CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1. Introduction

1Le télétravail (ou travail à distance) est couramment perçu comme une pratique permettant d’équilibrer vie privée et professionnelle (Tremblay, 2002 ; MacInnes, 2005 ; Taskin, 2006 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b). Il peut aussi constituer une solution permettant de réduire le coût immobilier pour l’employeur (Thomsin, 2002) et les trajets domicile-travail (Dumas et Ruiller, 2014). Cette forme de travail s’appuie sur les Technologies de l’Information de la Communication (TIC). À titre d’exemple, le cloud et les mails vont respectivement donner un accès aux services (documents, logiciels, etc.) et permettre la communication à distance (Taskin et Tremblay, 2010). De fait, ces technologies peuvent contribuer à brouiller la frontière domicile-travail (Metzger et Cléach, 2004).

2Certaines études poussent à reconsidérer l’impact positif du télétravail (Christensen, 1987 ; Boden Jr, 1999 ; Cooper et Kurland, 2002 ; Baines et Gelder, 2003 ; Harris, 2003 ; Tremblay et al., 2006 ; Maruyama et al., 2009 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b). En effet, ces outils numériques peuvent générer des effets négatifs (stress, coût d’apprentissage, etc.) si leur utilisation n’est pas accompagnée d’une réorganisation du travail (management, infrastructures, etc.). De plus, certains chercheurs insistent sur les effets néfastes liés à cette autonomie organisationnelle pouvant concourir à l’isolement social (risques psychosociaux, limitation de l’intégration à l’entreprise, etc.) (Cooper et Kurland, 2002 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b). Selon l’Institut National de Recherche et de Sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS), en dehors de ces risques psychosociaux, le télétravail peut aussi présenter des risques physiques (troubles visuels, musculo-squelettiques, etc.) et ainsi dégrader la santé du télétravailleur et donc sa performance (Lachmann et al., 2010). Entre autres, de mauvaises conditions de travail (siège, éclairage, bruit, etc.) peuvent pousser à dégrader le bien-être du télétravailleur et donc sa performance.

3Cette organisation du travail tend toutefois à se développer comme l’indique la hausse significative du nombre de télétravailleurs contractuels [1] entre 2017 et 2018 en France (50 %). En 2019, environ 30 % des salariés du secteur privé télétravaillent [2]. Cette hausse peut en partie s’expliquer par la dernière réforme du code du travail en France (2017) [3] ayant pour but d’assouplir les règles relatives au télétravail. Par exemple, le salarié victime d’un accident à son domicile est désormais considéré comme un accidenté du travail.

4Notre terrain d’étude est le Luxembourg où le cadre juridique du télétravail se révèle moins souple. En effet, le contrat de travail doit obligatoirement contenir un certain nombre d’éléments concernant le télétravail (lieu, horaires, contact, etc.) [4]. À contrario, en France, la modification du contrat de travail n’est pas nécessaire, un accord oral, par e-mail, ou par courrier entre le télétravailleur et l’employeur suffit. Précision importante, le marché du travail au Luxembourg est composé de 47,90 % de travailleurs frontaliers [5] pour moitié Français (plus de 100 000) [6]. Pour cette raison, le Luxembourg a adopté le 20 mars 2018 une nouvelle convention fiscale franco-luxembourgeoise décrétant une tolérance de 29 jours de télétravail par an.

5L’objet de cet article est d’étudier l’impact de cette forme de travail innovante en s’inscrivant dans la continuité des travaux de Taskin et Bridoux (2010) qui s’intéressent en partie au transfert de connaissances dans un environnement de télétravail.

6Nous testons empiriquement si la démarche de télétravail dans une entreprise stimule la probabilité d’innover de cette entreprise. En effet, le caractère innovant socialement de cette forme de travail (Scaillerez et Tremblay, 2016b) tend à démontrer un certain goût pour l’innovation de manière générale. Notre questionnaire met en avant une innovation technologique (produit ; procédé) supérieure à la moyenne quand les entreprises proposent le télétravail à domicile [7]. Toutefois, selon nous, ce constat va au-delà du simple goût pour l’innovation. Le télétravail s’appuie sur les TIC qui peuvent contribuer à stimuler l’innovation. Les TIC peuvent en effet stimuler la coopération (Chesbrough et al., 2006), la créativité (Medzo-M’engone et al., 2019), la communication et l’échange de connaissance (Des Horts et Isaac, 2006 ; Greenan et Walkowiak, 2002). Néanmoins, le télétravail peut aussi conduire à isoler le travailleur (Cooper et Kurland, 2002 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b), pouvant ainsi avoir une influence négative sur l’innovation. En effet, le travail en équipe est régulièrement mis en avant pour son influence positive sur la propension à innover (Montes et al., 2005).

7Pour répondre à cette question, une base de données issue d’une enquête menée auprès d’entreprises Luxembourgeoises [8] est mobilisée. Ces entreprises ont été interrogées sur leurs usages des technologies numériques et innovantes. Cette enquête distingue deux types d’innovations, celles associées aux produits et aux procédés à travers respectivement deux questions : 1) votre entreprise a-t-elle introduit des biens ou services nouveaux (ou améliorés) ? 2) votre entreprise a-t-elle mis en œuvre une technologie de production ou une méthode de distribution, qui était nouvelle (ou modifiée de manière significative) ? La procédure que nous avons adoptée se décompose en deux étapes. Premièrement, nous analysons l’impact d’une démarche de télétravail de façon occasionnelle sur l’innovation (produit ; procédé). Deuxièmement, nous identifions les déterminants du télétravail et de l’innovation (produit ; procédé) afin d’identifier les déterminants qui sont communs à ces deux pratiques et ceux qui ne le sont pas. Les principaux résultats mettent en avant une relation complexe concernant l’impact d’une démarche de télétravail sur l’innovation. En effet, certains déterminants du télétravail freinent l’innovation. Ces effets contraires incitent les entreprises à trouver un compromis si elles souhaitent favoriser les synergies entre une démarche de télétravail et l’innovation.

8La section suivante présente une revue de littérature concernant le télétravail et l’innovation. L’hypothèse de recherche est formulée à partir de cette littérature. La troisième section décrit les données d’enquêtes exploitées. La quatrième section présente le modèle économétrique. Ce modèle de type probit trivarié récursif consiste à estimer conjointement l’innovation de produit, de procédé et le télétravail pour mesurer l’effet du télétravail sur l’innovation (produit ; procédé). Dans la cinquième section, les résultats des régressions sont commentés. Enfin, la sixième section conclut.

2. Revue de littérature et hypothèse de recherche

2.1. Le télétravail

9Le télétravail se caractérise par la relation salariale, la contrainte spatiale, la dissociation avec la coopération (communication) à distance, l’échelle géographique et la fréquence (Aguilera et al., 2016). Trois critères permettent de distinguer la dimension spatiale :

10

  1. le travail à domicile
  2. le travail dans le bureau des clients
  3. le travail dans les bureaux d’affaires ou satellites (Tremblay et al., 2006). À titre d’exemple, les espaces de coworking [9] peuvent être utilisés par les télétravailleurs (Scaillerez et Tremblay, 2016a, 2017). De plus en plus d’entreprises proposent d’ailleurs ce type d’alternative au domicile via les espaces de coworking [10].

11Cet article ne considère que le travail à domicile proposé aux salariés de façon occasionnelle. En d’autres termes, aucune distinction n’est faite quant au nombre de télétravailleurs, ni concernant la fréquence à laquelle les salariés télétravaillent.

2.2. Les implications du télétravail

12Le recours au télétravail est très présent au sein des professions intellectuelles et/ou à forte autonomie (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006). Ce dernier est plus présent dans certains secteurs (Tremblay, 2001) notamment celui des Technologies de l’Information et de la Communication (TIC). Ce résultat peut s’expliquer par la nature même du télétravail consistant à s’appuyer sur les outils numériques.

13La flexibilité aux changements constitue une condition essentielle à la mise en place d’une démarche de télétravail. En effet, cette démarche nécessite une flexibilité au niveau de l’organisation du travail et du management (Taskin, 2006). Elle nécessite des réaménagements technologiques, institutionnels et organisationnels (Illegems et al., 2001).

14La littérature met régulièrement en avant la capacité du télétravail à équilibrer le rapport travail-famille en raison de la flexibilité spatio-temporelle qu’il induit (Tremblay, 2002 ; MacInnes, 2005 ; Taskin, 2006 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b). Dans la pratique, la conciliation vie privée et professionnelle peut aussi être rendue possible en octroyant des congés (de maternité, de paternité, parental, d’aidant). Les formules souples de travail comme la flexibilité du temps de travail ou de l’emploi du temps et le changement de lieu de travail facilitent également cette conciliation (Commission européenne, 2017) [11].

15Notons que le télétravail n’est pas sans conséquence pour le salarié. En particulier, il peut conduire à isoler ce dernier (Cooper et Kurland, 2002 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b). Dès lors, cet isolement qui induit potentiellement une perte de contrôle du manager sur le télétravailleur constitue un frein à la mise en place du télétravail (Tremblay, 2001 ; Felstead et al., 2003). Cet isolement peut aussi éventuellement avoir un impact négatif sur la performance de la firme. En effet, certaines caractéristiques des salariés (genre, personnalité, etc.) et le caractère intrusif du télétravail dans la vie privée obligent à reconsidérer ces résultats (Christensen, 1987 ; Boden Jr, 1999 ; Baines et Gelder, 2003 ; Harris, 2003 ; Tremblay et al., 2006 ; Maruyama et al., 2009). Ainsi, le télétravail peut rendre plus complexe la distinction entre le temps de travail et de non-travail et conduire à l’isolement socioprofessionnel (Cooper et Kurland, 2002 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b).

2.3. La relation entre le télétravail et l’innovation

16Le télétravail est une forme de travail à distance (Metzger et Cléach, 2004) et représente une innovation sociale (Scaillerez et Tremblay, 2016b). Il peut s’inscrire dans le cadre d’une démarche RSE [12]. Le développement du télétravail peut aussi conduire à innover au niveau organisationnel. En effet, sa mise en place nécessite de repenser le mode de fonctionnement et d’encadrement du travail (Taskin, 2006). Le management doit être reconsidéré pour s’adapter aux nouvelles contraintes spatiales. Ce remaniement a pour but de permettre aux salariés d’obtenir une plus grande autonomie organisationnelle (Scaillerez et Tremblay, 2016b).

17L’influence du télétravail sur le besoin et la capacité de faire face aux réaménagements technologiques, institutionnels et organisationnels (Illegems et al., 2001) semble augmenter la probabilité d’innover au niveau technologique [13]. Ce résultat peut s’expliquer par l’influence de la flexibilité aux changements organisationnels des entreprises qui mettent en place le télétravail car cette flexibilité est un déterminants de l’innovation (Mothe et Nguyen, 2012 ; Le Bas et al., 2015).

18Autre aspect important dans cette relation, le télétravail peut permettre d’accroître le bien-être des salariés (Tremblay, 2002 ; MacInnes, 2005 ; Taskin, 2006 ; Scaillerez et Tremblay, 2016b) et, de fait, leur performance. En effet, les caractéristiques du lieu de travail influencent le bien-être, la santé, le moral et la productivité du travailleur (Ajala, 2012).

