CAIRN.INFO : Matières à réflexion

Depuis l’origine de l’Homme, du moins depuis que nous avons des traces écrites de ses pensées et de ses sentiments, et, quelles que soient les formes d’évolution de la condition humaine, le thème de l’amour et de toutes ses variantes occupe une place privilégiée. Après “Le cantique des Cantiques” de la Bible, les poésies de l’ancienne Égypte ou les contes des “Mille et une nuits”, “Le banquet” de Platon, la poésie des troubadours ou des romantiques, je ne vais pas supposer que nos contributions contemporaines mettront enfin un point final à nos réflexions, à nos doutes, à nos commentaires sur ce thème.
Wittgenstein avait inscrit “amour” dans sa liste des “mots faux” (ein falsches Wort), c’est-à-dire de ces mots dont on ne sait de quoi il est parlé lorsqu’ils sont utilisés. Mais, ne serait-ce pas le cas de nombreux mots, voire de tous ? Je connais beaucoup de mots qu’au sein de notre microcosme nous utilisons sans guère nous assurer que nous parlons bien de la même chose, par exemple ‘contact’, ‘champ’, ‘self’, ‘esthétique’…, et c’est même le cas avec des concepts à la portée plus restreinte comme ‘introjection’, ‘frontière-contact’ etc.
Alors que j’étais jeune gestalt-thérapeute, une de mes premières patientes, après deux ou trois ans de séances hebdomadaires, arrive un jour en séance la mine défaite, manifestement en un état d’angoisse proche de la panique. La seule chose qu’elle peut me dire : “J’ai besoin de savoir si vous m’aimez”. Percuté et déséquilibré par l’inattendu et l’urgence que je perçois dans la demande, à tort ou à raison je décide de répondre : “Oui, je vous aime…” et après le temps d’une courte respiration, j’ajoute : “Je vous aime… pas comme un père, pas comme un amant ou un ami, pas comme un frère …

Français

Je n’aime pas utiliser le concept de “relation”. Trop large, trop vague. Bien entendu, je sais qu’une relation peut être “soignante”, mais je sais aussi que toute psychopathologie a été créée par la relation. Aussi, pas à pas, j’essaie d’explorer certains composants de la “relation“ thérapeutique qui peuvent focaliser notre intérêt et contribuer à déplier et comprendre ce qui se passe dans ce face à face si spécifique. L’intime est un concept intéressant parce qu’il désigne à la fois au “plus intérieur“ et une manière très particulière d’être très proche avec l’autre. Peut-être que “rencontre“ pourrait être considéré comme une extension de notre paradigme de contact, lorsque le contact naît et se développe entre deux personnes ? Dans notre contexte thérapeutique, on fait souvent référence à “l’amour“. Est-ce une référence appropriée ? Pourquoi pas plutôt la tendresse qui me semble mieux désigner une attitude thérapeutique qui n’exclut pas pour autant la confrontation et la distance. Des pistes à continuer de creuser…

  • amour
  • tendresse
  • intime
  • intimité
  • rencontre
  • face à face
  • relation
  • relation thérapeutique
Jean-Marie Robine
Gestalt-thérapeute, psychologue clinicien, didacticien. Cofondateur et souvent responsable/directeur/président ou autre de l’IFGT, de la SFG, du CEGT, de l’EAGT, de la revue Gestalt, des Cahiers de Gestalt-thérapie, auteur de quelques livres de gestalt-thérapie, éditeur et responsable de l’Exprimerie.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 14/03/2022
https://doi.org/10.3917/cges.046.0011
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