Introduction : le coût de la détention, une terra incognita
1 Depuis la seconde moitié du XXe siècle, la question de la détention a suscité une attention soutenue parmi les différentes disciplines des sciences sociales, en particulier à la suite de l’essor de la sociologie carcérale aux États-Unis puis dans le sillage des travaux de Michel Foucault. Toutefois, la question du coût de la détention dans une perspective historique – soit l’évolution des dépensées occasionnées à l’État par ses établissements de détention – a été peu traitée par ces recherches, notamment dans l’espace francophone. Il est vrai que le traitement d’une telle problématique nécessite une fastidieuse récolte de données statistiques [1]. Ainsi, le fameux ouvrage de Michel Foucault (1975) ne consacre pas une ligne à l’aspect financier de la détention. Le même constat s’impose pour une étude classique consacrée à l’histoire des prisons en France aux XIXe et XXe siècles (Petit et al., 2002). Quant à la revue Déviance et Société, depuis sa création en 1976, elle n’a pas publié d’article principalement dédié à cette question. Dans une des rares publications consacrées au coût de la détention en France à l’époque contemporaine, les auteurs soulignent à juste titre le silence de la littérature à ce sujet (Deffains, Jean, 2013, 25). C’est cette lacune que notre étude voudrait contribuer à combler en partie, en présentant les résultats d’une recherche sur le coût de la détention au prisme de la longue durée (1845-2015), à travers une étude de cas : celui du troisième État cantonal le plus peuplé de Suisse, le canton de Vaud [2].
2 L’absence d’études historiques systématiques concernant le coût de la détention apparaît d’autant plus comme une lacune de la recherche que plusieurs spécialistes ont montré que le travail des détenus constitue, depuis l’essor de la prison moderne jusqu’à nos jours, une source de revenus importante, que ce soit pour l’État-geôlier ou, dans certains cas, pour des acteurs privés. Un ouvrage de référence sur la prison au XIXe siècle à Genève, canton voisin de celui qui nous intéresse dans le présent article, souligne ainsi la rentabilité, pour l’État, du travail des personnes emprisonnées (Roth, 1981, 264). Le cas genevois n’a du reste rien d’exceptionnel, si l’on songe aux bagnards, auxquels les autorités françaises recouraient pour les travaux publics (Valette, 1980, 206). Il en va de même aux États-Unis, bien que le travail des détenus y ait été âprement combattu. Cette opposition a non seulement été le fait des syndicats de travailleurs, qui y ont vu une concurrence déloyale entraînant une pression à la baisse sur les salaires, à plus forte raison lorsque les détenus ont été utilisés comme briseurs de grève (Adamson, 1984, 450) ; elle a aussi été portée par des associations patronales qui craignaient que l’État ne vienne à jouer un rôle trop important dans le processus de production (Petchesky, 1981, 349). À noter également que durant les conflits mondiaux, en particulier le second, le travail des prisonniers de guerre, des requis civils et des détenus concentrationnaires joue un rôle économique central (Gaida, 2015).
3 Compte tenu de l’importance du travail des détenus, il n’est guère étonnant que, depuis la naissance de la prison moderne, les revenus qui en découlent aient aiguisé les appétits du secteur privé. Les historiens rappellent ainsi que le philosophe anglais Jeremy Bentham, bien avant les débats contemporains autour de la privatisation des prisons, espérait faire fortune en obtenant que les autorités du Royaume-Uni lui confient la gestion du système carcéral. Bentham prévoyait de mettre les détenus au travail dans son fameux Panopticon, ambitionnant ainsi, par une surveillance de tous les instants, de dégager une productivité élevée parmi les prisonniers (Feeley, 2002, 332). Plus largement, avec l’essor de l’industrialisation, le secteur privé a joué un rôle majeur dans l’exploitation du travail d’une partie des prisonniers, aussi bien dans les pays européens (Petit, 1990, 315) qu’aux États-Unis (McLennan, 2008, 87).
4 Aujourd’hui encore, l’attrait du secteur privé pour le travail des prisonniers est une réalité, comme l’ont montré des sociologues ou journalistes, qui ont mis en lumière les profits qui pouvaient être obtenus grâce au travail à très bas coût des détenus, à l’image d’une investigation récente sur le « business carcéral » en France (Rambaud, 2010) ou de nombreuses recherches menées aux États-Unis dans le cadre du processus de privatisation des prisons, initié par le président Ronald Reagan (par exemple Simon, 2007, 476). Certains chercheurs (notamment Wacquant, 2004) relient l’essor de ce nouveau champ de profit pour le secteur privé au renforcement, ces dernières années, de l’État pénal qui se combinerait avec un recul de l’État social. Dans cette perspective, l’emprisonnement renouerait avec sa fonction ancienne de contrôle social des classes populaires, dans un contexte de paupérisation de ces dernières (Weiss, 2001, 263 ; LeBaron, 2008, 67). L’augmentation significative du travail en prison aux États-Unis depuis la fin des années 1970 s’inscrirait enfin dans le projet néolibéral consistant à faire assumer de manière plus forte le coût du secteur public à la population, ce qui permettrait en parallèle d’alléger l’imposition du capital (LeBaron, 2008, 60).
5 Le débat contemporain suscité par la question de la privatisation des prisons reste pourtant fortement biaisé par les partis pris idéologiques, ainsi que l’importance des enjeux économiques soulevés (pour un tour d’horizon, voir Perrone, Pratt, 2003). Les partisans de la privatisation insistent sur la charge financière élevée qu’impliquerait la détention pour les États, en soutenant que le secteur privé serait capable d’assumer cette fonction à moindre coût (Savas, 2000). S’agissant du cas helvétique, un partisan de la privatisation partielle du système carcéral explique ainsi que « la question de la privatisation de l’exécution des peines s’est posée pour des raisons liées aux coûts. L’expérience montre que les activités étatiques peuvent en général être offertes à moindres frais lorsqu’elles sont privatisées » (Stamm, 2006, 251).
6 Si une telle promesse est contestée par les opposants à cette évolution d’inspiration néolibérale, paradoxalement, les analyses développant un point de vue critique à l’égard de l’État pénal et de l’emprise croissante du secteur privé sur celui-ci font généralement aussi valoir que les prisons reviennent cher aux collectivités publiques, et que la recherche d’alternatives progressistes à l’incarcération permettrait, en conséquence, de substantielles économies aux États. Comme le soutiennent des économistes du Center for Economic and Policy Research aux États-Unis, un groupe de réflexion proche de l’aile gauche du Parti démocrate : « Une réduction de moitié du taux de détention pour les délinquants non violents (qui constituent désormais plus de 60 % de la population carcérale) ramènerait le taux de détention global au niveau de 1993 (ce dernier étant déjà historiquement élevé). Cela réduirait en outre les dépenses de détention à hauteur de 16,9 milliards de dollars par an, pour large part en soulageant le budget de l’État et des administrations régionales. De telles économies représenteraient près du quart du budget global de la détention. Les vastes recherches existantes sur la détention et la criminalité montrent qu’un tel processus pourrait être accompli sans détérioration notable de la sécurité publique. » [3] (Schmitt et al., 2010, 12 ; voir aussi Weiss, 2001, 279). Les opposants à la privatisation soutiennent en outre que le secteur privé aurait intérêt à l’augmentation du nombre de détenus, ce qui, in fine, ne ferait que renchérir le coût du système carcéral pour l’État sous-traitant ; dans une contribution visant à combattre la perspective d’une privatisation des prisons helvétiques, le criminologue André Kuhn explique que la « privatisation augmenterait le nombre de détenus, l’État devant même payer encore davantage que ce qu’il investit aujourd’hui dans le secteur carcéral. » (Kuhn, 2006, 219).
7 Si le discours concernant les coûts supposément excessifs de la détention pour les États fait mouche, c’est aussi parce que cette idée est souvent relayée dans la sphère publique, en particulier à la droite du spectre politique et médiatique, au point d’être devenue un quasi lieu commun. L’argument n’est pas seulement mobilisé pour préparer l’opinion à la privatisation de prisons. Il permet tantôt de justifier des mesures d’économie affectant le personnel pénitentiaire ou les conditions de détention, tantôt encore – comme c’est le cas dans le discours de l’Union démocratique du centre (UDC) en Suisse ou du Front national (FN) en France – de stigmatiser les immigrés présentés comme responsables des taux de détention élevés. L’UDC, premier parti de Suisse en termes électoraux et situé très à la droite du champ politique helvétique, dénonce ainsi régulièrement la forte augmentation du coût de la détention qui serait survenue après 2007, laquelle s’expliquerait par l’introduction d’un Code pénal « accordant davantage d’importance à la réinsertion des détenus qu’à la protection de la population » ainsi que par la délinquance commise par des immigrés (Rickli, 2013, 15). Une éditorialiste proche de la droite vaudoise affirme pour sa part, dans un essai récent sur la criminalité en Suisse et sans l’ombre d’une démonstration que « les détenus coûtent une fortune à la société » (Miauton, 2013, 114). En Suisse toujours, le prix jugé trop onéreux de l’encadrement des jeunes délinquants en prison a défrayé la chronique en 2013 (Sommer, 2014).
8 De tels discours ne sont pas propres à la Suisse, comme le montre le cas des Pays-Bas, où le ministre de la Justice a proposé, en 2014, de faire payer aux détenus 16 euros par nuit passée en prison, pour réduire la charge à ses yeux trop lourde de la détention pour les collectivités publiques (Agence France-Presse, 2014) ; une idée qui a rapidement été reprise par des politiciens d’autre pays européens, notamment en France (Maligorne, 2015). Enfin, il n’est pas rare de lire dans de prestigieux journaux européens, comme le britannique Daily Telegraph (Barrett, 2015) ou l’allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (Plickert, 2010), des tribunes alléguant que les dépenses publiques affectées aux prisons seraient en augmentation constante.
9 Tous ces débats seraient sans doute plus féconds s’ils pouvaient s’appuyer sur des recherches qui, comme se propose de le faire la présente contribution, évaluent de manière systématique et sur la longue durée – une perspective indispensable si l’on veut aboutir à des conclusions robustes – l’évolution du coût réel de la détention. Pour calculer ce coût, trois opérations sont nécessaires. En premier lieu, il s’agit d’obtenir les dépenses nettes des prisons, soit les dépenses brutes auxquelles on soustrait les recettes issues du travail des détenus. Pour toute la période qui nous intéresse, les établissements de détention du canton de Vaud mettent en effet la grande majorité des détenus au travail : textile ou artisanat dans les prisons, production agricole et boulangerie dans les colonies de travail ou encore participation des détenus à des chantiers publics. Le produit de ce travail permet d’approvisionner l’établissement de détention, réduisant d’autant ses frais de fonctionnement, ou est mis en vente à l’extérieur, permettant de dégager des recettes qui couvrent, comme nous allons le voir, une part substantielle des dépenses entraînées par les prisons ; quant au travail des détenus dans le cadre de chantiers publics, il permet de valoriser le patrimoine de l’État à moindre frais.
10 Une fois l’évolution des dépenses nettes connues, il s’agit, en deuxième lieu, de les convertir en francs constants, à l’aide d’un indice du coût de la vie permettant d’éliminer l’effet de l’inflation sur les données. Enfin, pour évaluer le poids financier réel de ces dépenses nettes et son évolution, il est éclairant de mettre ces dernières en rapport avec d’autres variables, en particulier avec le produit intérieur brut (PIB) et les dépenses totales de l’État.
