1Des données rétrospectives de revenu par âge et génération sont couplées avec les résultats d’un modèle de simulation du système de retraite pour retracer des trajectoires longues de niveau de vie par cohorte, pour discuter l’existence de phénomènes de générations « favorisées » et pour analyser les conséquences par âge et génération de différents scénarios de réforme des retraites. L’identification de générations favorisées suppose une approche relative de la notion de bien-être et dépend de la définition choisie pour cette notion de bien-être relatif. Si l’on mesure le bien-être par la position relative instantanée dans la hiérarchie des revenus, on observe que certaines générations ont bénéficié d’un haut niveau de vie relatif durant leurs années d’activité et de la montée des taux de remplacement retraite pour leurs périodes de retraite. Si ces taux sont maintenus, les générations plus récentes ne bénéficieraient plus que du second de ces deux avantages. S’ils sont réduits et si les retraites bénéficient d’indexations moins généreuses, on retournerait à des profils d’inégalités par âge comparables à ceux des années 1950 à 1960. L’article examine le rôle correcteur éventuel de compléments de retraites préfinancés. En revanche, il ne discute pas le rôle que pourrait jouer un relèvement de l’âge de la retraite.
2Parmi les outils permettant d’évaluer les phénomènes de redistribution intergénérationnelle, la méthode de la comptabilité générationnelle (Auerbach, Gokhale et Kotlikoff, 1991) a focalisé une attention importante au cours des dernières années et l’on dispose maintenant d’applications ou de tentatives d’application à de nombreux pays. Cette approche constitue un outil utile pour le chiffrage des déséquilibres potentiels associés aux évolutions démographiques qui sont prévues pour les décennies à venir. Mais il est aussi admis qu’elle reste un outil complexe, fragile et qui ne donne qu’u ne image au mieux p artielle de ces déséquilibres. On ne reviendra pas ici sur la sensibilité de la méthode à divers détails de mise en œuvre, largement illustrée par d’autres contributions à ce numéro. On en soulignera en revanche trois limites de fond.
3La première est le fait que la méthode résume ces déséquilibres à l’aide d’au plus un indicateur par génération, qui est un indicateur de bilan actualisé des versements effectués et des prestations reçues, par chaque génération, au titre du ou des systèmes de transferts analysés. On ne contestera évidemment pas que le recours à des indicateurs synthétiques soit un objectif légitime, mais il ne doit pas faire perdre de vue l’intérêt de comparaisons plus fines, par exemple sur le détail des âges auxquels les agents perdent ou gagnent à tel ou tel scénario de réforme du système de transferts, au delà de l’évaluation globale du solde final de ces pertes et de ces gains. Cette observation est particulièrement importante dans le cas d’individus à qui les marchés financiers n’offrent que de faibles possibilités de lisser ces pertes ou gains sur leurs cycles de vie.
4Ce besoin d’une approche moins globalisante que celle de la comptabilité générationnelle (CG) est également vrai dans le cas des générations futures, pour lesquelles la méthode est encore plus synthétique puisqu’elle ne propose qu’un indicateur de bilan unique global pour l’ensemble de celles-ci, qui est le bilan de la génération à naître à la date d’établissement du compte. C’est là notre deuxième remarque de fond : cette convention revient à supposer que ce n’est qu’à partir de cette génération que s’appliqueraient l’ensemble des ajustements nécessaires à l’établissement d’un régime permanent de long terme. Or on peut souhaiter des évaluations plus réalistes s’appuyant sur des scénarios d’ajustement progressifs des barèmes de con tributio ns et prestations, calendriers d’ajustement qui sont précisément l’enjeu d’une bonne part des débats sur l’avenir des retraites.
5La dernière observation est que cette focalisation sur les bilans par générations oriente directement vers l’évaluation des écarts à une norme particulière d’équité intergénérationnelle, celle de l’équivalence actuarielle entre cotisations et prestations. Pour reprendre la formule de Sen selon laquelle l’équité se définit nécessairement comme égalité de quelque chose, on dira que la position implicite des défenseurs de la CG est que ce dont il faudrait viser l’égalité en matière intergénérationnelle consiste précisément en ces bilans actualisés de transferts ou, de manière à peu près équivalente, les taux de ren dement interne associés aux flu x contributions/prestations. Cette norme d’équité n’est certes pas à rejeter d’entrée de jeu. Elle est la traduction au niveau intergénérationnel du principe de justice commutative ou contributive qui joue un rôle important dans la logique de notre système de protection sociale et elle peut parfois constituer un guide intéressant pour la réforme des retraites - voir par exemple les scénarios de remontée de l’âge de la retraite au rythme de la hausse de l’espérance de vie mis en place dans certains pays (Vernière, 1999), qui sont une application partielle d’un tel principe. Mais, outre que l’égalité parfaite de ces rendements ou de ces bilans est en général inatteignable en régime non permanent, cette norme n’est évidemment pas la seule qui soit envisageable (Fleurbaey et Michel, 1993; Kessler et Masson, 1995; Blanchet, Lenseigne et Ricordeau, 1996). Le concept d’équité intergénérationnelle, comme l’équité tout court, est un concept à plusieurs facettes qu’il est donc réducteur de résumer à un indicateur unique.
6C’est pour répondre à ces limites que cet article adopte une approche différente de la comparaison des trajectoires économiques des générations, en proposant des visualisations complètes et systématiques de ces trajectoires, qui permettent de varier les points de vue sur le caractère « favorisé » ou « défavorisé » des générations successives. Évidemment, par rapport aux approches de CG, un coût est associé au fait de ne pas s’appuyer sur des indices par génération synthétiques : la quantité d’information à visualiser en est considérablement accrue. Pour ce faire, l’option retenue est celle d’un recours systématique à des visualisations tridimensionnelles des effets d’âge, de génération et de période-dites surfaces de Lexis- permettant d’apprécier en une seule fois les trajectoires relatives des différentes générations les unes par rapport aux autres [1]. L’apport de cette méthodologie sera testé sur une simulation d’une réforme-type du système de retraite, plus ou moins inspirée de la réforme de 1993 du régime général, complétée par un scénario de mise en place de compléments de retraite préfinancés par capitalisation.
7La projection des effets de ces réformes sera poussée relativement loin, à l’horizon d’un siècle. Comme il est usuel dans ce type d’exercice, il ne s’agit pas d’établir des prévisions à un horizon aussi lointain, mais simplement de se donner un horizon assez éloigné pour pouvoir observer le déploiement complet des conséquences potentielles des scénarios retenus. L’incidence de ces réformes sera par ailleurs établie sur la base d’une maquette de simulation du système de retraite et de quelques unes de ses interactions avec la croissance économique générale qui reprend la logique générale d’un modèle présenté antérieurement dans la même revue (Blanchet, 1990).
8Le recours à cette maquette répondra incidemment à une quatrième critique fréquemment adressée à la comptabilité générationnelle, qui est de n’être qu’une comptabilité en équilibre partiel. Sur ce point, notre réponse restera cependant assez sommaire, la modélisation retenue restant très en deçà de l’état de l’art en matière de simulation des interactions retraite/croissance [2]. En bref, le modèle présenté ici consistera en (1) une projection démographique complétée par une description des diverses composantes du système de retraite, dont une partie pourra mener à une accumulation spécifique de capital (dans des scénarios de recours à la capitalisation) ; (2) une fonction de production permettant d’évaluer l’impact du changement des conditions démographiques et d’accumulation de capital sur l’intensité capitalistique et la rémunération relative des facteurs et enfin (3) une équation simple du marché du travail autorisant l’existence d’un chômage structurel ou transitoire.
9La projection des trajectoires futures des générations actuellement actives ou retraitées sera aussi comp létée en amont par d es évaluations rétrospectives. Cette dimension rétrospective des trajectoires de revenu a été introduite parce qu’il est clair que la trajectoire des revenus passés est un élément à prendre en compte pour bien mettre en perspective les transferts à venir en faveur de telle ou telle génération. Les rétropolations de séries qui ont été effectuées remontent à environ 1945-1950 et donc à la période de mise en place de l’actuel système de sécurité sociale : cela veut dire que les premières gén ératio ns pour lesquelles des profits générationnels complets seront disponibles seront les générations 1925-1930.
