le seuil d’imposition a été relevé et en France les plafonds de l’avantage lié au quotient familial des parents non isolés et de la décote ont été rehaussés.
3Dans les deux pays, ces réformes fiscales, dont l’objectif était de réduire le taux de prélèvements obligatoires [1], ont été complétées par des mesures connexes qui avaient pour finalité, selon un principe d’équité, de faire bénéficier indirectement de ce “ cadeau fiscal ” les citoyens non imposables. La France a choisi la Prime pour l’emploi, associant ainsi à l’objectif d’équité une timide volonté d’incitation au travail [2]. Cette prime ne profite cependant pas à tous les foyers non imposables, puisqu’une des conditions est qu’au moins une personne du foyer travaille suffisamment (ce qui exclut notamment les ménages sans emploi ou en emploi très réduit) ; elle est par ailleurs versée à c e r t a i n s f o y e r s f a i b l e m e n t i m p o s é s. A u Luxembourg, c’est une toute autre voie qui a été suivie. La réforme fiscale s’est accompagnée d’une revalorisation importante et exceptionnelle des Allocations familiales [3] (pour une présentation plus détaillée de la réforme luxembourgeoise, cf. annexe 1). Là encore, nonobstant l’objectif général d’équité, cette mesure d’accompagnement ne profitera pas à tous les foyers non imposables, puisque les ménages sans enfant à charge n’en bénéficieront pas et, encore plus systématiquement que dans le cas de la Prime pour l’emploi, ces allocations seront octroyées à nombre de foyers imposables. Si ces deux mesures complémentaires sont donc assez différentes, il n’en demeure pas moins qu’elles ont en commun une prise en compte explicite de la structure familiale puisque la Prime pour l’emploi comporte une majoration pour enfant(s) et/ou pour mono-activité (au titre de l’exercice 2001, selon Aubert et alii (2002, p. 217), cette majoration aurait coûté 0,8 milliard d’euros sur un total de 2,5 milliards).
4Ces deux réformes fiscales ont donné lieu à des évaluations prospectives. En France, l’équipe Myriade de la Cnaf (Caisse nationale des allocations familiales), notamment [4], a réalisé en 2001, à l’aide de son tout nouveau modèle de micro-simulation, une première évaluation de la Prime pour l’emploi et de la réforme fiscale (Legendre et alii, 2001a). Au L u x e m b o u r g, l e D é p a r t e m e n t “ P o p u l a t i o n - Ménages” du Ceps/Instead a été mobilisé par le Ministère de la Famille luxembourgeois pour mener une évaluation ex ante de la réforme et c’est à cette occasion qu’un premier embryon de modèle de micro-simulation a été développé dans ce pays (Berger et alii, 2001). Ces deux évaluations ont bien évidemment été menées indépendamment. Pourtant leurs objectifs analytiques (l’impact redistributif de la réforme) et leurs champs d’application (une réforme fiscale pour partie similaire) sont très proches. D’où l’idée de tenter un rapprochement de leurs principaux résultats de manière à comparer ces d e u x m i c r o - s i m u l a t i o n s d e r é f o r m e s fiscalo-sociales.
5L’exercice auquel nous nous sommes livrés a donc consisté principalement, à des fins de comparaison, à tenter de répliquer sur le Luxembourg l’analyse que Legendre et alii (2001a) avaient menée pour la France. Pour des raisons techniques, que nous soulignerons dans une première partie, cette r é pl ic a ti on n ’a p u ê t r e m e n é e to ta le m e nt à l’identique. Cependant, nous pensons que les différences méthodologiques assez mineures ne gênent pas fondamentalement la comparaison. Aussi, dans une deuxième partie nous présenterons quelque s a spe cts relatifs aux deux systèm es fiscalo-sociaux pris globalement. Puis, la troisième partie sera consacrée plus particulièrement à la com pa raison des effets spécifiques des deux réformes. Enfin, la dernière partie sera consacrée à l’impact des deux réformes du point de vue de leur caractère de redistribution horizontale.
Les principales similitudes et différences méthodologiques des deux exercices de simulation
6À la différence de la simulation française effectuée a v e c l e m o d è l e M y r i a d e, n o t r e s i m u l a t i o n luxembourgeoise [5] s’appuie sur un échantillon pondéré et non un échantillon calibré par clonage [6]. Dans le cas luxembourgeois, les données d’enquête n’ont été “ vieillies ” que du point de vue des revenus (et non du point de vue des éventuelles modifications de structures d’âge et d’emploi entre 1999 – date de l’enquête – et 2002, année de référence pour la simulation). Quant aux simulations des transferts, e f f e c t u é e s s u r b a r è m e s, e l l e s r e l è v e n t approximativement des mêmes logiques pour les deux pays : dans les deux cas, les auteurs tentent de reproduire au mieux la réglementation à partir de la source de données disponible, sachant qu’un tel exercice nécessite naturellement des simplifications faute d’information suffisamment précise dans la source.
7Du point de vue du champ de la redistribution pris en compte dans l’analyse, nous avons essayé de suivre au plus près les choix initiaux de Legendre et alii (2001a). Pour les cotisations sociales, sont donc exclues celles relevant plutôt d’une logique de revenus différés (retraite et chômage), ces deux types de transferts étant parallèlement exclus de la redistribution [7]. Pour les cotisations sociales incluses dans le champ de la redistribution, la part “ salarié ” et la part “ employeur ” sont simulées. En ce qui concerne les impôts directs, seul l’impôt sur le revenu des personnes physiques est simulé pour le Luxembourg : il n’existe en effet pas de Cotisation Sociale Généralisée (CSG) au Luxembourg et la taxe d’habitation est relativement négligeable dans le système fiscal luxembourgeois (d’où sa non prise en compte, à la différence de ce qui est fait dans Myriade). Faute de données de consommation, la TVA est exclue de l’analyse dans les deux pays. Enfin, du point de vue des transferts positifs, le champ est assez identique pour les deux pays pu isqu ’il c ou vr e l’e nse m ble de s pr e sta tions familiales et les minima sociaux (notons qu’il n ’e x i s t e p a s d e p r e s t a t i o n s l o g e m e n t a u Luxembourg) [8]. Enfin, comme dans Myriade, c erta ines con tr epa rties individualisa bles des prélèvements obligatoires luxembourgeois ne sont pas intégrées (remboursements de l’assurance santé, dépenses d’éducation…).
8On s’aperçoit au tableau 1 que, du point de vue des prélèvements, la structure globale des flux de la redistribution simulés est assez différente d’un pays à l’autre, le poids des cotisations sociales étant deux fois plus élevé en France et celui de l’impôt (CSG incluse) étant un peu supérieur à celui simulé au Luxembourg. En revanche, côté transferts, les deux pays se ressemblent si l’on cumule la part des prestations fam iliales à celle des prestations logement. Mais on peut noter dès à présent que les deux transferts nouveaux (la Prime pour l’emploi et l a h a us s e d e s A l lo c a ti o ns f a m il ia le s ) s on t, relativement au revenu brut, dans un rapport de un à deux entre les deux pays [9].
