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Délibérée : Une réflexion est-elle menée, dans le cadre du travail social, sous le prisme de la « preuve » dans l’identification et le recueil des éléments ?
Sophie Bouchereau : La culture de la preuve n’est pas celle de l’éducateur. Ce qui prime, c’est la rencontre avec les familles, qui se déploie dans le temps ; la preuve serait davantage une photographie d’éléments à un moment donné. Évidemment, les travailleurs sociaux n’en sont pas totalement éloignés, notamment quand il s’agit de constituer un recueil d’observations, avec des éléments objectifs, sur le développement de l’enfant par exemple. Ce qui est compliqué, ce n’est pas de recueillir des éléments de preuve d’un retard de développement, mais de voir si cette réalité a un lien avec le comportement parental. L’éducateur doit mettre en perspective ce qu’il constate avec le reste de ses observations. Une évaluation n’est pas une compilation d’éléments qui vont faire preuve, c’est un récit de la rencontre avec un système familial.
Certains chercheurs ont créé des outils très rigoureux de recueil de faits. Ce n’est pas inintéressant pour l’objectivation mais ça peut poser un vrai problème éthique car les éléments sont désolidarisés les uns des autres, comme une simplification du problème. Cela ne permet pas la mise en perspective nécessaire pour percevoir la complexité d’une situation familiale. Une éducatrice de milieu ouvert a joué le jeu en utilisant à la lettre les techniques d’objectivation pour réaliser son rapport éducatif…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 16/03/2023
- https://doi.org/10.3917/delib.018.0026

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