11 Au cœur de notre analyse, la distinction entre dépenses brutes et dépenses nettes des établissements de détention renvoie à la question fort débattue dans l’historiographie du travail des détenus. Pour mieux problématiser cet aspect de la recherche, certaines analyses développées par la sociologie carcérale dans le monde anglo-saxon s’avèrent fécondes, malgré le peu d’attention accordée, là encore, à l’évolution statistique et historique du coût de la détention. En particulier, les résultats des recherches qui – dans le sillage du travail pionnier de Rusche et Kirchheimer (1939, 1994 pour la traduction française) – s’interrogent sur les liens entre structures économiques et systèmes pénaux doivent être brièvement évoqués ici (pour une synthèse des études inspirées de Rusche et Kirchheimer et des débats qu’elles ont suscités, voir Garland, 1990, 83-130). Même si ces théories sont à envisager avec certaines précautions – elles ont notamment été critiquées pour accorder une importance trop grande aux facteurs économiques dans l’explication du développement de la politique pénale, aux dépens des dimensions politiques et idéologiques – leurs auteurs amènent des résultats importants.
12 Grâce à ces travaux, il a été en particulier montré que la rationalisation du travail des détenus s’est combinée avec le processus d’industrialisation capitaliste. Ainsi, pour les milieux dirigeants du XIXe siècle, la rationalisation du travail des détenus répond à deux objectifs principaux. Elle est d’abord une réponse au fort besoin de main-d’œuvre lié aux grands travaux d’infrastructure rendus nécessaires par l’industrialisation, notamment la construction des routes (voir notamment l’étude de Shelden, 1981, 359). Elle est ensuite une manière de discipliner, par le travail carcéral, ceux qui, au sein des classes populaires – vagabonds, mendiants, migrants, etc. – se montrent rétifs aux nouvelles formes de vie (urbanisation et exode rural, dislocation des solidarités familiales traditionnelles) ou de travail (passage de l’artisanat au salariat) provoquées par l’industrialisation (voir notamment Melossi et Pavarini, 1981, 25-26). Selon les auteurs qui s’inspirent de Rusche et Kirchheimer, l’incarcération en tant que méthode pour discipliner et contrôler les classes pauvres est d’autant plus volontiers retenue par les dirigeants des pays en cours d’industrialisation que les recettes dégagées par le travail des détenus la rendent moins onéreuses (Adamson, 1984, 440 ; Garland, 1990, 95 ; Petit, 1990, 410). Ce dernier postulat mérite précisément d’être mis à l’épreuve par des études statistiques portant sur la longue durée, comme celle que nous proposons ici.
13 Une telle mise à l’épreuve apparaît d’autant plus intéressante que, selon ces théories, la fonction de mise au pas des classes subalternes ne concernerait pas uniquement les débuts du processus d’industrialisation, mais se serait également intensifiée dans les périodes de crises économiques du XIXe siècle et de la première moitié du XXe siècle, lorsque les tensions sociales conduisaient l’État à muscler son bras pénal, provoquant une hausse du taux de détention (Adamson, 1984, 443). L’historien Jacques-Guy Petit, dans son travail de référence sur la prison en France au XIXe siècle, montre le parallélisme saisissant entre la hausse des prix du froment et le nombre de condamnés pour atteintes à la propriété (Petit, 1990, 275). Toutefois, la hausse du taux de détention en période de crise ne signifierait pas mécaniquement une augmentation de la quantité de travail des détenus. En effet, les périodes de crise amèneraient aussi à un accroissement des résistances sociales au travail en détention de la part des employeurs et/ou des syndicats des travailleurs, qui y verraient une forme de concurrence déloyale, d’autant plus qu’ils sont plongés dans les difficultés économiques (voir par exemple Petit, 1990, 330). On le voit, compte tenu de ces effets ambivalents, l’impact réel d’une crise économique sur le travail en détention, et du même coup sur le coût des prisons, est une question épineuse. Ici encore, nous espérons qu’une approche statistique et historique puisse offrir un éclairage utile à ce débat.
La récolte des données statistiques et le périmètre de la recherche
14 Nous nous sommes appuyés pour réaliser cette étude sur des données statistiques recueillies sur une base annuelle pour une période de 170 ans. Les données ont été récoltées à partir de deux sources principales : d’une part, le rapport d’activité que le gouvernement vaudois remet chaque année, depuis 1845, au parlement du canton et, d’autre part, les comptes annuels de l’État de Vaud, également publiés par le gouvernement depuis cette même date (État de Vaud a, b, 1845-2015). Cinq précisions doivent être données au préalable à propos de la base de données et des graphiques que nous avons ainsi construits.
15 Premièrement, nos données se rapportent aux établissements de détention de l’État de Vaud (y compris les prisons de district et celles pour mineurs), soit une dizaine en tout. Les quelques établissements, de taille nettement plus petite, gérés par des communes (par exemple la Ville de Lausanne), ne sont pas pris en compte dans cette recherche aussi longtemps que leurs comptes relèvent des finances des communes en question et non des finances du canton. À noter que ces établissements étant progressivement pris en charge par l’État cantonal, durant les dernières décennies du XXe siècle (Vuilleumier, 2014, 146), ils seront intégrés au fur et à mesure dans nos statistiques.
16 Deuxièmement, nos données ne se réfèrent qu’aux dépenses occasionnées à l’État de Vaud par les établissements de détention eux-mêmes et c’est donc bien cela que nous entendons quand nous évoquons les coûts de la détention. Il s’agit donc des coûts de l’incarcération en tant que telle, qui ne comprennent ni les frais causés en amont (par l’arrestation et la condamnation, voire par les coûts sociaux de la criminalité) ni ceux qui sont occasionnés en aval de l’emprisonnement (par la réinsertion sociale).
17 Troisièmement, nos données ne prennent en compte que les dépenses de fonctionnement des prisons (salaires du personnel pénitentiaire, frais de chauffage, de nourriture, etc.) Les dépenses liées à l’amortissement des investissements – pour la construction d’un établissement pénitentiaire, par exemple – ne sont pas incluses, car non intégrées dans les comptes des établissements de détention vaudois, qui ont servi de base à notre collecte de données. Le biais ainsi introduit n’est toutefois pas significatif pour deux raisons. D’abord, parce que les dépenses d’investissement sont amorties sur de nombreuses décennies (une prison fonctionnant la plupart du temps davantage que 50 ans) et sont donc faibles par rapport aux frais de fonctionnement. Ensuite, parce que si les dépenses d’investissement sont laissées de côté, les recettes extraordinaires ne sont pas intégrées non plus, alors même que celles-ci peuvent être considérables : songeons au cas où des terrains insalubres ou impropres à la culture sont assainis par le travail des détenus et peuvent être ensuite vendus ou affermés par l’État à des prix sans commune mesure avec ceux auxquels ils ont été achetés. Dans le canton qui nous intéresse ici, de très grandes zones marécageuses ont été assainies par les détenus d’un des principaux centres de détention vaudois, les Établissements pénitentiaires de la plaine de l’Orbe (Anselmier, 1993, 104). En 1922, le gouvernement vaudois explique ainsi que « pour le calcul du résultat final de nos exercices, nous n’avons pas tenu compte de la plus-value réelle de nos terrains, résultant des travaux d’amélioration et d’assainissement tels que : drainages, fossés à ciel ouvert, défrichements, colmatages, etc. Ces travaux entrepris il y a déjà plusieurs années et nécessitant une attention continuelle ont transformé singulièrement le domaine primitif de la colonie. Grâce à eux, des surfaces considérables de marais, achetées à des prix inférieurs, sont aujourd’hui des terrains productifs, représentant plus du double de leur valeur d’achat. Ce résultat a été acquis exclusivement avec la main-d’œuvre pénale. » (État de Vaud a, 1922, 84).
18 Quatrièmement, en ce qui concerne les recettes, nous n’avons pas pris en compte les peines pécuniaires prononcées par la justice en lieu et place de la détention. Cette source de revenu étatique ancienne (pour une histoire de la peine pécuniaire, voir Faraldo-Cabana, 2017) a pourtant connu une très forte expansion en Suisse ces dernières années, en particulier depuis 2007, à la suite d’une révision du Code pénal suisse. Celle-ci incite les tribunaux à renoncer aux peines privatives de liberté de moins de 6 mois, en lieu et place desquelles on préfère désormais les peines pécuniaires ; ainsi, avant la révision de 2007, 62 % des condamnations prenaient la forme de peines privatives de liberté, contre seulement 12 % à la suite de celle-ci (Fink, 2017, 47). La prise en compte de ces revenus, qui apparaissent dans les comptes du Service pénitentiaire – autorité de tutelle des prisons vaudoises – aurait conduit à diminuer encore davantage le coût net des prisons vaudoises : ainsi, en 2008, le revenu des peines pécuniaires permet de couvrir la moitié des charges du Service pénitentiaire. Nous avons toutefois laissé de côté cette recette pour deux raisons. D’une part, leur intégration aurait introduit un fort biais dans la comparaison à long terme, cette source de revenu ne jouant qu’un rôle faible ou marginal jusqu’à une période relativement récente. D’autre part, cette recette n’est pas directement issue des établissements pénitentiaires sur lesquels se focalise notre étude, mais relève du système pénal considéré en un sens plus large.
19 Enfin, il faut souligner que nos graphiques présentent les dépenses nettes des prisons, soit les charges de fonctionnement desquelles on a soustrait les recettes dégagées par les établissements. Ce sont en effet ces dépenses nettes de l’État – celles qui doivent être in fine assumées par les contribuables – qu’il faut prendre en compte si l’on veut établir le véritable coût des prisons. Durant le XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, les recettes proviennent essentiellement de la vente des produits du travail des détenus. À partir de la seconde moitié du XXe siècle, les recettes des prisons issues de la vente de produits sont progressivement complétées par d’autres dans les comptes de l’État, tels que des versements effectués par l’assurance-maladie lorsqu’un prisonnier est malade ou encore le remboursement, par un canton voisin, des frais de détention occasionnés par le placement d’un de leurs ressortissants dans un établissement pénitentiaire vaudois.
L’évolution du taux de détention
20 Avant d’aborder la question du coût, commençons par quelques considérations préalables, relatives à l’évolution du taux de détention depuis 1845. Le Graphique 1 présente à cet effet le nombre de détenus au 31 décembre de chaque année, rapporté à la population totale du canton pour 100000 habitants [4].
Taux de détention 1845-2015 (rapport du nombre de personnes détenues au 31 décembre à la population vaudoise, pour cent mille habitants)

Taux de détention 1845-2015 (rapport du nombre de personnes détenues au 31 décembre à la population vaudoise, pour cent mille habitants)
21 Ce graphique révèle tout d’abord un pic du taux de détention entre 1875 et 1890 ; celui-ci y est environ deux fois plus élevé qu’entre 1845 et 1875. En chiffres absolus, la progression est encore plus nette ; elle conduit à davantage qu’un doublement du nombre de détenus, de 264 à la fin de l’année 1870, à 583 à fin 1880 [5]. Après 1890 en revanche, une tendance séculaire à la baisse du taux de détention se dégage, si bien qu’à partir des années 1970, ce taux renoue avec un niveau proche de celui des années 1845-1865. Cette évolution générale se retrouve au niveau suisse, où le taux de détenus pour 100000 habitants passe de 140 en 1900 à 83 en 2015 (Fink, 2017, 118). Relevons néanmoins quatre périodes d’accroissement relatif par rapport à la tendance séculaire à la baisse du taux de détention : premièrement, les années de la Première Guerre mondiale et de la crise économique de 1920-1923 ; deuxièmement, la période qui coïncide avec la dite Grande Crise des années 1930 et le second conflit mondial ; enfin, dans une moindre mesure, la période allant de 1980 au début des années 1990 ainsi que les cinq années les plus récentes, après 2010.
