Les Trois Mousquetaires – cette histoire de dons – est présenté par Dumas et donné aux lecteurs comme offrande. Mais celle-ci se réitère aussi et se rejoue chaque fois que l’œuvre, sous une forme ou sous une autre, est adaptée, retransmise, réactualisée et intégrée dans un nouveau circuit de sens. Dumas lui-même, en promouvant une vision de la littérature comme création collective et comme mythe, a relégué au second plan des notions littéraires telles que l’auteur unique, le génie, le caractère intouchable du texte. Ses conceptions et sa pratique généreuse proposent une autre approche de la littérature, offerte à tous les vents de la postérité et ouverte à des appropriations multiples, l’auteur premier (existe-t-il en définitive ?) dût-il se trouver dépossédé.
Article
Soit une préface intitulée : « Préface dans laquelle il est établi que malgré leurs noms en os et en is, les héros de l’histoire que nous allons avoir l’honneur de raconter à nos lecteurs n’ont rien de mythologique », publiée dans le journal Le Siècle le 14 mars 1844. Tout un chacun aura reconnu le roman dont cette phrase, sommaire, parodique, place à côté l’un de l’autre celui qui raconte et ceux à qui il est raconté, auteur et lecteurs, donateur et donataires, l’esprit capricieux du poète et les impressions de la masse des lecteurs. La liaison entre ce singulier – qui, certes, se drape dans un pluriel dit de majesté – et ce pluriel ordinaire, c’est le récit où l’auteur privilégie, plus loin, dans ce même préambule, l’amusant aux dépens de l’instructif.
À la fin de la préface précédant la publication des Mémoires du comte de La Fère, dont le manuscrit a été prétendument découvert dans les rayons de la Bibliothèque royale, celui qui s’en présente comme l’éditeur dévoile le titre du nouveau feuilleton :
C’est la première partie de ce précieux manuscrit que nous offrons aujourd’hui à nos lecteurs, en changeant son titre en celui des Trois Mousquetaires […]. En attendant, comme le parrain est un second père, nous invitons nos lecteurs à s’en prendre à nous, et non au comte de La Fère, de leur plaisir ou de leur ennui.
Cela posé, passons à notre histoire.
L’histoire est donc donnée comme offrande, c’est-à-dire un acte de générosité, source d’affects entraînant chez ses récepteurs des réactions immédiates, soit positives comme le plaisir, soit négatives comme l’ennui…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 02/03/2022
- https://doi.org/10.3917/rdm1.058.0075

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