19Néanmoins et paradoxalement, l’isolement associé au télétravail (despatialisation [14]) peut selon Taskin et Bridoux (2010) ébranler le processus créatif et de transfert de connaissances (pratiques, capital intellectuel, etc.) entre les télétravailleurs et les autres. Le télétravail est plus présent dans les professions intellectuelles (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006) et créatives (graphiste, designer, chercheur, etc.). Ce sont ces salariés qui sont les plus à l’origine d’innovation dans l’entreprise (Hage, 1980 ; Kimberly et Evanisko, 1981 ; Dewar et Dutton, 1986 ; Bocquet et al., 2013, 2017). Autrement dit, le télétravail des salariés qualifiés peut réduire la capacité d’innovation collective et le transfert d’idée (Alvesson, 2004).

20Ces résultats peuvent paraître contradictoires en raison de la relation qu’entretient le télétravail avec les TIC. Les TIC tendent à multiplier les interconnexions et les collaborations au sein de l’entreprise favorisant ainsi la créativité (Medzo-M’engone et al., 2019). Ces technologies permettent entre autres d’accroître la coopération et la coordination entre les salariés et les services (Comtet, 2006) via l’enrichissement de la palette méthodologique du travailleur (Greenan et Walkowiak, 2002). Ainsi, l’introduction des TIC permet de fluidifier les circuits décisionnels tout en rapprochant les acteurs dans l’entreprise pour faciliter la communication et l’échange de connaissances (Greenan et Walkowiak, 2002 ; Des Horts et Isaac, 2006 ; Medzo-M’engone et al., 2019). Par nature, le télétravail est dans l’obligation de s’appuyer sur ces technologies. De fait, ces dernières devraient donc plutôt stimuler l’innovation, limitant ainsi l’impact potentiellement négatif lié à l’éloignement.

21Enfin, de nombreuses études montrent que les entreprises les plus engagées dans le domaine de la RSE sont aussi celles qui innovent le plus (Bocquet et al., 2011 ; Berger-Douce, 2011 ; Le Bas et al., 2011 ; Bocquet et al., 2013 ; Bocquet et Mothe, 2013). Le télétravail lui-même pouvant résulter d’une démarche responsable, on peut présumer une relation positive entre le télétravail et l’innovation.

22Tous ces éléments témoignent d’une relation complexe entre la démarche du télétravail et la probabilité d’innover. Selon nous, le management des salariés (contrôle, confiance, flexibilité, supervision, etc.) peut aussi jouer un rôle essentiel dans cette relation. En effet, Taskin et Bridoux (2010) expliquent que le transfert de connaissances dans un environnement de télétravail peut être favorisé par la communication (projets, modalités) et la gestion des ressources humaines (management, etc.).

23Le caractère innovant au niveau organisationnel, social et technologique associé à une démarche visant à proposer le télétravail tend plutôt à valider l’existence d’une relation positive entre une démarche de télétravail et la probabilité à innover. Schumpeter (1911) appréhende entre autres l’innovation sous deux formes, de produit (biens ou services) et de procédé (technologie de production ou une méthode de distribution). Les déterminants de ces deux types d’innovations peuvent différer d’une innovation à l’autre (produit ; procédé), justifiant ainsi de distinguer les effets du télétravail sur l’innovation de produit et de procédé (Avermaete et al., 2004).

24Les différents résultats présentés dans cette revue de littérature tendent à valider l’existence d’un effet positif d’une démarche télétravail sur la probabilité d’innover.

25H1 : Une démarche de télétravail a un effet positif sur la probabilité d’innover au niveau des produits (a) et des procédés (b).

3. Les données

3.1. Présentation de l’enquête

26Le test empirique de l’hypothèse H1 s’appuie sur les données d’une enquête réalisée par le Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER). L’enquête couvre les entreprises Luxembourgeoises de plus de 15 salariés dans la quasi-totalité des secteurs d’activités économiques. Les secteurs d’activités sont l’industrie, la construction, le commerce, les transports, les TIC, la finance et les autres secteurs. Au sein de cette population, a été construit un échantillon aléatoire stratifié (par taille d’entreprise et par secteur économique) de 2819 entreprises. Le questionnaire, rédigé en français et en allemand, également disponible en anglais, a été envoyé à ces entreprises au cours de la deuxième semaine de janvier 2013. Après un rappel en février, la collecte de données s’est arrêtée en juillet. 1 468 ont répondu favorablement à l’enquête, soit environ 52 % de l’ensemble des entreprises ce qui constitue un taux de réponse très satisfaisant pour une enquête non obligatoire. Une procédure de pondération basée sur l’inverse du taux de réponse par strate a été adoptée pour obtenir des résultats représentatifs de la population. L’enquête a permis de recueillir des informations détaillées sur les caractéristiques générales des entreprises (taille, activité, appartenance à un groupe, qualification de la main-d’œuvre, structure organisationnelle) et des informations sur leurs pratiques de RSE [15], leurs activités d’innovation [16], leur utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) [17]et l’environnement concurrentiel.

3.2. Panorama du télétravail et de l’innovation au Luxembourg

27Les tableaux A.0, A.1 et A.2 en annexe présentent respectivement une partie du questionnaire, les variables utilisées dans les modèles économétriques et les statistiques descriptives. Le tableau 1 décrit quant à lui la répartition de l’échantillon.

Tableau 1. Répartition par taille et par secteur de l’échantillon

VariablesEffectifPourcentage
Petites entreprises (15 – 49 salariés)1 00768,60 %
Moyennes entreprises (50 – 249 salariés)39026,60 %
Grandes entreprises (250 salariés et plus)714,80 %
Industrie18012,30 %
Construction32021,80 %
Commerce35624,20 %
Transport15110,30 %
TIC976,60 %
Finance18812,80 %
Autres17612,00 %
Ensemble1 468100,00 %

Tableau 1. Répartition par taille et par secteur de l’échantillon

Note : taille des entreprises selon la classification de l’Union Européenne selon la directive 2013/34/UE.

28L’échantillon se compose de 68,60 % de petites entreprises, 26,60 % font partie de la catégorie des moyennes entreprises et 4,80 % sont des grandes entreprises. Le secteur du commerce représente 24,20 % de l’échantillon. La construction constitue 21,80 % de notre échantillon, l’industrie 12,30 %. Les secteurs de la finance, des transports et des TIC représentent respectivement 12,80 %, 10,30 % et 6,60 %. Les autres secteurs d’activités (scientifiques et techniques, les activités immobilières et services administratifs et de soutien et autres activités de services personnels) regroupent 12 % des entreprises de notre échantillon.

29Le tableau 2 présente les proportions d'entreprises qui déclarent, proposer aux salariés de travailler depuis leur domicile durant les heures normales de travail, avoir introduit des biens ou services nouveaux ou améliorés (innovation produit), avoir mis en œuvre une technologie de production ou une méthode de distribution nouvelle (innovation procédé), en fonction de la taille et du secteur d’activités.

Tableau 2. Démarche de télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

VariablesDémarche
de télétravail
Innovation
produit
Innovation
procédé
Petites entreprises18,90 %27,30 %15,80 %
Moyennes entreprises29,70 %38,70 %23,80 %
Grandes entreprises25,30 %69,00 %39,40 %
Industrie21,10 %40,00 %31,60 %
Construction11,60 %20,30 %11,90 %
Commerce12,30 %29,20 %19,10 %
Transport23,80 %22,50 %17,90 %
TIC58,70 %46,40 %23,70 %
Finance27,10 %46,30 %20,70 %
Autres35,20 %38,60 %16,50 %
Ensemble22,10 %32,30 %19,10 %

Tableau 2. Démarche de télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

30Ce tableau met en avant l’importance du secteur des TIC en ce qui concerne le télétravail. Ce secteur arrive en tête avec une moyenne d’environ 58,70 % des entreprises proposant cette forme de travail à distance. Ce constat concorde avec le rapport 2016 de l’OBERGO [18]. Concernant la propension à innover, il est possible de constater qu’elle croît en fonction de l’effectif. Précisons que l’innovation de procédé est moins fréquente (19,10 %) que l’innovation de produit (32,30 %). Enfin, deux secteurs innovent plus que les autres en ce qui concerne les produits : le secteur des TIC (46,40 %) et celui de la finance (46,30 %). Pour ce qui est de l’innovation de procédé, le secteur de l’industrie ressort avec une moyenne de 31,60 %. Le secteur de la construction quant à lui s’avère être le moins innovant dans ce domaine (11,90 %).

31Le tableau 3 présente la proportion d’entreprises déclarant avoir innové parmi celles qui déclarent proposer à leurs salariés de télétravailler.

Tableau 3. Télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

VariablesInnovation produitInnovation procédé
Démarche de télétravail41,80 %26,10 %
Ensemble32,30 %19,10 %

Tableau 3. Télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

32Les entreprises qui proposent le télétravail innovent plus que la moyenne de l’échantillon complet. En effet, en moyenne, les innovations de produit et les innovations de procédé concernent respectivement entre 32,30 % et 19,10 % des entreprises. Toutefois, si l’on s’intéresse à la proportion d’entreprises ayant innové en matière de produit et de procédé lorsqu’elle propose du télétravail, alors ces chiffres passent à 41,80 % et 26,10 %.

33Les outils numériques et le niveau d’éducation sont deux caractéristiques communes à l’innovation et au télétravail. En premier lieu, le tableau 4 présente la proportion d’entreprises disposant d’un accès numérique à distance parmi celles qui proposent le télétravail ou quand elles déclarent avoir innové en matière de produit ou de procédé.

Tableau 4. Usage des TIC, télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

VariablesMails à distanceDocuments à distanceLogiciels à distanceService de cloudNombre d’accès à d’outils distance
Démarche
de télétravail
88,60 %68,80 %54,10 %26,50 %2,4/4
Innovation produit75,30 %54,70 %43,10 %21,10 %2,0/4
Innovation procédé77,90 %53,70 %44,50 %30,20 %2,0/4
Ensemble62,70 %39,60 %31,80 %17,50 %1,5/4

Tableau 4. Usage des TIC, télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

34Les entreprises disposant d’une démarche de télétravail proposent globalement plus d’outils permettant l’accès à distance avec en moyenne 2,4 outils contre 1,5 en moyenne sur l’ensemble de l’échantillon. Néanmoins, les entreprises ne disposent pas obligatoirement d’un accès à distance lorsqu’elles mettent en œuvre une démarche de télétravail. Ce résultat est d’autant plus vrai pour le cloud avec seulement 26,50 % d’entre elles disposant de ce service. À ce stade nous ne pouvons pas savoir si le déploiement d’outils numériques est une cause ou une conséquence de la mise en place d’une démarche de télétravail. Néanmoins, selon le centre d’étude et d’analyse stratégique, l’usage professionnel de l’Internet favorise la mobilité car est adapté au télétravail [19]. Enfin, concernant les entreprises innovantes, les proportions sont sensiblement les mêmes d’une innovation à l’autre. Ces chiffres restent supérieurs à la moyenne tout en étant inférieurs aux valeurs concernant les entreprises proposant du télétravail. Plus précisément, en moyenne, 62,70 % des entreprises proposent un accès à distance (mails) contre 88,60 % de celles disposant d’une démarche de télétravail.