10Ces générations se trouvent correspondre à ces générations qu’on qualifie parfois de « favorisées » ou de générations du welfare (Thomson, 1989; voir aussi, dans le même esprit, les travaux de Chauvel, 1998). Ces générations seraient celles qui ont bénéficié des allocations familiales à l’époque où elles étaient les plus élevées en proportion du revenu national, et elles n’ont pas eu à financer des dépenses de retraite ou de santé élevées à la génération de leurs parents, étant donné les bas niveaux d’espérance de vie de ces derniers, de leurs faibles droits à retraite ou encore de leur propension encore limitée à recourir au système de soins. Et ces générations du bien-être bénéficient maintenant de transferts de retraite dans une phase où leur montant a été encore peu affecté par les restrictions que pourraient appeler, pour les années à venir, les évolutions démographiques. D’autres facteurs extérieurs au système de protection sociale peuvent aussi avoir contribué au renforcement de l’avantage relatif de ces générations : de très bas niveaux de chômage, des taux d’intérêts réels négatifs pendant des périodes d’inflation élevée qui ont permis un accès facile à la propriété.
11Le présent papier ne proposera pas un chiffrage exhaustif de ces différents éléments. Il tentera néanmoins d’apporter quelques éclairages - en partie critiques - sur cette thèse, en montrant comment l’identification de générations « favorisées » s’avère sensible aux critères de bien-être retenus.
12L’article est org anisé comme suit. No us présenterons d’abord la structure du modèle de projection, en distinguant les trois composantes principales que sont (a) la modélisation du système par répartition et des autres dépenses sociales, (b) la modélisation de l’épargne incluant celle qui pourrait se faire au sein de fonds de pension (ou d’un fonds de réserve) et (c) le bouclage macro-économique déterminant l’évolution du produit par tête et l’équilibre du marché du travail. Puis nous résumerons brièvement comment ont été construites les données rétrospectives que ces projections prolongent.
13Nous présenterons ensuite trois groupes de résultats visant à analyser les conséquences de réformes-type du système de retraite inspirées de la réforme de 1993, mais supposées étendues à l’ensemble des salariés et pour l’ensemble de leurs salaires : les trois groupes de résultat concerneront donc un scénario de statu quo dit « sans réforme », une simulation dite « réforme simple » sans appel à la capitalisation complémentaire et enfin une simulation dite « système mixte » où l’introduction de la réforme de type 1993 est compensée par la mise en place d’un système par capitalisation complémentaire. Les simulations se situent toutes, en revanche, à âge de la retraite inchangé.
Projection des retraites par répartition et des autres dépenses sociales
14L e mod èle s’appu ie su r des projectio ns démographiques reproduisant approximativement les projections réalisées en 1994 par l’Insee (Dinh, 1994), que les projections plus récentes (Brutel, 2001) n’ont pas fondamentalement remises en cause. Elles utilisent les mêmes hypothèses concernant les tendances de mortalité, plus optimistes que ce qu’elles étaient dans le passé : les projections passées sous- estimaient généralement les augmentations de l’espérance de vie qui furent observées par la suite (Vallin, 1993). La durée de vie moyenne est supposée augmenter à la hauteur de 90 ans pour les femmes et de 82 ans pour les hommes d’ici 2050. Le scén ario de fécondité est un scénario de remplacement des générations à long terme, avec une période de transition de vingt ans entre le niveau initial et le niveau de fécondité de remplacement (de 2,1 enfants par femme). Ces projections faites par l’Insee incluaient aussi des hypothèses concernant l’immigration avec un flux d’environ 50 000 migrants par an. Cette hypothèse n’a pas été réintroduite dans le présent exercice : la projection est donc une projection à solde migratoire nul.
15Sur ces projections de populaton globale, le modèle applique des taux d’activité exogènes et constant les taux d’activité par sexe et âge l(s, a, t) étant supposés fixés à leur niveau initial de t0 =1990 sur l’ensemble de la période de projection.
16Sur cette base, le modèle projette l’évolution des retraites par répartition en recourant à l’hypothèse d’un régime unique fictif, hypothèse utilisée dans d’autres études (Malabouche, 1987; Vernière, 1990 a et b). Ses règles sont une stylisation des règles qui prévalent dans le Régime Général, supposées étendues à toute la population et à l’ensemble des revenus d’activité, au lieu de ne concerner que la part des salaires inférieure au plafond de la sécurité sociale. La retraite est calculée en multipliant le nombre d’années de cotisation par un « taux d’annuité » et un salaire de référence qui, jusqu’en 1993, était calculé comme une moyenne des salaires obtenus sur les dix meilleures années de la carrière passée du travailleur. Les scénarios avec réforme appliqueront ensuite à ce système fictif deux des trois principaux changements introduits dans le régime général en 1993. Ces trois principaux changements étaient la modification des règles d’indexation pour les retraites déjà liquidées, la modification des règles utilisées pour calculer le salaire de référence (progressivement calculé sur les 25 meilleures années de carrière au lieu des dix meilleures années) et une modification des conditions nécessaires pour bénéficier du taux normal d’annuité dès 60 ans. Notre analyse va se concentrer plus spécifiquement sur les deux premières dispositions. La troisième n’était pas supposée avoir d’impact important à court terme (Blanchet et Marioni, 1996) et renvoie à la question générale de l’augmentation de l’âge de la retraite, maintenant venue au premier plan suite au rapport Charpin (Commissariat Général du Plan, 1999), mais qui ne sera pas développée ici.
17Supposer que cette réforme du régime général est représentative de réformes qui pourraient ou auraient pu être appliquées à tout le système français est évidemment une simplification très forte, puisque nous savons déjà que l’adaptation des régimes spéciaux ou complémentaires peuvent suivre des logiques différentes ou au moins se produire à des vitesses différentes. Il s’agit donc d’une hypothèse d’école dans un travail qui se veut surtout méthodologique. Cette précaution à l’esprit, nous pouvons détailler plus précisément les équations décrivant ce système de retraite fictif :
- on note p(s, a, t) le niveau de retraite des individus de sexe s avec l’âge a, à la date t;
- pour les individus déjà retraités à la période t- 1, la
retraite est calculée par révision du niveau de
pension à l’âge a-1 et la période t- 1 selon laformule :
où tindex mesure le degré d’indexation des pensions sur le salaire net moyen w. Une valeur de 1 impliquera une indexation complète sur le salaire net - retardé d’un an pour conserver un modèle récursif). Une valeur de 0 reproduira le cas d’une indexation limitée aux prix, étant donné le fait que le modèle, travaillant en francs-ou en euros- constants, neutralise le taux d’inflation ;
- pour les individus qui prennent leur retraite à la date
t, la retraite est calculée selon la règle simplifiée
suivante :
où l(s, a- k, t - k) est la séquence des taux d’activité passés dont la somme donne le nombre moyen d’années de contribution au système dans la génération t- a, et où D est la durée sur laquelle est calculé le salaire de référence auquel la retraite est proportionnelle (D = 10 ans sous les conditions initiales, 25 ans après que la réforme ait complètement produit ses effets).
18Cette formule est appliquée séparément pour chaque sexe compte tenu de leurs écarts de taux d’activité et de salaires. Le coefficient de proportionnalité ? est aussi différencié selon le sexe, pour résumer l’effet d’un certain nombre de prestations non contributives qui sont, soit réservées explicitement aux femmes (prime pour les années où elles ont élevé des enfants) ou qui leur profitent plus que proportionnellement : ceci inclut à la fois les conséquences de l’existence d’un niveau minimum des retraites et le rôle des pensions de réversion (dont la modélisation exacte aurait nécessité une simulation spécifique de la dissolution des couples par le décès) et qui ont été pris en compte de cette manière très fruste. Dans l’ensemble, sous les conditions courantes, le taux d’annuité « effectif » appliqué aux hommes a été évalué à 1,4 pour cent, ce qui est à peu près le taux réellement appliqué par le régime général (une année de contribution supplémentaire conduit à une augmentation des droits à la retraite qui se monte à 1,4 % du salaire de référence). Le même taux « effectif » pour les femmes, estiméselon des données empiriques sur le niveau moyen des retraites se monterait à 2,1%.
19Une fois calculées, les retraites par âge et sexe à la date t sont agrégées et un taux de cotisation uniforme ? sur les salaires bruts pour les individus qui travaillent à cette date est calculé en divisant le montant total des retraites par la masse salariale totale.
20Cette projection des retraites et du taux de cotisation
associé est finalement complétée par une projection
approximative des autres prestations sociales. Ces
dernières sont également financées par des
cotisations proportionnelles assises sur les salaires et
sont regroupées en deux catégories : les allocations
chômage et les autres types de prestations
(c’est-à-dire principalement l’assurance maladie et
les allocations familiales). Les allocations de
chômage totales sont proportionnelles au nombre
total d’individus au chômage (voir ci-dessous sa
détermination) avec un niveau par chômeur indexé
sur les salaires nets (toujours retardés d’un an). Le
montant agrégé des allocations de chômage à la date
t est donc :

