CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Le fait qu’un enfant de la famille souffre d’une pathologie ou soit atteint de déficiences innées ou acquises « attaque » le lien fraternel, et influence les relations entre les frères et sœurs, ainsi que leurs évolutions. L’analyse de ces situations met en lumière des processus masqués et peu repérables. Cet impact peut être source de souffrance, qui pourrait être apaisée ou soutenue ; c’est pourquoi le chercheur, comme le clinicien, doivent se donner les moyens de comprendre le fondement, le fonctionnement et les fonctions du lien fraternel pour mieux saisir la manière dont le handicap, la maladie de l’un des membres de la fratrie affecte et transforme ce lien.

2Cet article réunit des auteurs qui, dans leurs recherches, ont travaillé avec des sujets ayant des pathologies différentes : handicap de naissance ou acquis, handicap psychique, maladie grave. Il est pertinent de traiter de ces différentes situations dans un même article, car s’il y a des spécificités pour chacune des pathologies, pour autant, il y a des points communs dans les vécus des fratries de l’enfance à l’âge adulte, qu’il est intéressant de repérer.

3La fratrie est un objet de recherche complexe, jusqu’alors peu étudié dans le champ de la psychanalyse ou essentiellement dans sa dimension familiale, groupale et, plus particulièrement, dans une dynamique verticale (Kaës, 1993 ; Ruffiot, 1981). C’est, néanmoins, un champ de recherche qui se développe (Boucher, Derome 2006 ; Claës, Poirier, Arseneault, 2003 ; Claudon, 2006 ; Korff-Sausse, 2006 ; Poujol, Scelles, 2014 ; Scelles, 2010 ; Schauder, 1998 ; Williams et coll, 2003). Par ailleurs, les travaux nord-américains ont mis en lumière des aménagements mis en place par les fratries dans une recherche de bien-être (Pitman, Matthey, 2004). Tous ces travaux ont permis des avancées dans la prise en compte et les aides apportées aux frères et sœurs, ce qui est mentionné dans l’article. Toutefois, l’analyse de cette littérature montre, également, que des questions, pourtant centrales, restent peu traitées. C’est ce qui est souligné à la fin de ce travail.

Fratrie et handicap : Évolutions sociÉtales

4Dans sa composition et son fonctionnement, la fratrie a subi, ces dernières années, des modifications importantes. Moins nombreux qu’auparavant, les membres de la fratrie vivent désormais plus longtemps ensemble (Castellan, 1980 ; Fine, 2007). L’autorité du chef, père ou mère de famille, déclinerait au profit de la création d’une vie de groupe ou de clan incluant les frères et sœurs (Fourez, 1999). Alors, les familles sont davantage unies par un esprit consensuel et des sentiments affectueux, que par des contrôles formels et institutionnels (Cherlin, 1978 ; Angel, 1994). D’un autre côté, l’augmentation des divorces et les recompositions familiales contribuent à ce que le centre de gravité des fratries ne soit plus nécessairement le couple parental (Théry, 1996). Poittevin (2006) montre que le degré de consanguinité influence la qualité des rapports de la fratrie recomposée pour les demi et quasi-frères, les frères germains n’ayant pas nécessairement la priorité dans les choix de ces liens électifs. Langevin (1991) souligne l’impact des rapports entre les sexes dans la fratrie sur le devenir des relations sociales et sexuelles de ses membres.

5Pour ce qui concerne le handicap, la politique inclusive met en lumière les difficultés des personnes handicapées à créer et à entretenir les liens sociaux électifs extrafamiliaux (Winance, 2004 ; Gardou, 2012). Poujol et Scelles (2014) mettent en lien cette situation avec la nature des relations fraternelles vécues dans l’enfance.

6S’agissant de la clinique du handicap, le développement des soins précoces et les pratiques d’inclusion amènent plus fréquemment les professionnels à rencontrer des frères et sœurs. De ce fait, ils les connaissent mieux et sont davantage confrontés à leurs difficultés et à leurs demandes. De leur côté, les jeunes parents se montrent de plus en plus sensibles au vécu de la fratrie, s’interrogeant très tôt sur les répercussions du handicap. En outre, le vieillissement des personnes handicapées conduit les frères et sœurs à réfléchir davantage à l’aide et au soutien qu’ils devront leur apporter, une fois leurs parents trop âgés pour s’en occuper ou décédés (Rossetti, Hall, 2015 ; Gargiulo, Salvador, 2009).

7Enfin, le manque, en France, d’établissements spécialisés dans la prise en charge de certains adolescents et jeunes adultes, en particulier autistes ou atteints de handicaps multiples, est important (Schauder, Mercier, 2007) et contraint certaines familles à accueillir à nouveau la personne handicapée ou malade à plein temps au domicile. La fratrie est alors, évidemment, extrêmement sollicitée, tant aux plans matériel qu’affectif. Pour les pathologies, dont l’apparition est plus tardive comme la schizophrénie, la transformation du système de santé, qui passe par la réduction des durées d’hospitalisation et l’augmentation des prises en charge au domicile, renforce les contextes de cohabitation avec un frère ou une sœur malade dans la maison familiale (Davtian, Scelles, 2013 ; Haley, 1980).

8Si la fratrie est donc davantage considérée, voire impliquée, dans la prise en charge de l’un de ses membres. Cela rend de plus en plus important le fait de penser l’impact du handicap ou de la maladie psychique sur les liens fraternels.

Quelques éléments de théorie sur la dynamique fraternelle

9Reconnu par la loi et la société, « être frère » est un statut qui s’impose à chacun des membres de la fratrie, du fait de l’existence de parents communs. En revanche, « se sentir frère » est le fruit d’une coconstruction évolutive, car la tonalité et la qualité des liens peuvent changer au fil de l’histoire du groupe familial, de la fratrie et de ses membres. Ces liens peuvent, en effet, se modifier dans leur qualité et leur forme, tout au long de la vie, même quand les enfants ne cohabitent plus (Tilmans-Ostyn, Meynckens-Fourez, 1999 ; Sherman, Lansford, Volling, 2006 ; Whiteman, McHale, Crouter, 2010).

10Il convient de différencier le pair-frère « presque pareil » de la même génération, premier semblable que l’enfant fréquente, du pair « copain de la crèche, de l’école… ». En effet, parmi tous les pairs que la vie lui permet de rencontrer, l’enfant choisit de faire de certains des amis, de manière de plus en plus indépendante des parents au fil du temps. En revanche, ses frères et sœurs lui sont imposés par ses parents. S’il peut les détester, les aimer, les rejeter, il n’est pas en son pouvoir de faire qu’il ne soit plus son frère ou sa sœur.