35La figure 1 présente le rapport entre l’accès à distance aux données de l’entreprise et la proportion de hauts diplômés (Bac+4 au doctorat) dans les entreprises Luxembourgeoises.

Figure 1. Pourcentage d’entreprises Luxembourgeoises disposant d’un accès à distance (mails, documents, logiciels, cloud) en fonction de la proportion de hauts diplômés dans l’entreprise.

Figure 0

Figure 1. Pourcentage d’entreprises Luxembourgeoises disposant d’un accès à distance (mails, documents, logiciels, cloud) en fonction de la proportion de hauts diplômés dans l’entreprise.

36Ce graphique illustre le recours plus fréquent aux outils numériques lorsque la proportion de salariés diplômés (BAC+4 à doctorat) augmente.

37Le tableau 5 montre que ces constatations sur le télétravail et l’innovation de produit et de procédé sont plus fréquentes dans les entreprises ayant une main d’œuvre hautement diplômée.

Tableau 5. Proportion de diplômés, télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

VariablesDémarche
de télétravail
Innovation
produit
Innovation
procédé
0 à 5 % de diplômés12,40 %25,10 %15,10 %
6 à 24 % de diplômés26,40 %42,40 %27,20 %
25 à 49 % de diplômés29,70 %40,50 %26,00 %
50 à 74 % de diplômés50,00 %45,90 %21,60 %
75 à 100 % de diplômés51,40 %41,70 %20,30 %
Ensemble22,10 %32,30 %19,10 %

Tableau 5. Proportion de diplômés, télétravail et innovation dans les entreprises Luxembourgeoises

38Concernant le pourcentage d’entreprises déclarant avoir innové (produit ; procédé), les résultats montrent que les entreprises qui comptabilisent entre 0 % et 5 % de diplômés sont 25,10 % à innover en matière de produit et 15,10 % au niveau du procédé. Les autres catégories d’entreprises présentent des résultats proches avec environ 40 % d’entreprises innovantes en produit et entre 20 et 27 % en procédé.

4. Méthodologie

4.1. Modèle estimé

39L’approche empirique se compose de deux étapes. La première étape consiste à tester l’hypothèse H1 : Une démarche de télétravail a un effet positif sur la probabilité d’innover au niveau des produits (a) et des procédés (b). La deuxième étape quant à elle s’attache à identifier quelles sont les variables qui ont le même effet ou un effet opposé sur le télétravail et sur l’innovation. L’accent est mis sur les pratiques responsables et technologiques entre autres. Bien entendu, des variables de contrôle comprenant un ensemble de caractéristiques essentielles à l’analyse de pratiques innovantes sont intégrées (cf. partie 4.4). La figure 2 permet de conceptualiser cette démarche.

Figure 2. Interaction entre une démarche de télétravail et l’innovation

Figure 1

Figure 2. Interaction entre une démarche de télétravail et l’innovation

Étape 1 – Analyse de l’impact d’une démarche de télétravail sur l’innovation de produit et de procédé

40Cette première étape teste l’hypothèse 1 en s’appuyant sur un modèle trivarié qui définit simultanément trois équations dans l’optique de prendre en considération l’interdépendance pouvant exister entre ces trois probabilités : innover en matière de produit, innover en matière de procédé, disposer d’une démarche de télétravail. L’objectif de ce modèle est dans un premier temps d’estimer l’impact d’une démarche de télétravail sur la probabilité d’innover au niveau des produits et des procédés. L’identification de la causalité entre le télétravail et l’innovation (produit ; procédé) apparaît comme complexe. De fait, la démarche de télétravail est instrumentée pour éviter les biais d’endogénéité (cf. partie 4.3).

Étape 2 – Analyse de l’impact des déterminants d’une démarche de télétravail sur l’innovation de produit et de procédé

41Cette étape se concentre en grande partie sur les variables de contrôle du télétravail. Ces variables vont de la flexibilité à l’autonomie en passant par les outils TIC. Plus précisément, le télétravail implique une formalisation de l’autonomie salariale intégrant confiance et flexibilité (Feldman et Gainey, 1997 ; Allen et al., 2003 ; Taskin, 2006). De plus, le télétravail par nature s’appuie sur les TIC. Bien entendu, les variables de contrôle associées à l’innovation de produit et de procédé sont elles aussi considérées. Cette étape complète les résultats de l’étape 1 en comparant les déterminants du télétravail impactant l’innovation (produit ; procédé).

4.2. Méthode économétrique

42Le modèle de type trivarié récursif explique simultanément trois états (Innovation produit ; Innovation procédé ; Télétravail). Cette spécification économétrique permet de prendre en considération : i) l’interdépendance entre l’innovation de produit et de procédé (Polder et al., 2010) avec l’innovation sociale d’une démarche de télétravail ii) l’impact d’une démarche de télétravail sur l’innovation (produit ; procédé).

43Le premier point i) conduit à se tourner vers un modèle de type Probit trivarié. Pour ce faire, trois variables binaires interdépendantes sont mobilisées. La probabilité d’innover en produits est en effet liée à la propension à innover ou non en procédé (Polder et al., 2010) et potentiellement à innover en matière de sociale (télétravail). Ce type de modèle consiste à estimer simultanément trois modèles Probit portant sur des choix binaires en permettant aux termes d’erreur d’être corrélés entre eux. Si le coefficient de corrélation entre deux termes d’erreur est positif, il est alors possible de conclure que les deux états sont complémentaires. Si la corrélation est négative, les deux états sont alors influencés par des variables manquantes ou inobservées exerçant des forces contraires. L’absence de corrélation significative suggère que les deux états sont indépendants l’un de l’autre.

44Le second point ii) quant à lui prend en compte la causalité entre une démarche de télétravail et l’innovation (produit ; procédé). En effet, il est probable que les pratiques associées au télétravail influencent les capacités d’innovation (technologies collaboratives, configuration organisationnelle, etc.). Les entreprises avec une plus grande propension à innover peuvent potentiellement être plus ouvertes à la mise en place de ce type d’innovation sociale (télétravail). Nous pouvons être confrontés à un biais d’endogénéité dans les estimations, et ce, en raison de la causalité inverse. L’utilisation d’un modèle Probit trivarié récursif est donc privilégiée. Ce type de modèle permet en effet d’instrumenter la variable supposée endogène (télétravail) dans le but de limiter le problème lié à l’endogénéité.

45Nos variables expliquées dans ce modèle sont, premièrement, l’innovation de produit définie par l’ensemble des innovations portant sur des biens ou services, deuxièmement, l’innovation de procédé définie par la technologie de production ou la méthode de distribution et, troisièmement, la démarche de télétravail constitue à la fois une variable expliquée et une variable explicative de l’innovation de produit et de procédé. Ce Probit trivarié récursif permet ainsi d’une part de tenir compte de l’impact du télétravail sur la probabilité d’innover et d’autre part de modéliser l’ensemble des corrélations possibles entre ces trois types d’innovations à travers la potentielle simultanéité des trois états. Le modèle est le suivant :

Figure 2

46L’équation (3) modélise la probabilité pour l’entreprise de mettre en place une démarche de télétravail (Figure 3 = 1). Les variables explicatives de cette démarche sont représentées par X Z représente notre variable instrumentale. En effet, il est nécessaire pour permettre l’identification du modèle de sélectionner une variable instrumentale (Z) qui explique la démarche de télétravail, mais qui n’impacte pas les deux types d’innovations. Notre choix s’est porté sur la variable dichotomique suivante : « proposez-vous à vos salariés la possibilité de réduire le nombre d’heures de travail (ex. : basculement d’un temps plein à un temps partiel) ? » (Flexibilité horaire). Les équations (1) et (2) modélisent quant à elle respectivement la probabilité d’innover en matière de produit (Figure 4 = 1) et de procédé (Figure 5 = 1). Les mêmes déterminants que pour la démarche de télétravail (X) sont intégrés à cette équation hormis l’instrument (Z). Dans ces équations, le coefficient 𝛼ptt capte l’influence d’une démarche de télétravail sur la probabilité d’innover en matière de produit (Figure 6) et de procédé (Figure 7). Si le télétravail influence directement l’innovation (produit, procédé), ce coefficient devrait être positif.

47Ce modèle est estimé simultanément par la méthode du maximum de vraisemblance nécessitant le calcul d’intégrales triples. Néanmoins, ce système ne converge pas vers une solution analytique. Le modèle fait donc appel au programme Conditional Mixed Process (CMP) développé par Roodman (2011). Ce programme permet de maximiser la log-vraisemblance du système résolvant ainsi le problème lié aux intégrales triples via un algorithme de simulations numériques de type GHK (Geweke, Hajivassiliou et Keane). Cet algorithme permet d’obtenir des probabilités simulées issues de l’approximation des intégrales. Ces probabilités simulées remplacent ensuite les intégrales des lois normales multivariées dans la fonction de vraisemblance dans l’optique de la maximiser via la technique traditionnelle.

48Les résidus de ce modèle ne sont pas indépendants. De fait, les paramètres des équations concernant l’innovation (produit ; procédé) ne peuvent pas être identifiés correctement si ses déterminants Xij incluent tous les déterminants du télétravail (Xij et Zij). La contrainte d’identification impose de retirer au moins une des variables expliquant le télétravail dans les équations estimant l’innovation (produit ; procédé). Ainsi, comme l’indiquent les équations, la variable Z est retirée. La sous-section suivante revient sur cet aspect.

4.3. Endogénéité

49La correction de l’endogénéité est complexe dans le cas où la variable expliquée supposée endogène (Télétravail) et l’instrument (Flexibilité horaire) sont tous deux des variables dichotomiques. Lollivier (2001) propose une méthode pour tester la présence d’endogénéité dans ce cas. Comme cette technique se base sur un modèle Probit bivarié, nous testons l’endogénéité du télétravail avec, dans un premier temps, l’innovation produit et, dans un second temps, avec l’innovation de procédé. Selon nous, une entreprise proposant à ses salariés de la flexibilité horaire est plus à même de proposer aussi le choix du lieu de travail à ses salariés. Toutefois, cette flexibilité horaire n’impacte pas l’innovation produit ou procédé comme l’indiquent les estimations incluant cette variable instrumentale pour expliquer l’innovation (cf. annexes A.3 et A.4). Le test statistique sur la validité de l’instrument de Stock et Yogo (2005) confirme que l’instrument est fort (cf. annexe A.5). En d’autres termes, ce dernier est corrélé à la variable instrumentée, ici le télétravail, mais pas à l’innovation de produit et de procédé. Dans ce cas, le modèle ne dispose que d’une seule variable endogène, la statistique F de Cragg Donald est égale à 61,377 ce qui indique une forte capacité prédictive de notre variable instrumentale sur la variable endogène.

