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L’approche phénoménologique des questions féministes a longtemps été ignorée en France. Pourtant, et c’est ce qui fait du phénomène un quasi paradoxe, c’est à Simone de Beauvoir que nous devons de l’avoir magistralement inaugurée, et qui plus est à partir des postulats de Maurice Merleau-Ponty. « Mon existence comme subjectivité ne fait qu’un avec mon existence comme corps », écrit le philosophe dans une formule-manifeste. Pour la phénoménologie, l’existence est une « incarnation perpétuelle » qui implique que chacun se découvre toujours « en situation », immergé dans un contexte historique et culturel donné. Notre corps, précise Merleau-Ponty, habite l’espace et le temps, il nous fait accéder à un sens qui n’est pas donné de surplomb, dans l’abstraction d’un esprit purement rationnel, mais qui s’enracine dans l’expérience vécue, c’est un sens qui adhère au monde, un sens incarné. Le corps phénoménologique se saisit dans ses deux dimensions cognitive et intersubjective : vecteur de significations, il est tout autant fondement de la relation aux autres. L’existence physique revêt ainsi une portée ontologique, elle est la condition indépassable de la conscience simultanée de soi, d’autrui et du monde.
De façon étrange, la phénoménologie n’envisage pas la dimension sexuée de la corporéité qu’elle érige pourtant au rang de condition même de la réflexivité. Le biais masculin des œuvres fondatrices est flagrant : le corps phénoménologique est en fait un corps générique et universel, un corps mâle don…
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- Mis en ligne sur Cairn.info le 04/04/2018
- https://doi.org/10.3917/cite.073.0081

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