11Dans le domaine de la psychologie, un regain d’intérêt pour les relations horizontales est né, entre autres, en suite de travaux de psychologues et d’éthologistes s’appuyant sur des observations d’interactions de bébés avec leurs pairs (Montagner, 1978 ; Bank, Kahn, 1982 ; Bedford, 1989 ; Bowlby, 1984). Selon Adler (1958), c’est le « complexe d’infériorité » au sein de la fratrie, qui serait à l’origine des névroses, la dépendance de l’enfant à l’égard d’autrui poussant l’enfant à développer une volonté de pouvoir à visée réparatrice. Sulloway (1966), Furman et Buhrmester (1985), Stocker, Lanthier et Furman (1997), Stocker et McHale (1992) observent que, durant l’enfance, les relations fraternelles sont marquées par des conflits et une rivalité fraternelle dans laquelle chacun des enfants tente de bénéficier des ressources familiales et, plus particulièrement, de l’investissement parental. Ainsi, la fratrie serait-elle un espace de compétition entre enfants, à l’intérieur duquel chacun cherche à se faire une place, contre ou en collaboration, avec les autres.

Places, fonctions et rôles du frère

12Il est impossible, dans cet article, de détailler toutes les fonctions du frère dans la vie intrapsychique et relationnelle de l’enfant. Ne sont rapportés ici que les aspects de ces fonctions et fonctionnements particulièrement impactés par le handicap ou la maladie.

13De sa conception jusqu’à l’âge adulte, le frère joue un rôle fondamental dans la construction identitaire, la gestion de l’agressivité et l’acquisition des compétences sociales (Bourguignon, 1999 ; Dunn, Slomkowski, Beardsall, 1994 ; Mendelson, Aboud, Lanthier, 1994). Si ce lien est source de honte et de culpabilité, il est aussi celui qui permet à chacun de se socialiser, de gérer psychiquement la violence et l’agressivité inhérentes à l’ontologique dépendance de l’enfant à l’autre.

14La fratrie participe à la construction identitaire, via des processus d’identification/différenciation (Wallon, 1934 ; Lacan, 1949 ; Bourguignon, 1999 ; Cahn, 1962). Langlais (1991) parle d’« empiètement », de « frôlement » entre les frères et sœurs, provoquant ce qu’il appelle « la non-possibilité de l’indifférence » et « la non-indifférence ». Cela permet de comprendre pourquoi ce qui arrive à un enfant, un adolescent, un adulte, n’est jamais tout à fait extérieur à ses frères et sœurs. Aussi, chacun des enfants de la fratrie peut-il vivre la pathologie de l’autre comme étant la sienne, quoi qu’il en soit sur le plan de la réalité. Les frères et sœurs peuvent servir de lieu de projection de différentes problématiques internes du sujet et, en cela, ils participent à la gestion de ses conflits intrapsychiques et intersubjectifs. De ce fait, la gestion des conflits internes surgissant à chacune des étapes du cycle de la vie peut être favorisée ou entravée via ce lien affectif non érotisé (Scelles, 2010 ; Brusset, 2003, Cole, Kerns, 2001 ; Dunn, 1983).

15Quant à la construction psychique du sujet, Kaës (2008) parle du complexe fraternel comme étant une expérience fondamentale de la psyché humaine, qui peut jouer un rôle d’évitement, de modération, voire de substitution du complexe œdipien à toutes les étapes de son élaboration. Il doit donc se concevoir dans une articulation avec le complexe d’Œdipe. Il joue un rôle dans les premiers temps de la construction des limites moi/non-moi avant l’avènement de la tiercéité et, donc, avant l’Œdipe, mais également plus tard, en particulier, à l’adolescence et après le décès des parents.

La fratrie : un groupe d’appartenance

16Lacan (1938) considère qu’avant d’être reconnu comme un même que soi, le frère, ou la sœur, est d’abord perçu comme un rival, un « intrus » qui s’impose dans le triangle œdipien et avec lequel il faut trouver une façon de cohabiter, de composer et de partager. Le frère peut avoir, alors, pour fonction de favoriser le dégagement du lien à l’objet primaire, les parents, ce qui ouvre l’enfant aux relations sociales (Mollo-Bouvier, 1991 ; Zaouche-Gaudron, 2005).

17Le groupe fraternel est animé par des mouvements de haine, d’amour, d’agressivité, de tendresse, dont le jeu plus ou moins souple et évolutif créé les conditions pour que l’enfant, l’adolescent acquiert les compétences sociales nécessaires pour, ainsi, faire génération à son tour. En effet, les liens d’amour, de haine, de complicité, de rivalité, les corps à corps vécus entre enfants dans la famille sont le terreau sur lequel les liens aux collègues, aux amis, aux amants se construiront et évolueront (Bourguignon, 1999, Benedek, 2013 ; Troupel-Cremel et coll., 2009).

18Par la suite, grandir, nouer des alliances, des pactes avec les pairs permet de faire évoluer le groupe famille. Gutton (1993) parle du « pubertaire de fratrie » pour signifier l’importance du lien fraternel dans le processus d’adolescence et la possibilité pour l’enfant de pouvoir quitter sa famille lors du second processus de séparation. Durant cette période, une évolution des liens aux parents, aux frères et sœurs, réactive des conflits laissés dans l’impasse ou jamais abordés, en particulier ceux relatifs aux identifications, aux pactes de loyauté familiaux (Boszormenyi-Nagy, Krasner, 1991 ; Neuburger, 1995) et à la dette de vie (Bydlowsky, 1997).

19Si le lien fraternel a sa dynamique propre, celle-ci est influencée par les liens aux parents, par leurs transmissions conscientes et inconscientes, et ce qu’ils projettent de leur propre vécu fraternel sur leurs enfants. D’un autre côté, ils jouent un rôle de contenance et de pare-excitation essentiel, qui déterminera la façon dont chacun des enfants apprendra à vivre avec ses pairs (Kaës, 2008).