50Le test d’endogénéité proposé par Lollivier (2001) consiste ensuite à comparer les valeurs de la log-vraisemblance entre deux modèles Probit simple et le modèle simultané (Probit bivarié) [20]. Les résultats sont présentés tableau A.6. La formule suivante est utilisée pour calculer cette statistique : (2L1) + (2L2) (2L).

51La statistique Chi2 (k-1) permettant de rejeter l’hypothèse nulle d’exogénéité possède un seuil à 3,84. Pour le test entre le télétravail et l’innovation produit, le calcul donne le résultat suivant : 7,0578 > 3,84. De fait, la corrélation entre les termes d’erreur des deux équations est statistiquement différente de zéro. Ainsi, le télétravail est bien endogène et il est nécessaire d’estimer conjointement le télétravail et l’innovation produit en instrumentant le télétravail dans l’estimation de l’innovation produit. À contrario, le même test avec l’innovation de procédé donne une statistique de 0,4612 < 3,84. Par conséquent, il n’existe pas de corrélation entre les termes d’erreur. Toutefois, la complémentarité entre l’innovation de produit et celle de procédé oblige à estimer conjointement ces deux pratiques. Pour ce faire, un modèle de type Probit trivarié récursif est nécessaire pour contrôler le biais d’endogénéité tout en prenant en considération d’une part la complémentarité entre l’innovation produit et procédé et d’autre part la corrélation entre les termes d’erreur d’une démarche de télétravail avec l’innovation produit.

52Enfin, une vérification est effectuée pour contrôler qu’il n’existe pas de fortes corrélations entre les variables explicatives de ce modèle, et ce, pour ne pas biaiser les estimations. Les tableaux de corrélation montrent qu’il existe peu de corrélation supérieure à 0,40 [21] (cf. annexe A.7 et A.8).

4.4. Variables de contrôle

53Les variables de contrôle présentées ci-après sont communes aux trois variables dépendantes (Innovation produit ; Innovation procédé ; Télétravail). En effet, la spécification économétrique de ce modèle pousse à utiliser les mêmes variables dans chacune des équations (cf. partie 4.2). Commençons par nous intéresser aux variables de contrôle essentiellement axées sur l’innovation de produit et de procédé.

54Pour innover tant au niveau des produits que des procédés, l’entreprise doit posséder des ressources financières (Hadjimanolis, 1999 ; Frenkel, 2003 ; Mohnen et Röller, 2005 ; Segarra-Blasco et al., 2008 ; Mohnen et al., 2008). Ne disposant pas du montant du chiffre d’affaires des entreprises, nous utilisons une variable binaire indiquant si l’entreprise à connu une croissance de son chiffre d’affaires lors des trois dernières années. Cette variable devrait avoir un effet positif sur l’innovation (produit ; procédé) (Croissance du CA).

55La taille de l’entreprise, elle aussi, influence positivement l’innovation (Cohen et Levin, 1989). Les entreprises de grande taille font plus d’innovations de procédé (Cohen et al., 1996) et les plus petites disposent d’une forte capacité à innover au niveau des produits (White et al., 1988) [22]. De fait, nous intégrons un score de 1 à 3 (Taille) indiquant si l’effectif de l’entreprise est compris entre (1) 15 et 49 salariés (2) 50 et 249 (3) plus de 250. Nous complétons avec une variable binaire indiquant l’appartenance à un groupe (Groupe) (Mairesse et Mohnen, 2010).

56L’innovation et la concurrence sont très liées (Kraft, 1990 ; Metcalfe, 2006). Les entreprises jugeant la menace élevée ont plus d’incitations à innover (Baldwin et al., 2002), et ce, en raison de gains potentiels supérieurs à ceux sur des marchés moins concurrentiels (Arrow et Nelson, 1962 ; Scherer, 1983). La structure du marché vient donc elle aussi contrôler ce modèle via la perception de la concurrence (Concurrence sur le marché). Plus précisément, cette variable binaire indique si l’entreprise fait face à une menace concurrentielle élevée sur son marché (nouveaux concurrents). La perception d’une menace concurrentielle élevée devrait donc avoir un impact positif sur la probabilité d’innover au niveau des produits et des procédés.

57Les innovations organisationnelles influencent aussi positivement l’innovation qu’elle soit de produit ou de procédé (Mothe et Nguyen, 2012 ; Le Bas et al., 2015). Deux types d’innovations organisationnelles sont prises en compte via deux variables binaires. Celles associées à des changements de réglementation [23](Réglementation) et à l’introduction de nouveaux outils technologiques (Nouvelles technologies).

58Le recours à des dispositifs dédiés à la stimulation de la créativité vient compléter ces variables (comme des séances de brainstorming) . Pour ce faire, ce modèle intègre une variable de score de 1 à 6 (Score créativité) [24]indiquant le nombre de dispositifs de ce type mis en place (cf. annexe A.1).

59Enfin, la littérature insiste sur l’importance de la recherche et développement (RD en interne) comme déterminant de la propension à innover tant au niveau des produits que des procédés (Brouwer et Kleinknecht, 1996 ; Karlsson et Olsson, 1998 ; Baldwin et Hanel, 2003 ; Subrahmanya, 2005 ; Le Bas et al., 2015). Nous intégrons donc une variable binaire indiquant si l’entreprise dispose d’un service fonctionnel en recherche et développement en interne.

60Poursuivons avec les variables de contrôles communes à l’innovation de produit et de procédé et à une démarche de télétravail. Tout d’abord, un score de 1 à 4 indiquant la proportion de salariés diplômés (Diplôme) [25]est intégrée au modèle. Plusieurs études soulignent l’effet positif de l’éducation des dirigeants sur l’innovation de produit et de procédé (Hage, 1980 ; Kimberly et Evanisko, 1981 ; Dewar et Dutton, 1986 ; Bocquet et al., 2013, 2017). Toutefois, certains auteurs ne trouvent pas de résultats significatifs concernant l’impact du niveau d’étude sur l’innovation de produit ou de procédé (Kraft, 1990 ; Freel, 2003). Le télétravail quant à lui est fortement présent chez les professions intellectuelles (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006). Dans la continuité du niveau d’étude, un score de 1 à 3 indiquant la proportion de salariés (noncadres supérieurs) pouvant décider collectivement de leur manière de travailler en équipe est aussi intégrée au modèle (Autonomie au travail) [26]tout comme la variable binaire Polyvalence indiquant si les salariés sont en mesure d’assurer les tâches d’autres collègues lors de leurs absences (au moins au niveau des équipes). Le télétravail nécessitant de la flexibilité (Illegems et al., 2001) et étant fortement influencé par l’autonomie (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006), ces caractéristiques devraient ainsi avoir une influence positive sur le télétravail et l’innovation (proximité avec le niveau d’éducation).

61Le secteur lui aussi influence les trajectoires technologiques des entreprises et donc l’innovation (Pavitt, 1984 ; Becheikh et al., 2006 ; Damanpour et Aravind, 2006). L’innovation est d’ailleurs plus présente dans le secteur des TIC (Le Bas et al., 2015). Le télétravail quant à lui est plus présent dans certains secteurs (Tremblay, 2001) comme ceux fortement influencés par la technologie (TIC). De fait, le secteur des TIC constitue le secteur de référence de cette étude [27].

62L’échange d’informations et la communication permettent de stimuler l’innovation (Khouri, 2010). De fait, pour considérer l’influence positive de la communication sur l’innovation, la présence d’une politique de tutorat (Tutorat) [28]est prise en compte dans ce modèle via une variable binaire. Le tutorat constitue une pratique d’encadrement et de formation ayant pour objectif de transmettre des connaissances et/ou des techniques professionnelles. Ainsi, son impact sur la probabilité d’innover devrait être positif. Enfin, le risque de perte de contrôle sur le salarié constitue un frein régulièrement mis en avant concernant la mise en place du télétravail (Tremblay, 2001 ; Felstead et al., 2003).

63Le télétravail peut résulter d’une démarche RSE visant à optimiser le bien-être des salariés. De plus, la littérature au sujet de l’impact de la RSE met en avant l’effet positif du degré d’engagement en matière de RSE sur l’innovation de produit et de procédé (Bocquet et al., 2011 ; Berger-Douce, 2011 ; Le Bas et al., 2011 ; Bocquet et al., 2013 ; Bocquet et Mothe, 2013). De ce fait, deux variables binaires viennent compléter ce modèle : la présence d’une démarche RSE et la certification ou l’inspiration par la norme ISO 18 001 [29].

64Enfin, par nature, le télétravail nous oblige à considérer les TIC via trois variables binaires, l’accès à distance aux mails (Mails à distance), aux documents (Documents à distance) et aux logiciels (Logiciels à distance). La transmission régulière d’informations par les mails ou l’Intranet (Communication) est, elle-aussi, intégrée en s’appuyant sur une variable binaire. Ces outils et applications devraient avoir un effet positif sur la démarche de télétravail. Il est possible d’avoir le même raisonnement concernant l’innovation. En effet, les TIC contribuent à stimuler la propension à innover (Greenan et Walkowiak, 2002 ; Comtet, 2006 ; Des Horts et Isaac, 2006 ; Medzo-M’engone et al., 2019)

5. Résultats

5.1. Estimation de l’innovation produit, procédé et du télétravail

65Le tableau 6 présente les coefficients estimés du modèle Probit trivarié récursif concernant l’innovation de produit, de procédé et la démarche de télétravail. La variable à expliquer Télétravail est intégrée comme variable explicative dans les équations d’innovation de produit et de procédé. La variable instrumentale Flexibilité horaire quant à elle n’est présente que dans l’équation de télétravail pour corriger le biais d’endogénéité de la variable Télétravail (cf. partie 4.4). Les coefficients de corrélation des termes d’erreur présentés tableau A.9 sont significatifs et positifs entre l’innovation de produit et de procédé ; négatif entre l’innovation de produit et la démarche de télétravail. Les tests de robustesse sont présentés tableaux A.3 et A.4.