22 Toutes les augmentations du taux de détention coïncident avec une période de crise économique, aussi bien le pic du XIXe siècle que les quatre périodes d’accroissement relatif durant le XXe siècle. Pour les trois premières de ces crises, les répercussions sur la politique pénale sont claires, alors qu’elles sont plus discutables s’agissant des deux dernières (1980-début des années 1990 et 2010-2015).
23 Voyons cela d’un peu plus près. Le pic de 1875-1890, qui coïncide avec la dite Grande Dépression (1873-1896), est fortement lié aux conséquences sociales de celle-ci, qui suscitent de la part des autorités vaudoises une volonté de contrôle pénal plus strict de la population. Rappelons à ce titre qu’une révision du Code pénal vaudois entre en vigueur en 1875 (Anselmier, 1993, 12). Cette dernière réforme prévoit une nouvelle peine, l’internement, pour une durée de 6 mois à 5 ans, dans des colonies de travail agricole créées à cet effet (Payerne, Orbe, Chailly). L’influence du grand voisin français se fait ici ressentir : l’introduction de cette peine s’inspire en effet de l’entreprise de moralisation de la société dans laquelle se lance la Troisième République après la défaite de 1871 et la Commune de Paris, et qui provoque une forte croissance des affaires correctionnelles, alors que celles des assises n’augmentent guère (Petit et al., 2002, 138). De manière similaire, la réforme du droit pénal vaudois vise à enfermer et discipliner par le travail cette importante catégorie sociale formée par les couches les plus démunies, les laissés-pour-compte de la crise économique, en un temps où les assurances sociales n’existent pas : miséreux, vagabonds, mendiants, infirmes, prostituées (Tabin et al., 2010, 25-54). En 1883, à la colonie de Payerne, sur 59 détenus, la moitié représente des infirmes et la grande majorité (22 sur 29) est âgée de 45 ans ou plus. Comme le note le 30 novembre 1880 le journal libéral-conservateur proche des autorités, La Gazette de Lausanne (p. 3), sur un ton paternaliste typique du discours dominant qui accompagne alors cette entreprise de moralisation des couches populaires : « Les condamnés envoyés à Payerne sont en général des vagabonds que la paresse ou l’ivrognerie a poussés à l’oisiveté, à la mendicité, à l’abandon de leur famille […] la discipline qui leur est imposée […] tend surtout à leur faire aimer le travail dont la plupart ont méconnu la nécessité. »
Nombre de journées de détention effectuées, d’une part, au pénitentier et dans les prisons et, d’autre part, dans les colonies de travail agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1845-1913

Nombre de journées de détention effectuées, d’une part, au pénitentier et dans les prisons et, d’autre part, dans les colonies de travail agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1845-1913
24 Le Graphique 2 montre bien – en particulier à travers la progression rapide du nombre de détenus dans les colonies de travail agricoles dès 1874 (en foncé dans le graphique) – que c’est essentiellement à cette approche pénale des problèmes sociaux qu’est due l’augmentation du taux global de détention constatée entre cette année-là et 1890.
25 Un constat analogue s’impose pour l’augmentation du taux de détention lors des deux crises économiques de l’entre-deux-guerres, celle, courte mais brutale, du début des années 1920 (Guex, 2012, 153) et celle des années 1930. Ainsi, en 1933, alors que le nombre de demandeurs d’emploi inscrits auprès des Offices du travail du canton de Vaud est passé de 718 au début de l’année 1931, à 5571 à la fin de l’année 1933 (Ritzmann-Blickenstorfer, 1996, 425), le gouvernement cantonal dit vouloir « astreindre à une occupation méthodique et suivie ceux qui trop souvent encore […] encombrent les pavés des villes et errent dans les campagnes » (cité par Collaud et al., 2015, 6 ; voir aussi Killias, Grandjean, 1986). À la fin de la décennie, cette volonté conduit – dans le contexte des pleins pouvoirs concédés par le parlement cantonal aux autorités en temps de guerre – à l’introduction d’un Arrêté sur l’internement administratif. Celui-ci permet au Département de justice et police de « prononcer l’internement dans une colonie de travail de toute personne âgée de plus de dix-huit ans qui se trouve dans l’un des cas suivants : a) s’adonne habituellement à la prostitution ou au racolage ; b) tire tout ou partie de ses moyens d’existence de l’inconduite d’autrui ; c) trouve dans le jeu […] une partie appréciable de ses moyens d’existence ; d) compromet par son inconduite ou sa fainéantise la sécurité ou la santé d’autrui. » (cité par Collaud et al., 2015, 8). Cette forme d’internement auquel les autorités vaudoises pouvaient recourir sans décision et sans contrôle judiciaires, vu son caractère administratif, ne sera aboli qu’en 1971 [6].
26 En conséquence, le nombre de détenus, en chiffres absolus, augmente de 393 à la fin 1938 à un pic de 461 à fin 1944, avant de redescendre à son niveau d’avant-guerre en 1950, avec 396 détenus. Le pic de détenus durant la guerre doit aussi attirer notre attention sur les facteurs politiques – et non seulement économiques – qui contribuent à forger la politique pénale. En l’occurrence, la forte augmentation du taux de détention durant la guerre, procédant d’un contrôle accru sur la population et en particulier sur les classes populaires, a été facilitée par le tournant autoritaire de la politique vaudoise (et suisse) durant le second conflit mondial. À ce titre, on peut certainement considérer que les facteurs économiques et politiques se sont combinés. La pénurie de main-d’œuvre en Suisse durant le conflit – provoquée par la mobilisation de nombreux salariés et paysans dans l’armée et par la fermeture des frontières, rendant beaucoup plus difficile le recours à une main-d’œuvre saisonnière immigrée – est sans doute un facteur non négligeable expliquant l’augmentation du taux de détention, qui répondait à la volonté de mettre au travail ceux qui « encombrent les pavés des villes et errent dans les campagnes ». À ce propos, Rusche et Kirchheimer ainsi que plusieurs auteurs dans leur sillage ont montré de manière convaincante que les périodes de pénurie de main-d’œuvre stimulent le recours, par les autorités, au travail carcéral (Garland, 1990, 93). Mais pour ne pas risquer de prêter le flanc à un reproche souvent formulé à l’égard de Rusche et Kirchheimer, soit la sous-estimation du contexte politique, il faut aussi souligner qu’une telle option, pour les autorités vaudoises, aurait sans doute été beaucoup plus difficile à mettre en œuvre sans les pleins pouvoirs, qui, en temps de guerre, restreignent fortement les droits démocratiques et du même coup ceux des justiciables.
27 Par contraste, la période dite des Trente Glorieuses conduit à une baisse significative du taux de détention, qui atteint son niveau le plus bas en 1973, avec 49 détenus pour 100000 habitants. Une telle évolution s’explique avant tout par la réduction des problèmes sociaux, liée à la croissance économique et au quasi plein emploi qui en résulte. De plus, l’État répond désormais de manière croissante à ces problèmes par une extension du système social plutôt que par la répression pénale, une évolution largement documentée s’agissant de la politique pénale des pays occidentaux dans l’après-guerre (voir par exemple Weiss, 2001, 263). Enfin, le besoin de mettre au travail ceux que les cercles dirigeants considèrent comme des marginaux, des débauchés ou des oisifs est sans doute réduit par rapport à la période de guerre, dans la mesure où les autorités et le patronat peuvent désormais recourir massivement à la main-d’œuvre saisonnière immigrée, dont les salaires sont significativement moins élevés que ceux des travailleurs suisses (Cerutti, 2008, 33-39).
28 Il faut attendre le milieu des années 1970 et surtout le tournant de l’année 1980, pour constater une nouvelle augmentation du taux de détention. Cette hausse est toutefois trop peu accentuée pour remettre en question la tendance séculaire à la baisse du taux constatée depuis la fin du XIXe siècle. Reste qu’il serait tentant d’expliquer cette augmentation en invoquant la fin de la période de croissance économique de l’après-guerre, le retour des crises et la paupérisation consécutive d’une partie de la population. En particulier, il serait tentant de mettre en parallèle l’augmentation du taux de chômage au début des années 1980 et surtout au début des années 1990 – la récession étant alors assez intense en Suisse et dans le canton de Vaud en comparaison européenne (Guex, 2012, 162-163) – avec l’augmentation du nombre de détenus. De fait, le nombre de demandeurs d’emploi dans le canton de Vaud passe d’environ 2000 à la fin des années 1980 à environ 8600 en 1992 (Ritzmann-Blickenstorfer, 1996, 430), quand le nombre de détenus augmente de 490 à fin 1987 à 640 à fin 1993, avant de redescendre par la suite (526 à fin 1995).
29 Le constat d’un retour de l’État pénal dans les pays dits développés à partir des années 1970, à la faveur des crises économiques et de l’essor du néolibéralisme, a du reste été dressé par de nombreux sociologues ou criminologues (voir par exemple Simon, Caplow, 1999, 64 ; Weiss, 2001, 263 ; Wacquant, 2004 ; Zimring, 2010, 1228). Les États-Unis offrent à cet égard l’exemple le plus spectaculaire, avec un taux de détention passant de 95 pour 100000 habitants en 1972 à 519 en 1992 (Kuhn, 2000, 19). La hausse du taux de détention dans le canton de Vaud est toutefois bien plus limitée, avec un pic de 104 détenus pour 100000 habitants en 1993, contre 49 en 1973. Dans les années 1990, ce taux est proche de celui de pays voisins (95 en Autriche en 1992), qui connaissent en général eux aussi une augmentation relative de cet indicateur à partir du milieu des années 1970, mais il est plus élevé que celui des pays du Nord de l’Europe (63 pour 100000 habitants en Suède en 1992 ; Kuhn, 2000, 19-20).
30 Toujours est-il qu’il convient de se montrer prudent avant de postuler un lien direct entre la fin des Trente Glorieuses et l’augmentation relative du taux de détention vaudois après 1973. Il faut rappeler que l’État social permet d’amortir le choc du chômage et que les conséquences des récessions sont dès lors beaucoup moins dramatiques que durant les années 1880, 1920 ou 1930. De plus, l’augmentation du taux de détention constatée à la fin des années 1980 s’explique au moins en partie par l’adhésion, en 1989, du canton de Vaud à un nouveau concordat sur l’exécution des peines dans les cantons romands et du Tessin (un premier accord intercantonal était déjà en vigueur depuis 1969 ; Agence télégraphique suisse, 6 février 1969, 5). À travers ce concordat, Vaud se voit attribuer l’enfermement d’un nombre relativement élevé de condamnés pour des durées supérieures à la moyenne nationale. Son taux de détention devient donc supérieur à celui d’autres cantons où l’on est chargé de s’occuper d’un moins grand nombre de personnes à caractéristiques spécifiques (détenus en hôpital cellulaire ou dans des secteurs pénitentiaires à haute sécurité ; Agence télégraphique suisse, 8 août 1988, 17).