La formule utilisée pour les autres prestations est très similaire, sauf que le montant total des allocations est supposé proportionnel à la population totale, soit :

Ces deux montants d’allocations permettent la détermination des deux taux de cotisations spécifiques, ?u et ? qui, combinés avec le taux de 0 cotisation au système par répartition, donnent la relation finale entre salaires brut et net :

Retraites par capitalisation et épargne globale
21 Concernant les retraites préfinancées, nous partons de l’observation qu’elles sont quasi-inexistantes dans l’état actuel du système de retraite. Si nous notons kf (s, a, t) le montant total de capital accumulé dans des fonds de pension à l’âge a et à la date t par les individus de sexe s, nous partons donc, à la date t avec k s a t f ( , , ) 0= pour tout a. Ensuite 0 0 nous supposerons que si les individus commencent à accumuler de tels fonds ou, de manière équivalente, à investir dans un fonds de réserve, cette accumulation sera faite selon une fraction?f t( ) du salaire courant w (s, a, t) net de cotisations sociales.
22Cette fraction a donc été supposée ne dépendre que
du temps, sans composante ni d’âge ni de génération.
Cette approximation simplifie fortement le modèle :
elle dispense d’une modélisation des anticipations à
long terme des individus. Elle n’est pas forcément si
irréaliste qu’il n’y paraît, car d’une génération sur
l’autre, deux effets de sens contraire se superposent.
Les générations qui sont actuellement proches de la
fin de leur cycle de vie active devraient avoir besoin,
toutes choses égales par ailleurs, d’un effort
d’épargne plus intensif pour préfinancer un montant
donné de retraite additionnelle. Mais ce montant à
financer est plus limité pour ces générations que pour
les générations plus jeunes, puisqu’elles vont
aborder la retraite sous des conditions moins
défavorables. L’hypothèse revient donc à supposer
que ces deux effets se compensent. Il en résulte que,
pour les individus dont l’âge est inférieur à l’âge de la
retraite au moment t, le modèle suppose l’équation
suivante d’accumulation dans le fonds de pension :

où rt est le rendement du capital et u(s,a, t) le taux de chômage par sexe et âge.
23Après la retraite, ce stock de capital est
progressivement consommé. On a supposé que les
retraites distribuées par les fonds de pension sont
seulement indexées sur les prix et qu’elles sont
réévaluées chaque année sur la base de la mortalité
courante plutôt que sur la base de la mortalité
attendue. Ces deux hypothèses ne sont pas
irréalistes. Plus discutable sera l’hypothèse que les
niveaux de pension sont calculés séparément pour
chaque sexe sur la base de leur propre espérance de
vie [3]. Si ? (s, a, t) est la fonction de survie courante,
la prestation versée par le fonds est alors :

et la fonction de désaccumulation associée est :

les deux équations étant appliquées séparément pour chaque sexe.
24La modélisation de l’accumulation de capital dans l’économie ne peut cependant pas se limiter à cela. Puisque les fonds de pension ou systèmes équivalents sont considérés comme inexistants au début de la projection et peuvent le demeurer dans des scénarios où ces fonds ne se développent pas, le modèle a besoin d’une autre forme d’épargne pour expliquer l’accumulation au niveau macro-économique. Plusieurs possibilités existent. L’une serait de supposer que cette épargne obéit elle aussi à un motif de cycle de vie, même si elle n’est pas canalisée institutionnellement par des fonds de pension. Cette hypothèse ne semble pas être la plus pertinente : les taux de remplacement actuellement offerts par les systèmes de retraite par répartition restent suffisants pour dispenser une bonne part de la population d’une épargne de cette nature. Une autre possibilité serait d’invoquer des motifs de précaution plus généraux, ou de supposer que l’épargne répond plutôt à un objectif de transmission intergénérationnelle.
25Un problème que soulève cette dernière hypothèse est que nous savons que ce comportement de transmission intergénérationnelle est hautement concentré. Pour rendre compte de cette réalité, on a ici recours à un modèle cambridgien à deux classes. On fait ainsi l’hypothèse d’une première classe de salariés pour lesquels nous ne supposerons aucun motif de legs et, jusqu’à maintenant, aucun besoin d’épargne du type cycle de vie grâce aux taux de remplacement élevé proposés par les systèmes par répartition. Nous supposerons de plus que si cette classe développe un comportement d’épargne retraite dans le futur, ce sera exactement celui qui lui sera imposé par des fonds de pension ou le fonds de réserve sans autre épargne retraite additionnelle, que ceci soit dû à un phénomène de myopie individuelle ou à cause des coûts d’entrée sur le marché des capitaux.
26La seconde classe sera celle des agents qu’on qualifiera, pour faire vite, de « capitalistes ». Puisque l’étude de cette catégorie d’agents n’est pas notre intérêt primordial ici et étant donné notre but de garder à ce modèle toute la simplicité possible, nous décrivons son comportement de la façon très simple suivante : K t c ( ) sera le montant total de capital détenu par cette classe à la date t. À la datet, il est par 0 hypothèse équivalent au stock de capital total K t( ).
270 Puis l’évolution de ce capital est, à chaque période,
gouvernée par l’équation :