9Les résultats qui vont suivre sont présentés, sauf indication contraire, avec l’individu comme unité d’analyse. Chaque individu est en particulier caractérisé par un niveau de vie (revenu disponible par unité de consommation). Pour les deux pays, c’est l’échelle d’équivalence dite “de l’Insee ” qui est utilisée pour déterminer le nombre d’unités de consommation, mais “ l’unité de mutualisation des ressources et des charges ” sur laquelle est calculé ce nombre d’unités de consommation est un peu différente selon le pays [10]. En France, il s’agit de “ la famille, définie de manière relativement large” (Legendre et alii, 2001a, p. 17), alors qu’au Luxembourg nous avons dû retenir le ménage. La différence entre ces deux regroupements d’individus porte, d’une part, sur les ménages claniques (trois générations ou plus) qui selon Myriade sont donc constitués de plusieurs familles (un seul ménage au Luxembourg), d’autre part, sur les enfants résidant chez leurs parents, âgés de moins de 26 ans et autonomes financièrement ou âgés de plus de 25 ans (ils forment une famille séparée dans Myriade alors qu’au Luxembourg ils sont membres du ménage de leurs parents) et, enfin, sur les enfants dépendant fiscalement de leurs parents bien que ne cohabitant p a s a v e c e u x ( s e l o n M y r i a d e i l s s o n t systématiquement réintégrés dans la famille de leurs parents ; au Luxembourg ils sont ignorés, sauf s’ils apparaissent dans l’échantillon en tant que ménage autonome et, dans ce cas, il est très peu probable que le ménage de leurs parents fasse également partie de l’échantillon) [11].
le champ de la redistribution couvert dans le cadre de cet exercice de simulation : structure relative des masses budgétaires simulées et extrapolées au niveau national

le champ de la redistribution couvert dans le cadre de cet exercice de simulation : structure relative des masses budgétaires simulées et extrapolées au niveau national
Des caractéristiques nationales qui peuvent justifier le choix d’une Prime pour l’emploi ou d’une hausse des Allocations familiales
10Au Luxembourg, le revenu brut par unité de consommation moyen, calculé au niveau individuel, est environ une fois et demi plus élevé que celui observé en France (30 600 euros versus 19 870 euros, en valeurs 2002 après correctif par les parités de pouvoir d’achat). Après prise en compte de la redistribution, ce rapport croît même légèrement (26 310 euros versus 15 270 euros). Mais si les inégalités avant redistribution sont supérieures en France (indices de Gini, respectivement pour le Luxembourg et la France : 35,6% et 37,4%), du fait d’un système fiscalo-social plus redistributif en France, les inégalités de niveau de vie individuel après prise en compte de la redistribution sont plus faibles en France (indices de Gini : 27,3% versus 26,4%).
11Pour affiner ce bilan redistributif global, nous proposons tout d’abord le calcul, “pour chaque i n d i v i d u d u m o d è l e, d’u n t a u x m o y e n d e prélèvements nets qui rapporte ses charges nettes (prélèvements moins transferts) à son revenu disponible” [12].
12Pour apprécier la redistribution verticale du circuit fiscalo-social, nous comparons dans le tableau 2 cet indicateur selon le niveau de vie des individus (qui sont classés par quintiles de niveau de vie) en France et au Luxembourg. Lorsque l’on examine la médiane d u t a u x d e p r é lè ve m e n ts n e t s, o n r e t r o u v e naturellement dans les deux pays le caractère progressif de la redistribution, cette médiane croissant à m esure que l’on s’é lè ve dans la dis tri but ion d e s niv ea u x de vi e. Ma is ce tte progressivité est plus marquée en France, puisque pour les Français du cinquième quintile de niveau de vie les prélèvements nets représentent 44% de leurs revenus disponibles, contre seulement 23% au Luxembourg, alors qu’en bas de la distribution des n i v e a u x d e v i e, l e s F r a n ç a i s c o m m e l e s Luxem bourge ois ont e n mo yenne un reve nu disponible constitué de pré lè vem e nts ne ts à c o n c u r r e n c e d’u n p e u m o i n s d’u n d ix i è m e (respectivement 9% et 8%).
13Dans leur analyse, Legendre et alii (2001a) pointent un autre trait saillant de la redistribution française : le fait que certains individus de classes moyennes sont assez lourdement taxés par le système socio-fiscal. Ce constat s’appuie sur le fait que, pour les quintiles de niveau de vie 2,3 et 4, le quartile supérieur de taux de prélèvements nets est plus grand que la médiane observée pour le quintile de niveau de vie juste supérieur (cf. tableau 2). Si l’on suit le même raisonnement pour le Luxembourg, ce serait plutôt les individus du premier quintile de niveau de vie qui seraient dans cette situation. En effet, pour ce q u i n t i l e, l e q u a r t i l e s u p é r i e u r d e t a u x d e prélèvements nets est égal à 6% alors que dans le quintile 2 de niveau de vie la médiane du taux de prélèvements nets est égal à seulement 1% (un constat similaire, mais moins marqué, peut être fait pour le quintile 2 de niveau de vie).
distribution du taux moyen de prélèvements nets par quintiles de niveau de vie

distribution du taux moyen de prélèvements nets par quintiles de niveau de vie
composition du groupe “classes moyennes/inférieures lourdement taxées” en %

composition du groupe “classes moyennes/inférieures lourdement taxées” en %
14Dans le cas de la France, ces individus de classes moyennes lourdement taxées ont pour particularité d’être proportionnellement plus souvent des actifs occupés (cf. tableau 3), dans un cas sur quatre (24%), alors que ce groupe ne représente que 15% de la population. C’est, selon Legendre et alii (2001a), l’un des arguments qui justifie la mise en œuvre d’une Prime pour l’emploi dans la mesure où elle s’adresse aux actifs occupés appartenant à la première moitié de la distribution des niveaux de vie, c’est-à-dire des actifs occupés non imposables ou assez “injustement” taxés. Au Luxembourg, les individus de classes inférieures relativement plus taxées ont en revanche la particularité d’être proportionnellement plus souvent des inactifs (hors enfants) puisque 17% d’entre eux sont dans ce groupe d’individus, alors que ce dernier représente seulement 10% de la population.
15D u p o i n t d e v u e d e l a c o m p o s i t i o n d é m o - économique des quintiles de niveau de vie, on observe tout d’abord des tendances communes aux deux pays : surreprésentation des actifs occupés dans le s q uin tile s s upé r ie ur s ( da ns le de rn ie r au Luxembourg ; dans les deux derniers en France), surreprésentation des chômeurs dans les quintiles inférieurs, surreprésentation des individus vivant en couple sans enfants dans le quintile supérieur. En revanche, au Luxembourg les individus de ménages d’isolés se répartissent équitablement dans les différents quintiles, alors qu’en France on observe une surreprésentation dans le quintile inférieur [13].
16Ensuite, ce qui semble distinguer plus nettement les deux pays, c’est la répartition des individus vivant dans des familles/ménages avec enfant(s). En effet, au Luxembourg et à la différence de la France, ces individus sont nettement surreprésentés dans le quintile inférieur. Cette différence est intéressante dans la mesure où, comme les individus du quintile inférieur sont probablement non imposables, si l’on veut par mesure d’équité leur faire bénéficier indirectement de la baisse de la pression fiscale, il apparaît alors assez justifié de mettre en œuvre un mécanisme complémentaire qui soit ciblé sur les i n di v id u s su r r e pr é se nt é s d a n s c e b a s d e l a distribution des niveaux de vie. Or, de fait, c’est bien cette option qui a été choisie au Luxembourg, puisque la mesure d’accompagnement à la baisse des taux ma rgina ux d’im position est une ha usse importante des Allocations familiales. A contrario, selon cette même logique, on pourrait s’étonner du choix effectué en France, puisque la Prime pour l’emploi concerne les individus actifs occupés, individus qui sont sous-représentés dans le bas de la d i s t r i b u t i o n d e s n i v e a u x d e v i e. M a i s c e raisonnement n’est que très partiellement pertinent dans la mesure où il faudrait pouvoir distinguer, parmi ces actifs occupés, ceux au statut d’emploi précaire qui sont probablement surreprésentés dans le premier quintile.
Les effets redistributifs des réformes fiscales française et luxembourgeoise
17Si l’on s’intéresse aux deux réformes dans leur ensemble, c’est-à-dire à la fois à la modification du barème de l’impôt sur les revenus des personnes p h y s i q u e s [14] e t a u x d e u x m e s u r e s d’accompagnement (Prime pour l’emploi et hausse des Allocations familiales), en première analyse on ne peut qu’être très frappé par la grande similitude des résultats issus des simulations pour les deux pays (cf. tableau 4).