Quand un frère est en situation de handicap ou malade

20Les thérapeutes familiaux, qui se réfèrent à la théorie systémique, contextuelle ou psychanalytique, ont beaucoup contribué à faire sortir la fratrie de l’ombre. Chacun, avec un angle d’approche différent, a aidé à montrer que le handicap ou la maladie grave avaient un impact désorganisateur dans la structure du système ou des sous-systèmes familiaux (Aubert-Godard, Scelles, 2006 ; Gardou, 1999 ; Gargiulo, Salvador, 2009 ; Kaës, 2008 ; Miermont, 1997 ; Scelles, 2010 ; Tilman et coll., 1999).

21Selon Tseng et McDermott (1979) les interactions familiales évoluent sur trois axes :

  • axe de développement (façon dont les rôles s’organisent au fil du temps entre les membres de la famille, du mariage des parents au départ des enfants devenus adultes) ;
  • axe de structuration (évolution des membres de la famille et de leurs interactions) ;
  • axe de fonctionnement (famille comme système ayant ses propres régulations).

22Le handicap ou la maladie peuvent entraîner des dysfonctionnements sur un ou plusieurs de ces axes, mais pas nécessairement sur tous, et pas de la même manière à différents moments de la vie de la famille.

Retentissements sur les frères et sœurs et sur les liens fraternels

23La pathologie de l’un des enfants affecte plus ou moins temporairement les capacités de contenance et de pare-excitation parentales (Schauder, Durant, 2004), ce qui affecte chacun des enfants de manière spécifique et transforme les liens qu’ils entretiennent entre eux. En effet, l’annonce d’un handicap constitue un traumatisme pour les parents, qui entraîne une sidération de leur pensée, de manière plus ou moins prolongée ; ils sont alors dans l’incapacité d’assurer la fonction contenante et de symbolisation décrite par Bion (1983) auprès de leurs enfants. Autrement dit, ils ne peuvent à ce moment-là, aider leurs enfants à trouver un sens, une manière de penser et de se représenter ce qui arrive (Sausse, 1996 ; Rimbault, Royer, 1967).

Une énigme

24La façon dont chacun des membres de la fratrie perçoit le handicap, la maladie et ses conséquences dans le regard de ses parents, des professionnels, des camarades de classe et des personnes extérieures à la famille, est centrale dans le processus de subjectivation de cette situation. Dans la littérature, les auteurs citent, en particulier, les effets de souffrance générés par le fait que médecins et parents ne parlent pas suffisamment aux enfants de cette réalité énigmatique. Ils constatent que si l’adulte n’évoque pas avec eux la maladie, les enfants s’interdisent eux-mêmes d’en parler (Scelles, 2010 ; Gargiulo, Salvador 2009). D’un autre côté, le sujet en situation de handicap peut souffrir du fait que sa pathologie soit considérée comme étant à l’origine de toutes les difficultés rencontrées par le couple de ses parents et ses frères et sœurs.

Des conséquences sur le cycle de vie familial

25Comme pour tout sujet, certaines étapes du cycle de la vie individuelle et groupale provoquent des changements, parfois des crises, ouvrant soit sur une réorganisation soit sur une désorganisation des liens, salutaires ou traumatiques. Compte tenu du thème de cet article, il convient de relever les étapes suivantes comme particulièrement problématiques (Scelles, 2010) :

  • naissance de l’enfant handicapé ou annonce de la pathologie ;
  • toutes les étapes durant le cycle de la vie des frères et sœurs signant la « normalité » : entrée à l’école, apprentissage de la marche, de la lecture, permis de conduire, mariage… Plus généralement, tous les marqueurs d’autonomie avec des conséquences repérables sur les plans personnels, familiaux et extrafamiliaux ;
  • modification de la prise en charge, en particulier lors des intégrations scolaires, de l’orientation en établissement spécialisé, en internat…
  • modification de l’état de santé de la personne handicapée que ce soit dans un sens positif ou négatif.

Honte, culpabilité, jalousie…

26Dans l’ouvrage dirigé par Missonnier (2012), il est fait état de nombreux travaux, qui se sont attachés à évaluer la santé psychique des frères et sœurs. Chercheurs et praticiens notent la fréquence des sentiments de culpabilité et de honte vécus dans une grande solitude par les frères et sœurs, du fait que l’attention des parents est happée par le frère/sœur handicapé. Cunningham, Betsa et Gross (1981) constatent que les sœurs, en particulier, ont tendance à adopter un rôle de mère à l’égard de l’enfant malade, ce qui les rend anxieuses et stressées. Plusieurs travaux font, d’ailleurs, état de l’existence d’anxiété, de dépression, de sentiments de culpabilité et de honte (Williams et coll, 2003 ; Buhrmester, Furman, 1990). De son côté, l’enfant handicapé exprime une conscience très culpabilisante que ses déficiences font souffrir ses proches, il peut également nourrir une douloureuse jalousie envers la normalité de ses frères et sœurs (Missonnier, 2012 ; Sausse, 1996 ; Ciccone, 2009a).

Le silence, le non-dit et ses effets

27Dans tous les cas, on retrouve, dans la littérature, le fait que la pathologie est énigmatique et inquiétante pour les frères et sœurs et pour la personne elle-même, et suscite chez eux des questions sur les origines, la filiation, la sexualité, les liens aux parents, la castration… Ces pensées, ces questions ont des effets d’autant plus négatifs que l’enfant, qu’il soit atteint ou que son frère le soit, ne peut en parler à personne. Ce qui conduit à mettre en valeur l’importance des dispositifs permettant à l’enfant de parler, pour faire en sorte que l’événement handicap ou maladie puisse entrer dans une trame narrative entre enfants et entre enfants et adultes (Golse, 2006 ; Claudon, 2006 ; Boucher, Derome, 2006).

28Or, comme il a été dit en début d’article, la question du fraternel a longtemps été passée sous silence, les raisons de ce silence étant complexes. Parfois, il est mentionné un « non-dit », parfois, un « silence », ces deux termes recouvrant une même réalité pour l’enfant : le fait que peu ou pas de mots soient mis pour qu’il puisse se représenter cet événement « maladie » et ses conséquences. Face à cela, il imagine, le plus souvent seul, les raisons de ce silence, de cet interdit de savoir, de comprendre, de ce manque de « mots pour penser ». Il s’agit, le plus souvent, d’un pacte dénégatif (Kaës, 1989) : ce silence répond aux règles de régulation implicite du groupe fraternel, qui distinguent ce qui appartient au groupe et doit rester en son sein, de ce qui peut être communiqué à l’extérieur, en particulier aux parents. Celui qui ne comprend pas cette règle, ne la respecte pas, court le risque de se retrouver exclu du groupe, sans appartenance ou de faire souffrir le groupe ou certains de ses membres. Souvent, la période d’adolescence est favorable à la levée de ce silence, qui peut être envisagée comme une forme d’adaptation à la vulnérabilité ressentie chez les parents.