31 Finalement, arrêtons-nous un instant sur la hausse du taux de détention constatée ces dernières années, qui a par ailleurs conduit à une situation de surpopulation carcérale aiguë dans le canton de Vaud (État de Vaud, 2014). Il faut tout d’abord noter que, dans le débat public récent, l’augmentation du nombre des détenus est d’autant plus susceptible de frapper les esprits qu’elle n’est souvent pas présentée sous l’angle du taux de détention – la croissance démographique permettant alors de relativiser l’augmentation – mais à travers des chiffres absolus d’effectifs de détenus, par exemple de 531 détenus au 31 décembre 2012 à 877 à la fin de l’année 2015, soit une augmentation de 65 % ; inutile de préciser que de telles augmentations en chiffres absolus, aujourd’hui comme hier, servent les discours visant à dramatiser le phénomène de la détention et son coût pour les finances publiques. De 2012 à 2015, le taux de détention augmente de manière moins spectaculaire, de 72 détenus pour 100000 habitants à 114, soit une augmentation de 58 %.
32 Sur le fond, on manque de recul pour déterminer si cette augmentation récente du taux de détention est un phénomène durable ou conjoncturel. On peut cependant remarquer qu’à l’échelle du pays, à partir de la révision du Code pénal de 2007, les peines privatives de liberté sont en fort recul dans l’ensemble des condamnations pénales, au profit des peines pécuniaires. Aussi l’augmentation en question est-elle peut-être, à nouveau, plus fortement reliée à un contexte de crise économique et politique ? La crise économique qui touche sévèrement l’Europe à partir de 2008 – combinée à l’effondrement de plusieurs dictatures en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, qui jouaient jusqu’alors un rôle de gendarme migratoire pour l’Europe – a en effet conduit à un renforcement de l’immigration vers la Suisse : une partie de l’augmentation du taux de détention s’expliquerait dès lors par l’enfermement d’immigrés, dont la présence contrevient notamment à la Loi sur les étrangers (Delgrande, 2014, 11). En outre, depuis 1995, des mesures de contraintes ont été introduites dans le droit des étrangers ; en 2005, celles-ci ont été renforcées et peuvent désormais être prononcées par les seules autorités administratives (Fink, 2017, 68). Cette évolution ne va pas sans rappeler – toutes proportions gardées – l’internement administratif, introduit dans le canton de Vaud (comme dans d’autres cantons suisses) au début du XXe siècle et renforcé, comme nous l’avons vu, dans le contexte de la Grande Crise des années 1930 et de la Deuxième Guerre mondiale (Dolivo, 2013, 97). Comme l’explique le criminologue Daniel Fink dans un état des lieux récent consacré à la prison en Suisse, celle-ci « est […] de plus en plus, devenue un instrument de régulation, par le moyen du droit pénal, des étrangers en situation irrégulière dans le pays » (Fink, 2017, 33). De ce point de vue, il est peut-être possible de parler aussi pour la Suisse – une fois de plus, toutes proportions gardées par rapport à une situation comme celle qui prévaut aujourd’hui aux États-Unis – du retour d’une réponse pénale aux problèmes sociaux ; cette réponse concernant toutefois principalement une catégorie très ciblée de la population, soit les immigrés extra-européens.
L’évolution des dépenses nettes des prisons
33 Les recettes des prisons permettent de réduire de manière considérable les charges de fonctionnement brutes. Si ce constat est un peu moins significatif s’agissant des soixante dernières années sur lesquelles porte notre recherche, pour des raisons que nous expliquerons par la suite, il est en revanche pleinement valable pour les années 1845 à 1960, comme l’illustre ici le Graphique 3. Celui-ci présente la différence entre les dépenses brutes et les dépenses nettes pour les deux principaux lieux de détention vaudois entre 1848 et 1958, le pénitencier de Béthusy (mis hors service en 1929) et la colonie puis les Établissements de détention et d’internement de la plaine de l’Orbe (en service depuis 1877).
Dépenses brutes et dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe 1848-1958 (en francs constants de 1958)

Dépenses brutes et dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe 1848-1958 (en francs constants de 1958)
34 Le Graphique 3 fait ressortir que, pour les années 1848-1958, les dépenses brutes sont de deux à deux fois et demie supérieures aux dépenses nettes. Durant le premier pic du taux de détention, qui coïncide, rappelons-le, avec la dite Grande dépression de 1873-1896, les autorités décident de renforcer le travail carcéral. Cette décision s’inscrit non seulement dans le projet, déjà évoqué, de moralisation des classes populaires, mais s’explique aussi par la volonté de réduire le coût de la détention pour les finances publiques (Anselmier, 1993, 38). Toutefois, ce renforcement du travail des prisonniers suscite des oppositions au sein du petit patronat vaudois, dont les représentants déplorent la concurrence déloyale induite par le travail carcéral, dans un contexte économique déjà difficile. Ces plaintes conduisent à limiter les velléités, de la part des autorités, d’étendre le travail des détenus en direction des chantiers publics, en sus des activités dans les pénitenciers et les colonies agricoles (Anselmier, 1993, 54-58).
35 Pour autant, ces crispations ne suffisent pas à empêcher le renforcement du travail en détention. Le Graphique 3 montre bien, en effet, que le pic du taux de détention (voir Graphique 1) et, corrélativement, la hausse des dépenses brutes, ne se traduisent pas, loin de là, par une augmentation aussi rapide des dépenses nettes. Tout au plus peut-on supposer que, sans opposition patronale, l’extension du travail des détenus vers les chantiers publics aurait permis une politique carcérale encore plus intéressante pour l’État du point de vue financier. Reste que le Graphique 3 illustre le fait que l’entreprise de moralisation des classes populaires lancée à travers la révision du Code pénal vaudois de 1875 a été menée à moindre frais pour l’État grâce à l’intensification du travail des détenus, un constat qui rejoint celui des auteurs s’inscrivant dans le sillage des travaux de Rusche et Kirchheimer évoqués en introduction (Adamson, 1984, 440 ; Garland, 1990, 95 ; Petit, 1990, 410).
36 S’agissant des données du Graphique 3 pour les quatre premières décennies du XXe siècle, celles-ci font avant tout apparaître que le travail carcéral n’est jamais aussi rentable que dans les périodes de pénurie de main-d’œuvre, un constat qui rejoint, là encore, les thèses de Rusche et Kirchheimer ainsi que celles de leurs successeurs (Garland, 1990, 93). C’est le cas des deux conflits mondiaux, compte tenu de la mobilisation des salariés et paysans dans l’armée et de la difficulté à recourir aux travailleurs immigrés. Entre 1939 et 1945, les recettes réalisées grâce au travail des détenus des Établissements de la plaine de l’Orbe sont même si élevées que la prison n’est pas loin de dégager des bénéfices. Il est vrai toutefois que la pénurie de main-d’œuvre n’est pas le seul facteur à expliquer l’augmentation de cette rentabilité du travail carcéral : le contexte de restriction à l’importation et de hausse considérable du prix des produits agricoles joue aussi un rôle.
37 Par contraste, les périodes de crise conduisent à une certaine érosion des recettes des prisons. Par exemple, s’agissant des années 1930, les recettes des Établissements pénitentiaires de la plaine de l’Orbe, la principale prison du canton, diminuent d’environ 16 %, en francs constants, de 1933 à 1935. Cette baisse s’explique par les difficultés à écouler la production des détenus sur un marché sinistré et par la résistance accrue des acteurs de l’artisanat et de l’industrie face à la concurrence induite par la production carcérale. L’érosion des recettes des établissements de détention est d’ailleurs un phénomène typique des périodes de crise. Dans les comptes de l’État de Vaud, on le constate aussi bien durant les années de la dite Grande Dépression (Anselmier, 1993, 52) qu’au début des années 1920, et il est documenté par d’autres chercheurs, par exemple dans le cas des prisons au XIXe siècle en France (Petit, 1990, 350) ou aux États-Unis (Adamson, 1984, 454).
38 Cependant, une telle diminution des recettes reste relative, dans la mesure où elle est contrebalancée par le renforcement de la réponse pénale aux problèmes sociaux, typique elle aussi du temps de crise. De plus, les deux crises économiques de la première moitié du XXe siècle conduisent à des plans d’économie affectant le personnel de l’État – y compris dans le secteur pénitentiaire – ce qui contribue à contenir les dépenses brutes des prisons, permettant de contrebalancer l’érosion des recettes (Anselmier, 1993, 357). Enfin, au chapitre des économies réalisées pour les finances publiques à travers l’incarcération en période de crise, n’oublions pas un aspect qui n’apparaît pas dans nos statistiques : la mise au travail en détention de chômeurs, mendiants ou vagabonds permet, comme s’en félicite le gouvernement vaudois en 1935, de « soulager de manière appréciable les communes qui auraient dû pourvoir à leur assistance » (cité par Anselmier, 1993, 309). Cette remarque incidente illustre bien la manière dont l’État pénal prend le pas sur un État social encore embryonnaire à l’époque.
Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention 1845-2015 (en millions de francs constants de 2000)

Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention 1845-2015 (en millions de francs constants de 2000)
39 Examinons à présent, de manière plus générale, l’évolution des dépenses nettes occasionnées par la totalité des établissements de détention et pour l’ensemble de la période qui nous intéresse, examen permis par le Graphique 4.
40 Il en ressort deux constats. Premièrement, l’évolution des dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention connaît deux grandes phases bien distinctes entre 1845 et 2015. De 1845 au début de la Seconde Guerre mondiale, le coût des prisons se situe à un niveau beaucoup plus faible que durant la seconde moitié du XXe siècle et il ne progresse que lentement : 1,1 % par an, en valeur réelle et en moyenne entre 1845-1949 et 1937-1939. Après 1945 en revanche, ce coût augmente à un rythme trois fois plus élevé : 3,2 % par an, en moyenne, entre 1946-1948 et 2013-2015. Second constat : depuis la fin de la guerre, les dépenses nettes du canton pour ses établissements de détention suivent une courbe à la hausse qui, certes, connaît des fléchissements et des reculs temporaires, mais dont la tendance générale vers le haut ne semble pas, ou guère, se ralentir. Inutile d’insister sur le fait que c’est sur ce type de statistiques que se fonde le discours répandu, dénonçant la charge élevée occasionnée par les prisons pour les collectivités publiques.
Dépenses annuelles nettes par détenu de l’État de Vaud pour ses établissements de détention 1845-2015 (en francs constants de 2000)

Dépenses annuelles nettes par détenu de l’État de Vaud pour ses établissements de détention 1845-2015 (en francs constants de 2000)
41 À première vue, les deux constats faits ci-dessus paraissent corroborés lorsqu’on examine l’évolution des dépenses annuelles nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention par détenu.
42 Ici aussi, on distingue immédiatement deux grandes phases. De 1845 au début de la Seconde Guerre mondiale, le coût par détenu se situe à un niveau beaucoup plus faible que celui atteint au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Si ce coût diminue même légèrement durant la première phase (de 0,1 % par an, en moyenne, entre 1845-1849 et 1937- 1939), il augmente considérablement après la guerre : 2,3 % par an, en moyenne, entre 1946-1948 et 2013-2015 (l’évolution du coût net par journée de détention est bien sûr similaire). Mais, à y regarder plus attentivement, il apparaît une grosse différence, en ce qui concerne la période post-1945, entre le Graphique 4 et le Graphique 5. Comme le montre ce dernier, le coût par détenu augmente très rapidement entre la fin de la guerre et le début des années 1970 : le taux de croissance annuel moyen atteint 7,8 % de 1946-1948 à 1971-1973. Mais depuis lors, il reste stable, ou tend même vers une légère diminution. Si l’on considère non pas le coût global des prisons, mais le coût par détenu, l’idée très répandue selon laquelle la détention coûte toujours plus cher ne correspond donc pas à la réalité.
43 Reste que les deux graphiques montrent que ce coût se situe, à partir des années 1970, à un niveau considérablement plus élevé que jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Comment expliquer une telle augmentation ?