Tableau 6. Estimation de l’innovation produit, procédé et d’une démarche de télétravail – Probit trivarié récursif

VariablesPratiques innovantes
(1)(2)(3)
Innovation produitÉcarts-typesInnovation procédéÉcarts-typesTélétravailÉcarts-types
Flexibilité horaire0,327***[0,095]
Télétravail0,789***[0,270]0,366[0,362]
Autonomie au travail-0,096*[0,051]-0,108*[0,059]0,171***[0,053]
Polyvalence0,241**[0,109]0,263**[0,125]0,243*[0,125]
Tutorat0,180*[0,096]0,081[0,112]-0,330***[0,106]
Communication0,007[0,099]-0,023[0,109]0,229**[0,104]
Mails à distance-0,081[0,101]0,197*[0,115]0,452***[0,120]
Documents à distance0,267**[0,110]0,120[0,120]0,288**[0,113]
Logiciels à distance-0,086[0,102]-0,090[0,112]0,206*[0,107]
ISO 180010,101[0,078]0,155*[0,087]-0,122[0,090]
RSE0,158[0,097]0,188*[0,112]0,170[0,109]
Groupe0,060[0,088]-0,065[0,099]0,024[0,096]
Réglementation0,460***[0,104]0,252**[0,117]0,062[0,115]
Nouvelles technologies0,695***[0,107]0,735***[0,113]0,005[0,114]
RD en interne0,379***[0,090]0,410***[0,097]0,026[0,098]
Concurrence sur
le marché
0,037[0,090]0,025[0,096]-0,161[0,103]
Croissance du CA0,248***[0,075]0,188**[0,085]-0,032[0,083]
Taille0,127*[0,067]0,077[0,076]0,053[0,072]
Diplôme-0,092[0,068]0,014[0,073]0,241***[0,065]
Score créativité0,089***[0,026]0,093***[0,029]0,009[0,027]
TICRéférenceRéférenceRéférence
Industrie0,063[0,199]0,411*[0,214]-0,529***[0,199]
Construction-0,073[0,199]0,033[0,229]-0,717***[0,193]
Commerce0,035[0,193]0,244[0,219]-0,746***[0,188]
Transport-0,096[0,210]0,338[0,217]-0,281[0,202]
Finance0,271[0,185]0,052[0,226]-0,737***[0,176]
Autres0,018[0,188]-0,206[0,212]-0,322*[0,182]
Constante-1,606***[0,265]-2,224***[0,282]-2,038***[0,280]
Observations1468
Pseudolikelihood-3230,845

Tableau 6. Estimation de l’innovation produit, procédé et d’une démarche de télétravail – Probit trivarié récursif

Écarts-types robustes entre crochets
*** p 0,01, ** p 0,05, * p 0,10

66Nos résultats montrent un impact positif et significatif d’une démarche de télétravail sur la probabilité d’innover en produit. En revanche, une démarche de télétravail n’impacte pas la probabilité d’innover en procédés. Les coefficients de corrélation entre les variables innovation de produit, de procédé et le télétravail (cf. annexe A.9).

67Premièrement, cette analyse met en évidence une corrélation positive et significative entre les termes d’erreur des équations d’innovation de produit et de procédé. Ces deux pratiques sont donc complémentaires (Polder et al., 2010). Deuxièmement, il n’existe aucune corrélation entre les termes d’erreur des équations de télétravail et d’innovation de procédé. Autrement dit, ces deux pratiques sont indépendantes l’une de l’autre. Enfin, la corrélation entre l’innovation produit et le télétravail est négative. Ce troisième résultat suggère qu’il existe d’autres variables influençant à la fois la probabilité de proposer du télétravail et d’innover en produit. Ces variables inobservées ont un effet globalement inverse sur le télétravail et l’innovation produit. En d’autres termes, parmi les variables inobservées, le poids de celles ayant un effet inverse est supérieur à celles ayant un effet similaire. L’identification des variables inobservées constitue une piste de recherche future.

68Ces résultats permettent de valider l’hypothèse H1(a). Une démarche de télétravail, qui est une innovation organisationnelle a un effet positif sur la probabilité d’innover au niveau des produits. En revanche, nous ne pouvons pas valider notre hypothèse H1(b) concernant la relation entre le télétravail et l’innovation de procédé.

5.2. Déterminants de l’innovation (produit et procédé)

69Conformément à la littérature, nos résultats montrent que la recherche et développement (Brouwer et Kleinknecht, 1996 ; Karlsson et Olsson, 1998 ; Baldwin et Hanel, 2003 ; Subrahmanya, 2005) et l’accès à des ressources financières influencent positivement la propension à innover dans les entreprises (Hadjimanolis, 1999 ; Frenkel, 2003 ; Mohnen et Röller, 2005 ; Segarra-Blasco et al., 2008 ; Mohnen et al., 2008) [30]. Il est possible de faire le même constat pour les innovations ou changements organisationnels (Mothe et Nguyen, 2012 ; Le Bas et al., 2015) impulsés par des changements de réglementation [31]et par l’introduction d’outils numérique. Les politiques dédiées à la stimulation de la créativité [32] jouent elles aussi un rôle positif sur l’innovation (produit ; procédé). La démarche RSE influence positivement l’innovation procédé tout comme la certification ou la mise en œuvre de la norme ISO 18001 concernant la santé et de la sécurité au travail (Bocquet et al., 2011 ; Berger-Douce, 2011 ; Le Bas et al., 2011 ; Bocquet et al., 2013 ; Bocquet et Mothe, 2013). Ce résultat peut s’expliquer par la nécessité de faire évoluer les modes de production en lien avec les attentes liées à cette norme ISO. Enfin, l’innovation produit n’est pas significativement influencée par les secteurs d’activités. Toutefois, ces résultats indiquent une influence positive du secteur de l’industrie (par rapport au secteur des TIC) sur l’innovation de procédé (Pavitt, 1984 ; Becheikh et al., 2006 ; Damanpour et Aravind, 2006 ; Le Bas et al., 2015).

5.3. Déterminants d’une démarche de télétravail

70La flexibilité horaire (variable instrumentale) joue un rôle positif sur la probabilité d’avoir une démarche de télétravail. Ces résultats confortent la littérature soulignant l’importance de la flexibilité au sujet de la mise en place du télétravail (Illegems et al., 2001).

71Même constat en ce qui concerne la polyvalence et la proportion de salariés (non-cadres supérieurs) disposant d’une autonomie organisationnelle leur permettant de définir collectivement leurs manières de travailler (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006).

72Autre caractéristique régulièrement mise en avant pour son un rôle positif sur le télétravail, le niveau d’éducation (Tremblay, 2001 ; Schampheleire et Martinez, 2006). Le niveau d’éducation augmente l’éligibilité des salariés au télétravail tout comme l’appartenance au secteur des TIC (Tremblay, 2001). Les résultats indiquent aussi que faire partie du secteur de l’industrie, de la construction, du commerce et de la finance diminue la probabilité de proposer le télétravail par rapport au secteur des TIC.

73Concernant les technologies numériques, deux résultats complémentaires ressortent de cette analyse. Premièrement, la mise à disposition d’un accès à distance aux mails, aux documents et aux logiciels facilite la mise en place du télétravail. Deuxièmement, l’usage de mail, d’Intranet, ou la diffusion régulière d’informations ont un effet positif sur le télétravail. Ce deuxième résultat conforte les propos de Valléry et Leduc (2017) expliquant que les supports informationnels peuvent servir d’appuis pour éviter toute dégradation de la santé au travail (risques psychosociaux).

74Enfin, l’accompagnement par le tutorat et la formation aux salariés influencent négativement la probabilité de mettre en place du télétravail. Nous pouvons penser que ce type de pratiques se caractérisant par un encadrement des salariés se prête mal au télétravail. Ce résultat vient ainsi appuyer le frein régulièrement mis en avant associé à la perte de contrôle sur le salarié (Tremblay, 2001 ; Felstead et al., 2003). Toutefois, ce résultat peut aussi s’expliquer par les caractéristiques des entreprises proposant le tutorat (à secteur d’activité et niveau de diplôme équivalents). En effet, 84,80 % des entreprises disposant d’un accompagnement salarial via le tutorat appartiennent aux secteurs de l’industrie, de la construction, du commerce, de la finance et autres [33]. Or, ces secteurs proposent significativement moins de télétravail que le secteur des TIC. De plus, 41,40 % des entreprises proposant du tutorat disposent de moins de 5 % de salariés diplômés de l’enseignement supérieur [34]. Autrement dit, les entreprises proposant une politique de tutorat ont moins de salariés éligibles au télétravail.

75Précisons qu’avoir une démarche RSE n’a pas d’effet significatif sur le télétravail. Ce résultat peut s’expliquer par le fait que le télétravail peut résulter d’une démarche responsable, mais ne constitue pas en soi une démarche RSE. Si la télétravail n’est pas lié à la RSE, nous pouvons penser que le télétravail n’est pas adopté pour un meilleur équilibre vie de famille / vie professionnelle ni pour accroître le bien-être des salariés.

5.4. Relation entre le télétravail et l’innovation (produit ; procédé)

76Le tableau 7 ci-après met en avant les déterminants communs du télétravail et de l’innovation de produit et de procédé. L’accès à distance augmente la probabilité de proposer du télétravail mais aussi celle d’innover en matière de produit (Documents à distance) et de procédé (Mails à distance). La polyvalence des salariés (Polyvalence) influence positivement le télétravail et l’innovation produit et procédé. À contrario, il existe des relations inverses dans deux cas. Premièrement, la proportion de salariés (non-cadres) pouvant décider collectivement de leur manière de travailler (Autonomie au travail) influence positivement la probabilité de mettre en place une démarche de télétravail alors qu’elle influence négativement la probabilité d’innover (produit ; procédé). Deuxièmement, le tutorat (Tutorat) en entreprise joue négativement sur la probabilité du télétravail mais influence positivement l’innovation de produit.

Tableau 7. Innovation et télétravail auprès des entreprises Luxembourgeoises

Déterminants du télétravail et de l’innovationEffet sur télétravailEffet sur l’innovation produitEffet sur l’innovation procédé
Autonomie au travailPositifNégatifNégatif
PolyvalencePositifPositifPositif
TutoratNégatifPositif/
Documents à distancePositifPositif/
Mails à distancePositif/Positif
IndustrieNégatif/Positif

Tableau 7. Innovation et télétravail auprès des entreprises Luxembourgeoises

77Ces résultats indiquent l’importance de la polyvalence accordée aux salariés et de l’accès à distance aux documents de l’entreprise dans l’impact positif du télétravail sur l’innovation produit. Il est tout de même important de souligner que le tutorat contribue à freiner la pratique du télétravail mais qu’il favorise l’innovation via la transmission de connaissance qu’il soustend. Cette variable tutorat met aussi en avant l’importance des caractéristiques propres au type d’entreprises ayant recours au tutorat. Effectivement, les entreprises proposant ce type d’encadrement sont fortement représentées dans les secteurs de l’industrie, de la construction, du commerce, de la finance et autres et disposent d’une proportion très faible de salariés diplômés du supérieur, qui sont par nature plus éligibles au télétravail. De fait, le secteur et la proportion de salariés diplômés semblent aussi jouer un rôle important dans cette relation entre le télétravail et l’innovation, tout du moins quand elles sont couplées à cette politique. Autre point, l’autonomie organisationnelle influence négativement la probabilité d’innover en matière de produit et de procédé alors même qu’elle joue un rôle positif sur la probabilité de proposer le télétravail. Ce résultat peut s’expliquer en partie par la composition des entreprises proposant cette autonomie organisationnelle. En effet, les entreprises proposant une autonomie organisationnelle à leurs salariés appartiennent pour 69,40 % d’entre elles à la catégorie des petites entreprises (15 à 49 salariés).

78Les entreprises qui proposent à leurs employés de télétravailler se caractérisent certainement par une plus grande capacité d’adaptation et de management à distance. Ces entreprises ont donc plus de facilité à innover et se transformer, notamment sur le plan organisationnel (le télétravail pouvant être en soi une forme d’innovation sociale et organisationnelle du travail). Du côté des salariés télétravailleurs, ces derniers ont plus d’autonomie et sont plus en contact avec l’extérieur, ce qui peut être source de nouvelles idées. Ainsi, tant du point de vue de l’entreprise que des salariés, le télétravail peut stimuler l’innovation de produits ou de services. Le schéma suivant résume nos résultats en mettant en évidence les variables ayant un effet positif à la fois sur le télétravail et l’innovation (figure 3).