29Il y a des silences qui proviennent de la fratrie (silence de l’intérieur vers l’extérieur), les enfants ne parlent pas à leurs amis ; il y a le silence dans la fratrie c’est-à-dire entre les membres qui la composent ; enfin, il y a le silence sur la fratrie (silence de l’extérieur sur ce qui se passe à l’intérieur), parents et professionnels ignorent les interrogations propres à la fratrie. L’intrication de ces trois dimensions rend d’autant plus difficile la levée du silence.

30Le silence sur la fratrie peut signifier une absence de considération sur ce que vivent les frères et sœurs. En conséquence, ceux-ci peuvent intégrer l’idée que ce qu’ils vivent n’est pas digne d’intérêt et ne rien oser exprimer, ce qui renforce le silence de la fratrie. Le terme de « silenciation » proposé par Moscovitz (2007) permet de signifier cette situation passée sous silence et qui ne peut être dite. Racamier (1980) mentionne ce phénomène à propos de la schizophrénie et estime qu’il convient de ne pas considérer cela uniquement comme un déni, mais comme le signe qu’il y a une difficulté, pour l’entourage du patient, à trouver une valeur à ce que l’on vit soi-même. C’est ainsi que ce silence peut représenter un désaveu de ce que vivent les membres de la fratrie, dont Ferenczi (1931) a montré la puissance traumatique : « c’est le désaveu du traumatisme qui rend le traumatisme encore plus pathogène » (p. 98-113). Ce désaveu produit un clivage entre ce que le sujet ressent et ce qu’il peut ou doit savoir, mais sans pouvoir le relier à une sensation.

31Les recherches sur le groupe familial, le couple, la fratrie ont renouvelé la manière d’intervenir auprès de familles (Elkaïm, 1995). Dans le champ du handicap, la classification de l’OMS (2000) a contribué à ce que l’on sorte du raisonnement linéaire médical (étiologie, sémiologie, traitement), pour ouvrir sur la construction d’interventions prenant en compte davantage l’environnement humain et matériel de l’enfant.

32Les travaux, les pratiques cliniques prennent de plus en plus en compte la dimension familiale et, donc, fraternelle dans ce que vivent les sujets malades en situation de handicap, ce qui conduit à des évolutions dans la création des dispositifs spécifiques et destinés aux fratries.

Proposer un espace pour parler

33Bien que la dimension fraternelle reste encore peu prise en compte, nous citons les deux dispositifs les plus courants : les entretiens familiaux et les groupes de parole. Il apparaît qu’à chacune des étapes de la vie de la fratrie, c’est d’une aide spécifique, dont chaque enfant et le groupe familial peuvent avoir besoin. Celle-ci peut aller des renseignements sur, par exemple, la prise en charge ou la pathologie, à une aide concrète ou encore à un soutien psychologique. Ce dernier peut prendre des formes diverses : soutien aux parents ; soutien à l’un des enfants particulièrement en difficulté à un moment de sa vie ; soutien au groupe fratrie, soutien entre enfants confrontés à une situation de handicap. Dans tous les cas, en lien avec ce qui vient d’être explicité sur le silence et le non-dit, il s’agit de proposer aux frères et sœurs un espace pour parler, sortir de la solitude et élaborer un positionnement subjectif.

Entretiens familiaux

34De manière systématique durant l’enfance, plus rarement à l’adolescence et à l’âge adulte, le psychologue rencontre la personne en situation de handicap ou malade en présence de ses parents et, parfois, de ses frères et sœurs. Les entretiens, plus ou moins fréquents, se font à la demande des familles ou des praticiens. Quel que soit le cadre, il est important, lors de ces temps d’échanges entre professionnels et famille, et également entre les membres de la famille, de faire exister l’enfant handicapé comme « frère de », et de faire en sorte de se préoccuper des liens fraternels.

35Lors de ces entretiens familiaux, dans le cadre contenant garanti par le psychologue, les enfants peuvent élaborer une manière de penser la pathologie. Cela peut aider chacun à comprendre que le handicap sert parfois d’écran à une autre problématique fraternelle et familiale. Ainsi, une famille consulte, car elle est inquiète de l’inhibition de leur fils ainé. Leur second enfant, atteint de trisomie 21, était supposé être à l’origine de l’inhibition de son aîné. Or, il apparut que ce dernier craignait surtout que ses parents divorcent. Mentionnant cela lors d’un entretien familial, l’enfant handicapé s’est trouvé dégagé du rôle de celui par qui tous les problèmes arrivent.

36Durant les entretiens, les frères et sœurs, qu’ils soient en situation de handicap ou pas, ne parlent pas qu’avec les mots : leurs corps à corps, leurs disputes, leurs jeux collectifs, sont autant de manières de construire leurs liens, et de les élaborer. Ces agirs, ainsi que tout ce qui relève du dialogue non verbal favorisent la mise en œuvre des processus individuels et groupaux de subjectivation. La résonance de ce que l’un dit ou manifeste faisant, parfois, écho chez l’autre, il s’agit de le repérer, sans nécessairement l’interpréter. Ceci ne peut se faire que si l’alliance avec les parents est suffisamment bien installée pour que les enfants puissent, en toute confiance, prendre de la distance par rapport au vécu et aux interdits parentaux, se risquer à expliciter la manière dont, pour eux, le handicap, la maladie, existe et fait effet. Ce faisant, c’est l’instauration d’une différence entre générations symboligènes et structurantes qui se met en place.

Groupes de parole pour les fratries

37La pratique de groupe de parole d’adultes confrontés à un traumatisme ou à une pathologie spécifique est ancienne (Rabeharisoa, Callon, 2000 ; Minary et Perrin, 2005), celle des groupes de parole pour les fratries s’est développée depuis les années 1980 aux États-Unis et depuis les années 2000 en France (Dayan, 2009).

38Dayan et coll. (2006) notent que les groupes réunissent quasiment toujours des frères et sœurs non handicapés, l’enfant en situation de handicap en étant exclu. Ces auteurs notent la grande diversité des cadres, des objectifs et de l’organisation de ces groupes, qui concernent davantage les enfants et les adolescents que les adultes.

