Article
Dans les territoires rebelles du Chiapas, depuis le soulèvement du 1er janvier 1994, les zapatistes expérimentent des formes d’autogouvernement populaire. Dans une complète sécession vis-à-vis des institutions de l’État mexicain et avec le souci de se dissocier autant que possible des logiques de marchandisation qui, partout, dévastent les mondes du vivant, ils ont mis en place, malgré un contexte hostile et dans des conditions précaires, leurs propres instances de gouvernement et de justice ; ils inventent aussi des formes originales d’organisation du travail productif et organisent leur propre système d’éducation et de santé. Ils déploient ainsi ce qu’ils nomment leur autonomie, c’est-à-dire la liberté de créer des formes de vie autodéterminées et éprouvées comme leurs, à la fois ancrées dans la tradition communautaire des peuples indigènes et soucieuses de se transformer dans un sens émancipateur. Ce qui émerge ainsi, non sans difficultés ni limites, dans les territoires zapatistes du Chiapas peut être considéré comme l’une des utopies réelles les plus remarquables qu’il soit donné d’observer aujourd’hui à l’échelle planétaire.
Dans un tel contexte, la pratique de la justice paraît réintégrée dans le tissu d’une vie communale auto-organisée ; elle vise la médiation plutôt que la punition carcérale et rompt avec une logique de spécialisation et d’hyperinstitutionnalisation.
L’autonomie dans les territoires zapatistes articule trois échelles d’organisation : les villages (ou communautés), les communes autonomes (elles regroupent chacune des dizaines de villages et sont actuellement au nombre de 31) et les régions, appelées ici « zones », avec leurs « conseils de bon gouvernement » qui coordonnent l’action de plusieurs communes autonomes (5 conseils ont été créés en 2003, puis 7 autres en août 2019)…
Plan
Auteur
- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/03/2023
- https://doi.org/10.3917/delib.018.0077

Veuillez patienter...