CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1Les couples désunis, pour lesquels la vie commune est difficile à supporter, voire devient un véritable calvaire, constituent une réalité dans de nombreuses sociétés, anciennes et actuelles. Pour les siècles passés, leur existence renvoie la plupart du temps aux règles entourant le mariage et en particulier le choix du conjoint. En effet, lorsque ce choix est réalisé en fonction de règles rigides, par les parents des futurs époux, le consentement de ces derniers peut être contraint. Dans d’autres couples, la décision émane des conjoints eux-mêmes, qui se sont choisis librement, mais sans vraiment connaître leur partenaire, et dans l’ignorance de ce que peut être la réalité de la vie conjugale et en particulier de la sexualité du couple. Dans d’autres cas, la relation se détériore au fil du temps, avec l’accumulation de malentendus, de rancœurs ou d’oppositions, qui peuvent déboucher sur des violences physiques et/ou morales. Parfois encore, c’est l’existence d’une relation adultère qui entraîne ou concrétise la volonté de rompre un lien conjugal affaibli ou devenu caduc.

Mariage et religion : un lien indissoluble ?

2Comment dès lors mettre fin à cette vie de couple dégradée ? La réponse des différentes autorités appelées à statuer sur cette réalité a varié, selon les régions du monde et les règles culturelles qui y prévalent. Lorsque la règle est fixée par les autorités religieuses seules, celle-ci diffère fortement entre les sociétés musulmanes ou juives qui autorisent sous certaines conditions la répudiation, en général répudiation de la femme par son époux [1] (Wegner, 1982), et les sociétés chrétiennes. Dans celles-ci, à l’époque moderne, les règles se distinguent selon que la religion catholique romaine est restée dominante ou que la Réforme y a triomphé. Pour l’Église catholique romaine le mariage est un sacrement devant Dieu, faisant du mari et de son épouse une seule chair et un seul sang. Ce lien consacré par Dieu ne peut être rompu par les hommes et il est impossible de séparer ce qui a été ainsi uni. Seule l’annulation du mariage, admise pour des motifs extrêmement restrictifs et largement réservée dans les faits aux élites, pouvait dénouer le lien conjugal. La Réforme, quant à elle, a introduit l’idée que le mariage était un contrat civil, régulant les affaires matérielles entre deux lignées familiales. Ce contrat, conclu en vertu de conventions décrétées par des hommes, pouvait être rompu par la volonté humaine en cas de mésentente ou de désaccord.

3Dans la France catholique de l’Ancien Régime, hormis l’annulation, la seule possibilité de relâchement du lien conjugal offerte aux couples désunis était la séparation : séparation de corps autorisant les conjoints à vivre sous des toits différents, et séparation de biens reconnaissant à l’épouse une liberté relative à disposer de ses biens propres et notamment de sa dot. Ce n’est guère que dans les milieux sociaux aisés, bourgeoisie et haute noblesse, que de telles séparations ont été réalisées lorsque les intérêts matériels de la femme étaient menacés ou à la suite d’outrages verbaux et physiques répétés (Lottin et al., 1975). L’article d’Aurélie Chatenet-Calyste, dans ce volume, explore les comportements dans le milieu très particulier de la société curiale française, et il montre que, dans ce microcosme spécifique, la séparation entre conjoints n’était pas rare, en général pour protéger la dot de l’épouse. Maraud (2000), pour sa part, dénombre près de 200 séparations dans la noblesse parisienne en 1788 tandis que Landelle (2012) recense 125 couples nobiliaires séparés entre 1730 et 1761. Mais la cour n’est pas la France, et les données chiffrées montrent que cette pratique était peu répandue dans la société française de l’époque moderne. Dans son étude sur l’histoire des désordres conjugaux dans le Poitou aux xviie et xviiie siècles, Murphy (2019) note que les demandes de séparations représentent 1 à 2 % des affaires présentées dans les justices seigneuriales, avec un fort différentiel villes / campagnes, ce qu’avait déjà montré Chatelain (2019). Ces chiffres sont similaires à ce que l’on retrouve ailleurs, même s’ils sont un peu plus élevés dans le Nord (Lottin et al., 1975) car les séparations accordées par l’official y sont temporaires. Ils corroborent également d’autres études en montrant une augmentation des demandes à partir de la Régence, qui s’accélère fortement à partir des années 1750 puisqu’elle est multipliée par trois après cette date (Chatelain, 2013).