39Outre-Atlantique, les groupes de parole sont organisés dans une perspective le plus souvent cognitivo-comportementale ; ce sont des groupes de coformation ou de soutien mutuel. Les rencontres répondent à un programme défini avec une durée, des thèmes et une organisation déterminés. Lors de ces groupes, les frères et sœurs parlent de leurs ressentis, reçoivent des informations et sont supposés apprendre, via des conseils venus du groupe et des animateurs, des manières de faire et de dire. Ce qui est mis en jeu ici, est le soutien entre pairs dans le registre du « savoir-faire », davantage que du « savoir-être » (Houtzager, Grootenhuis, Last, 2001 ; Pitman, Mattey, 2004 ; William et coll., 2003).

40En France, ce type de groupes adopte, plus souvent, une approche psychodynamique (groupes de parole), le contenu évolue en fonction des participants et se construit avec eux (Germain, 2006 ; Claudon, Bourbon, Thomas, 2005).

41Dans tous les cas, les groupes visent le soin et la prévention (Houtzager, Grootenhuis et Last, 2001 ; Germain, 2006), l’acquisition de connaissances sur ce que vivent les frères et sœurs d’un enfant malade ou handicapé (Pitman, Matthey, 2004), l’expression des souffrances et des ressources (Gascon, Lauzon, 2007).

42Toutes les publications soulignent qu’il est indispensable que l’enfant puisse parler en toute sécurité, sans culpabilité et sans la peur d’être jugé, de voir son interlocuteur s’effondrer ou se déprimer lorsqu’il fait part de sa souffrance. Est également soulignée l’importance que les enfants puissent à la fois valoriser leur expérience et apprendre de celle des autres.

43Gascon et Lauzon (2007) ou Germain (2006) notent que les connaissances acquises dans ces groupes favorisent l’amélioration des relations fraternelles et l’adaptation de ses membres à la situation particulière (Williams et coll, 2003). Les groupes contribuent à diminuer l’anxiété des frères et sœurs (Williams et coll., 2003 ; Smith, Perry, 2005) ; leur sentiment de solitude (Pitman, Matthey, 2004 ; Claudon, Bourbon, Thomas, 2005) ; leur culpabilité et leur honte (Cunningham, Betsa, Gross, 1981).

44Metzger (2005) et Dennis (1995) mentionnent que, parfois, le groupe de parole n’a pas d’effet sur les frères et sœurs. Mancini (1989) et Germain (2006) préviennent, quant à eux, d’éventuels effets négatifs du groupe de parole, en raison de l’effet de miroir qu’il provoque, certains enfants pouvant être fragilisés par cette expérience. Par exemple, des problèmes mentionnés par les plus âgés ou par des enfants confrontés à des pathologies létales peuvent inquiéter des plus jeunes, qui n’auraient pas la maturité nécessaire pour entendre certaines questions abordées ou des enfants qui n’avaient pas encore envisagé certains éléments comme faisant partie du champ des possibles (risque létal notamment).

Perspectives

45Ce qui précède montre la richesse des travaux récents sur ce thème, tant sur la compréhension des processus, que sur celui des aides à proposer. Toutefois, force est de constater, dans ces travaux, une grande uniformité des thèmes traités : parentification, culpabilité, honte, effet traumatique du handicap, jalousie… Or, la clinique permet de repérer trois thèmes peu explorés et qui mériteraient, sans nul doute, que les praticiens et les chercheurs s’y intéressent. Il s’agit de la maltraitance, du vécu fraternel plus particulièrement à l’adolescence et à l’âge adulte, et de la manière dont la personne en situation de handicap elle-même vit ses relations fraternelles.

Maltraitance au sein de la fratrie

46Il est connu que le handicap est un facteur de risque pour la maltraitance intrafraternelle (Troupel, Cremel et coll., 2009). Or, il est dommage que les chercheurs ne se soient pas davantage intéressés à la maltraitance intrafraternelle dans ces situations-là, dont les cliniciens savent qu’elles ne sont pas exceptionnelles.

47De nombreux travaux s’intéressent ainsi aux questions relatives aux relations fusionnelles parents/enfants, à la parentification, à la surprotection des frères et sœurs. En revanche, peu de chercheurs et de praticiens se sont penchés sur les maltraitances qui existent au sein du groupe d’enfants, dont l’un est porteur d’un handicap. Cette situation a de multiples raisons : en général, la question des maltraitances intrafraternelles est mal connue (Mathis, Mueller, 2015) ; les parents, comme les professionnels, ont des difficultés à distinguer l’agressivité fraternelle structurante des maltraitances qui sont source de souffrance. Enfin, les enfants en parlent peu, à la fois pour protéger le narcissisme parental et parce que, non reconnus par les adultes, ces comportements ne prennent pas sens pour eux ; ils les considèrent alors comme « normaux » (Pinel-Jacquemin, Scelles, 2012). En effet, ne pas repérer, prendre en compte, attester de l’existence d’une maltraitance subie ou infligée au sein de la fratrie, fait courir le risque aux enfants de ne pas reconnaitre la signification et les effets de cette situation, et de ne pas pouvoir être soutenus dans l’évolution des liens.

Une agressivité fraternelle structurante…

48La violence, composante instinctuelle et innée, nécessaire à la survie de l’individu, vise à répondre à la menace que représente l’autre. Le passage de la violence à l’agressivité ouvre sur la prise en compte de la reconnaissance de l’altérité, via l’identification à l’autre (Bergeret, 1994).

49Selon la théorie systémique (Minuchin, 1979), quand les processus d’individualisation, de différenciation, de distribution du pouvoir dans la famille et la capacité à être empathique se déroulent de façon harmonieuse, les relations fraternelles présentent, pour l’enfant, une ressource et l’agressivité qui s’y déploie n’est pas pathogène. Les ethnopsychanalystes montrent que le groupe social et la culture interviennent pour aider l’enfant dans ces processus (Ortigues, Ortigues, 1966 ; Rabain, 1979).

50Selon Marcelli (1993), le fratricide archaïque préfigure l’Œdipe. De son côté, Kaës (2008) parle de déplacement défensif d’un désir parricide dans le cadre d’une configuration œdipienne ou du meurtre du double fraternel haï, afin d’assurer le maintien de soi, comme complément narcissique phallique de la mère. Le frère haï n’est pas seulement un rival (œdipien ou préœdipien) ; il est également une part du sujet, qu’il ne reconnaît pas en lui-même. Incarnation du refoulé inconscient, part de soi, qui trouve une surface d’inscription à travers l’autre, le frère est un miroir (Marty, 2001).