44 Cette progression n’est pas due à l’augmentation du nombre de détenus et/ou à l’allongement de leurs peines. En effet, comme l’indique le Graphique 1, le taux global de détention, c’est-à-dire le nombre de jours de prison effectués par des détenus rapporté à la population vaudoise, ne connaît que de faibles variations depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Alors qu’il tourne autour de 115 détenus pour 100000 habitants entre 1946 et 1950, il est à peine moins élevé entre 2010 et 2015.
45 L’augmentation des coûts nets de la détention s’explique donc par une série d’autres facteurs. Le plus important réside dans la professionnalisation du personnel pénitentiaire, qui favorise une augmentation des salaires. Ceux-ci sont grosso modo multipliés par trois, en valeur réelle, de 1946 au début du XXIe siècle. S’y ajoute une amélioration de l’encadrement des détenus par l’augmentation du nombre d’agents pénitentiaires et par la création d’autres postes d’intervenants en prison, par exemple des psychologues ou des formateurs d’adultes. La reprise des prisons communales par le canton de Vaud durant les dernières décennies du XXe siècle a également pesé dans l’augmentation des dépenses nettes qu’il consacre à ses établissements de détention.
46 Enfin, un dernier facteur expliquant l’augmentation des coûts nets est que les recettes issues de la vente de biens produits par les détenus déclinent en termes relatifs. Certes, contrairement aux droits anglais, belge, danois, espagnol ou français – mais à l’instar des droits allemand ou italien – le droit pénal suisse maintient encore aujourd’hui une astreinte au travail dans l’exécution des peines privatives de liberté (Queloz, 2011, 443). La plus haute juridiction du pays a même confirmé, dans un arrêt récent, que cette astreinte était valable y compris après l’âge légal de la retraite, fixé à 65 ans (arrêt du Tribunal fédéral 6B_182/2013 du 18 juillet 2013). Pourtant, dans une économie helvétique spécialisée dans la production de biens et services à haute valeur ajoutée, la production artisanale ou agricole, qui reste dominante dans les prisons, permet des recettes moins élevées, en termes relatifs, que celles qui étaient dégagées durant le XIXe siècle ou la première moitié du XXe. Ces dernières années, des directeurs de prison ont aussi fait part de la difficulté rencontrée pour garantir des prix compétitifs aux objets produits par les détenus et mis en vente, dans le contexte d’une économie globalisée (Galli, 2010, 5).
47 Le travail en prison vise d’ailleurs moins qu’auparavant la productivité et la rentabilité, mais tient davantage compte du « bien-être » des détenus et des objectifs de réinsertion (Ullrich, 2010, 3). En 1966 déjà, de manière révélatrice d’une telle évolution, le gouvernement cantonal répond de la manière suivante à un député qui demande que la rentabilité du travail dans les Établissements pénitentiaires de la plaine de l’Orbe soit accrue : « le but essentiel tant des ateliers que du domaine n’est pas d’être une source de profits pour l’État, mais de permettre de donner du travail aux détenus, le travail étant un moyen de rééducation efficace » (cité par la Feuille d’avis de Lausanne, 28 avril 1966, 11).
48 Depuis 2007, le Code pénal suisse admet que l’astreinte au travail peut être remplacée, pour les détenus qui en font la demande, par une astreinte à la formation ou au perfectionnement professionnel. Enfin, l’indemnité accordée aux détenus pour le travail accompli en prison – même si elle reste très faible proportionnellement aux revenus du travail salarié à l’extérieur du monde carcéral – est néanmoins plus élevée que durant les décennies précédant 1945 : dans les années 1930, l’indemnité moyenne par jour de travail en prison (Anselmier, 1993, 331) équivaut à environ 2 à 3 % du salaire journalier d’un employé non-qualifié (nos calculs, d’après Ritzmann-Blickenstorfer, 1996, 452, tableau 6b), contre environ 10 à 15 % aujourd’hui (RTS, 2016). Cela dit, il serait trop simple d’envisager l’indemnisation des détenus comme un simple facteur de renchérissement du coût de la détention. C’est en effet aussi un moyen de réduire ce dernier, dans la mesure où les directions d’établissement utilisent une telle indemnisation pour stimuler la productivité du travail, par un savant mélange de sanctions (pour les détenus récalcitrants) et de gratifications financières (pour les prisonniers assidus à la tâche). Ainsi, avant même l’introduction d’une indemnité proprement dite sous le nom de pécule en 1875, les autorités vaudoises mettent sur pied, dès 1803, un système de punitions et récompenses sous forme de privation ou de supplément de nourriture, dans le but de discipliner les détenus au travail (Anselmier, 1983, 63). En 1950, le système est moins rudimentaire, mais l’esprit reste le même ; comme l’explique un journaliste dans un reportage consacré au système pénitentiaire vaudois : « Le pécule […] va de zéro à cinquante centimes par jour et il est fixé en tenant compte de la conduite et du travail du détenu qui sont appréciés mensuellement par des notes allant de un à cinq, attribuées par les chefs d’atelier et d’équipes » (Dentan, 1950, 5).
Coût de la détention dans l’après-guerre : une augmentation en trompe-l’œil
49 L’opinion selon laquelle le coût des prisons est en forte et constante augmentation depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale doit – nous l’avons déjà vu – être fortement relativisée si, comme mesure de ce coût, on ne prend pas uniquement le montant des dépenses nettes dans l’absolu, mais si l’on prend aussi en compte l’évolution des dépenses par détenu. L’image se modifie encore davantage si l’on passe à deux variables qui, du point de vue de la rigueur scientifique, sont beaucoup plus significatives que les montants dans l’absolu lorsqu’il s’agit d’analyser les dépenses de l’État. Il s’agit, premièrement, du rapport entre les dépenses nettes du canton de Vaud pour ses prisons et son PIB. À noter que cette variable ne peut être calculée qu’à partir de 1886, faute de données antérieures permettant d’établir le PIB vaudois.
50 Le Graphique 6 est frappant, car il montre que le coût net des prisons représente sur toute la période une part stable du PIB vaudois, malgré la forte croissance, en termes absolus, des dépenses pour la détention depuis 1945. Autrement dit, bon an mal an, les établissements de détention « absorbent », en moyenne pondérée, 0,58 % de la valeur ajoutée produite dans le canton, soit 5,80 francs sur 10000. Sous cet angle, le constat est clair : on ne peut en aucun cas parler d’une explosion du coût des prisons qui aurait débuté durant ces dernières décennies et se poursuivrait aujourd’hui.
Rapport entre les dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses prisons et son produit intérieur brut 1886-2015 (en %)

Rapport entre les dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses prisons et son produit intérieur brut 1886-2015 (en %)
Part des dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses prisons dans le total de ses dépenses 1845-2015 (en %)

51 La seconde variable est encore plus parlante. Il s’agit du rapport entre les dépenses nettes de l’État pour ses prisons et le total de ses dépenses.
52 Comme le montre le Graphique 7, la tendance lourde, sur plus d’un siècle et demi, est à la baisse. Alors que l’État de Vaud consacrait, en moyenne pondérée, 3,44 francs sur 100 à ses prisons entre 1845 et 1854, il n’en consacre plus que 27 centimes sur 100 francs entre 2006 et 2015. Plus précisément, on peut distinguer deux grandes périodes : de 1845 à 1913, l’État de Vaud consacre, en moyenne pondérée, 1,63 % de ses dépenses à ses prisons. À partir de la fin de la Première Guerre mondiale, les dépenses pour la détention ne dépassent plus les 1 % et suivent une lente pente descendante ; elles n’atteignent plus qu’environ 0,3 % durant ces dernières années. Cette baisse est particulièrement significative si l’on tient compte des facteurs de renchérissement du coût des prisons, tels que la forte croissance du salaire du personnel, dans les décennies suivant la Seconde Guerre mondiale. Quant à l’augmentation du taux de détention ces cinq dernières années, elle n’a guère eu d’impact sur le pourcentage des dépenses consacrées par l’État pour ses prisons ; d’une part, parce que le budget global de l’État a crû, lui aussi, de manière régulière durant les années 2010-2015, mais aussi, d’autre part, parce que l’entassement des détenus permet – de manière douteuse au regard de leurs droits – de limiter les frais de la détention (Restellini, 2013).
Conclusion : le coût de la détention, un épouvantail politique ?
53 L’évolution séculaire qui se dégage des Graphiques 1 (taux de détention) et 7 (part des dépenses carcérales nettes dans le budget de l’État) confirme le schéma général que nous connaissons pour les sociétés industrialisées (Spitzer, 1981, 326). Jusqu’au début du XXe siècle, l’État répond en large partie par l’incarcération aux problèmes sociaux, à plus forte raison durant les périodes de crises économiques et politiques. Le discours sur le relèvement moral par le travail, qui se développe à la fin du XIXe siècle et continue d’influencer les discours sur la prison jusque tard durant le XXe siècle, permet alors de justifier une exploitation parfois féroce de la main-d’œuvre carcérale, réduisant d’autant le coût du contrôle social par l’emprisonnement et rendant par là même cette politique attrayante pour les milieux dirigeants. À partir de la Seconde Guerre mondiale, les autorités réagissent toutefois dans une moindre mesure aux problèmes sociaux par l’emprisonnement mais davantage par les différents dispositifs de prévention et de sécurité sociale. Dès lors, loin de représenter une charge toujours plus écrasante pour le budget de l’État, le coût de la détention reste globalement stable au regard du produit intérieur brut (Graphique 7), malgré la professionnalisation du personnel carcéral, l’amélioration des conditions de détention ou encore la baisse relative de la valeur des marchandises produites en prison. Le coût de la détention est même nettement orienté à la baisse relativement au total des dépenses de l’État (Graphique 7), malgré l’augmentation relative du taux de détention à la fin des années 1980 ou après 2010.