18Tout d’abord, on peut observer que la répartition de la charge de l’impôt total par déciles de niveau de vie est identique dans les deux pays. Ensuite, on peut remarquer que la répartition, selon ces mêmes déciles, de la baisse de l’impôt est également assez proche d’un pays à l’autre. Dans les deux pays, un tiers de l’économie d’impôt profite au décile supérieur (36% dans le cas de la France) et les trois premiers déciles n’en profitent pratiquement pas, mais il est vrai qu’ils ne sont pratiquement jamais imposables. Que les individus des familles/ménages l e s p l u s a i sé ( e ) s p r o f i t e n t m a s s i v e m e n t d e l’économie d’impôt (en termes absolus) n’est pas, comme le soulignent Legendre et alii (2001a, p. 14), surprenant dans la mesure où, soumis aux tranches d’im position les plus é levé es, c es individus cumulent les baisses de taux relatives aux tranches inférieures. En revanche, que la répartition par déciles soit presque identique dans les deux pays est tout de même assez curieux dans la mesure où, même si les deux réformes fiscales sont proches dans leurs modalités (baisse des taux pour l’essentiel), les deux systèmes fiscaux n’en demeurent pas moins assez différents : absence de système de quotient familial au Luxembourg, proportion de ménages exonérés approchant la moitié en France, contre seulement un tiers au Luxembourg, etc. L’explication tient sans doute au fait que les deux impôts, nonobstant ces différences, ont des degrés de progressivité assez proches (cf. infra tableau 6).
19Enfin, le cumul de la baisse d’impôt avec la Prime pour l’emploi (PPE) ou la hausse des Allocations familiales (AF) produit un effet global assez similaire dans les deux pays. Jusqu’au sixième décile de niveau de vie dans les deux pays, la PPE (ou la hausse des AF) accroît la part de l’avantage global perçu par les individus de ces déciles et inversement au-delà du sixième décile. Les deux dispositifs d’accompagnement de la réforme fiscale produisent donc l’e ffe t atte ndu, à sa voir une me ille ure répartition de cet avantage global. Il n’en demeure pas moins que la part de cet avantage, en termes absolus, croît avec le niveau de vie. Mais si l’on reprend l’argumentation de Legendre et alii (2001a, p. 14), au total, la combinaison de deux dispositifs (baisses de l’impôt et primes ou allocations) contribue à accroître la progressivité du dispositif d’ensemble puisque, d’un côté, dans chacun des premiers déciles de niveau de vie, la part de l’avantage global octroyé par la réforme est supérieure à la contribution relative à l’impôt sur le revenu, et, de l’autre côté, pour le dernier décile de niveau de vie en France et pour les deux derniers au Luxembourg, c’est l’inverse qui se produit (avantage relatif inférieur à contribution relative). Cependant, lorsque l’on compare la première colonne du tableau 4 à la dernière, on s’aperçoit que la part de l’avantage total dans les déciles inférieurs est inférieure à la part du revenu disponible dans ces mêmes déciles ; cela indique donc que la réforme globale aurait un impact allant plutôt dans le sens d’une hausse des inégalités (ce que l’analyse des coefficients de Gini, proposée infra, confirme), le phénomène étant plus affirmé au Luxembourg puisque ce n’est qu’à partir du sixième décile que la part de l’avantage rejoint celle du revenu disponible, alors qu’en France c’est à partir du quatrième décile. Pour autant, la similitude entre les deux pays est un peu moins forte lorsque l’on analyse la structure relative des avantages dus à la réforme dans son ensemble que lorsque l’on ne tient pas compte des deux mesures d’accompagnement. D’où l’intérêt d’analyser plus spécifiquement ces deux mesures.
répartition des masses budgétaires par déciles de niveau de vie

répartition des masses budgétaires par déciles de niveau de vie
20Le graphique 1 représente la répartition, par déciles de niveau de vie, de la masse budgétaire distribuée dans le cadre des deux dispositifs complémentaires (PPE ou AF). On constate que ces deux mesures touchent des individus appartenant à tous les déciles. Ce constat n’a rien d’étonnant dans le cas du Luxembourg puisqu’il est tout à faire normal de trouver des enfants ouvrant droit à des Allocations familiales dans tous les déciles. En revanche, dans le cas de la France, le constat est plus curieux dans la mesure où la Prime pour l’emploi a été conçue pour les tra va ille urs à fa ibles re ve nus d’a ctivité. Cependant, le fait que la prime soit individuelle, alors que le niveau de vie est calculé à l’échelon f a m i l i a l, e x p l i q u e l’e x i s t e n c e d e q u e l q u e s bénéficiaires dans le haut de la distribution des niveaux de vie (et ce, malgré les plafonds – assez élevés – de revenu fiscal intégrés dans les modalités d’octroi de la prime [15] ).
répartition en % de la Prime pour l’emploi/hausse des Allocations familiales par déciles de niveau de vie

répartition en % de la Prime pour l’emploi/hausse des Allocations familiales par déciles de niveau de vie
répartition en % de la Prime pour l’emploi (la hausse des Allocations familiales) par déciles de niveau de vie pour les seuls individus membres d’une famille comprenant au moins un actif occupé (au moins un enfant à charge)

répartition en % de la Prime pour l’emploi (la hausse des Allocations familiales) par déciles de niveau de vie pour les seuls individus membres d’une famille comprenant au moins un actif occupé (au moins un enfant à charge)
21Par ailleurs, la distribution présentée au graphique 1 porte sur l’ensemble des individus et non sur les seuls actifs occupés et donc, comm e le montre le graphique 2, la présence d’inactifs et de chômeurs dans les déciles inférieurs fausse l’appréciation que l’on peut porter quant à la position des bénéficiaires de la prime au sein de la seule population active occupée. En effet, comme le soulignent Legendre et alii (2001a, p. 12), lorsque l’on restreint l’analyse aux seuls individus vivant da ns une fam ille comprenant au moins un actif occupé, “ à l’exception du premier décile, la part répartie est une fonction décroissante du niveau de vie : la Prime pour l’emploi s’adresse principalement aux déciles deux à cinq de niveau de vie, n’exclut pas les “travailleurs pauvres” et, sous ces deux aspects, est donc bien redistributive ”.
22Si l’on effectue le même type de restriction de champ dans le cas du Luxembourg, mais cette fois-ci en ne sélectionnant que les individus vivant dans un ménage comprenant au moins un enfant à charge, puisque telle est la population ciblée par la hausse des Allocations familiales, on obtient une répartition également un peu différente à celle observée pour l’ensemble de la population luxembourgeoise. Mais cette analyse est assez largement sans intérêt : en restreignant le champ aux seuls ménages avec enfants à charge, puisque tous sont bénéficiaires de la hausse des Allocations familiales, il est logique que la masse budgétaire se répartisse égalitairement (10%) entre les dix déciles. On observe simplement de petites différences dues à de légères variations de composition des différents déciles du point de vue du nombre d’enfants par ménage.
23C’est donc, dans le cas du Luxembourg, le graphique 1 qu’il convient de commenter. Si la hausse des A l l o c a t i o n s f a m i l i a l e s a é t é p r o p o s é e a u Luxembourg pour faire bénéficier indirectement les ménages non imposables de la baisse de la pression fiscale, on peut dire que l’objectif est atteint d’une certaine manière dans la mesure où l’on peut observer, d’une part, que les deux déciles inférieurs de niveau de vie (20% de la population) bénéficient de 26% de la masse budgétaire et que, d’autre part, la hausse d’Allocations familiales est une fonction légèrement décroissante du niveau de vie à partir du quatrième décile. Ces deux particularités accroissent la dégressivité déjà provoquée par le caractère uniform e de cette mesure d’accom pagnement fiscale, mais comparativement à la Prime pour l’emploi en France cet impact apparaît beaucoup moins marqué (notamment parce que, par exemple, les deux derniers déciles de niveau de vie bénéficient de 16% de la hausse d’Allocations familiales, alors que dans le cas de la Prime pour l’emploi française, ce taux n’est que d’environ 3%).