51La construction d’un lien fraternel sécure et soutenant repose sur la réussite de cette transition de la violence vers l’agressivité. Il est possible que, dans certains cas, la maltraitance intrafraternelle marque le fait que la rivalité est encore organisée dans un fonctionnement préœdipien : il ne s’agit alors pas, pour l’enfant, de rivaliser avec son frère pour conquérir l’amour des parents, mais, plus fondamentalement, de défendre son existence.

De la violence à la maltraitance

52Plusieurs hypothèses ont été formulées quant aux facteurs générant de la maltraitance intrafraternelle : ainsi, la distribution inégale entre les enfants des ressources matérielles et émotionnelles des parents, l’inégalité entre les frères et sœurs, seraient, pour Kiselica et Morril-Richards (2007), une source de tensions pouvant conduire à des maltraitances fraternelles.

53Les maltraitances fraternelles, dans les fratries comprenant un enfant handicapé, ne sont pas de nature différente de celles qui existent dans une fratrie « ordinaire ». Comme pour toute fratrie, il convient de différencier la violence fraternelle de la rivalité fraternelle, définie comme un sentiment d’inégalité et d’injustice face à la différence de traitement des parents vis-à-vis du frère ou de la sœur. Ne pas penser les sujets handicapés comme pouvant être violents et ne pouvant pas subir des violences les met, de fait, dans une position « alter ». Or, le fait que les parents soient blessés narcissiquement, parfois subissant douloureusement les effets du traumatisme que représente le fait d’avoir un enfant en situation de handicap, contribue à ce qu’ils peuvent plus difficilement jouer leur rôle de pare-excitation et de protection de leurs enfants. Or, tous les travaux sur les maltraitances fraternelles mettent en relief le défaut des capacités de contenance et de pare-excitation parentales dans l’émergence de la maltraitance entre enfants (Cyr, Wright, McDuff, Perron, 2002 ; Lafortune, 2002 ; Jaïtin, 1998).

54Banalisant ces agressions entre enfants, les adultes se défendent de leur propre culpabilité de ne pouvoir empêcher cette violence. Or, pour que l’agressivité entre enfants soit structurante, elle ne doit pas être réprimée ou inhibée, mais passer de l’acte à la pensée, être déplacée, transformée ou encore sublimée, ce qui est particulièrement complexe dans les situations de handicap.

Être victime, être agresseur : des enjeux narcissiques

55L’enfant en situation de handicap a souvent des difficultés à prendre sa place dans un groupe de pairs. Il préférera alors, parfois, être maltraité par ses pairs qu’être totalement exclu du groupe. D’un autre côté, cette maltraitance peut, sur le plan fantasmatique, jouer le rôle de « punition », car il se sent coupable de son état et du malaise qu’il provoque chez ses pairs (Scelles, 2003).

56Diverses situations conduisent l’enfant handicapé à être maltraité : ses difficultés à se défendre, la sollicitude dont il est l’objet de la part de l’adulte, faisant de lui un « destinataire privilégié » de l’agressivité entre enfants. De plus, le comportement des frères et sœurs met parfois en acte une agressivité qui appartient aux parents.

57Par ailleurs, être en bonne santé, dans une famille qui comprend un enfant handicapé, fait courir le risque au frère de se sentir oublié, inexistant aux yeux de ses parents. Dans ce contexte, être maltraité par l’enfant handicapé, par exemple, peut sembler, à certains égards, une meilleure place que celle qui conduit à n’intéresser personne, à être ou à devenir sans place dans la famille et la fratrie.

58L’agresseur non puni peut jouir temporairement de la domination qu’il exerce sur l’autre, mais il ne retire pas de cette position une gratification narcissique. La victime peut investir sur le plan libidinal cette maltraitance et occuper durablement une position de victime. De son côté, le frère non handicapé, s’il est victime, peut vivre la violence de son frère handicapé comme une « juste révolte » contre sa « normalité ». Cette situation vécue en famille peut hypothéquer les compétences des enfants à se faire des amis et à vivre avec d’autres enfants des relations satisfaisantes pour lui et pour les autres (Pinel-Jacquemin, Scelles, 2009).

59Il y a une grande diversité des figures de maltraitances pouvant exister au sein de la fratrie comprenant un enfant handicapé. Parfois, l’enfant agressé se tait, il sait et sent que ses parents ont compris ce qui se joue entre leurs enfants, mais il constate leur impuissance à le protéger, à l’aider. Il ne dit rien, pleure en silence pour protéger le narcissisme familial. C’est le cas décrit par Fredet (1979). Parfois, la maltraitance se déguise en prenant le visage d’une sollicitude, comme cette sœur qui, au prétexte de rééduquer son frère ou de lui faire faire des exercices de kinésithérapie, le maltraitait gravement.

Reconnaître les maltraitances

60Pour prévenir les maltraitances entre pairs, les repérer quand elles existent, il convient de prendre soin, d’écouter les agresseurs et leurs victimes. Parfois, il sera indispensable d’intervenir pour transformer cette violence, la muer en agressivité, afin de socialiser son expression et éviter qu’elle ne soit totalement inhibée. L’agresseur et l’agressé doivent être soutenus dans le déploiement des possibilités à « faire avec » ces pulsions. Les problèmes de gestion de l’agressivité, dans ces fratries-là, ne sont pas uniquement dépendantes des relations entre parents et enfants, mais dépendent également des problématiques psychiques de chacun des enfants et de la dynamique de leur groupe. Dans l’émergence de ces maltraitances, qui peuvent être en lien direct avec le handicap, mais, évidemment, pas nécessairement, la honte et la culpabilité ont un rôle central. Si cette maltraitance est ignorée, le risque est de conduire, soit à des troubles externalisés, soit à l’émergence des troubles internes, l’enfant faisant alors en sorte de « ne plus sentir », de « ne plus penser », « ne plus être » qu’une apparence, afin que les pulsions et les affects qui l’habitent soient « gelés », « effacés », cela jusqu’à ce qu’il se sente mieux protégé par un appareil psychique plus « solide », après une thérapie, par exemple.

61D’un autre côté, si certaines maltraitances sont intentionnelles, d’autres existent en raison des troubles du comportement sévères de l’enfant handicapé, générant des agressions, dont les frères et sœurs peuvent être les victimes, notamment dans les situations de cohabitation. Ceci peut être le cas dans des situations de schizophrénie ou d’autisme, où le frère malade peut être, à la fois, menaçant et se sentir menacé, notamment parce que les effets de confusion entre moi et l’autre peuvent être amplifiés par la nature même du lien fraternel.