54 La mise en perspective historique que nous avons proposée ici permet de questionner certains discours politiques contemporains, en Suisse et peut-être aussi dans d’autres pays économiquement développés, en particulier ceux qui cherchent à persuader les citoyens du coût financier élevé de la détention. Notre contribution permet de mettre en lumière leur peu de fondement, voire – au regard du cas vaudois – leur caractère trompeur. Pour conforter la validité de nos analyses à plus large échelle, des recherches sur l’évolution du coût de la détention en perspective historique devraient toutefois être menées dans d’autres pays. De telles contributions pourraient enrichir la discussion ouverte il y a plus d’un demi-siècle par Rusche et Kirchheimer, prolongée par les auteurs qu’ils ont inspirés, concernant le rôle économique et social du travail en détention. Il serait intéressant, en particulier, de mener des comparaisons sur le long terme entre les coûts de la détention en régime public et ceux en régime (semi)-privé, afin de mieux évaluer l’impact des facteurs financiers sur la politique carcérale des États. ■
Annexe
données
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1845 | 192658 | 1,74 | 0,061 | 58000 | 122 | 8,06 | ||||
1846 | 194022 | 0,055 | 60000 | 125 | 9,21 | |||||
1847 | 195396 | 1,64 | 0,069 | 55000 | 141 | 9,57 | ||||
1848 | 196779 | 1,58 | 0,067 | 55000 | 156 | 6,64 | 42061 | 34578 | ||
1849 | 198172 | 1,59 | 0,068 | 68000 | 138 | 6,49 | 44505 | 34689 | ||
1850 | 199575 | 1,63 | 0,055 | 66000 | 147 | 7,31 | 39317 | 29076 | ||
1851 | 200978 | 2,25 | 0,077 | 65000 | 149 | 7,53 | 61115 | 42749 | ||
1852 | 202391 | 2,32 | 0,081 | 72000 | 172 | 8,49 | 62933 | 46318 | ||
1853 | 203813 | 2,36 | 0,062 | 81662 | 227 | 9,93 | 70632 | 54285 | ||
1854 | 205246 | 2,48 | 0,070 | 89245 | 252 | 12,05 | 78799 | 60997 | ||
1855 | 206689 | 2,47 | 0,070 | 96946 | 276 | 11,00 | 78900 | 53108 | ||
1856 | 208142 | 2,50 | 0,063 | 85139 | 220 | 10,66 | 69141 | 50160 | ||
1857 | 209605 | 2,72 | 0,060 | 79405 | 197 | 10,87 | 69163 | 45905 | ||
1858 | 211078 | 2,65 | 0,043 | 77063 | 217 | 8,31 | 62225 | 37231 |











Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1859 | 212562 | 3,03 | 0,038 | 75856 | 198 | 9,34 | 61584 | 28888 | ||
1860 | 214056 | 2,75 | 0,042 | 68893 | 181 | 11,34 | 62792 | 31923 | ||
1861 | 215561 | 2,90 | 0,041 | 71408 | 189 | 11,22 | 64083 | 30137 | ||
1862 | 217076 | 3,17 | 0,041 | 81789 | 218 | 10,36 | 65373 | 30362 | ||
1863 | 218602 | 3,38 | 0,055 | 85580 | 225 | 10,99 | 70551 | 34332 | ||
1864 | 220139 | 3,31 | 0,059 | 87353 | 207 | 11,77 | 75128 | 42726 | ||
1865 | 221686 | 3,40 | 0,060 | 85272 | 255 | 11,02 | 72444 | 41825 | ||
1866 | 223244 | 3,43 | 0,054 | 82797 | 224 | 11,45 | 76467 | 38527 | ||
1867 | 224814 | 3,49 | 0,069 | 89602 | 252 | 12,39 | 93880 | 45013 | ||
1868 | 226394 | 3,73 | 0,088 | 100781 | 302 | 11,30 | 110510 | 65782 | ||
1869 | 227985 | 3,66 | 0,080 | 97918 | 265 | 10,27 | 86447 | 37178 | ||
1870 | 229588 | 3,71 | 0,054 | 100000 | 264 | 10,91 | 90914 | 37373 | ||
1871 | 230158 | 3,89 | 0,073 | 93322 | 271 | 11,98 | 114352 | 53562 | ||
1872 | 230729 | 4,13 | 0,056 | 91000 | 236 | 14,44 | 97928 | 37771 | ||
1873 | 231301 | 4,81 | 0,076 | 96000 | 262 | 15,35 | 103556 | 37096 | ||
1874 | 231875 | 5,26 | 0,079 | 111000 | 316 | 12,83 | 5454 | 125252 | 42003 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1875 | 232451 | 4,79 | 0,064 | 117000 | 370 | 12,08 | 9290 | 105603 | 30594 | |
1876 | 233027 | 4,75 | 0,067 | 128000 | 423 | 13,08 | 16664 | 106876 | 30918 | |
1877 | 233606 | 4,96 | 0,081 | 161000 | 544 | 12,, 84 | 36962 | 123034 | 41925 | |
1878 | 234185 | 4,97 | 0,117 | 186000 | 525 | 11,80 | 56014 | 137907 | 46195 | |
1879 | 234766 | 5,08 | 0,105 | 185000 | 531 | 11,20 | 52998 | 133243 | 48232 | |
1880 | 235349 | 4,51 | 0,114 | 186000 | 583 | 11,21 | 53559 | 134469 | 53091 | |
1881 | 236552 | 4,84 | 0,091 | 204000 | 591 | 10,63 | 58422 | 154078 | 45342 | |
1882 | 237760 | 4,98 | 0,112 | 208003 | 516 | 10,65 | 60231 | 170717 | 59571 | |
1883 | 238975 | 5,03 | 0,111 | 188240 | 469 | 10,19 | 56332 | 151966 | 66992 | |
1884 | 240196 | 4,86 | 0,096 | 188541 | 485 | 9,16 | 57446 | 149815 | 47558 | |
1885 | 241424 | 4,85 | 0,094 | 201909 | 516 | 8,21 | 58414 | 141115 | 38371 | |
1886 | 242657 | 176 | 6,10 | 0,101 | 184680 | 410 | 7,87 | 51959 | 133418 | 48829 |
1887 | 243897 | 177 | 6,46 | 0,091 | 173343 | 410 | 8,04 | 43430 | 151109 | 50079 |
1888 | 245143 | 180 | 6,72 | 0,094 | 165950 | 368 | 7,91 | 43444 | 147122 | 50522 |
1889 | 246396 | 182 | 6,50 | 0,109 | 148903 | 345 | 8,52 | 35618 | 146662 | 52045 |
1890 | 247655 | 184 | 6,99 | 0,112 | 154034 | 356 | 8,89 | 32359 | 145296 | 63890 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) |
Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1891 | 250837 | 188 | 7,15 | 0,108 | 156658 | 414 | 9,13 | 36969 | 168217 | 61996 |
1892 | 254060 | 192 | 7,32 | 0,102 | 162194 | 387 | 9,01 | 35296 | 214164 | 67044 |
1893 | 257324 | 196 | 7,76 | 0,136 | 167341 | 431 | 8,84 | 37472 | 235394 | 88070 |
1894 | 260630 | 202 | 7,98 | 0,156 | 171425 | 393 | 8,74 | 34946 | 275813 | 123905 |
1895 | 263979 | 206 | 7,96 | 0,171 | 165056 | 419 | 8,66 | 32064 | 288885 | 126854 |
1896 | 267371 | 210 | 8,61 | 0,143 | 173407 | 376 | 8,63 | 31919 | 285996 | 97589 |
1897 | 270806 | 213 | 9,21 | 0,161 | 163600 | 379 | 8,76 | 24500 | 285511 | 113049 |
1898 | 274285 | 217 | 9,77 | 0,163 | 162823 | 340 | 8,90 | 24729 | 297062 | 109536 |
1899 | 277810 | 222 | 10,25 | 0,170 | 161716 | 323 | 8,78 | 22512 | 298448 | 122637 |
1900 | 281379 | 228 | 10,51 | 0,162 | 150639 | 312 | 8,65 | 21475 | 285609 | 117328 |
1901 | 284794 | 233 | 10,57 | 0,161 | 144674 | 258 | 8,65 | 21295 | 266617 | 109961 |
1902 | 288251 | 239 | 10,77 | 0,194 | 142426 | 272 | 8,72 | 19781 | 298569 | 140289 |
1903 | 291749 | 247 | 11,08 | 0,186 | 146636 | 279 | 8,80 | 24388 | 306214 | 130410 |
1904 | 295290 | 255 | 11,67 | 0,190 | 144542 | 251 | 8,80 | 25830 | 303375 | 131357 |
1905 | 298874 | 270 | 11,95 | 0,186 | 146589 | 276 | 8,89 | 25932 | 303717 | 137541 |
1906 | 302502 | 284 | 12,39 | 0,166 | 147948 | 321 | 9,07 | 27060 | 311856 | 131934 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1907 | 306173 | 300 | 13,56 | 0,173 | 150421 | 304 | 9,51 | 27094 | 325845 | 134821 |
1908 | 309889 | 319 | 14,56 | 0,160 | 161469 | 355 | 9,70 | 32160 | 341290 | 126736 |
1909 | 313650 | 337 | 14,82 | 0,155 | 176031 | 362 | 9,71 | 37100 | 356988 | 119527 |
1910 | 317457 | 358 | 15,28 | 0,162 | 176729 | 367 | 9,95 | 36996 | 370349 | 121830 |
1911 | 317461 | 371 | 15,99 | 0,170 | 181482 | 361 | 10,32 | 42842 | 376279 | 137731 |
1912 | 317465 | 379 | 16,61 | 0,164 | 189462 | 388 | 10,62 | 41845 | 389449 | 129097 |
1913 | 317469 | 391 | 17,28 | 0,179 | 199277 | 396 | 10,44 | 41380 | 386046 | 132582 |
1914 | 317473 | 412 | 17,81 | 0,201 | 192872 | 405 | 10,41 | 49611 | 384364 | 128853 |
1915 | 317477 | 449 | 18,46 | 0,143 | 208259 | 396 | 11,77 | 49496 | 386513 | 103671 |
1916 | 317482 | 510 | 18,92 | 0,114 | 212729 | 381 | 13,64 | 50186 | 403572 | 85736 |
1917 | 317486 | 582 | 20,92 | 0,198 | 211617 | 313 | 16,98 | 48296 | 541462 | 140333 |
1918 | 317490 | 672 | 44,13 | 0,250 | 197543 | 339 | 21,25 | 36807 | 550956 | 169688 |
1919 | 317494 | 790 | 54,42 | 0,236 | 191763 | 342 | 23,12 | 31617 | 622679 | 131915 |
1920 | 317498 | 938 | 43,99 | 0,348 | 175179 | 375 | 23,33 | 33410 | 702953 | 171031 |
1921 | 318905 | 928 | 40,49 | 0,389 | 168503 | 363 | 20,86 | 43443 | 672237 | 229472 |
1922 | 320318 | 872 | 39,62 | 0,367 | 172023 | 342 | 17,07 | 40872 | 594206 | 227332 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) |
Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1923 | 321738 | 796 | 37,39 | 0,210 | 150895 | 297 | 17,06 | 35829 | 568299 | 142845 |
1924 | 323164 | 651 | 35,44 | 0,289 | 146532 | 280 | 17,58 | 35807 | 592108 | 220098 |
1925 | 324596 | 689 | 31,52 | 0,278 | 153293 | 324 | 17,52 | 43283 | 578803 | 216036 |
1926 | 326035 | 702 | 36,01 | 0,305 | 153235 | 342 | 16,89 | 42451 | 610884 | 231927 |
1927 | 327480 | 718 | 36,52 | 0,241 | 153870 | 302 | 16,69 | 43503 | 576325 | 195026 |
1928 | 328931 | 773 | 37,13 | 0,223 | 143571 | 288 | 16,77 | 34980 | 589538 | 180604 |
1929 | 330389 | 801 | 40,46 | 0,244 | 140633 | 320 | 16,79 | 32780 | 596140 | 202650 |
1930 | 331853 | 793 | 45,80 | 0,339 | 151283 | 341 | 16,50 | 622809 | 298710 | |
1931 | 332886 | 733 | 47,40 | 0,356 | 164222 | 377 | 15,64 | 643024 | 309861 | |
1932 | 333923 | 655 | 48,40 | 0,367 | 166711 | 403 | 14,42 | 656983 | 313393 | |
1933 | 334963 | 656 | 48,80 | 0,316 | 187565 | 467 | 13,68 | 656186 | 271618 | |
1934 | 336006 | 647 | 51,90 | 0,295 | 196403 | 470 | 13,49 | 613760 | 251669 | |