24La sec onde m anière pour me ttre en lumièr e d’éventuelles différences entre les deux pays consiste à mesurer l’impact de la PPE ou de la hausse des AF sur le taux de prélèvements nets, ou plus exactement sur les quartiles de ce taux (cf. tableau 5). Dans le cas de la France, on peut observer que la Prime pour l’emploi réduit principalement le taux de prélèvements nets des individus les plus démunis (le quartile inférieur, la médiane et le quartile supérieur dans le quintile 1 de niveau de vie baissent respectivement de 0,7,0,7 et 1,2 point) et des classes moyennes fortement taxées (baisse de 0,8 et 0,6 point des quartiles supérieurs dans, respectivement, les quintiles de niveau de vie 2 et 3).
distribution de la baisse du taux moyen de prélèvements nets occasionnée par la Prime pour l’emploi (la hausse des Allocations familiales) en points de pourcentage par quintiles de niveau de vie

distribution de la baisse du taux moyen de prélèvements nets occasionnée par la Prime pour l’emploi (la hausse des Allocations familiales) en points de pourcentage par quintiles de niveau de vie
25A u L ux e m b o u rg, l’im p a c t e s t t o u t d’a bo r d relativement plus important qu’en France et ce, notamment parce que les sommes en jeu sont plus importantes (le montant annuel moyen de hausse des Allocations familiales par ménage bénéficiaire est estimé à 537 euros, contre un montant moyen de Prime pour l’emploi, estimé dans Myriade à 152 euros). Ensuite, on observe que l’impact de la hausse d e s A l l o c a t i o n s f a m i l i a l e s s u r l e t a u x d e prélèvements nets n’est pas comme en France ciblé s u r c e r t a i n s q u a r t i l e s p a r ti c ul i e r s m a is e st simplement décroissant selon le niveau de vie, ce qui n’est pas vraiment étonnant dans la mesure où la hausse des Allocations familiales est forfaitaire et que le taux de prélèvements nets croît avec le niveau de vie. Au total donc, au Luxembourg ce sont bien les m é n a g e s l e s p l u s d é m u n i s q u i p r o f i t e n t propor tionne llem ent le plus de c ette m esure d’accompagnement de la réforme du barème fiscal. D’a ille ur s, le c oe ff ic ient de Gini du r evenu disponible par UC, pour la population des individus, se réduit de 0,2 point (de 28,50% à 28,29%) du fait de cette hausse d’Allocations familiales. En France, l’impact de la PPE, mesuré de la même manière, est de seulement 0,1 point (coefficient de Gini passant de 27,96% à 27,84%).
26Cependant, pour pouvoir réellement apprécier l’efficacité comparée de ces deux mesures, il convient de raisonner à budget donné. C’est ce que nous avons simulé en calant le montant de la hausse des Allocations familiales luxembourgeoises de manière à ce que le coût global engendré soit égal au coût estimé de la Prime pour l’emploi [16] (à taille de population identique et après prise en compte des parités de pouvoir d’achat [17] ). Raisonner ainsi à b u d g e t i d e n t i q u e r e v i e n d r a i t à d i m i n u e r s e n s i b l e m e n t l a h a u s s e e x c e p t i o n n e l l e d e s Allocations familiales luxembourgeoises (de 24,76 euros par mois et par enfant à 6,21 euros); l’impact redistributif de la mesure serait alors naturellement plus faible : le coefficient de Gini ne baisserait que de 0,05 point. Si l’on tient compte du différentiel de richesse (PIB) entre les deux pays et donc si l’on ne raisonne non pas simplement à budget identique mais à effort de la collectivité identique, l’impact en termes de réduction du coefficient de Gini serait, pour le Luxembourg, de 0,1 point, soit un impact comparable à ce que Myriade simule pour la Prime pour l’emploi (législation 2001 avant doublement du montant).
27Mais si la hausse des Allocations familia les l u x e m b o u r g e o i s e s a p p a r a î t l é g è r e m e n t redistributive, en revanche, globalement, la réforme fiscale du Luxembourg génère une dispersion plus importante des niveaux de vie. En effet, sans la réforme, nous avons calculé que le coefficient de Gini, relatif à la distribution des niveaux de vie des individus, serait égal à 27,29%, contre 28,29% avec la réforme. En France, la réforme prise dans son ensemble apparaît moins anti-redistributive, voire neutre du point de vue des inégalités individuelles de niveau de vie, puisque le coefficient de Gini passe de 27,82% à 27,84% [18]. En guise de synthèse, nous proposons au tableau 6 une approche en termes de d é c o m p o s i t i o n d e c o e f f i c i e n t s d e G i n i e n pseudo-indices, inspirée d’une publication récente de l’Insee (2002) [19]. Cette approche est menée au niveau des foyers fiscaux au Luxembourg (des familles en France) et non plus au niveau individuel comme dans les analyses précédentes.
contributions des différents transferts à la réduction des inégalités de niveau de vie des foyers fiscaux luxembourgeois et des familles françaises

contributions des différents transferts à la réduction des inégalités de niveau de vie des foyers fiscaux luxembourgeois et des familles françaises
28D’un point de vue très général, deux différences importantes entre les deux pays méritent d’être soulignées. Premièrement, le système socio-fiscal luxembourgeois est moins redistributif que le système français : en termes de revenu brut par UC, le degré d’inégalité est équivalent dans les deux pays (cf. pseudo-Gini de revenu brut), mais en termes de revenu disponible par UC, la France apparaît plus égalitaire (pseudo-Gini de revenu disponible égal à 0,265 en France, contre 0,299 au Luxembourg). Deuxièmement, on s’aperçoit que la redistribution verticale luxembourgeoise est due très massivement à l’impôt (les trois quarts de la baisse des inégalités de niveau de vie sont attribuables à l’impôt, cf. colonne 5), alors que le rôle de l’impôt français est plus modéré (un quart de l’effet redistributif).
29Plus spécifiquement, en ce qui concerne la réforme fiscale, dans les deux pays, la baisse des taux marginaux d’imposition entraîne un accroissement de la progressivité (cf. colonne 3), mais l’effet redistributif que l’on pourrait en attendre est contrecarré par la baisse du taux de pression fiscale (cf. colonne 1), ce qui explique qu’au total la réforme fiscale apparaisse anti-redistributive (l’impact de l’impôt sur la baisse des inégalités de niveau de vie se réduit, cf. colonne 4). Quant aux deux mesures d’accompagnement (AF et PPE), elles contribuent d a n s u n e m ê m e p r o p o r t i o n ( 0,1 p o i n t d e pourcentage) à la réduction des inégalités (leur degré de ciblage sur les bas niveaux de vie est d’ailleurs très proche, cf. colonne 3). En France, l’effet redistributif de la Prime pour l’emploi compense grosso modo l’effet anti-redistributif de la réforme fiscale [20], ce qui n’est pas le cas pour la hausse des Allocations familiales au Luxembourg car dans ce dernier pays l’effet anti-redistributif de la réforme fiscale est nettement plus prononcé qu’en France (1 point de pourcentage au Luxembourg, contre 0,1 point en France, cf. colonne 4). Pour autant, il pourrait ne pas être impartial de limiter la comparaison à cette seule dimension verticale de la distribution, car la réforme l ux e m b o urg e o is e e st é ga l e m e n t i n sp ir é e d e considérations de politique familiale qui relèvent plus d’une logique de redistribution horizontale.