qui signifie que le comportement d’épargne de cette classe consiste simplement à réinvestir à taux constant? le revenu brut de ce capital,?étant le taux de dépréciation. L’hypothèse que l’épargne est une fraction du revenu brut plutôt que net, est introduite pour éviter les problèmes techniques dans la situation (peu probable) où la croissance éco nomique et le rend ement du capital diminueraient à tel point que le revenu de capital net en deviendrait négatif.
28Cette représentation de l’épargne est naturellement très sommaire mais elle a quelques avantages, qui justifient son utilisation. Elle est a priori plus plausible que l’hypothèse d’une population uniforme partageant le même comportement dynastique avec une prévoyance parfaite. Ensuite, la dynamique de ce type de modèle est bien connue à long terme. Nous savons que, dans cette classe de modèles, l’accumulation de capital à long terme ne dépend que du comportement de la classe qui a le plus fort taux d’épargne, en l’occurrence celle des cap italistes, de sorte que le s eul impact macro-économique à long terme du développement d’un fonds de pension sera un changement dans la structure du capital (moins de Kc et plus de Kf ), un résultat qui paraît relativement réaliste et dont on notera d’ailleurs qu’il reproduit le résultat d’équivalence ricardienne sur la neutralité globale du système de retraite, par un mécanisme qui est cependant très différent. Dans l’approche ricardienne, la neutralité résulte de mouvements de compensation directe entre épargne retraite et épargn e destinée à la transmissio n intergénérationnelle, compensation supposée valoir pour chaque agent. Ici elle résulte de compensations entre les évolutions du capital détenu par les deux classes d’agents, avec un phénomène d’éviction partielle des détenteurs initiaux du capital par les fonds de pension, un phénomène auquel on s’attend assez naturellement : si les fonds de pension se développent sans effets à long terme sur l’accumulation globale, ce sera bien qu’on aura assisté à une rerépartition du patrimoine national entre investisseurs traditionnels et fonds depension.
29Jouer sur le paramètre ? permet en tout cas de retrouver facilement les cas typiques qui sont généralement pris en considération dans les débats concernant les pensions : si ? =1, cela signifie que tout revenu du capital est réinvesti et la convergence vers la règle d’or qui assure l’identité à long terme entre rendement actuariel du système de retraite par répartition et des systèmes préfinancés par capitalisation. Nous savons donc immédiatement que le développement de systèmes préfinancés ne sera avantageux à long terme que si? < 1, ce qui est la situation dans laquelle nous nous placerons. Évidemment, cet avantage de long terme sera à mettre en balance avec le coût immédiat que représente, pour les salariés, le fait de consentir à un effort d’épargne supplémentaire.
Salaires, marché du travail et revenu net disponible
30Une fois explicitées nos deux sources d’accumulation de capital, nous pouvons générer des séries de stock de capital total K(t). En face de ce stock de capital total, l’offre totale d’emploi est déterminée par les tendances démographiques et les taux d’activité. Notons L(t) cette main-d’œuvre. Elle sera affectée par un taux de chômage moyenu t( )qui inclura deux composantes, une composante structurelle exogène u t * ( ) et une composante transitoire résultant d’une flexibilité imparfaite du salaire.
31Cette dernière composante est modélisée de la façon
suivante. À la date t, on hérite d’un niveau de salaire
brut moyenw t b ( )- 1. Étant donné le stock de capital
K(t) et la fonction de production qui est CES avec
progrès technique augmentant le travail à taux
exogène g(t), on calcule le salaire moyen brutw t * ( )
qui correspondrait au taux de chômage structurel. Il
est comparé au salaire de t - 1 augmenté des progrès
de productivité et l'on suppose un processus
d’ajustement partiel du second sur le premier.
L’équation d’ajustement s’écrit :

qui signifie que les salaires sont parfaitement élastiques vers le haut et imparfaitement élastiques vers le bas-avec un coefficient ?-, la première hypothèse étant introduite pour éviter les situations de suremploi. Ceci mène à un niveau de salaire moyen qui détermine la demande de travail et donc le taux de chômage global à la date t. Salaire moyen et chômage global sont ensuite convertis en salaires et taux de chômage par âge selon la dernière distribution connue de ces deux variables par âge.
32Une intégration plus fouillée des caractéristiques économiques et démographiques du marché du travail aurait nécessité un traitement plus satisfaisant que cette désagrégation ad hoc : par exemple, une meilleure séparation entre effets de génération et de période sur les salaires serait utile, au lieu de supposer que la structure par âge des salaires ne dépend que d’effets de période et d’âge. Il est aussi probable qu’une augmentation donnée du taux de chômage global n’a pas forcément des effets identiques pour toutes les tranches d’âge : des raisonnements de type insider-outsider ou des modèles de file d’attente justifieraient un impact relatif plus fort du taux de chômage global sur celui des plus jeunes. Une plus forte vulnérabilité des travailleurs plus âgés est aussi envisageable même si, pour la France, elle a plutôt pris la forme d’un recours aux sorties anticipées du marché du travail. Une analyse intégrée de tous ces aspects est cependant hors du champ du présent exercice et nous avons préféré coller à des règles simples de proportionnalité qui constituent des approximations acceptables au premier ordre.
33Finalement, les salaires, les taux d’activité et les taux
de chômage ainsi que les taux de cotisations sont
combinés pour calculer des indices de revenu net par
sexe et par âge. Seules les ressources des salariés ou
des retraités sont prises en compte et abstraction est
faite des ressources de la classe des capitalistes. Ces
ressources des salariés sont calculées comme
ressources nettes de cotisations pour la protection
sociale et des éventuelles cotisations au fonds de
pension mais sans prise en compte des prélèvements
fiscaux. Nous avons donc, pour les individus en
dessous de l’âge de la retraite ( )a ar < :

et pour les individus au-delà de l’âge normal de la retraite ( )a ar ?