62Les travaux sur cette question ne font que commencer et, à notre connaissance, ils n’ont pas été menés sur des fratries à l’adolescence et à l’âge adulte, ce qui ouvre de nécessaires perspectives de recherche.

L’âge adulte

63Si les travaux sur l’adolescence de la personne en situation de handicap commencent à se développer (Picon, 2010 ; Vaginay, 2014 ; Écotière, 2014). En revanche, les questions relatives à l’âge adulte restent à développer, avec deux points importants, la parentalité et le vieillissement. Il faut différencier, ici, les situations où le frère a toujours été connu avec cette fragilité (déficience intellectuelle, autisme…), de celles où la maladie/handicap surgit au moment de l’adolescence du groupe fratrie (schizophrénie, handicap en suite d’un accident de la vie…). Dans les deux cas, cependant, c’est une période de modification où la question de l’autonomie et des réaménagements des liens familiaux se posent pour tous (Whiteman et coll., 2010).

64L’âge adulte se déroule à partir du terreau familial hérité de l’enfance, mais d’autres protagonistes, ainsi qu’un plus grand investissement de la scène sociale, modifient beaucoup les équilibres acquis. Le sens et les effets des déficiences évoluent, imposant à chacun des changements aux effets positifs ou négatifs. De plus en plus de tiers interviennent dans la vie des frères et sœurs : amoureux, cercles de relations extrafamiliales. Leurs regards, leurs questions contribuent, parfois, à ce que certains pactes familiaux de non-dits et certaines interdictions de savoir soient levés. Il devient, alors, possible de parler du passé sans trop craindre de se sentir menacés ou menaçants. Dans une certaine limite, les adolescents redessinent alors les contours de leur conception de la loyauté familiale et fraternelle. Des conflits, des souffrances qui, à la faveur de la période de latence, avaient été « oubliés », peuvent brusquement ressurgir à ce moment précis (Korff-Sausse, 1996 ; Vaginay, 2014, Scelles, 1997 ; Gutton, 1993).

65L’âge adulte est peu exploré par les psychologues. Les juristes se sont saisis de cette question via les réflexions sur le statut du tuteur ou du curateur. Or, dans ces fratries, les liens fraternels se posent en des termes très particuliers, notamment quand les parents vieillissent ou décèdent : situations trop peu travaillées, qui, pourtant, ont des incidences majeures sur la vie professionnelle et affective des frères et sœurs et de la personne en situation de handicap. Il y a donc un manque manifeste de travaux sur les relations fraternelles à l’âge adulte, du jeune adulte à l’adulte vieillissant. Dans un livre collectif récent sur la clinique du handicap, le thème du vieillissement est abordé, mais sans véritablement marquer les spécificités des liens fraternels à ce moment-là (Poussin, Galiano, 2014). En effet, la fratrie y est abordée dans ses aspects subjectifs, uniquement durant l’enfance. Enfin, les conditions des parents en situation de handicap, qui commencent tout juste à donner lieu à des travaux systématisés (Coppin, 2001 ; Ethier, 1999), mériteraient de mettre l’accent sur les dimensions fraternelles de ces situations de parentalité. En effet, si quelques travaux ont été réalisés sur les fratries, dont les parents ont des troubles psychiatriques, rien de tel pour les parents ayant une déficience cognitive. D’un autre côté, le fait que des personnes en situation de handicap deviennent parents a, évidemment, un impact sur la place et les fonctions que pourront, souhaiteront, refuseront de jouer les frères et sœurs et leurs conjoints pour soutenir, suppléer ou, au contraire, stigmatiser le processus de parentalité.

Vécu fraternel de la personne en situation de handicap

66Ce dernier point ne constitue pas un thème particulier, mais vise à souligner le fait que chacun des thèmes de cet article devrait, à l’avenir, être davantage traité en prenant en compte le point de vue subjectif de la personne en situation de handicap ou malade.

De la nécessité de changer de point de vue

67La focalisation des chercheurs et des médias sur la souffrance parentale et, plus particulièrement maternelle, laissent dans l’ombre, encore aujourd’hui, ce que vit la personne en situation de handicap dans le cadre de sa fratrie. C’est comme si la personne handicapée ne pouvait être pensée que dans des liens de filiations verticaux et qu’elle n’aurait rien à dire, ne vivrait rien dans le cadre de ses relations fraternelles, voire que la qualité de ces liens n’auraient d’effet ni sur sa qualité de vie ni sur son évolution. Or, nous manquons, aujourd’hui, de travaux nous permettant de mieux comprendre les chemins empruntés, créés par ces enfants, ces adolescents, ces adultes, pour se vivre et se construire comme frères.

68Les revendications d’associations d’usagers, les Disability Studies[1], la signature de la charte des droits des personnes handicapées contribuent à inciter les professionnels et les chercheurs à prendre en compte le point de vue des personnes en situation de handicap.

69La personne en situation de handicap se sent coupable de ne pas être l’enfant idéal, mais, également, de ne pas être un frère idéal. S’il peut avoir des bénéfices à occuper le temps et l’espace psychiques parentaux, il peut également s’en vouloir, comme le dit un adolescent, « d’avoir privé ses frères et sœurs de parents ». Cette culpabilité est également une manière de résister au non-sens, à la passivité mortifère, une manière d’appeler l’autre et de se positionner par rapport à lui. Des entretiens de recherche sur les liens fraternels, conduits auprès de patients schizophrènes, montrent que ceux-ci sont particulièrement inquiets de ce que leur maladie peut faire à leurs frères et sœurs (Davtian, Scelles, 2014).