4L’approche protestante du mariage, fondée sur une vision contractuelle de l’union, n’empêche pas une hostilité persistante des Églises protestantes de France au divorce [2]. Les protestants sont toutefois nombreux à se séparer et l’appartenance religieuse semble, pour les couples interconfessionnels, un facteur de facilitation du recours à ces procédures comme l’a montré Murphy (2019) pour l’espace poitevin où 90 % des couples concernés par ces demandes comprennent au moins un protestant parmi les époux.

5La religion orthodoxe, quant à elle, considérait le lien matrimonial comme indissoluble et sa rupture comme un pêché, ce n’est donc que de manière exceptionnelle qu’elle admettait le divorce et le remariage. De fait, elle faisait preuve d’une certaine souplesse, acceptant par exemple plus volontiers le divorce lorsque ses fidèles vivaient dans des sociétés à majorité musulmane. Mais lorsque le territoire était sous domination catholique, comme Corfou au xviiie siècle (voir l’article de Katerina Konstantinidou, dans ce volume), elle pouvait favoriser le recours à une simple séparation du couple ou à une annulation du mariage, afin de ne pas heurter le pouvoir en place. Les cas de divorces, au sens actuel du terme, et de remariages étaient alors rares, même si les tribunaux orthodoxes jugeaient recevables les demandes en fonction de causes plus nombreuses que l’Église catholique romaine, notamment en cas de violences exercées sur l’un des conjoints, de certaines maladies, ou d’impuissance sexuelle, par exemple. L’étude sur Corfou dans ce volume montre cependant la relative rareté des démarches en ce sens et que les milieux sociaux aisés étaient plus concernés que les autres, du fait de l’existence d’un patrimoine propre à l’épouse, potentiellement menacé, et lui permettant en outre de subvenir à ses besoins une fois la séparation prononcée.

6L’évolution des règles et des pratiques est au cœur de la recherche d’Andrea Griesebner qui travaille sur les séparations dans l’archiduché de Basse-Autriche, qui inclut la ville de Vienne et ses environs. Dans cette région catholique une rupture se produit en 1783, date à laquelle la procédure de séparation des couples n’est plus menée par les autorités religieuses mais par la justice civile. Les motifs admis pour demander la séparation sont élargis, et l’adultère, la condamnation pour crime, l’abandon, ou l’existence de maladies infectieuses sont désormais pris en compte. Andrea Griesebner prolonge son analyse jusqu’au milieu du xixe siècle, mais dans ce pays qui ne connaît pas l’influence de la législation révolutionnaire puis consulaire française, c’est bien toujours de séparations dont il s’agit, et non de divorces.

7Cette séparation, qui donnait ainsi une certaine liberté aux époux, ne mettait pas pour autant fin au mariage. Le lien conjugal continuait à exister et à produire ses effets, maintenant en général l’épouse sous la tutelle de son conjoint pour la gestion de ses biens, et entraînant l’impossibilité pour les époux de nouer un nouveau mariage.

Débats et évolutions : xviiie siècle – début du xixe siècle, des principes à la pratique

8Le débat autour de l’indissolubilité du mariage et des malheurs auxquels ce fait condamnait de nombreux couples a pris de l’ampleur au cours du xviiie siècle parmi les philosophes, en particulier en France. Montesquieu fait dans les Lettres persanes, publiées en 1721, un plaidoyer en faveur du divorce au nom du mariage des cœurs : « Rien ne contribuait plus à l’attachement mutuel que la faculté du divorce : un mari et une femme étaient portés à soutenir patiemment les peines domestiques, sachant qu’ils étaient maîtres de le faire finir et ils gardaient souvent ce pouvoir en main toute leur vie sans en user, par cette seule considération qu’ils étaient libres de le faire (lettre xxvi). » Montesquieu voit en outre, dans le mariage malheureux et maintenu malgré tout, la cause de liaisons clandestines, immorales et dangereuses. Pour sa part, Voltaire écrit de nombreux fascicules, notamment l’un intitulé Fragment des instructions pour le Prince Royal de *** (1767) en faveur du divorce [3]. Il rend public le témoignage d’un de ses amis victime de l’indissolubilité du mariage. Diderot, dans le Supplément aux voyages de Bougainville (1772), ouvrage de fantaisie, fait l’apologie du mariage à durée limitée, envisagé comme un contrat renouvelable tous les trois mois. Selon lui, « un serment éternel ne peut se prêter sous un ciel qui change » (Dessertine, 1981, 29).