34La première formule est simplement la somme du revenu net du travail et des allocations de chômage. La seconde inclut les mêmes composantes (pour les individus faisant encore partie de la main-d’œuvre) complétées par les prestations de retraite (pour les individus sortis du marché du travail) et les pensions par capitalisation. On doit noter que ces expressions n’incluent pas les autres types de prestations sociales qui, en première approximation, ne font que compenser d’autres charges (de famille ou de maladie).
Rétropolations
35Les rétropolations de séries qui complètent le modèle de projection en amont ont été établies par compilation de sources diverses. Les structures d’âge rétrospectives sont reprises de Couet (1995). Les séries rétrospectives de taux d’activité font à la fois usage de reconstitutions faites par Guillemot et Bordes (1994) pour la période postérieure à 1962 et des séries longues établies par Marchand et Thélot (1991) pour la période précédente. Des séries complètes de taux de chômage par âge et sexe sont aussi disponibles à partir de Guillemot et Bordes pour la période 1962 et après. Pour la période antérieure, seuls les taux de chômage agrégés sont disponibles. Ceux qu’on utilise ont été reconstruits par Villa (1995). Ils sont alors désagrégés par âge et sexe selon les plus anciennes des structures par âge et sexe dont on dispose, à savoir celles de 1962.
36Nous avons ensuite reconstitué les séries de salaires bruts moyens, normalisées à 1 en 1990, en utilisant les Comptes Nationaux et les séries proposées par Sauvy (1954) pour la période 1920 à 1948. Les séries longues de dépenses sociales, depuis 1950, sont tirées des Comptes de la Protection Sociale. En l’absence de toute information sur la période précédente (à notre connaissance) nous avons supposé que ces dépenses ont été constantes entre cette date et 1946 (quand le système actuel fut créé) et nous avons aussi supposé que les dépenses sociales étaient négligeables auparavant. En divisant ces séries par le produit des salaires bruts et de l’emploi, nous reconstruisons les taux de cotisations apparents qui sont ensuite déduits des salaires bruts pour calculer la série agrégée de salaires nets. Cette série est alors désagrégée par âge et par sexe. Pour la période 1962-1990 ceci est fait sur la base des distributions effectives de revenus du travail établies par l’Insee à partir des DADS (Déclarations Annuelles de Données Sociales). Pour la période antérieure, comme nous l’avons fait pour les taux de chômage, la désagrégation a été réalisée sur la base de la plus ancienne de ces distributions par âge qui nous soit connue, à savoir celle de 1962.
37À partir de cette information, il est possible de fournir des séries longues de ressources nettes par âge et par sexe pour les individus d’âge au travail similaires à celles projetées avec le modèle sur la base de l’équation (11). Pour les individus à l’âge de la retraite, qui ont été assimilés à tous les individus qui ne travaillent pas après l’âge de 60 ans, les niveaux de retraite par répartition ont été calculés en répartissant les dépenses totales sur la population concernée, de sorte à atteindre un ratio de pension moyenne entre hommes et femmes de 1,85, selon l’ordre de grandeur fourni par l’Échantillon Inter-Régimes de Retraités (Dangerfield, Prangère et Roth, 1996), mais sans avoir introduit de ventilation par âge, ce qui est une simplification puisque les niveaux de pension en coupe transversale diminuent en fait légèrement avec l’âge. Ce sont ces niveaux de pensions reconstruits pour la génération la plus récente de retraités qui ont été utilisés pour évaluer les taux d’annuités effectifs cités plu s hauts, de respectivement 1,4 % et 2,1% pour les hommes et les femmes, après confrontation avec les séquences passées de salaires et de taux d’activité par sexe de la même génération.
38Avec des niveaux de pension individualisés calculés selon cette procédure, et en négligeant d’autres sources de revenus de retraite, nous sommes capables de calculer des niveaux de ressources des retraités comparables à ceux projetés par le modèle et l’équation (12). La façon dont les taux d’annuité effectifs ont été calculés assure la continuité entre les pensions simulées des nouveaux retraités au début de la projection et les pensions des plus jeunes retraités juste avant que la projection ne commence.
39Au final, nous avons donc des données complètes pour les groupes d’âge actif dès 1920 et des données complètes pour les classes d’âge retraitées commençant en 1946. Ceci permet la reconstitution de profils de revenus complets par âge à partir de la génération 1900.
Premiers résultats : un scénario sans réforme
40Nous commencerons par examiner le scénario sans réforme, c’est-à-dire la continuation du statu quo d’avant 1993, avec un financement des retraites entièrement assuré par répartition, aucun changement dans les taux d’activité aux âges les plus élevés, une indexation des retraites déjà liquidée sur les salaires nets et un calcul des retraites au moment de leur liquidation selon une règle des dix meilleures années de carrière. De manière plus rigoureuse, il s’agit de la prolongation d’un statu quo plus ancien que 1993, puisque la pratique d’indexation sur les salaires avait déjà été abandonnée au cours des années quatre-vingt.
41Ces hypothèses concernant l’organisation du système de retraite sont combinées avec un scénario économique qui consiste en un réinvestissement au taux ? = 0 8, du revenu du capital non lié à la préparation de la retraite, un rapport initial capital/produit de 2,5, une fonction de production de Cobb-Douglas calibrée de sorte que ce taux d’épargne et ce rapport K/Y soient cohérents avec un chemin de croissance initial équilibré. Le chômage d’équilibre a été fixé à 5 pour cent avec une vitesse d’ajustement des salaires à leur valeur de plein emploi de 0,2 (coefficient ? de l’équation (10)). Ce scénario suppose enfin un taux de progrès technique augmentant le travail de 2 % par an. Ceci est comparable à l’ordre de grandeur généralement retenu pour la plupart des exercices de projection des retraites (Commissariat Général du Plan, 1991 et 1999).
42La figure 1 donne l’évolution des ressources totales nettes par tête, pour les hommes seulement, à la fois par âge et période, pour les âges de 20 ans et plus et à partir de 1950. On peut tracer sur la surface de Lexis y(a, t) les trajectoires de revenu par âge pour des cohortes spécifiques : elles correspondent aux intersections entre cette surface et des plans verticaux diagonaux. Le graphique donne ainsi la trajectoire tronquée de la génération 1920 et les trajectoires complètes des générations 1950 et 1980. Dans ce premier scénario, la croissance globale est suffisante pour assurer une croissance positive des revenus nets à la fois pour les travailleurs et les retraités. À noter la différence entre profils transversaux et longitudinaux des retraites par âge. Les profils transversaux indiquent des déclins modérés des revenus de retraite avec l’âge mais ceux-ci correspondent à des effets de génération : à un instant donné les retraités les plus âgés ont eu des trajectoires globalement plus basses que les retraités les plus jeunes. Les profils longitudinaux sont en revanche ascendants, une fois passée la baisse de revenu résultant de la transition entre l’activité et la retraite. Ce premier résultat montre que si l’on veut mettre en évidence des effets significativement défavorables du vieillissement de la population sur les trajectoires de revenu par âge et par génération, nous devons nous tourner vers deux possibilités : ou bien aller vers des scénarios économiques plus pessimistes, ou construire des indicateurs de niveau de vie qui neutralisent d’une manière ou d’une autre l’impact de la croissance de la productivité. Nous n’approfondirons pas la première piste, nous allons plutôt adopter la seconde.
ressources nettes par âge et période.

ressources nettes par âge et période.
premier indice de niveau de vie relatif : ressources des individus d’âge a en t rapportées au niveau de vie moyen de la date t. Scénario sans réforme

premier indice de niveau de vie relatif : ressources des individus d’âge a en t rapportées au niveau de vie moyen de la date t. Scénario sans réforme
second indice de niveau de vie relatif, ressources courantes des individus d’âge a comparé aux ressources de leurs parents à leur âge adulte.