1935 | 337052 | 632 | 50,70 | 0,421 | 207496 | 439 | 13,35 | 623890 | 307975 | |
1936 | 338101 | 632 | 47,80 | 0,398 | 195781 | 435 | 13,58 | 610131 | 274855 | |
1937 | 339154 | 667 | 47,90 | 0,333 | 186262 | 428 | 14,24 | 610300 | 228816 | |
1938 | 340210 | 710 | 52,10 | 0,343 | 183717 | 393 | 14,27 | 632739 | 251226 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1939 | 341269 | 719 | 53,40 | 0,272 | 179676 | 396 | 14,37 | 679848 | 173106 | |
1940 | 342332 | 763 | 62,60 | 0,200 | 188375 | 407 | 15,71 | 722688 | 74974 | |
1941 | 343398 | 844 | 61,00 | 0,223 | 187063 | 450 | 18,11 | 820576 | 54170 | |
1942 | 347038 | 909 | 67,10 | 0,284 | 191027 | 429 | 20,14 | 803089 | 29763 | |
1943 | 350717 | 973 | 75,00 | 0,198 | 195163 | 460 | 21,16 | 807602 | 66559 | |
1944 | 354435 | 1012 | 81,40 | 0,145 | 202578 | 461 | 21,61 | 814577 | 22716 | |
1945 | 358192 | 1089 | 87,60 | 0,262 | 206976 | 448 | 21,76 | 842604 | 91844 | |
1946 | 361990 | 1213 | 86,30 | 0,522 | 198880 | 457 | 21,64 | 1067500 | 301986 | |
1947 | 365827 | 1358 | 96,60 | 0,673 | 200680 | 430 | 22,61 | 1220020 | 329747 | |
1948 | 369705 | 1383 | 111,80 | 0,902 | 192353 | 414 | 23,29 | 1314145 | 518976 | |
1949 | 373624 | 1340 | 119,80 | 1,055 | 188103 | 421 | 23,09 | 1559573 | 654110 | |
1950 | 377585 | 1454 | 119,60 | 0,929 | 188501 | 396 | 22,71 | 1499101 | 554195 | |
1951 | 382482 | 1548 | 128,80 | 0,993 | 174798 | 372 | 23,80 | 1614576 | 631007 | |
1952 | 387442 | 1623 | 142,70 | 1,022 | 175185 | 382 | 24,41 | 1532814 | 606812 | |
1953 | 392467 | 1698 | 150,00 | 1,026 | 164017 | 359 | 24,27 | 1545673 | 555166 | |
1954 | 397557 | 1808 | 159,00 | 1,098 | 162338 | 367 | 24,40 | 1630825 | 647219 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1955 | 402712 | 1937 | 163,70 | 1,121 | 173385 | 381 | 24,65 | 1696596 | 614276 | |
1956 | 407935 | 2064 | 178,30 | 1,482 | 168282 | 342 | 25,04 | 1857387 | 888346 | |
1957 | 413226 | 2197 | 217,40 | 1,233 | 147281 | 280 | 25,53 | 1722139 | 708371 | |
1958 | 418585 | 2271 | 216,00 | 1,162 | 154310 | 290 | 25,99 | 1864214 | 646276 | |
1959 | 424013 | 2396 | 235,90 | 1,089 | 165158 | 263 | 25,83 | |||
1960 | 429512 | 2630 | 248,30 | 1,227 | 163156 | 308 | 26,20 | |||
1961 | 437111 | 2922 | 345,20 | 1,555 | 171279 | 318 | 26,68 | |||
1962 | 444845 | 3364 | 509,60 | 2,701 | 183341 | 355 | 27,83 | |||
1963 | 452716 | 3623 | 572,80 | 2,224 | 180682 | 325 | 28,79 | |||
1964 | 460726 | 3998 | 562,10 | 2,707 | 178382 | 302 | 29,68 | |||
1965 | 468878 | 4328 | 562,40 | 3,585 | 193237 | 347 | 30,69 | |||
1966 | 477173 | 4632 | 597,30 | 3,172 | 191286 | 344 | 32,15 | |||
1967 | 485616 | 5010 | 602,70 | 4,352 | 187885 | 323 | 33,45 | |||
1968 | 494208 | 5403 | 667,70 | 4,318 | 187302 | 349 | 34,25 | |||
1969 | 502952 | 5862 | 730,80 | 4,577 | 189255 | 316 | 35,11 | |||
1970 | 511851 | 6438 | 790,00 | 4,140 | 183264 | 307 | 36,38 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1971 | 513516 | 7538 | 911,00 | 4,772 | 175604 | 261 | 38,76 | |||
1972 | 515186 | 8528 | 1086,00 | 5,553 | 187011 | 318 | 41,35 | |||
1973 | 516862 | 9533 | 1257,00 | 5,884 | 186089 | 252 | 44,96 | |||
1974 | 518544 | 10514 | 1389,00 | 6,928 | 158394 | 343 | 49,34 | |||
1975 | 520230 | 10086 | 1577,00 | 5,778 | 162449 | 382 | 52,68 | |||
1976 | 521923 | 10728 | 1716,00 | 6,525 | 162305 | 330 | 53,57 | |||
1977 | 523620 | 11026 | 1675,00 | 7,148 | 153750 | 327 | 54,27 | |||
1978 | 525324 | 11156 | 1671,00 | 6,611 | 148817 | 315 | 54,83 | |||
1979 | 527033 | 11773 | 1757,00 | 6,393 | 148092 | 352 | 56,82 | |||
1980 | 528747 | 12734 | 1910,00 | 7,152 | 154969 | 346 | 59,11 | |||
1981 | 535636 | 13914 | 2122,00 | 8,732 | 159604 | 342 | 62,95 | |||
1982 | 542614 | 14963 | 2351,00 | 9,674 | 167968 | 355 | 66,51 | |||
1983 | 549683 | 15719 | 2485,00 | 10,208 | 166734 | 391 | 68,46 | |||
1984 | 556845 | 16758 | 2525,00 | 10,626 | 187720 | 448 | 70,46 | |||
1985 | 564100 | 17707 | 2683,00 | 12,580 | 203684 | 492 | 72,89 | |||
1986 | 571449 | 18800 | 2861,30 | 13,064 | 210589 | 511 | 73,43 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
1987 | 578894 | 19617 | 3000,30 | 11,523 | 202851 | 490 | 74,49 | |||
1988 | 586436 | 21168 | 3238,30 | 11,258 | 209248 | 508 | 75,89 | |||
1989 | 594076 | 22918 | 3590,40 | 11,825 | 201094 | 485 | 78,29 | |||
1990 | 601816 | 23549 | 3960,00 | 13,894 | 206556 | 500 | 82,51 | |||
1991 | 605592 | 24881 | 4307,70 | 15,299 | 216750 | 528 | 87,35 | |||
1992 | 609391 | 25155 | 4398,00 | 19,352 | 240110 | 592 | 90,88 | |||
1993 | 613214 | 26265 | 4887,00 | 18,061 | 257732 | 640 | 93,87 | |||
1994 | 617062 | 26522 | 4992,70 | 18,259 | 254337 | 631 | 94,67 | |||
1995 | 620933 | 27316 | 5033,50 | 20,913 | 215808 | 526 | 96,37 | |||
1996 | 624829 | 27641 | 5108,40 | 18,883 | 212887 | 524 | 97,16 | |||
1997 | 628749 | 29208 | 5367,50 | 20,135 | 208388 | 513 | 97,66 | |||
1998 | 632693 | 29680 | 5424,10 | 20,467 | 222725 | 548 | 97,68 | |||
1999 | 636663 | 30314 | 5672,40 | 16,802 | 235405 | 580 | 98,46 | |||
2000 | 640657 | 31591 | 5741,00 | 18,249 | 231787 | 571 | 100,00 | |||
2001 | 644676 | 32682 | 6039,20 | 20,144 | 224252 | 552 | 100,99 | |||
2002 | 648721 | 33120 | 6699,54 | 21,065 | 210348 | 518 | 101,64 |
Année | Population vaudoise | Produit intérieur brut vaudois (mios. de francs courants) | Dépenses totales de l’État de Vaud (mios. de francs courants) | Dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention (mios. de francs courants) | Nombre total de journées de détention par année | Nombre de détenus dans les établissements de l’État de Vaud au 31 déc. de chaque année | Indice des prix (2000 = 100) | Nombre de journées de détention dans les colonies agricoles (Payerne, Orbe, Chailly), 1874-1929 | Total des dépenses brutes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) | Total des dépenses nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements de la plaine de l’Orbe (mios. de francs courants) |
1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | |
2003 | 652791 | 34299 | 6591,65 | 25,320 | 211072 | 520 | 102,35 | |||
2004 | 656886 | 35357 | 6762,25 | 23,489 | 252079 | 621 | 103,10 | |||
2005 | 665277 | 36693 | 6925,27 | 22,624 | 248508 | 612 | 104,31 | |||
2006 | 672828 | 38904 | 7040,97 | 19,115 | 274102 | 675 | 105,42 | |||
2007 | 680125 | 41514 | 7157,37 | 19,056 | 261873 | 645 | 106,19 | |||
2008 | 694402 | 43861 | 6891,15 | 19,888 | 262244 | 646 | 108,77 | |||
2009 | 707521 | 44061 | 7410,40 | 20,315 | 283241 | 697 | 108,25 | |||
2010 | 717759 | 45830 | 7843,13 | 20,070 | 285522 | 703 | 108,99 | |||
2011 | 731822 | 47271 | 8239,45 | 20,649 | 255566 | 629 | 109,25 | |||
2012 | 740848 | 48280 | 9208,66 | 22,069 | 293865 | 531 | 108,49 | |||
2013 | 754824 | 49139 | 9510,77 | 24,690 | 318814 | 709 | 108,25 | |||
2014 | 766301 | 50089 | 9766,66 | 27,534 | 336679 | 791 | 108,23 | |||
2015 | 767497 | 51537 | 10039,41 | 29,779 | 359034 | 877 | 107,00 |
données
Sources des données et commentaires
Colonne 1, population vaudoise
55 1845-2000 : Recensement fédéral, en ligne sur : http://www.fsw.uzh.ch/hstat/nls_rev/ls_files.php?chapter_var=./b, consulté le 20 octobre 2016; 2000-2015 : Statistique Vaud, « Population résidante permanente », en ligne sur: http://www.stat.vd.ch/Default.aspx?DocId=7837, consulté le 20 octobre 2016.
56 La population vaudoise a été estimée grâce aux indications décennales des recensements fédéraux de 1850 à 2000. Pour les années intermédiaires, une interpolation linéaire a été calculée, de même que pour les années 1845-1849. Dès 2000, Statistique Vaud donne l’évolution annuelle.
Colonne 2, produit intérieur brut du canton de Vaud
57 1886-1987 : Lorusso, (1989, 22) ; 1988-1996 : Secrétariat d’État à l’économie, La vie économique. Revue de politique économique, années correspondantes, tableau 18.1 ; 1997-2015 : Statistique Vaud, « Produit intérieur brut vaudois nominal », en ligne sur : http://www.stat.vd.ch/Default.aspx?DocID=5793&DomId=2515, consulté le 20 octobre 2016.
58 Pour 1886-1996, nous avons ajouté 5 % aux montants donnés par Lorusso et par le Secrétariat d’État à l’économie. Ces 5 % correspondent à la différence moyenne entre le revenu cantonal et le PIB cantonal de 1997 à 2002.
Colonne 3, dépenses totales de l’État de Vaud
59 1845-1929 : Compte ordinaire tiré du Compte rendu du Conseil d’État pour chaque année correspondante ; 1930-1985 : Ritzmann, 1996, 972-973 ; 1986-2001 : Administration fédérale des finances, 2001 ; 2002- 2013 : Adm. féd. des finances, 2014 ; 2014-2015 : Comptes de l’État de Vaud.
Colonne 4, dépenses nettes de l’État de Vaud pour ses établissements de détention
60 1845-2015 : Compte ordinaire tiré du Compte rendu du Conseil d’État pour chaque année correspondante et comptes de l’État de Vaud.