Deux logiques de redistribution horizontale : corriger en faveur des enfants ou renforcer en faveur des actifs employés
30La réforme fiscale luxembourgeoise a provoqué, en moyenne, un accroissement de 4,7% du niveau de vie des foyers fiscaux (et 5,0% si l’on ajoute la hausse des Allocations familiales). Mais elle a bénéficié un peu plus aux foyers fiscaux sans enfant (+5,1%) qu’aux foyers fiscaux avec enfants (+3,5% suite à la modification fiscale et +4,5% si l’on ajoute la hausse des Allocations familiales). En France, c’est au contraire les familles avec enfant(s) qui ont un peu plus bénéficié de la réforme. Si la réforme de la fiscalité a provoqué un effet identique pour les deux types de familles (+0,6% du niveau de vie), en revanche la Prime pour l’emploi a contribué à accroître relativement un peu plus le niveau de vie des familles avec enfant(s) que celui des familles sans enfant (+0,3% versus +0,2%).
31A u L u x e m b o u r g ( g r a p h i q u e 3 ), e n t e r m e s d’évolution relative du niveau de vie due à la seule baisse des taux d’imposition, seuls des foyers fiscaux sans enfant voient leur niveau de vie progresser plus fortement qu’en moyenne (> à 4,7%). En effet, pour les couples avec enfants, la hausse moyenne de leur niveau de vie est inférieure à celle estimée pour l’ensemble des foyers fiscaux et, par ailleurs, décroît avec le nombre d’enfants (4,1%, 3,5% et 2,9% pour, respectivement, 1,2 et 3 enfants ou plus). Pour les familles monoparentales, la hausse moyenne se situe à 2,3%. Ces différences de variation du niveau de vie dépendent pour partie de la proportion, au sein des différents types de foyers fiscaux, de foyers fiscaux non-imposables avant la réforme, sachant que ces derniers ne profitent pas de la baisse des taux. Comme le montre en effet le graphique 3, les foyers fiscaux qui se situent en bas de l’échelle des niveaux de vie (les familles monoparentales, les isolés de moins de 65 ans sans emploi et non retraités, les couples ayant au moins trois enfants et où un seul parent travaille), lesquels sont aussi les plus fréquemment non imposables, connaissent une progression de niveau de vie beaucoup moins rapide que les foyers fiscaux se situant en haut de l’échelle des niveaux de vie (couples actifs sans enfant) [21].
32Si l’on tient compte maintenant de la hausse des A l l o c a t i o n s f a m i l i a l e s, o n n o t e q u e, b i e n évidemment, les différences de taux de croissance du niveau de vie entre foyers fiscaux avec enfant(s) et foyers fiscaux sans enfant se réduisent. En effet, certains foyers fiscaux avec enfant(s), les couples monoactifs avec un ou deux enfant(s) et les couples biactifs avec au moins trois enfants, connaissent en moyenne une hausse de leur niveau de vie au moins aussi importante que celle de l’ensemble des foyers fiscaux (respectivement 5,0%, 5,3% et 5,0%, contre 5,0% pour l’ensemble des foyers fiscaux).
variation (en %) du niveau de vie des foyers fiscaux, suite à la réforme fiscale luxembourgeoise, selon le niveau de vie initial (avant la réforme)

variation (en %) du niveau de vie des foyers fiscaux, suite à la réforme fiscale luxembourgeoise, selon le niveau de vie initial (avant la réforme)
variation (en%) du niveau de vie des familles, suite à la réforme fiscale française, selon le niveau de vie initial (avant la réforme)

variation (en%) du niveau de vie des familles, suite à la réforme fiscale française, selon le niveau de vie initial (avant la réforme)
33Quant aux autres foyers fiscaux avec enfant(s), à l’exception de deux types de foyers monoparentaux (inactifs; actifs avec un seul enfant), ils connaissent une hausse de niveau de vie assez proche de la moyenne (de 4,0% à 4,4%, contre 5,0% pour l’ensemble des foyers fiscaux). À l’inverse, les foyers fiscaux sans enfant, notamment ceux qui étaient les plus grands bénéficiaires de la baisse des taux, sont totalement exclus de la hausse de niveau de vie due à la mesure d’accompagnement. Cette dernière relève donc bien d’une logique d’équité horizontale au sens où elle permet aux familles avec enfant(s) de profiter de la réforme dans des proportions presque équivalentes à celles des foyers fiscaux sans enfant (graphiquement les carrés blancs sont moins dispersés sur l’axe vertical que ne le sont les losanges noirs). Il convient cependant de noter que les familles monoparentales inactives et les familles monoparentales actives avec un seul enfant apparaissent un peu comme les perdantes de la réforme (avec les isolés inactifs non retraités), ce qui n’est pas totalement surprenant lorsque l’on sait qu’au Luxembourg il n’existe aucune prestation familiale spécifique à la monoparentalité, signe d’un intérêt modéré pour la solidarité envers ce type de familles.
34On ne retrouve naturellement pas la même logique dans le cas de la France (graphique 4). Certes la Prime pour l’emploi profite à la quasi-totalité des t y p e s d e f a m il l e s a v e c e n f a n t ( s ), s e u l s l e s monoparentaux inactifs en étant exclus, mais comme les familles sans enfant en profitent tout autant, on ne peut pas dire que la mesure d’accompagnement resserre la dispersion – entre famille avec et sans enfant – des avantages relatifs apportés par la réforme. En revanche, on observe que les laisser pour compte de la réforme sont les familles sans emploi qui, d’une part, bénéficient d’un gain de niveau de vie, dû à la baisse des taux, plus faible qu’en moyenne (< à 0,6%) et, d’autre part, sont exclus de la Prime pour l’emploi [22]. C’est particulièrement le cas des monoparentaux et des jeunes isolés sans emploi, mais c’est aussi le cas des retraités (en couple ou isolés), pour l’essentiel donc des familles sans enfant. Mais à l’autre bout du spectre des gains relatifs de niveau de vie se trouvent également des familles sans enfant : les isolés en emploi et les couples biactifs qui connaissent, en moyenne, les plus forts taux de croissance de niveau de vie. La mesure d’accompagnement de la réforme française suivrait donc une logique de renforcement de l’aide octroyée aux actifs employés, alors que celle relative à la réforme luxembourgeoise relèverait au contraire d’une logique corrective en faveur des enfants.
Conclusion
35En conclusion, nous rappellerons tout d’abord que le Luxembourg est à l’aube du développement des modèles de micro-simulation socio-fiscaux et que ce développement est fortement tributaire des encore trop rares sources statistiques externes permettant de valider complètement le calibrage des modèles. En c o n s é q u e n c e, a v a n t d e s ’e n g a g e r d a n s l e dé ve lopp em e nt d e m od èle s plu s co m ple xe s, comportementaux ou dynamiques, à l’exemple du projet Myriade, le Luxembourg doit avant tout développer son modèle statique; néanmoins, l’outil développé jusqu’à présent a permis d’évaluer, pour le compte du Ministère de la Famille, les effets redistributifs de la réforme fiscale 2001-2002 et, en ce sens, il a pu montrer aux décideurs publics luxembourgeois tout l’intérêt de développer de tels modèles de micro-simulation des politiques sociales et fiscales ; en outre, il a permis de répliquer, à des fins comparatives, l’étude des effets redistributifs de la réforme fiscale française élaborée à l’aide du modèle Myriade de la Cnaf.