second indice de niveau de vie relatif, ressources courantes des individus d’âge a comparé aux ressources de leurs parents à leur âge adulte.
43Les figures 2 et 3 présentent à cet égard deux sous-options. Celle qui est utilisée pour la figure 2 consiste à calculer des indices de revenu relatif en divisant les ressources nettes à l’âge a, au moment t, par leurs moyennes transversales calculées (non pondérées) sur les âges de 20 à 95 ans. Cette normalisation transversale conduit à un indice qui mesure comment une personne d’âge a en t se compare à toutes les autres personnes vivantes au même moment. Cette mesure permet de mettre en évidence deux phénomènes. L‘évolution entre 1950 et 1990 illustre d’abord la période de réduction de l’écart de revenu relatif entre travailleurs et retraités avec des mouvements symétriques de réduction (resp. augmentation) du revenu relatif en deçà (resp. au-delà de 60 ans), permis parle développement de la politique de la vieillesse et la surindexation des retraites par rapport aux salaires nets. Ce processus s’arrête par hypothèse autour de 1990. Et cette interruption conduit effectivement à un phénomène de générations favorisées : les générations 1920 à 1930, sur tout leur cycle de vie adulte, sont dans une situation économique relative meilleure que toutes les autres générations aux mêmes âges. Par exemple, durant leur retraite, leurs ressources sont environ 85 % de ce qu’elles sont dans la population globale. Cette position économique relative pendant la retraite est presque deux fois plus élevée qu’elle ne l’était pour les générations qui sont passées à la retraite dans les années 1950. Et elle est légèrement plus élevée que ce qu’elle devrait être pour les générations nées après 1930 quand elle atteignent ou atteindront la retraite : ceci suggère un soutien modéré pour l’hypothèse de la génération du welfare, modéré car il est conditionné par l’adoption de cet indice de revenu relatif [4].
44La seconde sous-option que nous présentons pour calculer des indices de revenu ajustés à la croissance consiste à introduire une correction qu’on qualifiera d’Easterlinienne (Easterlin, 1973) dans laquelle les ressources nettes à l’âge a pour la génération née l’année n sont déflatées par un indice représentant le niveau de vie des parents de cette génération, disponible grâce aux données rétrospectives : le déflateur retenu est le revenu net des individus âgés de 45-50 ans quand la génération n était âgée de 15 à 20 ans, l’hypothèse sous-jacente étant que la formation des habitudes concernant les besoins de consommation se produit principalement pendant l’adolescence, combinée avec l’hypothèse d’un écart de 30 ans d’âge entre enfants et parents. On mesure donc le bien-être à l’âge a comme l’écart entre les réalisations à cet âge et les aspirations formées pendant l’adolescence. Un tel indice peut être calculé pour des générations à partir de 1905 (puisque la partierétrospective du modèle génère des données de revenu pour les adultes à partir de 1920). Les résultats sont présentés sur le graphique 3 qui est cette fois un graphique âge-génération, et non plus âge période.
45Avec ce nouvel indice, les générations « favorisées » s’avèrent peu différentes de celles montrées par la figure 2. C’est pour la génération 1925 que l’indicateur culmine, mais il faut noter que le résultat aurait pu être très différent puisque le mécanisme sous-jacent est d’une toute autre nature : il est lié à l’histoire de la croissance économique et doit peu à l’évolution des transferts intergénérationnels. La génération la plus favorisée est ici celle qui entre sur le marché du travail juste au démarrage de la période d’expansion économique rapide. L’autre spécificité de cette représentation est de donner un indicateur cohérent avec l’idée d’un déclin significatif du statut économique relatif des plus jeunes générations, alors que l’image donnée par la figure 2 était beaucoup moins nette.
L’effet d’un durcissement des règles de calcul, sans compléments par capitalisation
46Ces premiers résultats ont visé à illustrer la relativité du concept de génération favorisée. Les résultats dépendent du fait de savoir si ce sont les revenus absolus ou relatifs qui sont calculés. Ils dépendent aussi, dans le premier cas, des hypothèses de croissance et, dans le second cas, du choix de la formule qui est utilisée pour déflater les ressources courantes. Quand la procédure de déflation suppose que les individus, à chaque âge, sont essentiellement sensibles au revenu moyen de tous les individus qui coexistent à la même période, le bien-être relatif des générations est déterminé par l’organisation du système de transfert (et les règles d’ancienneté pour les statuts économiques relatifs au sein de la main-d’œuvre). Quand on suppose que les individus jugent essentiellement de leur niveau de revenu par référence à une expérience initiale de niveau de vie propre à la génération, un rôle important est attribué à l’accélération ou à la décélération de la croissance économique.
47Ceci illustre, s’il en était besoin, la difficulté à réduire le problème des retraites à un problème de pure équité intergénérationnelle, faute d’un indicateur indiscutable de comparaison des niveaux de vie entre générations. En revanche, ce qui pose problème aux systèmes de retraite est la question de la possibilité de réaliser de fortes augmentations des taux de cotisation des travailleurs qui étaient implicites dans ce premier scénario sans-réforme. Cette évolution est représentée par la courbe en traits plein de la figure 4, qui inclut aussi l’évolution rétrospective du taux de cotisation depuis 1950. Sous le scénario de statu quo, le taux de cotisation augmente d’à peu près 70 % entre 1990 et 2030 [5], une hypothèse qui soulève deux questions liées : l’une de faisabilité politique, l’autre étant relative aux effets de distorsion que pourraient avoir de tels niveaux de prélèvements.
48On sait que ces deux questions sont controversées. Une caractéristique intéressante des séries à long terme de la figure 4 est notamment de remettre ces évolutions à venir en perspective en rappelant que les augmentations futures des taux de cotisation sous ce scénario de non-réforme ne sont pas plus grandes que celles qui se sont produites entre 1960 et 1990. Ce point a été largement utilisé dans les débats sur les retraites pour minimiser l’importance du vieillissement de la population pour ces retraites, en argumentant que l’essentiel des hausses de cotisations à la retraite étaient derrière plutôt que devant nous. Cet argument a cependant, à son tour, deux limites. Premièrement, si on croit à l’assimilation entre cotisations retraite et prélèvement fiscal, alors nous savons que la non-linéarité des effets du distorsion rend le passage d’un taux de cotisation de 15 à 30 % plus coûteux que le mouvement allant de 0 à 15%. Cet argument n’est toutefois pas nécessairement le meilleur dans un système contributif où la proportionnalité entre pensions et cotisations doit fortement minimiser les effets de distorsion. Plus important serait donc l’argument de faisabilité politique : la confrontation des figures 4 et 3 rappelle que les fortes augmentations des taux de cotisation qui ont eu lieu entre 1960 et 1980 s’appliquaient précisément aux générations « favorisées » au sens Easterlinien du terme : les augmentations des taux de cotisation étaient donc faciles à obtenir car elles s’appliquaient à des individus qui bénéficiaient, de toute façon, de bien meilleures conditions que celles auxquelles ils avaient pu s’attendre avant d’entrer sur le marché du travail. La figure 3 montre que de telles conditions favorables ne se reproduiront pas probablement dans le futur, même sous un scénario de croissance significative, et ceci rend effectivement incertaine la marge de manœuvre future en matière de prélèvements pour la retraite.
taux de cotisation. Evolution passée et projetée avec ou sans réforme

taux de cotisation. Evolution passée et projetée avec ou sans réforme
49Une réforme du type de celle de 1993 parvient-elle alors à éviter ou à limiter significativement ces hausses de cotisations ? Sous l’hypothèse de croissance retenue, la figure 4 montre que la réponse est relativement positive. Elle le fait en séparant les effets des deux principales composantes de cette réforme en donnant des résultats associés à trois sous-scénarios :
- un scénario limité à la désindexation des retraites déjà liquidées relativement aux salaires nets ;
- un scénario où les retraites, après liquidation, demeurent indexées sur les salaires nets mais où leurs niveaux initiaux pour les générations successives sont calcu lés comme étant proportionnels au salaire moyen passé sur un nombre d’années qui augmente progressivement de 10 à 25 ans de la génération 1933 à la génération 1948 ;
- le scénario qui se rapproche de la réforme complète, c’est-à-dire la combinaison des deux précédentes hypothèses (en excluant toujours l’aspect de la réforme visant, à terme, une remontée de l’âge de la retraite)
50La figure 4 montre que la réforme atteint effectivement son but qui est de fortement limiter la progression du taux de cotisation, avec un rôle impo rtant et p lus imméd iat joué par la désindexation. Cependant, étant donné la condition d’équilibre du système par répartition, ce résultat ne peut bien sûr être atteint sans pertes, que la figure 5 illustre, en présentant les variations relatives de ressources nettes par période et âge entre le scénario de réforme et le précédent scénario sans réforme. On a de nouveau souligné, sur ce graphique, les profils générationnels des gains ou pertes pour les générations nées en 1920,1950 et 1990.
51Nous pouvons analyser l’impact de la réforme en distinguant les conséquences de ses deux composantes :
- l’allongement de la période retenue pour calculer le salaire de référence n’a naturellement aucun impact sur la génération 1920. Elle joue pleinement pour les générations 1950 et plus et consiste en une perte une fois pour toutes autour de l’âge de 60 ans qui demeure permanente sur le reste de la période de retraite ;
- la désindexation, en revanche, a un effet relatif négatif sur toutes les générations actuellement retraitées et les générations suivantes, même si l’effet est naturellement limité pour les premières générations. Le point principal est que la perte relative est d’une plus grande importance pour les retraités les plus âgés.
52La figure 5 montre que cette dernière caractéristique de la réforme est celle qui détermine le plus fortement son résultat global. La figure indique aussi la compensation modérée qui résulte de la réforme en termes d’augmentation des ressources nettes pour les individus qui travaillent : pour la réforme complète l’impact est d’environ 10% de ressources en plus en régime permanent, une valeur qui correspond exactement à l’écart des taux de cotisations extrêmes sur la figure 4.
variation relative des ressources par période et âge, entre les scénarios « non réforme » et « réforme simple »