Figure 3. Interaction entre une démarche de télétravail et l’innovation produit et procédé

Figure 8

Figure 3. Interaction entre une démarche de télétravail et l’innovation produit et procédé

6. Conclusion

79Cet article s’est intéressé à la relation entre une démarche de télétravail de façon occasionnelle et l’innovation technologique (produit ; procédé), sujet peu traité dans la littérature. Le développement du télétravail pousse à s’intéresser à son impact sur la performance de l’entreprise. Cependant, l’innovation sociale et organisationnelle que constitue le télétravail incite aussi à s’interroger sur son impact sur l’innovation technologique.

80À partir d’une enquête réalisée auprès de 1468 entreprises représentatives du Luxembourg, cet article cherche à comprendre l’impact d’une démarche de télétravail sur l’innovation de produit et de procédé. Les résultats permettent de valider empiriquement l’existence d’un impact positif d’une démarche de télétravail sur l’innovation de produit (H1a) mais pas sur l’innovation procédé (H1b). Certains déterminants du télétravail constituent des freins à l’innovation. Une réflexion au niveau du management à mettre en place (contrôle, autonomie, etc.) semble nécessaire si une entreprise souhaite favoriser les synergies entre les deux pratiques (télétravail et innovation de produit). En effet, le résultat principal met en avant l’importance de la polyvalence des salariés et de l’accès à distance aux documents professionnels via les TIC. À l’inverse, le tutorat freine la démarche du télétravail mais favorise l’innovation de produit. À noter que les entreprises qui proposent du tutorat sont fortement représentées dans les secteurs autres que celui des TIC et par des entreprises disposant majoritairement de peu de salariés diplômés. Autrement dit, ces entreprises ne disposent que de très peu de salariés éligibles au télétravail [35]. En outre, la proportion de salariés disposant d’une autonomie organisationnelle va quant à elle faciliter la démarche de télétravail. Enfin, la corrélation entre les termes d’erreur (équation télétravail et innovation produit) indique quant à elle qu’il existe d’autres variables communes avec des effets inverses sur la probabilité de disposer/proposer une démarche de télétravail et d’innover en matière de produit. De fait, le compromis entre un management basé sur le contrôle et la confiance apparaît essentiel pour éviter de voir la probabilité d’innover diminuer à la suite de la mise en place d’une démarche de télétravail. En d’autres termes, les entreprises proposant un encadrement trop axé sur le contrôle (transmission de connaissance via le tutorat par exemple) auront une probabilité plus faible de proposer du télétravail à contrario de celles accordant plutôt leur confiance aux salariés (autonomie organisationnelle). Ces résultats valident donc en partie les travaux de Taskin et Bridoux (2010) qui expliquent que le transfert de connaissances dans un environnement de télétravail peut être favorisé par la communication (projets, modalités) et la gestion des ressources humaines (management, etc.).

81D’autres caractéristiques peuvent permettre d’expliquer cet impact positif d’une démarche de télétravail sur la probabilité d’innover. À titre d’exemple, le recours aux espaces de coworking par les télétravailleurs peut conduire à stimuler la créativité. Ces lieux peuvent en effet être utilisés par des télétravailleurs autonomes pour des raisons économiques ou sociales (Scaillerez et Tremblay, 2016a, 2017). Ces espaces de travail collaboratif stimulent l’autonomie, la créativité et l’imagination (Boutillier, 2018). Autrement dit, ils permettent de favoriser l’innovation dite ouverte [36](Fabbri et Charue-Duboc, 2016). En plus d’éviter l’isolement social, ces espaces permettent de stimuler la créativité via la mixité socioprofessionnelle présente dans ces lieux. Toutefois, ces espaces collaboratifs doivent organiser et animer les interactions pour pouvoir stimuler une communauté innovante (Suire et al., 2018).

82L’ensemble des résultats présentés dans cet article contribuent à mieux appréhender la relation entre une démarche de télétravail et l’innovation (produit ; procédé), notamment sur leurs déterminants communs. Cette recherche met en avant les accélérateurs et les freins communs à une politique de télétravail et à l’innovation (produit ; procédé). Plus précisément, certains déterminants du télétravail vont aussi l’être pour l’innovation (produit ; procédé). À contrario, certaines variables influençant positivement le télétravail peuvent freiner la probabilité d’innover et inversement.

83Cette étude présente quelques limites. Un modèle disposant de plus de dimensions (nombre de jours télétravail par semaine ou par mois, fréquence du télétravail, accès aux espaces de coworking, etc.) permettrait potentiellement de mieux comprendre la relation entre le télétravail et l’innovation (produit ; procédé) et de réduire les caractéristiques inobservées (cf. partie 5.1). De plus, il pourrait être judicieux d’analyser l’évolution de certaines caractéristiques dans le temps pour étudier le déploiement d’une démarche de télétravail, puis, pour étudier son influence sur la probabilité d’innover. Ces limites constituent des pistes de recherche futures, tout comme l’élargissement du champ de l’enquête à d’autres régions que le Luxembourg.

L’auteur remercie le Carnot TSN Institut Mines Telecom pour sa confiance dans ce projet.

Annexe A.0 : Questionnaire

841. Votre entreprise est-elle active dans le domaine de la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) ?

85

  • Oui
  • Non

862. Votre entreprise est-elle certifiée ou s’inspire-t-elle de la norme ISO 18 001 ?

87

  • Oui
  • Non

883. La disposition suivante existe-t-elle dans votre entreprise : travailler à (ou à partir de) la maison durant les heures normales de travail ?

89

  • Oui
  • Non

904. Entre début 2010 et fin 2012, votre entreprise a-t-elle réalisé des changements organisationnels significatifs ? (ces changements peuvent inclure l’introduction de nouvelles procédures de gestion, de nouvelles façons d’organiser le travail et de prendre les décisions, ou de nouvelles méthodes pour organiser les relations interentreprises ou inter organisations) Si oui ces changements organisationnels significatifs ont été impulsés
par… ?

91a) Des changements de réglementations dans le domaine de l’environnement, en matière d’emploi, d’autres changements de réglementations ?

92

  • Oui
  • Non

93b) L’introduction de nouveaux outils numériques/technologiques ?

94

  • Oui
  • Non

955. Entre début 2010 et fin 2012, votre entreprise a-t-elle introduit des biens ou services nouveaux (ou améliorés) de manière significative quant à leurs caractéristiques ? (les biens ou services doivent être nouveaux (ou améliorés) pour votre entreprise, sans nécessairement l’être pour votre marché)

96

  • Oui
  • Non

976. Entre début 2010 et fin 2012, votre entreprise a-t-elle mis en œuvre une technologie de production ou une méthode de distribution, qui était nouvelle (ou modifiée de manière significative) ? (Cette technologie ou méthode de distribution doit être nouvelle (ou améliorée) pour votre entreprise, sans nécessairement l’être pour votre marché)

98

  • Oui
  • Non

997. Entre début 2010 et fin 2012, votre entreprise a-t-elle utilisé les méthodes suivantes afin de stimuler l’émergence d’idées nouvelles et la créativité des salariés ?

100

  • Séances de remue-méninge (‘Brainstorming’)
  • Rotation des salariés entre équipes
  • Attribution de primes
  • Attribution d’avantages en nature (ex. : temps libre, reconnaissance publique, attribution de tâches plus intéressantes)
  • Formation(s) favorisant le développement d’idées nouvelles et/ou la créativité
  • Participation d’experts externes (d’Universités, d’instituts de recherche, d’autres entreprises)
  • Participation d’experts issus du groupe d’entreprises ou mobilité des salariés au sein du groupe

1018. Votre entreprise recourt-elle à la virtualisation de ses serveurs ou applications via du Cloud Computing [37] ?

102

  • Oui
  • Non

1039. Quelle proportion de salariés (non-cadres supérieurs) travaille actuellement dans des équipes qui décident collectivement de leur manière de travailler ?

104

  • 0 % à 5 %
  • 6 % à 49 %
  • 50 % à 100 %

10510. Quelle proportion de salariés (non-cadres supérieurs) peut choisir l’heure à laquelle ils débutent et achèvent leur journée de travail ?

106

  • 0 % à 5 %
  • 6 % à 49 %
  • 50 % à 100 %

10711. Vos salariés (non-cadres supérieurs) sont-ils en mesure d’assurer les tâches d’autres collègues lors de leurs absences au moins au niveau des équipes ?

108

  • Oui
  • Non

10912. Existe-t-il un système de tutorat des salariés au sein de votre entreprise ? [38]

110

  • Oui
  • Non

11113. Disposez-vous de logiciels permettant d’effectuer un suivi de la performance des salariés ?

112

  • Oui
  • Non

11314. Existe-t-il un espace de discussion ouvert sur l’Intranet ou sur un réseau social d’entreprise ?

114

  • Oui
  • Non

11515. La Direction diffuse-t-elle régulièrement des informations par courrier électronique ou via l’Intranet ?

116

  • Oui
  • Non

11716. Proposez-vous à vos salariés la possibilité de réduire le nombre d’heures de travail ? (ex. : basculement d’un temps plein à un temps partiel)

118

  • Oui
  • Non

11917. Votre entreprise offre-t-elle à ses salariés la possibilité d’accéder à distance (via une connexion à l’Internet fixe, mobile ou sans fil) :

120

  • Au système d’e-mail de l’entreprise ?
  • Aux documents de l’entreprise ?
  • Aux logiciels dédiés aux activités de l’entreprise ? ex. pour la gestion des commandes ou des ventes, ERP (Enterprise Resource Planning) et les applications liées…

12118. Un service recherche et développement existe-t-il en interne ?

122

  • Oui
  • Non

12319. Dans quelle mesure les facteurs suivants décrivent le contexte de la concurrence sur votre marché principal ?

124a) Votre position sur le marché est menacée par des nouveaux concurrents (élevé)