61 Les dépenses nettes ont été calculées en soustrayant des charges des établissements de détention les recettes que ceux-ci dégagent, qui figurent dans les comptes pour chaque année correspondante. Pour les années 1845-1878, afin de prendre en considération les coûts occasionnés à l’État de Vaud par les prisons de district (qui ne figurent pas dans les comptes ou les comptes rendus), nous avons calculé la part moyenne des coûts des prisons de district dans le total des coûts entre 1878 et 1890. Cette part moyenne est de 5,3 %. Nous avons donc augmenté les dépenses nettes, telles que données par le Compte de l’État, de 5,3 %, pour obtenir une estimation des dépenses nettes entre 1845 et 1878.
62 Années 1845-1852 : on ne dispose pas des données, fournies à partir de 1853, par le Compte de l’État mais seulement des chiffres du Compte rendu du Conseil d’État. En moyenne, sur les années 1853-1872 (soit 20 ans), les montants donnés par le Compte d’État sont supérieurs de 1,2 % aux montants fournis par le compte rendu. Pour estimer les coûts nets pour les années 1845-1852, nous avons donc augmenté les montants donnés par le compte rendu de 1,2 %.
63 Années 1846-1847 : on ne dispose d’aucun chiffre dans les comptes rendus correspondants. Nous avons donc estimé ces montants en calculant le coût moyen d’un jour de prison pour les années 1845 et 1848 et avons ensuite calculé les montants pour 1846 et 1847, en multipliant les jours de prisons par ce coût moyen.
64 Années 1845-1850 : les montants sont donnés en francs vaudois et non en francs suisses. Un franc vaudois vaut 1,45 franc suisse. Nous avons donc multiplié les montants entre 1845 et 1850 par 1,45.
65 Années 1946-1956 : le Compte des prisons de l’État ne comprend pas les coûts occasionnés par la détention des mineurs (établissement de Moudon). Nous avons donc calculé la part moyenne que représentent ces coûts pour les 20 années précédant la dernière année pour laquelle on dispose de données, soit pour les années 1925 à 1945. Cette part moyenne s’élève à 6,2 %. Nous avons donc ajouté cette part aux montants figurant pour les années 1946-1956, afin de comprendre aussi le coût de détention des mineurs dans cet établissement pour le calcul des dépenses nettes.
66 Années 1957-2015 : le Compte des prisons de l’État ne comprend pas les coûts des établissements pour mineurs de Croisettes et Vennes. Nous avons donc calculé la part moyenne que représentent ces coûts pour les 20 années précédant la dernière année pour laquelle on dispose de données, soit pour les années 1936 à 1956. Cette part moyenne s’élève à 16,7 %. Nous avons donc ajouté cette part aux montants figurant pour les années 1957-2015, afin de comprendre aussi le coût de détention des mineurs dans ces deux établissements.
67 Années 2005-2015 : les comptes détaillés des prisons ne sont plus donnés dans le Compte de l’État et nous n’avons pas réussi à les obtenir malgré nos demandes réitérées au Service pénitentiaire ; les comptes de ce dernier sont désormais présentés en bloc. Nous avons donc calculé la moyenne pondérée du rapport entre le total des charges du Service pénitentiaire et les dépenses nettes pour les années 2000 à 2004. Les dépenses nettes représentent, en moyenne pondérée, 20,5 % de l’ensemble des charges du Service pénitentiaire pour ces 5 années 2000- 2004. Nous estimons donc le coût net des prisons, pour 2005-2015, à 20,5 % des charges annuelles du Service pénitentiaire.
Colonne 5, nombre de journées de détention par année
68 1845-2000 : Comptes rendus du Conseil d’État ; 2001-2015 : Statistique Vaud, « Journées de détention dans les prisons vaudoises », en ligne sur: http://www.scris.vd.ch/Default.aspx?DocID=1357&DomId=2781, consulté le 20 octobre 2016.
69 Pour 1845-1846, certaines données manquantes ont été estimées sur la base des années suivantes. Pour 1845-1852, manquent les données pour les prisons de district ; nous avons pris la moyenne des 10 années comprises entre 1853 et 1862, qui s’élève à 13000 environ et avons ajouté ces 13000 au chiffre de chaque année comprise entre 1845 et 1852, en arrondissant ces derniers.
70 Pour 1870, manquent les données pour les prisons de district ; nous avons pris la moyenne entre le nombre de l’année précédente et celui de l’année suivante, ce qui donne environ 6000, ajouté au chiffre de 1870. 1872-1881 : manquent les données pour les prisons de district ; nous avons calculé le nombre moyen des jours de prison dans les prisons de district pour les 10 années antérieures à 1872 pour lesquelles on dispose de données. Ce nombre moyen est d’environ 8000 jours. Nous avons ensuite calculé la même moyenne pour les 10 années postérieures à 1881, ce qui donne une moyenne de 44000 jours. Nous avons considéré que le nombre de jours de prison effectués dans les prisons de districts entre 1872 et 1881 progressait au rythme moyen de l’écart entre la première et la seconde moyenne, soit (44000-8000) = 36000 : 10 = une progression moyenne d’environ 3500 jours par année. Nous avons alors pris le chiffre pour les prisons de district pour l’année 1871 (= environ 6000) et nous lui avons ajouté chaque année 3500 jours, ce qui donne 9500 jours au total pour 1872, 13000 pour 1873, et ainsi de suite ; nous avons finalement ajouté les nombres ainsi obtenus pour les années 1872-1881 aux chiffres du total de jours de prison recensés, et arrondi les chiffres au millier supérieur ou inférieur. 1924-1956 : manquent les données pour les prisons de district.
71 Nous n’avons pas procédé de la même manière que pour les années 1872-1881, car la moyenne 1913-1923 aurait été trop élevée en raison de la guerre. Nous avons donc pris la moyenne des 3 dernières années (1921-1923), qui s’élève à environ 36000, et celle des 3 premières années suivantes (1957-1959), qui s’élève à environ 32000 jours. Nous avons donc considéré que le nombre de jours de prison effectués dans les prisons de districts entre 1924 et 1956 demeurait stable et se situait entre les deux moyennes ainsi obtenues, soit à environ 34000 jours. Nous avons donc ajouté ces 34000 au nombre total de jours de prison effectués entre 1923 et 1956. 1922-2002 : les chiffres pour l’internement des jeunes filles manquent. Nous avons pris le nombre qui correspond à la moyenne des 2 dernières années pour lesquelles on dispose de chiffres, soit 1920 et 1921. Ce nombre s’élève en gros à 8000, ajouté au total dès 1922.
72 1949-2002 : manquent les données pour la Ferme des Croisettes ; nous avons pris la moyenne des 11 années précédant la Seconde Guerre mondiale (durant les guerres, les chiffres augmentent considérablement), soit de 1928 à 1938, ce qui donne une moyenne d’environ 16000 jours de prison. Nous avons ajouté ces 16000 au total général. 1959 et 1960 : les données pour les Établissements de la plaine de l’Orbe manquent. Nous avons pris la moyenne de l’année précédant et de l’année suivant ces deux années, moyenne qui s’élève à environ 101000 jours, ajoutés au total. Dès 1979, nos chiffres correspondent à ceux donnés par Statistique Vaud, à ceci près que les nôtres sont plus élevés de 24000, soit le volume des jours de prison effectués par les mineurs, que Statistique Vaud ne prend pas en compte. À noter enfin qu’il y a une corrélation très élevée entre les journées de détention et le nombre de détenus (colonne 6), raison pour laquelle il est possible d’utiliser l’une ou l’autre de ces variables afin de calculer le taux global de détention sans provoquer de biais majeur. Le taux global de détention calculé comme le ratio entre le nombre total de jours de détention effectués durant une année et le total de la population nous semble cependant plus significatif que le taux calculé comme le ratio entre le nombre de détenus au 31 décembre de chaque année et le total de la population.
Colonne 6, nombre de détenus
73 1845-1982 : Comptes rendus du Conseil d’État ; 1983-1994 : Compte rendu du Conseil d’État pour l’année 1994, tableau de la p. 39 ; 1995 : Rapport annuel du Conseil d’État pour cette année ; 2012-2015 : Rapport annuel de gestion du Conseil d’État, en ligne sur : http://www.vd.ch/rapport-annuel-de-gestion/rapport-annuel-de-gestion-2015/, consulté le 20 octobre 2016.
74 De 1996 à 2011, les chiffres des détenus ne sont pas donnés dans le Rapport annuel du Conseil d’État : nous avons donc estimé le nombre de détenus sur la base du rapport moyen pondéré pour les années 1991 à 1995 entre le nombre de détenus et le nombre de journées de détention.
Colonne 7, indice des prix
75 1848-1915 : Ritzmann-Blickenstorfer, 1996, tableau H17 ; 1915-2015 : Office fédéral de la statistique (2016), tableau cc-f-05.02.17.
Colonne 8, nombre de journées de détention dans les colonies agricoles
76 1874-1929 : Comptes rendus du Conseil d’État.
77 Pour connaître le nombre de journées de détention dans les pénitenciers et prisons pour les années 1874-1929, on peut soustraire les chiffres de la colonne 5 par ceux de la colonne 8 pour chaque année correspondante.
Colonnes 9 et 10
78 Total des dépenses brutes et nettes pour le pénitencier de Béthusy et les Établissements pénitentiaires de la plaine de l’Orbe
1848-1958 : Comptes rendus du Conseil d’État.
79 Les dépenses et recettes des Établissements de la plaine de l’Orbe ne sont comptabilisées qu’à partir de la mise en service de cette institution en 1877. Celles du pénitencier de Béthusy ne sont plus comptabilisées après 1929, date de la fermeture de cet établissement.
Notes
-
[1]
À ce propos, les auteurs remercient chaleureusement le Dr Olivier Longchamp pour l’aide précieuse qu’il a apportée dans la récolte des quelque 20000 données de base qui ont permis l’élaboration des graphiques présentés dans cet article.
-
[2]
Un premier aperçu sommaire des résultats de cette recherche est déjà paru (Guex, 2015, 324).
-
[3]
« A reduction by one-half in the incarceration rate for non-violent offenders (who now make up over 60 percent of the prison and jail population) would lower the overall incarceration rate to the level reached in 1993 (which was already high by historical standards). This would also lower correctional expenditures by $16.9 billion per year, with the large majority of these savings accruing to state and local governments. These projected savings would amount to almost one-fourth of total corrections budgets. The extensive research on incarceration and crime suggests that these budgetary savings could be achieved without any appreciable deterioration in public safety. »
-
[4]
Un tableau qui contient les données agrégées ayant permis la réalisation des graphiques, la référence des sources primaires dans lesquelles ces données ont été récoltées ainsi qu’un certain nombre de commentaires concernant la construction des statistiques se trouve dans l’annexe à la fin de cet article. Concernant le taux de détention, ce tableau donne aussi l’évolution du nombre total de journées de détention par année, une évolution corrélée à celle du nombre de détenus au 31 décembre.
-
[5]
Voir le tableau en annexe du présent article.
-
[6]
En 2016, le parlement du Canton, à la suite des autorités fédérales, a présenté ses excuses aux victimes de l’internement administratif, dont le caractère arbitraire et contraire aux droits fondamentaux est aujourd’hui reconnu (communiqué du Grand Conseil du 21 juin 2016 : http://www.bicweb.vd.ch/frame.aspx?pPage=/communique.aspx?pObjectID=575319, consulté le 20 octobre 2016).