variation relative des ressources par période et âge, entre les scénarios « non réforme » et « réforme simple »
même indice de niveau de vie relatif qu’en figure 2. Scénario « réforme simple »

même indice de niveau de vie relatif qu’en figure 2. Scénario « réforme simple »
53La figure 6 indique enfin ce que la réforme implique pour le profil âge-période de l’un des indicateurs de niveau de vie relatif qui a été utilisé pour évaluer les conséquences du scénario sans réforme, c’est-à-dire l’indice obtenu par normalisation transversale (aucun changement qualitatif significatif n’est notable pour l’autre indice Easterlinien). La figure a été construite de la même façon que la figure 2. La comparaison des figures 6 et 2 montre que, lue à travers cet indice, la réforme équivaut à défaire partiellement mais très significativement ce qui a été fait dans les années 1960-1980 en termes d’amélioration du niveau de vie relatif des retraités, spécialement pour les plus âgés, avec cette fois la création d’un phénomène de génération défavorisée (génération 1950), au sens de génération bénéficiant d’un niveau de vie relatif moins favorable que les générations encadrantes durant l’ensemble de sa vie active mais aussi de sa retraite.
54La figure 5 invite à quelques réflexions sur le thème de la désindexation [6]. L’un des avantages qu’il y a à jouer sur l’indexation par rapport à la baisse du taux de remplacement est que cela évite d’aggraver la discontinuité du revenu qui se produit entre le travail et la retraite. Pourtant, son résultat est en contradiction avec ce qui peut être considéré comme l’un des buts du système de retraite, à savoir assurer une certaine position relative au sein de la hiérarchie totale des revenus durant toute la période de retraite. Déplacer la charge de l’ajustement vers les retraités plus âgés qui sont relativement moins nombreux présente aussi l’inconvénient que l’ajustement relatif a besoin d’être plus grand pour cette population dont le poids démographique est moins important. De plus, les gains tirés de la désindexation en termes de taux de cotisation dépendent du taux de la croissance de la productivité : dans le cas où elle serait nulle, ce qui est aussi le cas où la résistance à des hausses de prélèvement serait la plus forte, les gains tirés de la désindexation seraient également nuls.
55Enfin, si l’idée est de corriger les effets de la réforme par la mise en place de compléments préfinancés de type fonds de pension, on peut arguer que la complémentarité entre les instruments n’est pas utilisée au mieux. La capacité à assurer l’indexation est probablement plus à la portée du système public que des systèmes privés qui se cantonnent en général à des garanties d’indexation sur les prix. C’est en tout cas l’hypothèse faite dans le scénario cumulant réforme et développement de la retraite par capitalisation que nous allons maintenant examiner
Évolution vers un système mixte
56Nous nous tournons donc vers un scénario de système « mixte » qui est l’équivalent du scénario « réforme simple » avec la seule différence que, à partir de 1995, les salariés commencent à cotiser à des fonds de pension à un taux qui, jusqu’en 2000, augmente linéairement de 0 à 5 pour cent du salaire net puis se stabilisede manière définitive à ce niveau.
57Les mécanismes macro-économiques propres au modèle utilisé dans cet article n’ont pas été discutés en détail à propos des simulations précédentes car ils n’y jouaient pas un rôle important : comme ils se limitaient à un phénomène transitoire de résorption du chômage non structurel et à une intensification capitalistique modérée due au ralentissement de la croissance de la main-d’œuvre, ces deux phénomènes n’introduisaient pas une très grande différence avec une simulation d’équilibre partiel où à la fois le chômage et l’intensité capitalistique (ou les salaires bruts) auraient été tenus constants.
58Les interactions macro-économiques sont cependant plus importantes dans le scénario de préfinancement. Trois questions doivent être soulevées : comment le rendement du capital se situe-t-il par rapport au rendement apparent des cotisations à la répartition qui, en régime stable, est équivalent au taux de la croissance économique ? Comment le financement contribue-t-il à l’accumulation globale (en supposant ici la situation favorable où toute l’épargne pour la retraite représente une addition nette à l’épargne totale) ? Comment le rendement du capital va-t-il enfin être affecté par l’augmentation d’intensité cap italistiq ue qui résulte d u développement de la capitalisation ?
59Les réponses que le modèle fournit à ces questions sont résumées sur les figures 7 et 8. La figure 7 montre d’abord l’évolution du stock de capital accumulé par le fonds en tant que fraction du capital total existant à chaque période : le profil est une sigmoïde avec une valeur limite d’environ un tiers du stock de capital total. La période transitoire où la part du fonds dans le capital total augmente correspond à une phase d’augmentation du rapport capital/travail, comme le montre la deuxième série du graphe, qui donne l’évolution du rapport capital/travail comparée à celle du scénario de réforme sans recours à la capitalisation. Ce ratio K/L augmente de 10 à 15 pour cent autour de l’année 2020 mais cette augmentation n’est pas permanente : à long terme, un effet d’éviction se produit et le ratio K/L retourne à long terme à la valeur d’équilibre qui est déterminée par le taux d’épargne hors retraite de ? [7].
effets du préfinancement sur l’accumulation et les salaires

effets du préfinancement sur l’accumulation et les salaires
60Cet effet transitoire sur l’intensité capitalistique est reflété dans l’évolution des salaires bruts mais avec une intensité réduite : l’accumulation en vue de la retraite n’augmente les salaires bruts que de 2 à 3 pour cent au maximum, de sorte que, après avoir pris en compte l’impact de la cotisation au fonds, nous avons une diminution des salaires nets en comparaison du simple scénario « réforme ». Ceci ne permet cependant pas de conclure que le financement est inutile : cette perte pendant l’activité doit être comparée aux gains résultants pendant la retraite. Un élément clé à cet égard est le rendement net de l’épargne investie dans le fonds, c’est-à-dire la productivité marginale nette du capital en comparaison du rendement implicite du système par répartition. Ces éléments sont fournis par la figure 8. Cette figure présente d’abord les deux rendements sous le scénario « réforme sans capitalisation » : leur confrontation compare la performance du système par répartition avec le retour sur le premier Euro investi pour la retraite.
61Étant donné l’hypothèse d’un taux d’épargne
inférieur à la règle d’or, la comparaison est à
l’avantage du préfinancement. Mais nous savons que
l’on s’attend à ce que cet avantage relatif soit réduit
par le développement de la capitalisation. La courbe
intermédiaire sur la figure 8 montre que ceci est
effectivement le cas, mais pas toutefois au point où le
rendement de la capitalisation chuterait finalement
en deçà du rendement de la répartition. Cette
réduction, de toute façon, est seulement transitoire
et, à long terme, le système mixte est supérieur au pur
système par répartition : des retraites plus élevées
sont obtenues pour le même niveau de cotisation, ou
des retraites identiques sont obtenues avec des
niveaux plus bas de cotisations.
rendements du système par répartition et des retraites préfinancées