9Les positions de ces philosophes ont en commun de considérer le mariage en tant que choix volontaire de deux individus, et non pas comme un épisode au sein de stratégies familiales intergénérationnelles. Ils défendent une conception laïque du mariage en tant que contrat civil passé entre deux personnes, fondé sur l’affection et en vue d’un bonheur partagé. En conséquence, si le choix se révèle malheureux, si les sentiments changent, si le mariage n’assure pas le bonheur, il doit pouvoir être rompu complètement par un divorce.

10Cependant le débat ne touche pratiquement pas la population française, à l’exception de lettrés et membres de la bourgeoisie. Le décalage entre le débat philosophique et les préoccupations de la population concernée est fort : la question du divorce est ainsi pratiquement absente des cahiers de doléances pourtant souvent rédigés ou inspirés par des hommes de loi.

11Il en va de même dans la presse. Dans son étude sur le divorce à Lyon sous la Révolution et l’Empire, Dominique Dessertine (1981) a examiné le contenu des journaux publiés dans cette ville à la veille du vote de la loi autorisant le divorce. Il s’avère que la population lyonnaise est très peu informée du débat sur le divorce et des possibilités concrètes qu’ouvrirait une telle loi. Entre 1789 et 1792 on ne trouve dans les journaux lyonnais de l’époque (Courrier de Lyon ou résumé général des révolutions de la France et Moniteur du département du Rhône et Loire) que deux articles sur le sujet. Dans l’article publié le 14 novembre 1789, la tonalité générale est que la société peut tolérer le divorce mais qu’elle doit le limiter. Cet article fournit surtout une vision très classique du mariage et des rapports à l’intérieur du couple. « Un homme doit aimer et respecter son épouse, supporter avec indulgence ses défauts, mais il doit être le maître. » Pour l’auteur de cet article, il n’est pas envisageable que le divorce puisse être demandé par la femme qui reste dépendante du bon vouloir de son mari, et le serait encore plus avec le risque que le divorce ferait peser sur elle. Le second article date du 16 février 1790 et défend l’idée que le divorce est une nécessité, étant donné l’existence de couples désunis mariés depuis longtemps, mais que très rapidement le divorce deviendrait inutile, les couples anciens désunis ayant été libérés de leurs liens (Dessertine, 1981, 52-55). Le divorce y est explicitement considéré comme une forme de répudiation de la femme par l’homme, à sens unique. En fait, après une brève flambée dans les années suivant le vote de la loi, assez peu de divorces ont été prononcés à Lyon à cette époque. Les divorces révolutionnaires ont pourtant été plutôt urbains mais surtout parisiens (Ronsin, 1990).