36Nous avons ainsi pu monter que les deux réformes récentes, d’inspiration proche, semblaient avoir de g r a n d e s s i m i l a r i t é s d u p o i n t d e v u e d e l a r e d i st r i bu t io n v e r t ic a le l o r s qu ’e ll e s é ta ie n t analysées globalement. Mais nous avons également souligné qu’en termes relatifs les deux mesures d’accompagnement, à savoir la Prime pour l’emploi en France et la hausse des Allocations familiales au L u x e m b o u r g, “ c o r r i g e a i e n t ” l’i m p a c t a n t i - distributif de la baisse des taux d’imposition de manière plus différenciée (la Prime pour l’emploi jouant plus massivement sur les déciles du milieu de la distribution, alors que la hausse des Allocations familiales étaient plus répartie sur l’ensemble de la distribution). En France, parce que l’impact de la baisse des taux est assez modéré, la Prime pour l’emploi (dans sa version 2001 avant doublement de la prime) compense presque l’effet anti-redistributif et confère donc à la réforme une certaine neutralité du point de vue de la redistribution verticale. Au Luxembourg, l’impact anti-redistributif plus massif de la réforme fiscale est loin d’être compensé par la hausse exceptionnelle des Allocations familiales. Mais si l’on se place sous un angle de redistribution horizontale, on devine un peu la logique de la politique luxembourgeoise qui a consisté à limiter les écarts de gains relatifs entre foyers fiscaux avec et sans enfant dans un contexte d’accroissement des inégalités dû à une forte baisse de la pression fiscale de l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Quant à la réforme française, elle apparaît moins surprenante dans la mesure où la Prime pour l’emploi, d’une part, compense correctement le risque d’accroissement des inégalités et, d’autre part, est potentiellement favorable à l’emploi, ce qui est naturellement louable dans le contexte français, mais qui le serait beaucoup moins dans un pays où le taux de chômage est assez bas, comme c’est le cas au Luxembourg. Si l’évaluation comparative des deux réformes porte uniquement sur la finalité consistant à vouloir réduire le taux de prélèvements obligatoires sans accroître les inégalités (et donc en omettant les objectifs en termes d’incitation à l’emploi dans le cas de la France et en termes d’aide aux familles dans le cas du Luxembourg), la Prime pour l’emploi française apparaît clairement comme une mesure d’accompagnement plus efficace que la hausse e x c e p t i o n n e l l e d e s A l l o c a t i o n s f a m i l i a l e s luxembourgeoises.
Annexe 1 : les grandes lignes de la réforme fiscale luxembourgeoise
37 Cette annexe ne vise pas à présenter en détail l’architecture des transferts au Luxembourg mais seulement à présenter les deux dispositifs qui ont fai t l’obj et de r éfor mes importantes entre 2000 et 2002, à savoir l’impôt sur le r e ven u d es p er s on ne s ph ys iq u es et l es Al l o cat i on s familiales. Pour une connaissance plus approfondie du système socio-fiscal luxembourgeois et des dispositifs qui f o n t l’o b j e t d’u n e s i m u l a t i o n d a n s l e m o d è l e lu xembourgeoi s, l e l ect eur se r eport er a à Berger et Jeandidier (2003) ou aux rapports annuels du Ministère des Finances du Grand-Duché du Luxembourg (1999,2000, 2001) et du Ministère de la Sécurité sociale du Grand-Duché du Luxembourg (1998,1999).
38L’impôt sur le revenu des personnes physiques
39 Le calcul de l’impôt sur le revenu des personnes physiques s’effectue en plusieurs étapes. T out d’abord, il faut déterminer le revenu imposable ajusté, puis lui appliquer le barème d’impôt, éventuellement la modération d’impôt pour enfant et, enfin, majorer l’impôt ainsi obtenu de la contribution au Fonds de l’emploi, contribution qui sert à financer les indemnités de chômage. Le revenu imposable est celui qui est acquis par l’ensemble des membres d’un même foyer fiscal. En principe, l’impôt est recouvré par voie d’assiette, mais certains revenus (salaires, pensions, certains revenus mobiliers) sont soumis à la retenue à la source. Dans certains cas, les retenues à la source sont libératoires et entraînent, pour le contribuable, une dispense d’établir une déclaration annuelle de revenus.
40La logique qui sous-tend la détermination du revenu imposable ajusté, ou revenu à imposer, dans le modèle de micro-simulation est quelque peu différente, parce que m oi ns pr éci se, de cel l e qui est p r at iq uée av ec un e d é c l a r a t i o n d e r e v e n u s. E n e f f e t, l e m o d è l e d e m i c r o - s i m u l a t i o n n e c o u v r e p a s l’e n s e m b l e d e s informations qu’un contribuable fournit avec précision à l’Administration des Contributions Directes ; le modèle ne prétend donc pas remplacer totalement une déclaration fiscale. Néanmoins, ce modèle cerne un très grand nombre d’items présents dans la déclaration fiscale. Les revenus bruts sont le point de départ du calcul du revenu imposable ajusté. De ces revenus bruts sont déduits une série de frais d’o b t e n t i o n, d’e x e m p t i o n s, d e d é p e n s e s s p é c i a l e s (cotisations sociales), d’abattements et d’autres déductions. Pour autant, certaines déductions n’ont pas pu être prises en compte et, parmi celles qui ont été retenues, certaines ont fait l’objet d’une approximation.
41L’impôt suivant le barème est fonction, d’une part, de la classe d’impôt (cf. tableau a.1) et, d’autre part, du barème fiscal (cf. tableau a.2). Chaque unité fiscale est rangée, selon la terminologie luxembourgeoise, dans une classe d’impôt suivant la situation au regard de l’état civil, du fait d’avoir ou non des enfants et de l’âge.
42Pour la classe d’impôt 1, l’impôt à la charge du contribuable est déterminé par application directe du barème au revenu imposable ajusté. Pour la classe d’impôt 1a, l’impôt à la charge du contribuable est déterminé par application du barème au revenu imposable ajusté réduit du quart de son complément à 40,158 euros, sous réserve que le taux d’imposition marginal ne dépasse pas 46% (en 2000, c’est-à-dire avant la réforme). Après la réforme, le barème est appliqué au revenu imposable ajusté, réduit de la moitié de son complément à 39000 euros, sous réserve que le taux d’imposition marginal ne dépasse pas 38%. Pour la classe d’impôt 2, l’impôt à la charge du contribuable correspond au double du montant calculé par application du barème à la moitié du revenu imposable ajusté. De plus, en 2000 (avant réforme), pour la classe d’impôt 1, l’impôt n’est pas recouvrable lorsque le revenu imposable est inférieur ou égal à 8 924 euros et, pour les revenus dépassant 8 924 euros, l’impôt est réduit (par un calcul de lissage pour éviter un effet de seuil) si le montant résultant de la différence entre le revenu imposable ajusté et l’impôt calculé est inférieur à 8 924 euros. Pour les classes d’impôts 1a et 2, les mêmes correctifs sont appliqués pour les revenus imposables inférieurs ou juste supérieurs à 15 865 euros. L’impôt à la charge des contribuables des classes 1a et 2 ayant un ou plusieurs enfants à charge (moins de 21 ans, ou plus de 20 ans et poursuivant des études à plein temps ou bénéficiant des Allocations familiales) est diminué d’une modération d’impôt de 892 euros par enfant en 2000 et de 900 euros en 2002. Enfin, l’impôt calculé selon les barèmes et après modération d’impôt pour enfant à charge est majoré de 2,5%. Cette majoration est appelée à financer les prestations de chômage.
définition des classes d’impôts

définition des classes d’impôts
43La réforme fiscale 2001-2002 s’est déroulée en deux étapes. Une première baisse des tarifs fiscaux a eu lieu le 1er janvier 2001. La seconde baisse des tarifs fiscaux, aménagée d’une petite adaptation (favorable au contribuable) du fait de l’arrivée de l’euro, a au lieu le 1er janvier 2002 et s’est accompagnée d’une hausse des Allocations familiales. Les grandes lignes de la réforme se présentent ainsi par rapport à la situation de 2000 :
- augmentation du seuil d’imposition de 6 693 à 9 750 euros pour la classe d’impôt 1 et de 13 386 à 19 500 euros pour les classes d’impôt 2 et 1a ;
- fixation du taux d’imposition de la première tranche à 8% en 2002 pour un revenu imposable compris entre 9 750 et 11 400 euros, contre 6% en 2000 pour un revenu imposable compris entre 6 693 et 8 775 euros ;
- fixation du taux d’imposition de la dernière tranche à 38% en 2002 pour un revenu imposable supérieur à 34 500 euros, contre 46% en 2000 pour un revenu imposable supérieur à 65 433 euros ;
- baisse de 8 à 10 points du taux d’imposition pour toutes les autres tranches de revenu ;
- uniformisation de l’amplitude des tranches (15 tranches, hors première et dernière tranches, de 1 650 euros en 2002, contre 16 tranches, hors première et dernière tranches, dont deux d’amplitudes différentes en 2000).