rendements du système par répartition et des retraites préfinancées
variation relative des ressources par période et âge, entre les scénarios « système mixte » et « sans réforme »

variation relative des ressources par période et âge, entre les scénarios « système mixte » et « sans réforme »
62Mais nous savons aussi que cette transition a un coût immédiat et nous devons aussi voir comment le système change les statuts relatifs, même à long terme, des retraités aux différents âges. Si ces changements sont appréciés en prenant le scénario « réforme simple » comme point de référence, le résultat est direct : l’ajout d’un étage de capitalisation améliore le revenu des retraités. Mais la comparaison pertinente doit être faite avec le scénario initial sans réforme. C’est ce qui est fait sur la figure 9 qui montre ce qui est gagné ou perdu entre un système visant à maintenir le niveau de vie relatif des retraités au sein du système par répartition pure, ou un système combinant retraites par répartition revues à la baisse et compléments de retraites préfinancés. Pour les salariés, l’effet net du système mixte à long terme est légèrement positif : il paient moins sous ce scénario qu’ils ne l’auraient fait sous le régime du statu quo.
63Concernant les retraités, le scénario mixte évite aussi la dégradation du niveau de vie qu’impliquait la réforme pour les retraités les plus jeunes et conduit même dans leur cas à une hausse de niveau de vie. En revanche, il n’est pas à même de lutter contre la dégradation du niveau de vie avec l’âge induite par la désindexation. Ceci illustre bien le problème que peut poser la combinaison choisie entre retraite par répartition et par capitalisation, toutes deux désindexées par rapport au niveau de vie courant.
Conclusion
64Résumons brièvement les principaux résultats de cet article. Deux points peuvent être soulignés, en repartant de nos considérations liminaires sur les limites des ap pro ches de comp tabilité générationnelle : d’abord la nécessité de compléter les profils de génération prospectifs par leurs composantes rétrospectives, puis la nécessité de discuter les mesures du bien-être instantané qui sont utilisées pour comparer les trajectoires dans le temps spécifiques des générations. Trois indices de bien-êtreont été proposés, avec chacun des messages différents. Ils illustrent la relativité du concept de génération favorisée : son existence ou sa caractérisation dépendent du fait que le bien-être soit mesuré en termes absolus ou relatifs, et, dans ce dernier cas, dépendent de ce par rapport à quoi le bien -être relatif est apprécié. Enfin des représentations tridimensionnelles ont été tentées pour résumer les profils âge/période/génération. Cette solution a certainement ses avantages et ses inconvénients. Sa meilleure utilisation peut être celle d’un outil exploratoire permettant une identification rapide des générations les plus caractéristiques. Cette représentatio n est complémentaire des représentations classiques à deux dimensions appliquées à des générations sélectionnées.
65Ces outils ont été appliqués à l’évaluation de quelques aspects de la réforme des retraites introduites en France pour le régime général de base en 1993. Les pertes les plus importantes sont observées pour les retraités plus âgés et résultent des nouvelles règles d’indexation. En introduisant un fonds de pension en plus de ce système réformé, on fait peu pour corriger cette difficulté, quel que soit l’impact positif que ces fonds de pension pourraient avoir sur la performance économique. La question est de savoir à quel point ce type de trajectoire des revenus des retraités les plus âgés est acceptable. Un argument en faveur de ce scénario serait une décroissance des besoins économiques avec l’âge, justifiant qu’il n’y ait pas à faire plus que l’indexation de la retraite sur les prix après sa liquidation. Un contre-argument est l’importance de certains besoins spécifiques tels que la prise en charge de la dépendance et l’aide à domicile et le fait que ces besoins eux, ont des coûts qui, étant principalement des coûts salariaux, évoluent comme le salaire moyen plutôt que comme l’indice général des prix. La bonne réponse peut être que la désindexation des retraites par rapport aux salaires n’est acceptable que compensée par une prise en charge conséquente de la dépendance.
66Par ailleurs, l’ensemble de cet article s’est situé à taux d’activitépar âge ou âge de laretraitedonnés. Le même cadre pourrait être repris pour discuter des conséquences intergénérationnelles d’u n relèvement de l’âge de la retraite. Dans ce cas, la comparaison interg énérationn elle dev rait évidemment prendre en compte les conséquences des inégalités d’espérance de vie entre générations successives.
Notes
- (*)Insee. E-mail : ddidier. blanchet@ insee. fr
- (1)Hamayon et Rouquès (1997) et Chauvel (1998) donnent des exemples ponctuels d’utilisation du même outil.
- (2)Cet état de l’art met l’accent sur l’endogénéité des comportements, les interactions financières et l’ouverture internationale. Sur les fondements théoriques, voir Artus et Legros (1999). Pour diverses illustrations, voir Cazes, Chauveau, Le Cacheux et Loufir (1992), Chauveau et Loufir (1994 et 1995), Rouguet et Villa (2000) et les travaux de l’équipe INGENUE (Aglietta et alii, 1999).
- (3)Calculer un niveau de prestations mutualisé sur la base de la survie moyenne des deux sexes complique les calculs du fait que les deux sexes sont hétérogènes à la fois du point de vue de leurs risques de mortalité et de leurs niveaux de contributions passés.
- (4)Legris et Lollivier (1996) utilisent un indice similaire pour l’étude de la période 1970-1990. Leur résultat est que les générations « favorisées » sont plutôt les générations 1941-1945. Une explication à cet écart est que Legris et Lollivier déflatent les niveaux de vie par des indicateurs de taille des ménages, ce qui n’est pas fait dans le présent travail. Une autre différence est qu’ils s’appuient sur des données d’enquête limitées à cette période 1970-1990, alors que nous rétropolons et extrapolons en deçà et au-delà de cette période limitée.
- (5)Cet ordre de grandeur est comparable aux projections à indexation parfaite retenue dans divers exercices récents, une fois tenu compte des écarts d’hypothèses sur la démographie et les taux d’activité (Agalva et Plane, 2001 ; Conseil d’Orientation des Retraites, 2001).
- (6)Voir aussi Hamayon (1995) et Cornilleau et Sterdyniak (1995) pour des discussions similaires.
- (7)À l’équilibre, l’équation qui détermine le stock de capital non lié à la retraite est, en montant par tête :
Si k est le ratio global capital-travail K/L et f(k) la production par tête, cette équation détermine directement le niveau d’équilibre de k, comme solution de :
Le ratio k sera donc totalement indépendant du niveau d’épargne-retraite. Ce n’est qu’en cas d’éviction complète du capital non lié à la retraite par les fonds de pension que la première équation cesserait d’être valide et que l’intensité capitalistique d’équilibre deviendrait sensible à l’épargne-retraite. Pour un examen plus complet, voir Blanchet (1988,1992), ou Blanchet et Kessler (1992).