12Toujours est-il que la loi sur le divorce est votée dès le 21 septembre 1792 par l’Assemblée législative, à l’unanimité. C’est dans l’enthousiasme de la Convention, qui vient de proclamer la naissance de la République française, qu’une loi rendant possible le divorce, c’est-à-dire la fin complète du lien conjugal, est votée en rupture avec les règles de l’Église catholique. Avec la création de l’état civil et le fait que les mariages sont dorénavant célébrés civilement et inscrits dans les registres tenus en mairie, le mariage ne dépend plus uniquement des autorités religieuses. Ce que la loi a fait, la loi peut le défaire. Ronsin (1990) avance que 25 à 30 000 divorces ont été prononcés au cours de la période révolutionnaire et sous l’Empire, très majoritairement dans les villes. Ceux-ci sont particulièrement nombreux au cours des années qui suivent l’instauration de la loi, mais leur nombre chute dès l’an IV pour se stabiliser entre 1 200 et 1 400 par an. Le fait que le nombre de divorces soit plus important pendant les premières années s’explique en partie par l’existence de nombreux couples qui ne s’entendent plus, pressés de recourir à la possibilité offerte par la nouvelle législation. Par ailleurs, à partir de l’an IV, les démarches sont plus difficiles en raison de l’abrogation de la loi du 4 floréal an II qui autorisait le divorce après une séparation de fait de plus de six mois. La loi du 1er jour complémentaire an V (17 septembre 1797), prise par le Directoire, restreint encore les facilités antérieures de divorcer. Le nombre de divorces augmente ensuite de nouveau en l’an X, alors que pèse la menace de sa suppression (Ronsin, 1990). Après de vifs débats entre ses rédacteurs, le Code civil promulgué en 1804 ne le supprime finalement pas mais restreint encore les possibilités de divorcer. Les séparations de corps, qui avaient été supprimées en 1792, sont, en revanche, de nouveau autorisées. Enfin, la Restauration met une fin, provisoire, à l’existence du divorce en 1816 (loi Bonald), ne laissant de nouveau aux couples malheureux que la séparation [4].

13Entre 1793 et l’an III, les motifs pouvant être invoqués par les conjoints pour obtenir le divorce étaient nombreux [5], incluant l’incompatibilité d’humeur et le consentement mutuel, qui représentent à eux seuls 57 % des divorces demandés (3 436 sur 5 987) au cours de cette période (Ronsin, 1990). Mais les hommes et les femmes ne sont pas égaux devant cette loi puisque, si le mari peut demander le divorce pour cause d’adultère, la femme ne peut le faire que si son mari a « tenu sa concubine dans la maison commune » (art. 230). Par ailleurs, « la femme adultère sera condamnée par le même jugement, et sur la réquisition du ministère public, à la réclusion dans une maison de correction, pour un temps déterminé, qui ne pourra être moindre de trois mois, ni excéder deux années » (art. 298).

Divorcer en Europe au xixe siècle

14La législation française de la période révolutionnaire et impériale a eu une influence certaine sur le continent européen, en particulier dans les territoires départementalisés, les républiques puis les monarchies « sœurs ». Au sein de ces espaces, elle a parfois même rencontré un succès assez vif.

15Il en va ainsi dans la ville de Genève. Haut lieu de la Réforme calviniste, cette ville autorisait au xviiie siècle la rupture du mariage pour des motifs limités, tels que l’adultère ou l’abandon. Cependant les demandes des conjoints en la matière étaient fortement encadrées afin que ces séparations restent en nombre restreint et que les règles sociales demeurent respectées. Dans la recherche présentée dans ce volume, Michel Oris montre les fluctuations légales et l’influence de la législation révolutionnaire française dont l’adoption correspond à une flambée du nombre de ruptures. Mais contrairement à la France, Genève a continué à pratiquer le divorce tout au long du xixe siècle.

16En France, le débat autour du divorce a été réactivé lors de chaque épisode révolutionnaire. Lors des journées de juillet 1830, le rétablissement du divorce est voté par les Députés, à une très forte majorité, mais est repoussé par la Chambre des Pairs. Après la révolution de 1848, Adolphe Crémieux présente une proposition de loi sur le divorce qui est repoussée. Alors qu’il s’était auparavant prononcé en faveur du divorce, Louis-Napoléon Bonaparte n’agit pas en ce sens après son coup d’État, afin ne pas s’aliéner le soutien des conservateurs et de l’Église. Une vingtaine d’années plus tard, la Commune de Paris propose le rétablissement du divorce, mais cela quatre jours seulement avant sa chute, et sans effets. Avec la mise en place de la Troisième République, Léon Richer, journaliste, franc-maçon et féministe, propose sans succès un projet de loi dès 1872 (Ronsin, 1992, 174-176). Son projet est repris par Alfred Naquet, jeune député parmi les plus progressistes, franc-maçon également. Il lutte pendant dix ans pour emporter la conviction des chambres : ses deux premiers projets de loi, considérés comme trop libéraux et contraires aux mœurs et aux intérêts des familles, sont repoussés. Ce n’est que son troisième projet de loi, très modéré et proche des dispositions du Code civil de 1804, qui est finalement adopté en 1884 (Ronsin, 1992, 184-225). Cette loi considère le divorce comme une sanction venant frapper le conjoint ayant commis une faute, notamment en cas d’adultère. Dès 1884, 1 657 divorces sont prononcés, ils sont plus de 5 000 dès 1888 et plus de 8 000 dix ans plus tard, la barre des 10 000 étant franchie en 1893 (Brée, 2021). Les taux de divorces indiquent une forte augmentation de la divortialité en France entre 1884 et la veille de la Première Guerre mondiale. Pendant cette période, 30 % des divorces prononcés sur le territoire français (26 à 37 % selon les années) ont lieu dans le seul département de la Seine [6] et, au sein de ce département, les niveaux de divortialité sont équivalents à Paris et dans sa banlieue. Le texte de Sandra Brée et Vincent Gourdon, dans ce volume, examine précisément deux communes de banlieue parisienne : Noisy-le-Sec et Ivry-sur-Seine.