125

  • Oui
  • Non

12620. Depuis le 1er janvier 2010, votre chiffre d’affaires total a augmenté de plus de 5 % ?

127

  • Oui
  • Non

12821. Votre effectif salarié au 1er janvier 2013 est compris entre…

129

  • 15-49 salariés
  • 50-249 salariés
  • plus de 250 salariés

13022. Votre entreprise fait-elle partie d’un groupe d’entreprises ?

131

  • Oui
  • Non

13223. Quelle proportion des salariés ont les diplômes de l’enseignement supérieur suivants ?

133

  • 0 % à 5 %
  • 6 % à 49 %
  • 50 % à 94 %
  • 95 % à 100 %

13424. Dans quel secteur exercez-vous ?

Tableau A.1 Présentation et description des variables

VariablesDescription
Innovation produitVariable binaire indiquant si l’entreprise a introduit des biens ou services nouveaux (ou améliorés).
Innovation procédéVariable binaire indiquant si l’entreprise a mis en œuvre une technologie de production ou une méthode de distribution nouvelle.
TélétravailVariable binaire indiquant si l’entreprise propose aux salariés de travailler depuis leur domicile durant les heures normales de travail.
Flexibilité horaireVariable binaire indiquant si l’entreprise permet à ses salariés de réduire le nombre d’heures de travail (ex : basculement d’un temps plein à un temps partiel)
Autonomie au travailScore de 1 à 3 indiquant la proportion de salariés (non-cadres supérieurs) qui décident collectivement de leur manière de travailler en équipe. (1) 0 % à 5 %, 2) 6 % à 49 %, (3) 50 % à 100 %.
PolyvalenceVariable binaire indiquant si les salariés sont en mesure d’assurer les tâches d’autres collègues lors de leurs absences (au moins au niveau des équipes).
TutoratVariable binaire indiquant si l’entreprise propose un système de tutorat à ses salariés.
CommunicationVariable binaire indiquant si la direction diffuse régulièrement des informations par courrier électronique ou via l’Intranet ?
Mails à distanceVariable binaire indiquant si l’entreprise permet d’accéder aux mails à distance.
Documents à distanceVariable binaire indiquant si l’entreprise permet d’accéder aux documents à distance.
Logiciels à distanceVariable binaire indiquant si l’entreprise permet d’accéder aux logiciels à distance.
ISO 18001Variable binaire indiquant si l’entreprise est certifiée ou s’inspire de la norme ISO 18 001.
RSEVariable binaire indiquant si l’entreprise est active dans le domaine de la Responsabilité Sociale des Entreprises(RSE).
GroupeVariable binaire indiquant si l’entreprise appartient à un groupe.
RéglementationVariable binaire indiquant si des changements organisationnels significatifs ont été impulsés par changements de réglementations dans le domaine de l’environnement, en matière d’emploi et autres changements de réglementations.
Nouvelles technologiesVariable binaire indiquant si des changements organisationnels significatifs ont été impulsés par l’introduction de nouveaux outils numériques/technologiques.
RD en interneVariable binaire indiquant si l’entreprise dispose d’un service fonctionnel en recherche et développement en interne.
Concurrence sur le marchéVariable binaire indiquant si l’entreprise juge la menace élevée quant à sa position sur le marché (nouveaux concurrents).
Croissance du CAVariable binaire indiquant si le chiffre d’affaires total de l’entreprise a augmenté de plus de 5 % sur les trois dernières années.
TailleScore de 1 à 3 indiquant si l’effectif de l’entreprise est compris entre (1) 15 et 49 salariés (2) 50 et 249 (3) plus de 250.
DiplômeScore de 1 à 4 indiquant la proportion de salariés ayant un diplôme dans l’enseignement supérieur. (1) 0 % à 5 %, (2) 6 % à 49 %, (3) 50 % à 94 %, (4) 95 % à 100 %.

Tableau A.1 Présentation et description des variables

135   

VariablesDescription
Score Créativité :1. Rotation salariale2. Prime3. Avantage en nature4. Formation créativité5. Brainstorming6. Intervenant universitaire7. Intervenant expertVariable de score indiquant 0 à 7 indiquant le nombre de politiques mises en place visant à stimuler la créativité (brainstorming, rotation, prime, avantage en nature, formation, intervenant)
Variable binaire indiquant si l’entreprise met en place une rotation des équipes pour stimuler la créativité des salariés.
Variable binaire indiquant si l’entreprise attribue des primes pour stimuler la créativité des salariés.
Variable binaire indiquant si l’entreprise attribue des avantages en nature pour stimuler la créativité des salariés.
Variable binaire indiquant si l’entreprise favorise les formations qui développent des idées nouvelles et/ou la créativité.
Variable binaire indiquant si l’entreprise met en place des séances de remueméninge (‘Brainstorming’) pour stimuler la créativité.
Variable binaire indiquant si l’entreprise fait participer des experts externes (d’Universités, d’instituts de recherche, autres).
Variable binaire indiquant si l’entreprise fait participer des experts issus du groupe d’entreprises ou permet la mobilité des salariés au sein du groupe.
CloudVariable binaire indiquant si l’entreprise dispose d’un service cloud.

Tableau A.2 Statistiques descriptives

VariablesMoyennesÉcarts-typesMinMax
Variables à expliquer
Innovation Produit0,32350,01201
Innovation Procédé0,19140,01001
Télétravail0,22130,01001
Variables explicatives
Flexibilité horaire0,59330,01301
Autonomie au travail1,68050,78203
PolyvalenceTutorat0,82220,23360,0090,0110011
Communication0,54760,01301
Mails à distance0,63550,01201
Documents à distance0,40660,01201
Logiciels à distance0,32560,01201
ISO 180010,42430,01301
RSE0,21930,01001
Groupe0,44000,01301
Réglementation0,19000,01001
Nouvelle technologie0,19550,01001
RD en interne0,26150,01101
Concurrence sur le marché0,25000,01101
Croissance du CA0,39920,01201
Taille1,36240,09303
Diplôme1,58030,00814
Score créativité1,68050,00807
Rotation salariale0,35690,01201
Prime0,33370,01201
Avantage en nature0,21590,01001
Formation créativité0,40050,01201
Brainstorming0,36140,01201
Intervenant universitaire0,20020,01001
Intervenant expert0,19140,01001
Industrie0,12260,00801
Construction0,21790,01101
Commerce0,24250,01101
Transport0,10280,00801
TIC0,06600,00601
Finance0,12800,00801
Autres0,11980,00801
Cloud0,18050,01001

Tableau A.2 Statistiques descriptives

Tableau A.3 Probit trivarié – test de robustesse

VariablesPratiques innovantes
(1)(2)(3)
Innovation produitÉcarts-typesInnovation procédéÉcarts-typesTélétravailÉcarts-types
Flexibilité horaire0,110[0,089]-0,032[0,100]0,302***[0,097]
Télétravail0,706**[0,327]0,419[0,336]
Autonomie
au travail
-0,098*[0,052]-0,109*[0,058]0,172***[0,053]
Polyvalence0,238**[0,111]0,265**[0,125]0,247**[0,125]
Tutorat0,171*[0,097]0,086[0,112]-0,329***[0,106]
Communication-0,0002[0,101]-0,024[0,109]0,232**[0,104]
ISO 180010,098[0,079]0,157*[0,087]-0,119[0,090]
RSE0,158[0,098]0,188*[0,112]0,169[0,109]
Mails à distance-0,081[0,101]0,196*[0,115]0,452***[0,120]
Documents
à distance
0,277**[0,113]0,115[0,118]0,289**[0,113]
Logiciels à distance-0,084[0,103]-0,093[0,111]0,208*[0,107]
Groupe0,053[0,089]-0,063[0,099]0,023[0,096]
Réglementation0,468***[0,105]0,250**[0,117]0,062[0,116]
Nouvelle technologie0,704***[0,108]0,733***[0,113]0,004[0,114]
RD en interne0,388***[0,091]0,408***[0,097]0,025[0,098]
Concurrence
sur le marché
0,032[0,091]0,027[0,096]-0,159[0,103]
Croissance
du CA
0,252***[0,076]0,188**[0,085]-0,032[0,083]
Taille0,122*[0,067]0,078[0,076]0,055[0,072]
Diplôme-0,089[0,070]0,012[0,072]0,243***[0,065]
Score créativité0,088***[0,026]0,094***[0,029]0,010[0,027]
Industrie0,060[0,203]0,416**[0,212]-0,537***[0,198]
Construction-0,065[0,204]0,040[0,225]-0,724***[0,194]
Commerce0,017[0,198]0,256[0,216]-0,750***[0,188]
Transport-0,085[0,212]0,340[0,217]-0,282[0,203]
Finance0,247[0,191]0,065[0,223]-0,736***[0,176]
Autres0,010[0,190]-0,203[0,211]-0,322*[0,182]
Constante-1,643***[0,269]-2,217***[0,285]-2,037***[0,280]
Observations1468
Pseudo-
likelihood
3228,853

Tableau A.3 Probit trivarié – test de robustesse

Écarts-types robustes entre crochets
*** p 0,01, ** p 0,05, * p 0,10

136Note : ce modèle de type Probit trivarié simple teste la relation entre la variable instrumentale (Flexibilité horaire) les trois variables expliquées : Innovation produit, procédé et télétravail. Les résultats indiquent qu’il n’existe pas de relation significative entre la variable Flexibilité horaire et l’innovation de produit et de procédé. De plus, la variable Flexibilité horaire a un impact positif et significatif au seuil de 1 % sur la démarche de télétravail. De fait, la variable Flexibilité horaire constitue bien un bon instrument comme l’attestent aussi les tests tableau A.5. Enfin, la corrélation des termes d’erreur entre l’équation du télétravail et de l’innovation est significative. Ce résultat indique qu’il est nécessaire de prendre en considération l’interdépendance entre ces deux variables via un modèle de type Probit trivarié.

Tableau A.4 Probit bivarié – test robustesse

VariablesPratiques innovantes
(1)(2)
Innovation produitÉcarts-typesInnovation procédéÉcarts-types
Télétravail-0,045[0,098]0,072[0,109]
Autonomie au travail-0,061[0,051]-0,094*[0,057]
Polyvalence0,304***[0,112]0,281**[0,124]
Tutorat0,127[0,096]0,059[0,108]
Communication0,047[0,100]-0,008[0,108]
ISO 180010,078[0,080]0,147*[0,087]
RSE0,207**[0,097]0,202*[0,110]
Mails à distance-0,043[0,104]0,218*[0,114]
Documents à distance0,355***[0,109]0,144[0,116]
Logiciels à distance-0,029[0,101]-0,070[0,111]
Groupe0,063[0,090]-0,064[0,099]
Réglementation0,497***[0,105]0,258**[0,117]
Nouvelle technologie0,728***[0,106]0,737***[0,112]
RD en interne0,408***[0,092]0,415***[0,097]
Concurrence sur le marché0,011[0,093]0,014[0,096]
Croissance du CA0,246***[0,077]0,186**[0,085]
Taille0,147**[0,069]0,081[0,075]
Diplôme-0,023[0,065]0,038[0,068]
Score créativité0,097***[0,026]0,095***[0,029]
Industrie-0,128[0,190]0,349*[0,198]
Construction-0,298[0,191]-0,041[0,207]
Commerce-0,177[0,183]0,172[0,196]
Transport-0,226[0,210]0,295[0,209]
Finance0,059[0,176]-0,026[0,203]
Autres-0,094[0,184]-0,248[0,204]
Constante-1,633***[0,268]-2,218***[0,281]
Observations1468
Pseudolikelihood2153,124

Tableau A.4 Probit bivarié – test robustesse

Écarts-types robustes entre crochets
*** p 0,01, ** p 0,05, * p 0,10

137Note : ce modèle met en avant l’importance de l’utilisation d’un modèle de type trivarié récursif permettant de prendre en considération d’une part l’interdépendance entre une démarche de télétravail et l’innovation produit (cf. annexe A.3) et d’autre part l’endogénéité de la variable télétravail dans l’analyse. Les résultats associés à la variable Télétravail dans ce modèle diffèrent de ceux associés au modèle de type Probit trivarié récursif. En effet, la variable Télétravail n’est plus significative dans l’équation expliquant l’innovation produit. De fait, il est nécessaire de prendre en considération l’interdépendance entre les trois types d’innovation tout en instrumentant (Flexibilité horaire) la variable Télétravail pour corriger le biais d’endogénéité.