barèmes fiscaux applicables aux revenus des personnes physiques

barèmes fiscaux applicables aux revenus des personnes physiques
44Les Allocations familiales
45 Les allocations familiales sont déterminées en fonction du groupe familial auquel appartient l’enfant bénéficiaire et de l’âge de ce dernier (tableau a.3). Elles sont dues à partir du mois de naissance jusqu’à l’âge de 18 ans. Elles sont maintenues jusqu’à 27 ans pour les enfants poursuivant une formation. Au 1er janvier 2002, en accompagnement de la réforme fiscale, une hausse substantielle des Allocations familiales est intervenue. Les montants de base ont été relevés de 24,76 euros.
montants des Allocations familiales par enfant et par mois

montants des Allocations familiales par enfant et par mois
Annexe 2 : le modèle de micro-simulation luxembourgeois
46Depuis peu, le Luxembourg tente de développer un outil de micr o- simulation des politiques socio-fiscales. Deux évènements ont concouru à ce développement :
- la participation du Ceps/Instead au projet Euromod, projet européen de micro-simulation des politiques socio-fiscales qui réunit les quinze États-membres et qui est coordonné par l’Unité de Micro-simulation de l’Université de Cambridge cf. Sutherland et alii (1999)] ;
- l a d e m a n d e r é c e n t e d u M i n i s t è r e d e l a f a m i l l e luxembourgeois d’une évaluation ex ante des effets de la réforme fiscale 2001-2002.
47Les travaux préparatoires entrepris dans le cadre du projet Euromod ont servi de base à cet outil. Mais cet outil répond-il aux critères qui définissent généralement un modèle de micro-simulation ? Si nous nous attachons aux t r o i s é l é m e n t s s u r l e s q u e l s r e p o s e u n m o d è l e d e micro-simulation tel que le définissent Legendre et alii ( 2002b), à savoi r, premi èr emen t un ob jet d’analyse spécifique, deuxièmement un échantillon représentatif des unités microéconomiques dont on veut reproduire les c o m p o r t e m e n t s e t, t r o i s i è m e m e n t, u n s y s t è m e d’inf ormation (ordinateurs et logiciels) pour réaliser effectivement la micro-simulation (système d’information q ui ap p or t e e n p ar t i cu l i er l es t r o is f o n ct i on n al i té s suivantes : un accès simple et efficace aux caractéristiques des in div idu s, u ne pr ogr ammat ion d ans u n lang age i n f or m at i q ue su f f i sam m en t e xp r es si f, d es r é su l t at s enregistrés pour une exploitation ultérieure), nous pouvons conclure que l’outil développé répond effectivement aux d e ux p r em i e r s é l ém en t s m a i s q u’i l n e r ép o n d q u e partiellement au troisième élément. Présentons ces trois éléments.
48a) L’outil développé vise uniquement à évaluer les effets, en termes de gagnants et de perdants, et en termes de redistribution, d’un changement de législation fiscale et sociale. Il ne simule ni les changements de comportements induits par une modification de la législation (offre de travail, par exemple), ni les événements démographiques (naissances, décès, unions…). En ce sens, c’est un outil de modélisation statique qui s’apparente, selon la terminologie de Legendre et alii (2002b), aux “ modèles fiscaux ”.
49b) L’échant illon dont nous disposons est issu de la cinquième vague du Panel Socio-Économique Liewen zu Lëtzebuerg (PSELL2) qui a été réalisée en 1999. Cet échantillon est représentatif de la population qui réside sur le territoire luxembourgeois et qui est affiliée au système de Sécurité sociale luxembourgeois. Signalons que 35% des s alariés qui travaillent au Luxembourg sont des frontaliers qui résident soit en France, soit en Belgique, soit en Allemagne. Les revenus qu’ils perçoivent sur le territoire luxembourgeois sont soumis à l’impôt sur le revenu des personnes physiques luxembourgeois et aux cotisations sociales luxembourgeoises. Ces travailleurs frontaliers b é n é f i c i e n t p ar ai l l e u r s d e s p r es t a t i o n s f a m i l i a l e s luxembourgeoises dans la mesure où ces dernières sont plus favorables que celles qui sont en vigueur dans leur pays de résidence. Mais du fait de leur résidence à l’étranger, ces salariés (et leurs ménages) sont exclus de l’enquête et donc de la simulation. Sont également exclus de l’échantillon les fonctionnaires internationaux (ils ne relèvent pas de la Sécurité sociale luxembourgeoise) qui représentent un peu moins de 5% de la population résidente. L’échantillon des répondants à l’enquête compte 6 566 individus répartis dans 2 539 ménages. L’enquête PSELL2 constitue la partie luxembourgeoise du Panel Communautaire des Ménages (PCM). À côté des informations socio-démographiques et socio-économiques que collecte l’enquête (âge, sexe, ét at-civil, liens f ami liaux, statut économi que, statut professionnel, affiliation aux caisses de maladie, statut d’o c c u p a t i o n d u l o g e m e n t … ) – l e s q u e l l e s s o n t indispensables, d’une part, pour simuler les prestations sociales et familiales, les cotisations sociales et, d’autre part, pour reconstituer les foyers fiscaux –, un volet important est consacré aux revenus. Plus de trente sources différentes de revenus sont collectées au niveau individuel et douze sources au niveau du ménage. Toutefois, les revenus collectés sont nets d’impôts sur le revenu des personnes physiques et nets de cotisations sociales. Un traitement préalable des revenus nets a donc dû être effectué pour passer des revenus nets aux revenus bruts. Cette enquête ne collecte pas les dépenses effectuées par les ménages. Par conséquent, il n’est pas possible de simuler la taxe sur la valeur ajoutée, ni les accises sur les produits pétroliers, sur l’alcool et sur le tabac.
50c) L’outil est uniquement développé à l’aide du système SPSS (logiciel qui permet la gestion de données d’enquêtes et leur exploitation statistique). Les données d’entrée sont stockées dans le tableur de SPSS et les paramètres sociaux et fiscaux sont programmés en syntaxe SPSS. Les données de sortie sont présentes dans le tableur SPSS sous forme de nouvelles variables. Le traitement des données s’effectue à l’aide du programme SPSS.
51Si l’on se réfère aux propos de Legendre et alii (2002b), au vu des éléments qui composent le modèle, l’outil que nous avons développé peut donc être assimilé à la première génération des modèles de micro-simulation.
52La validation du modèle de micro-simulation a été effectuée à l’aide de données macro-économiques externes et à l’aide de cas types. Les différents agrégats produits par le modèle (montants et nombre de bénéficiaires) sont relativement proches des sources externes disponibles (cf. Berger et Jeandidier, 2003). L’utilisation de cas types a, quant à elle, perm is de vali der l a p rog ramm at io n d es con dit ions d’éligibilité et les montants des barèmes des différents prélèvements et transferts simulés.
Notes
- (*)CEPS/INSTEAD, Differdange, Luxembourg. E-mail : Frederic. BBerger@ ceps. lu
- (**)EPS-ADEPS (FRE 2684), Université Nancy 2 et CNRS. E-mail : Bruno. JJeandidier@ univ-nancy2. fr
- (1)Selon le Ministère de l’Économie et des Finances (2000, p. 131), les réformes engagées en France entre 2000 et 2002 devaient permettre de réduire le taux de prélèvements obligatoires de 0,7 point de PIB.