17En dehors des périodes de guerre [7], les femmes demandent plus souvent le divorce que les hommes et l’obtiennent également davantage (Brée, 2020). Ce constat est vérifié presque partout et à toutes les périodes (voir les articles de Konstantinidou, Griesebner ou Salmon dans ce volume par exemple). Même s’il est possible que les couples choisissent le motif qui leur permettra le divorce le plus rapide et le moins cher (Ronsin, 1990), les motifs de divorce varient selon les territoires étudiés [8]. Avant la Première Guerre, le motif « excès, sévices et injures graves » est le plus souvent utilisé partout en France, mais il est beaucoup plus souvent adopté dans le département de la Seine (72 %) qu’ailleurs en France (46 à 47 % dans les populations rurales et urbaines). Les adultères masculins sont deux fois plus souvent mentionnés que les adultères féminins dans les populations rurales et urbaines alors que dans le département de la Seine, ce ratio est bien plus faible (1,4) (Brée, 2021b).

18Au-delà des frontières nationales, les possibilités de divorcer ont été très contrastées selon les pays et ont pu donner lieu à des approches originales dans les prolongements coloniaux de certains territoires européens comme le montre l’article de Guy Brunet sur l’Algérie. Comme nous l’avons vu, dans le cas de Genève et de la Suisse, le divorce a été possible tout au long du xixe siècle. En Belgique également, le Code Napoléon a été appliqué sur le territoire soumis à l’occupation française et le divorce est resté autorisé pendant tout le xixe siècle, même si quelques réformes en ont modifié les motifs au fil du temps (Piret, 1954, 759-763). En Roumanie, le divorce a été autorisé à partir de 1864, sur la base du code civil français de 1804.

19En Angleterre, jusqu’en 1857, c’est soit un tribunal ecclésiastique soit une procédure législative qui peut dissoudre le lien conjugal. Dans le premier cas, il s’agit en fait d’une séparation juridique, comme elle existe alors en France, excluant toute possibilité de remariage pour les anciens conjoints. Le divorce, au sens actuel du terme, nécessite une « loi privée » rendue par le Parlement (private act of Parliament). Les séparations restent très rares et onéreuses, et la loi désavantage souvent les femmes. La loi de 1857 crée des tribunaux de divorce (Divorce courts) (Davie, 2011) : si le divorce en Angleterre et au Pays de Galles devient alors légal, il est très cher et difficile à obtenir, en particulier pour les femmes (Thane, 2020). En 1878, le Matrimonial causes act précise pour l’Angleterre les motifs recevables et le déroulement de la procédure, notamment en cas de violence à l’encontre de la femme (Kiefe, 1969). En Écosse enfin, il est plus facile de divorcer mais impossible de se remarier tant que l’ancien partenaire est en vie, car les Églises s’y opposent et le mariage civil n’y existe pas avant 1939 (Thane, 2020).