Tableau A.5 Test de validité de l’instrument

Test de Sous-identification61,281***
Statistique F Cragg-Donald Wald63,864
Stock et Yogo 10 %16,38
Stock et Yogo 15 %8,96
Stock et Yogo 20 %6,66
Stock et Yogo 25 %5,53

Tableau A.5 Test de validité de l’instrument

138La statistique Cragg Donald et le test de sous-identification valident la robustesse de l’instrument.

Tableau A.6 Test de log-vraisemblance

VariablesModèlesLog-Vraisemblance
TélétravailProbit-1081,4699
Innovation produitProbit-1271,5624
Innovation procédéProbit-1034,2857
Télétravail et Innovation produitProbit bivarié-2349,5034
Télétravail et Innovation procédéProbit bivarié-2115,5250

Tableau A.6 Test de log-vraisemblance

Tableau A.7 Corrélation entre les variables – modèles Probit tri varié recursif

(1)(2)(3)(4)(5)(6)(7)(8)(9)(10)(11)(12)(13)(14)(15)(16)(17)(18)(19)(20)
(1) Télétravail1
(2) Autonomie au travail,1781
(3) Polyvalence,097,0831
(4) Tutorat,066,067,1171
(5) Communication,250,132,121,3301
(6) ISO 18001-,026,008,017,121,0631
(7) RSE,109,096,091,298,203,1671
(8) Mails à distance,277,148,103,184,344,066,0931
(9) Documents à distance,296,139,094,181,295,001,080,5801
(10) Logiciels à distance,245,116,057,148,228,053,084,450,6021
(11) Taille,098-,013,138,193,223,084,242,138,142,1081
(12) Diplôme,325,213,069,213,414-,041,155,275,287,186,0891
(13) Groupe,152,034,096,275,408,069,239,220,193,154,256,2521
(14) Score créativité,188,203,127,339,373,177,327,242,259,254,230,315,3021
(15) Réglementation,042,055,052,134,133,058,183,056,009,048,117,068,056,2091
(16) Nouvelle technologie,068,074,049,117,209,035,153,130,053,108,099,055,068,192,4921
(17) RD interne,126,045,005,158,142,138,190,157,166,155,116,235,103,207,067,0811
(18) Concurrence sur le marché-,065-,082-,027-,025-,053,004-,051-,069-,055-,021-,024-,086-,049-,085,017-,014,0031
(19) Croissance du CA,047,116,0007,046,056,009,072,079,106,113,040,069,062,124,062,082,049-,1041
(20) Flexibilité horaire,204,131,144,227,337,043,190,185,182,146,175,287,298,286,065,082,085-,047,0461
tableau im10

Tableau A.7 Corrélation entre les variables – modèles Probit tri varié recursif

Tableau A.8 Corrélation entre les variables innovation produit, procédé et télétravail

(1)(2)(3)(4)
(1) Innovation produit1
(2) Innovation procédé0,5001
(3) Télétravail0,1020,0821
(4) Flexibilité horaire0,1630,0820,2051

Tableau A.8 Corrélation entre les variables innovation produit, procédé et télétravail

Tableau A.9 Coefficients de corrélation entre les termes d’erreur du Probit trivarié récursif

Association lexicaleCoefficientsÉcarts-typesp-value
𝜌12 – Innovation produit et innovation procédé0,7810,086< 0,01
𝜌13 – Innovation produit et télétravail-0,5360,189< 0,01
𝜌23 – Innovation procédé et télétravail-0,1740,204> 0,10

Tableau A.9 Coefficients de corrélation entre les termes d’erreur du Probit trivarié récursif

139Note : 𝜌12 coefficient de corrélation entre l’innovation de produit et de procédé ; 𝜌13 coefficient de corrélation entre l’innovation de produit et la démarche de télétravail ; 𝜌23 coefficient de corrélation entre l’innovation de procédé et le télétravail.

Notes

  • [1]
    Télétravail de manière officielle et contractualisée.
  • [2]
    Source : Le comptoir de la nouvelle entreprise de Malakoff Médéric Humanis, deuxième édition de l’étude sur le télétravail.
  • [3]
    Ordonnance numéro 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail.
  • [4]
    Article L121-4 du code du travail.
  • [5]
    Hors fonctionnaires et non-salariés.
  • [6]
    Chiffres du Ministère de la sécurité sociale du gouvernement du Grand-duché de Luxembourg – 10/09/2019.
  • [7]
    En moyenne, les innovations de produit et de procédé concernent respectivement entre 32,30 % et 19,10 % des entreprises. Toutefois, quand les entreprises proposent du télétravail, ces chiffres passent alors à 41,80 % et 26,10 %.
  • [8]
    Questionnaire réalisé auprès de 2819 entreprises représentatives du Luxembourg (cf. partie 3.1).
  • [9]
    Les espaces de coworking font référence à des lieux de travail partagés regroupant des individus de divers milieu favorisant ainsi les échanges de connaissances.
  • [10]
    Exemple : EDF propose un dispositif nommé « Welcome » comportant 14 espaces de coworking.
  • [11]
    Commission européenne (2017), « Proposition de directive du parlement Européen et du conseil concernant l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et aidants et abrogeant la directive 2010/18/UE du Conseil ».
  • [12]
    La Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) est définie comme « concept dans lequel les entreprises intègrent les préoccupations sociales, environnementales, et économiques dans leurs activités et dans leurs interactions avec leurs parties prenantes sur une base volontaire » – Définition du ministère de la Transition écologique et solidaire, 07/02/19.
  • [13]
    L’innovation technologique comprend les innovations de produit et celles de procédé.
  • [14]
    « La déspatialisation fait référence à la perte d’une proximité physique et psychosociologique et désigne, en d’autres mots, les effets psychosociologiques liés à l’éloignement physique des travailleurs, dans le cadre d’une relation d’emploi, donc d’un lien de subordination ou d’une relation de contrôle. » (Taskin, 2010).
  • [15]
    21,9 % de l’échantillon déclarent avoir une démarche RSE.
  • [16]
    32,30 % de l’échantillon déclarent avoir innové en matière de produit dans les trois ans contre 19,10 % au niveau du procédé.
  • [17]
    22,10 % de l’échantillon déclarent avoir une démarche de télétravail.
  • [18]
    Enquête l’OBservatoire du télétravail et de l’ERGOstressie (OBERGO) sur le télétravail du 25 janvier 2016.
  • [19]
    Source : Centre d’Etude et d’Analyse Stratégique – Le développement du télétravail dans la société numérique de demain. Novembre 2009 (https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/094000573.pdf)
  • [20]
    2 modèles bivariés : Télétravail et innovation produit ; Télétravail et innovation procédé.
  • [21]
    Corrélation supérieure à 0,4 : Logiciels à distance et mails à distance ; documents à distance ; Nouvelles technologies et Réglementation.
  • [22]
    Bernard, J. et A. Torre (1994), « La dynamique d’innovation de R-D des PMI françaises », Revue internationale PME, vol. 7, nos 3-4, p. 29-41. op. cit.
  • [23]
    Changements de réglementations dans le domaine de l’environnement, en matière d’emploi et autres changements de réglementations.
  • [24]
    Score de créativité : 1) Rotation salariale, 2) Prime, 3) Avantage en nature, 4) Formation créativité, 5) Brainstorming, 6) Intervenant universitaire, 7) Intervenant expert.
  • [25]
    Diplôme : (1) 0 % à 5 %, (2) 6 % à 49 %, (3) 50 % à 94 %, (4) 95 % à 100 %.
  • [26]
    Autonomie au travail : (1) 0 % à 5 %,(2) 6 % à 49 %, (3) 50 % à 100 %.
  • [27]
    Secteurs : Industrie, construction, commerce, transport, TIC, finance, autres.
  • [28]
    Existe-t-il un système de tutorat des salariés au sein de votre entreprise ?
  • [29]
    ISO 18 001 : management de la santé et de la sécurité au travail.
  • [30]
    Le manque de ressource financière constitue une barrière interne à l’innovation.
  • [31]
    Changement de réglementation dans le domaine de l’environnement, en matière d’emploi et autres changements de réglementations.
  • [32]
    Score Créativité : brainstorming, rotation, prime, avantage en nature, formation, intervenant.
  • [33]
    Proportion d’entreprises proposant un accompagnement via le tutorat en fonction du secteur : Industrie (15,80 %) ; Construction (9,90 %) ; Commerce (23,00 %) ; Transport (6,10 %) ; TIC (9,00 %) ; Finance (21,60 %) ; Autres (14,60 %).
  • [34]
    Proportion d’entreprises proposant un accompagnement via le tutorat en fonction de la proportion de salariés ayant un diplôme dans l’enseignement supérieur : 0 % à 5 % (41,40 %) ; 6 % à 49 % (33,90 %) ; 50 % à 94 % (21,40 %) ; 95 % à 100 % (3,30 %).
  • [35]
    Impact positif et significatif du secteur des TIC et de la proportion de salariés diplômés sur la probabilité d’avoir une démarche de télétravail.
  • [36]
    L’innovation ouverte fait référence à la façon dont les ressources internes sont affectées par l’environnement externe. Ce type d’innovation se fonde sur le partage et la collaboration (Chesbrough et al., 2006).
  • [37]
    Cloud computing : Accès via Internet à des données et services sur un serveur distant, non hébergé dans les locaux de l’entreprise.
  • [38]
    Le tutorat constitue une pratique d’encadrement pédagogique ayant pour objectif de transmettre des connaissances et/ou des techniques professionnelles.
Français

De nombreuses études analysent l’impact du télétravail et les déterminants de l’innovation. Toutefois, rares sont celles qui analysent la relation entre ces deux formes d’innovations, sociale (le télétravail) et technologique (produit ; procédé). Cet article a pour objectif de contribuer à la compréhension de cette relation. Pour ce faire, une enquête réalisée par le Luxembourg Institute of Socio Economic Research (LISER) auprès de 1468 entreprises représentatives du Luxembourg est mobilisée. Le principal résultat met en avant l’impact positif d’une démarche de télétravail sur l’innovation de produit. Plus précisément, cet article met en lumière des déterminants communs entre une démarche de télétravail et l’innovation (produit ; procédé).
Classification JEL : M14, O15, O31, O32.

  • innovation
  • TIC
  • RSE
  • télétravail
  • entreprises
  • Luxembourg
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Jimmy Merlet
Jimmy, Merlet, Univ Rennes, CNRS, CREM – UMR6211, F-35000 Rennes France ; Institut Mines Telecom, Business School (LITEM). Contact : jimmy.merlet[at]gmail.com
Nicolas Poussing
Nicolas, Poussing, Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), 11 Porte des Sciences, 4366 Esch/Alzette, Luxembourg ; CNRS, CREM – UMR6211, F-35000 Rennes France. Contact : nicolas.poussing[at]liser.lu
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Mis en ligne sur Cairn.info le 04/02/2021
https://doi.org/10.4000/rei.9266
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