Peu de travaux analysent ce qui se passe entre enfants, dans le temps jamais achevé de la découverte, pas à pas, des déficiences et de leurs conséquences sur les plans réel, fantasmatique et imaginaire.
Les travaux sur le développement de l’enfant montrent que la « réalité » des déficiences se construit d’abord à partir de la manière dont l’enfant les voit exister dans le regard et la parole des personnes qui prennent soin de lui. Par la suite, ou en même temps, il va s’attacher, si personne n’y fait entrave, à co-construire avec ses pairs – amis, ennemis, cousins, cousines – cette réalité. C’est précisément de la co-construction de sens et de représentations entre enfants que cet article traite.
Nous formulons l’hypothèse que si les enfants entre eux peuvent travailler sur l’énigme que représente le « handicap », alors cette étrangeté pourra ne plus être pensée comme un tabou, un secret dont la levée pourrait menacer soi ou l’autre. Or, pour que l’énigme que pose le handicap soit résolue au moins provisoirement, elle ne doit pas être pensée comme relevant du tabou.
Dans ce processus, nous mettons le focus sur la honte et la culpabilité car ils ont un impact important dans les processus de rencontre entre l’enfant et ses pairs.
L’ambiguïté, le désir de percer le mystère suscitent chez l’enfant la recherche du sens caché. Si l’étrangeté amène à ne pas savoir quel chemin emprunter et parfois à se heurter à des impasses et à rencontrer des embûches, elle peut aussi être source de créativité…