20Globalement dans les pays où la Réforme s’est imposée et a inspiré le droit, le divorce a été possible tout au long du xixe siècle. Il en est ainsi en Prusse, en Suède ou au Danemark, même si les motifs recevables ont pu varier d’un pays à l’autre et au fil du temps. Par exemple en Prusse, le code de 1794 acceptait comme cause de divorce « l’antipathie invincible » régnant entre les conjoints. En Suède et au Danemark, l’incompatibilité d’humeur était un motif permettant la seule séparation mais non le divorce complet (Simson, 1957, 391 ; Le Bouteillec et al., 2011).

21Quant aux pays dont la législation est restée pendant longtemps d’inspiration catholique romaine, le divorce n’y a été autorisé qu’à partir de la seconde moitié du xxe siècle. En Espagne, la première loi sur le divorce a été mise en place par la République en 1931-1932, mais révoquée par le régime franquiste en 1939. Ce n’est qu’en 1981, bien après la chute de ce régime, que le divorce a de nouveau été rendu légal. En Italie, le Code civil promulgué après l’unification et la désignation de Rome comme capitale nationale excluait toute possibilité de divorce. Ce n’est qu’en 1970 qu’une loi a rendu possible le divorce dans ce pays (Ondei, 1972). En Irlande, ce sont plusieurs évolutions législatives, en particulier depuis 1977, qui ont permis d’aboutir en 1995 à une véritable législation autorisant le divorce [9] (Hug, 1997).

Un renouveau actuel des recherches

22Malgré les recherches importantes menées sur le divorce et les divorcés depuis les années 1950, d’abord par Goode, (1951, 1962), puis par Phillips (1988), Barbagli (1990) ou Stone (1990, 1993), et leur renouveau à l’échelle internationale, souvent dans une perspective sociodémographique (Van Poppel, 1997 ; Matthijs, Baerts et Van de Putte, 2008 ; Cvrcek, 2009, 2011 ; Kalmijn, 2011 ; Savage, 2011 ; et un numéro spécial du Journal of family history, 2011), les connaissances sur le divorce sont encore réduites (Vikström et al., 2011). Par ailleurs, ces études restent pour beaucoup limitées aux pays nordiques ou anglo-saxons.

23Le choix de la Société de démographie historique de consacrer son colloque biennal de 2019 à la séparation et au divorce en Europe s’inscrit dans ce renouvellement historiographique profond, qui vise à embrasser les normes et pratiques autour de ces questions dans des territoires jusqu’à présent délaissés [10]. Lors de ce colloque international intitulé « Divorcer autrefois. La séparation matrimoniale du Moyen Âge au xxe siècle, mondes européens et extra-européens », vingt-et-une communications ont été présentées, couvrant un vaste panorama chronologique, géographique et thématique.

24Le présent volume propose une sélection de ces communications, resserrée autour de champs, chronologiques et géographiques, plus limités. Il comprend sept articles couvrant pour l’essentiel une période allant du xviie siècle au début du xxe siècle, et concernant la France, la Suisse, l’Autriche, Corfou et la société coloniale de l’Algérie [11]. La diversité des époques, des sociétés, des religions, des législations et des modes de séparation des époux, entre séparation de corps, séparation de biens, provisoire ou définitive, et divorce, dans l’acception actuelle du terme, est donc importante.

25La diversité est également forte en ce qui concerne les sources et les approches de la part des chercheurs et chercheuses qui sollicitent notamment des jugements émis par les juridictions religieuses et civiles, des textes littéraires, les témoignages des conjoints, l’état civil, des statistiques agrégées. Les recherches embrassent parfois l’ensemble de la population d’une ville ou d’une région, parfois des milieux spécifiques.

En Autriche, à Corfou et à Versailles : la séparation des couples à l’époque moderne

26Les trois premiers textes portent sur la période moderne, essentiellement les xviie et xviiie siècles, et utilisent principalement des sources juridiques. Celles-ci dépendent généralement des autorités religieuses, même si dans le cas de la France et de l’Autriche le pouvoir séculier prend progressivement le pas sur celles-ci. À ces sources normatives et de la pratique juridique, Aurélie Chatenet-Calyste ajoute des sources imprimées (commentaires de mémorialistes), notariées ou privées (archives familiales).

