CAIRN.INFO : Matières à réflexion

En Polynésie française, le fa’a’amura’a ou plus simplement « fa’a’amu » qui signifie « nourrir, élever » en langue tahitienne, est une pratique de confiage d’enfants qui est souvent présentée, y compris par le personnel de justice, comme la grande particularité culturelle de cette collectivité d’outre-mer. Si elle est celle qui intrigue le plus les magistrats, elle a tôt fait de les déconcerter et même, parfois, de susciter leur réprobation. Elle a fait l’objet de plusieurs procédures d’appel et de pourvois en cassation depuis 2020.
Historiquement, le fa’a’amura’a consiste à confier un enfant à des membres de la famille proche – grands-parents, oncles ou tantes, frères ou sœurs – ou à des parents plus éloignés qui en deviennent les parents nourriciers. La pratique n’implique pas de rupture du lien avec les parents biologiques et peut d’ailleurs n’être que temporaire. Les parents biologiques comme les parents accueillants peuvent initier le confiage d’un enfant. La circulation des enfants permet notamment de renforcer les liens au sein de la famille élargie dans une logique d’alliance ou de solidarité, en répondant à l’infécondité.
Les raisons du confiage d’enfants se sont diversifiées avec les changements sociaux et économiques occasionnés notamment par la colonisation française puis la modernisation rapide de la société polynésienne avec l’implantation du Centre d’expérimentation du Pacifique dans les années 1960. Ainsi, le fa’a’amura’a est multiforme et répond aujourd’hui à des besoins circonstanciels relatifs, par exemple, à une situation économique difficile dans un contexte de fortes inégalités socio-économiques, à la mobilité professionnelle induite par la géographie polynésienn…

Natacha Gagné
Natacha Gagné est professeure au Département d’anthropologie de l’Université Laval, située dans la ville de Québec. Depuis quelques années, elle s’intéresse tout particulièrement aux processus de décolonisation ainsi qu’au rapport à l’État français des Mā’ohi (autochtones) de Polynésie française à partir de l’ethnographie d’une institution clé, la justice. Sur cette thématique, elle a notamment codirigé avec Stéphanie Guyon et Benoît Trépied un numéro de la revue Ethnologie française qui s’intitule « Justices ultramarines » (2018, vol. 48, n° 1).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
Il vous reste à lire 91 % de cet article.
Acheter le numéro 12,00€ 96 pages, papier et/ou électronique add_shopping_cart Ajouter au panier
Acheter cet article 3,00€ 7 pages, format électronique
(html et pdf)
add_shopping_cart Ajouter au panier
Autres options
S'abonner à cette revue link Via la page revue
Membre d'une institution ? business Authentifiez-vous
Mis en ligne sur Cairn.info le 16/03/2023
https://doi.org/10.3917/delib.018.0055
Pour citer cet article
Distribution électronique Cairn.info pour La Découverte © La Découverte. Tous droits réservés pour tous pays. Il est interdit, sauf accord préalable et écrit de l’éditeur, de reproduire (notamment par photocopie) partiellement ou totalement le présent article, de le stocker dans une banque de données ou de le communiquer au public sous quelque forme et de quelque manière que ce soit.
keyboard_arrow_up
Chargement
Chargement en cours.
Veuillez patienter...