70Faisant l’objet de désirs de mort plus ou moins conscients, ou déniés depuis l’annonce de leur maladie, « survivants » de ces désirs, les personnes handicapées ne peuvent se permettre d’être agressives pour ne pas raviver ces souhaits de mort en leur donnant une « justification » (Korff-Sausse, 2006 ; Ciccone, 2009b). Pourtant, cette expression, entravée dans les familles d’enfants malades ou handicapés, risque d’entraîner un manque d’expérimentation de l’agressivité (Boucher, 2005). Comme nous l’avons dit précédemment, les personnes déficientes intellectuelles acquièrent des modèles de normalité en s’identifiant à leurs frères et sœurs. Ce mouvement peut les aider à lutter contre le sentiment d’étrangeté, qui leur est renvoyé dans les regards posés sur elles. Si les frères et sœurs sont alors des repères de normalité pour les personnes déficientes intellectuelles, la personne en situation de handicap, elle, ne paraît être le « modèle » de personne (Poujol, Scelles, 2014), ce qui n’est pas sans conséquence pour elle. Cette confrontation à un « modèle de normalité » permet de mesurer l’importance et la nature de certains des renoncements à opérer (Martinot, 2008). Or, si ces personnes ne se sentent jamais enviées pour ce qu’elles sont ou ce qu’elles font, si elles ne sont jamais un « bon objet d’identification », la construction de l’estime de soi peut en être affectée.

71Les grandes étapes de vie franchies par ses frères et sœurs posent question à la personne en situation de handicap sur ce qu’elle veut faire et peut faire, ainsi que sur la désirabilité de ce qu’elle fait. Les frères et sœurs expérimentent des passages comme le brevet, le bac, le travail, le départ du foyer parental, les relations amoureuses, les enfants… Observant cela, la personne en situation de handicap se confronte à ses limites. Si elle ne peut pas bénéficier des rites de passage, la question des opérateurs de son entrée dans sa vie adulte se pose.

72Dans les interactions avec ses frères et sœurs, la personne en situation de handicap acquiert des informations sur ses propres capacités et attitudes. Ce mouvement de comparaison et, donc, d’identification et de différenciation, participe de la construction de son image et de son narcissisme. Dans cette confrontation, elle doit se construire avec ses difficultés, sans se laisser totalement absorber par celles-ci, sans en nier la réalité, mais en se positionnant comme membre du groupe des frères. Aujourd’hui, concernant les adolescents et les adultes, nous manquons de recherches et de données cliniques permettant de mieux comprendre et appréhender la subjectivité de la personne en situation de handicap.

Des ouvertures pour la clinique autant que pour la recherche

73Tant du côté de la recherche que de celui de la clinique, il paraît donc fondamental de se donner les moyens d’explorer de manière fine ce que la personne en situation de handicap vit dans le cadre des processus fraternels. Ceci ne pourra se faire sans des études permettant de conceptualiser des dispositifs de recherche et de pratique, qui leur permettent de s’exprimer et d’être comprises, en particulier quand elles ont des difficultés à communiquer (Écotière, Poujol, Scelles, 2015).

74Il est important de développer des travaux sur les méthodes adaptées à ces personnes. Si des travaux commencent à être développés à partir de ce point de vue subjectif, ils devront encore être approfondis. Cela implique de trouver des moyens, d’adapter les outils, pour faciliter le recueil de cette subjectivité et trouver des supports de pensée permettant de faciliter la construction du récit. Il faudra expérimenter et valider le recours à des outils (pictogrammes, enregistrements vidéos, tests, échelles adaptées à leur compréhension…) et instaurer un plus grand partage de l’expérience sur ce thème, pour que la communauté des chercheurs progresse véritablement (Bedoin, Scelles, 2015).

Conclusion

75Cet article montre que si le handicap ou la maladie ont un impact sur la construction et l’évolution des liens fraternels, il est indispensable, dans la pratique et dans les recherches, de ne pas envisager ce lien uniquement via la rivalité d’objet, en regard des parents et de leur souffrance. Si la capacité de contenance psychique des parents est, certes, affectée lorsqu’ils ont un enfant porteur d’un handicap, la manière dont leurs autres enfants interviennent auprès de l’enfant handicapé révèle, de façon évidente, les fonctions psychiques potentielles des interactions fraternelles. La fratrie peut, ainsi, contribuer à ce que l’enfant handicapé ne se pense pas uniquement comme « handicapé », mais aussi comme enfant, frère de… La fratrie est un lieu qui permet de jouer avec un autre enfant, de s’y confronter, de donner et de recevoir des câlins dans une réciprocité structurante, d’apprendre à réguler ses pulsions agressives et à faire face à l’agressivité de l’autre.

76D’un autre côté, les enfants handicapés, recevant souvent peu de mots venant des adultes sur leur handicap, peuvent s’appuyer sur leur lien fraternel pour construire une pensée sur ce qui les différencie et ce qui les rend semblables aux autres enfants, sur le handicap qui les affecte ou sur leur devenir. Aussi, il convient, tout en continuant à explorer les souffrances générées par le handicap, d’ouvrir sur l’étude du lien fraternel dans la complexité de toutes ses dimensions, à tous les âges de la vie.

Notes

  • [1]
    Les Disability studies (études sur le handicap) sont un réseau transdisciplinaire international, regroupant tous les professionnels s’intéressant aux problèmes pratiques dus au handicap.
Français

Après un rappel des fonctions et fondements des liens fraternels, de l’enfance à l’âge adulte, les auteurs, praticiens et chercheurs exposent les travaux et les avancées théoriques sur l’impact du handicap et de la maladie mentale sur les liens fraternels. Cet état des lieux permet de dégager, à la fin de l’article, trois thèmes qui mériteraient, à l’avenir, d’être approfondis : la maltraitance intrafraternelle, la période de l’âge adulte et, surtout, celle du vieillissement des personnes en situation de handicap, et, enfin, la nécessité de mieux connaître et, donc, de prendre en compte, le vécu subjectif de la personne en situation de handicap dans le cadre de ses relations et interactions avec ses frères et sœurs, tout au long de sa vie.

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Anne-Laure Poujol
Université de Rouen, Laboratoire de psychologie et neurosciences de la cognition et de l’affectivité (Psy NCA), EA 4700 ; Université de Caen, Centre d’étude et de recherche sur les risques et les vulnérabilités (CERReV), EA 3918, France.
Anne-Laure Poujol, Département de psychologie, Laboratoire Psy-NCA, place Émile Blondel, 76130 Mont-Saint-Aignan, France.
Clémence Dayan
Université Paris Ouest Nanterre la Défense, Laboratoire de clinique, psychanalyse, développement (CLIPSYD), EA 4430, France.
Hélène Davtian
Université Paris Ouest Nanterre la Défense, Laboratoire de clinique, psychanalyse, développement (CLIPSYD), EA 4430, France.
Régine Scelles
Université Paris Ouest Nanterre la Défense, Laboratoire de clinique, psychanalyse, développement (CLIPSYD), EA 4430, France.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 12/12/2017
https://doi.org/10.3917/bupsy.552.0419
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