En milieu médico-social, l’accès aux soins des migrants allophones ne peut se faire qu’avec la collaboration d’interprètes professionnels. Ceux-ci, dans leur qualité de passeurs de langues, assurent les rendez-vous entre le soignant et le patient. Récemment, le cadre légal et les limites déontologiques de leur action ont été fixés par des arrêtés, des référentiels et des chartes nationales. En France, notamment, la promotion de cette activité a conduit en 2019 à la création du Réseau de l’interprétariat médical et social (rimes).
Or, une clinique qui se retrouve en situation d’interprétariat ne va pas sans produire des résistances parmi les praticiens. Chez certains psychologues, par exemple, la modification du cadre par l’introduction d’un tiers qui traduit peut générer de la suspicion. En effet, cette modification est parfois identifiée comme chronophage, déformatrice des données cliniques, nuisible au transfert et même traumatogène pour l’interprète.
L’expérience de l’auteur comme psychologue clinicien dans un centre médical accueillant des personnes exilées, l’a amené à questionner les enjeux et les limitations d’un tel dispositif pour la psychanalyse appliquée à la thérapeutique en institution. Au préalable, il est nécessaire de poser ici quelques repères sur les conditions spécifiques de cette pratique.
La mission principale du dispositif consiste à faciliter l’accès aux soins de personnes migrantes qui, du fait de leur exposition à des événements potentiellement traumatiques et de leur situation de précarité sur le territoire français, sont en souffrance psychique…