- (2)Timide au regard de la faiblesse du montant maximal de la prime, notamment comparativement, par exemple, au montant de l’Earned Income Tax Credit américain (cf. Bontout, 2000). Timide également si l’on se fie à l’effet incitatif qui, selon l’estimation de Hagneré et alii (2002, p. 7), serait très limité : “ Il est à noter que sur les 11 708 repreneurs d’emploi, seuls 600 peuvent prétendre à la PPE. La majorité des reprises d’emploi est donc imputable à la réforme des aides au logement et à la diminution de l’IR ” (les auteurs précisent cependant que leur échantillon souffre d’une sous-représentation des travailleurs pauvres). De même, Laroque et Salanié (2002, p. 1144) tirent de leur modélisation la conclusion suivante : “ (…) la prime pour l’emploi induit des transitions très faibles qui concernent surtout des mouvements entre non-emploi et temps plein (…) la prime pour l’emploi doit sans doute être considérée plus comme une mesure redistributive que comme une mesure d’incitation au travail ”.
- (3)Déjà avant cette réforme, le Luxembourg se distinguait des autres pays européens par une politique de prestations familiales très généreuse (des montants de prestations assez élevés en moyenne et croissant nettement avec le nombre d’enfants), cf. Saunier et Montigny (1999).
- (4)Voir également Lhommeau et Murat (2001a, 2001b).
- (5)Le lecteur trouvera en annexe 2 une présentation synthétique du modèle de micro-simulation luxembourgeois. Pour une présentation de Myriade, voir le numéro spécial de la revue de la Cnaf “Recherche et Prévisions”, n° 66 (en particulier Legendre et alii, 2002c).
- (6)La taille des échantillons est par ailleurs très différente : 220 000 individus pour la France (clones inclus) et 6 500 individus pour le Luxembourg. De plus, dans le cas de la France, la source est fiscale (enquête Revenus Fiscaux Insee-DGI 1997), alors que pour le Luxembourg, il s’agit d’une enquête classique auprès des ménages ordinaires résidents (PSELL2 : Panel Socio-Économique Liewen zu Lëtzebuerg, 1999).
- (7)Au Luxembourg, l’assurance chômage est totalement financée par l’impôt (pas de cotisations sociales). Il s’agit d’un prélèvement systématique de 2,5% qui s’ajoute au barème de l’impôt. De ce fait, il serait légitime d’inclure les transferts (positifs et négatifs) relatifs au chômage dans le champ de la redistribution, puisque avec un tel mode de financement on ne se trouve pas vraiment dans le cadre d’un revenu différé. Pour autant, de manière à rapprocher au plus près les champs d’analyse des deux pays, nous avons préféré ne pas tenir compte des 2,5% de l’impôt sur les revenus des personnes physiques destinés au Fonds pour l’emploi. Par ailleurs, au Luxembourg, à la différence de la France, une cotisation sociale “ dépendance ” est intégrée au circuit redistributif (le transfert positif en contrepartie étant la prestation de l’Assurance dépendance qui a été créée au Luxembourg en 1999).
- (8)Dans le cas du Luxembourg, les prestations familiales suivantes ont été simulées : Allocations familiales, Allocation de rentrée scolaire, Allocation d’éducation, Allocations de naissance, Allocation de maternité. Quant aux minima sociaux, ils n’ont pas été simulés mais nous avons retenu les montants déclarés dans l’enquête (Revenu Minimum Garanti, Allocation de soins, Allocation pour personnes gravement handicapées, aides du Fonds national de solidarité). Pour les transferts français, cf. Legendre et alii (2002c).
- (9)Myriade simule la Prime pour l’emploi selon la législation initiale de 2001, c’est-à-dire avant le doublement de son montant décidé en cours d’année et versé en janvier 2002 au titre de 2001.
- (10)En revanche, les simulations retiennent le regroupement adéquat à chacun des transferts ou prélèvements : individu, foyer allocataire, foyer fiscal, ménage…
- (11)En conséquence de cette différence de délimitation, la notion d’enfant n’est pas exactement la même dans les deux pays. Pour minimiser cette différence, lorsque nous présentons des résultats différenciant les familles/ménages avec versus sans enfant(s), nous retenons, pour le Luxembourg, une définition de l’enfant plus restrictive que celle implicitement contenue dans la notion de ménage : ne sont en effet alors considérés comme des enfants que les individus à charge de leurs parents du point de vue des Allocations familiales (c’est-à-dire les individus âgés de moins de 18 ans, ou âgés de moins de 27 ans sous réserve d’être en formation).
- (12)Legendre et alii (2001a, p. 8). “ (…) si ce taux s’établit à -50%, cela veut dire que la moitié du revenu disponible de l’individu est constitué de transferts nets de prélèvements ; à 33,3%, que les prélèvements nets représentent un montant qui correspond au tiers du revenu disponible ” (ibidem, p. 8).
- (13)Cette différence peut provenir cependant de la différence méthodologique entre ménage et famille, certains jeunes adultes étant considérés comme des familles d’isolés en France, alors qu’ils seraient membres d’un ménage avec enfants au Luxembourg.
- (14)Baisse de 1,25 point pour les taux des quatre premières tranches d’imposition et de 0,75 point pour les deux dernières, augmentation du plafond de l’avantage de quotient familial pour les parents non isolés et augmentation du plafond de la décote en France. Réduction de 8 à 10 points des taux marginaux d’imposition, passage de 18 à 17 tranches d’imposition et rehaussement du minimum imposable pour la réforme du barème luxembourgeois (pour plus de détail concernant le Luxembourg, cf. annexe 1).
- (15)Pour une analyse plus approfondie de cet aspect, cf. notamment Legendre et alii (2001a, p. 12). La distribution par déciles, relative à la France et présentée au graphique 1, est relativement identique à celle calculée par l’Insee (2002, tab. 3, p. 83), les petites différences entre les deux sources étant probablement dues à la différence d’unité d’analyse (l’individu dans notre cas, le ménage dans le cas des travaux de l’Insee).
- (16)1,14 milliard d’euros selon la simulation de Myriade (Legendre et alii, 2001a, p. 8), ce qui constitue une estimation un peu basse comparativement à celles proposées par Lhommeau et Murat (2001a, p. 78) selon une simulation d’Ines (1,19 milliard) ou par le Ministère de l’Économie et des Finances (2001, p. 136) : 1,3 milliard.
- (17)Source : Magnien et alii (2002, p. 74).
- (18)Lhommeau et Murat (2001a, p. 81) estiment, avec le modèle de microsimulation Ines, que la réforme a très légèrement diminué les inégalités de niveau de vie (-0,12 point de coefficient de Gini) en menant l’analyse au niveau ménages et en tronquant les deux déciles extrêmes.
- (19)Dans cette publication, le lecteur pourra trouver une présentation très pédagogique du mode de construction et d’interprétation des indicateurs en question.
- (20)On retrouve ici la conclusion de Aubert et alii (2002, p. 218) : “ (…) la PPE augmente le caractère redistributif de l’impôt sur le revenu, dans des proportions qui restent toutefois modérées ”. Ces auteurs indiquent par ailleurs que l’indice de redistributivité de Musgrave passe de 1,050 avant réforme, à 1,047 après réforme sans PPE et à 1,051 une fois pris en compte la PPE (selon la législation de 2001 avec prise en compte du doublement de la prime). Pour la comparaison, rappelons que Myriade simule la PPE sans prise en compte de son doublement.
- (21)Dans une moindre mesure, le même raisonnement peut être retenu pour les autres types de foyers avec enfant(s); pour plus de détail à ce sujet, cf. Berger et alii (2001).
- (22)Au total et en moyenne, la variation de leur niveau de vie est donc nettement inférieure à la moyenne calculée pour l’ensemble des familles, moyenne qui est estimée à 0,8% par Myriade, comme par Ines (cf. Lhommeau et Murat, 2001a, p. 81).