27Si ces textes portent sur trois régions d’Europe très différentes (le cœur viennois de l’Autriche, le microcosme curial de Versailles et l’île de Corfou) et des milieux sociaux distincts, ils soulignent le poids de l’encadrement religieux dans les choix que peuvent envisager les époux. À cette époque, dans les terres de catholicité viennoise et versaillaise, la seule solution permettant aux conjoints de vivre de manière plus ou moins indépendante est celle de la séparation : séparation de biens, et éventuellement séparation de corps. La première formule est essentiellement utilisée par les femmes afin de protéger leurs biens propres, et notamment leurs dots, contre la mauvaise gestion de leur conjoint. La seconde formule permet aux conjoints de vivre séparément. Seule l’Église orthodoxe, en dépit de l’influence exercée par l’Église catholique sur les terres corfiotes par l’intermédiaire de la tutelle vénitienne, ouvre la voie à un véritable divorce, susceptible de permettre le remariage religieux des conjoints.

28Le texte d’Andrea Griesebner permet d’aborder, sur une période longue (xvie-xixe siècles) et à l’échelle d’un archiduché de la Monarchie des Habsbourg, des questions de fond portant sur les règles permettant et limitant la séparation des couples, sur la modification des motifs au passage de juridictions religieuses à des juridictions civiles, sur le genre des demandes de divorce et les différences genrées de traitement par les juges des demandes des hommes et des femmes, sur le coût de la procédure ou son caractère plus ou moins définitif ou encore sur le devenir des femmes et des enfants après une séparation.

29L’observation porte ici sur l’archiduché de Basse Autriche, qui correspond au nord-est de l’actuelle Autriche, incluant la région de Vienne. Cette zone relève des diocèses de Passau et de Vienne.

30Ce texte présente le grand intérêt de mener une étude précise des règles encadrant le mariage et la séparation, ainsi que du fonctionnement des juridictions en charge de ces questions. Dans la monarchie des Habsbourg, l’Église catholique romaine garde la main sur les questions liées au mariage jusqu’en 1783. Cette juridiction admet la séparation de biens et de corps pour des motifs impérieux restrictifs : adultère, tentative de meurtre, entrée dans les ordres. Une évolution importante se produit en 1783 avec le transfert vers les cours séculières locales des procédures de séparation (sauf pour les membres de la noblesse). Les motifs sont élargis, prenant en considération en plus des motifs précédemment acceptés, la condamnation pour crime, l’abandon, les maladies infectieuses, ou la « conduite désordonnée » d’un conjoint.

31Face à une masse archivistique impressionnante et encore peu explorée, Andrea Griesebner et son équipe recourent à des coupes chronologiques : six pour la période 1558-1783, et quatre pour la période 1783-1850. Ce sont ainsi des milliers d’actes de procédure qui sont compilés et à partir desquels les chercheurs construisent deux bases de données (une indexée sur les documents de procédure, l’autre sur les individus) propres à permettre une analyse quantitative.

32Dans cet article, Andrea Griesebner livre, sous forme de statistiques descriptives, les résultats préliminaires de cette recherche. Grâce à un plan chronologique, elle rend compte des procédures engagées aux cours des deux grandes périodes définies plus haut. Dans une troisième partie, la période charnière 1733-1793 est étudiée plus finement, afin de percevoir l’évolution des pratiques lors du passage des juridictions catholiques aux juridictions civiles. Toutes périodes confondues, on constate que les demandes de séparation émanent très majoritairement des femmes, tandis que les hommes souhaitent plutôt obtenir un arrangement régulant le retour de l’épouse et la cohabitation du couple (avant 1783 les séparations sont souvent ordonnées pour une durée limitée).

33Cette recherche n’a encore livré que ses premiers résultats : estimations de l’âge au mariage des conjoints, durée de vie du couple avant la procédure, métiers exercés par les conjoints. On attend donc avec impatience la poursuite des analyses réalisées à partir de ces bases de données.

34Le monde curial français du xviiie siècle constitue un microcosme aux règles spécifiques. Princesses et princes, comme l’ensemble des nobles vivant à la cour de Versailles, tiennent un rang précis et doivent se soumettre à des règles spécifiques. Il en va ainsi pour le mariage, acte social et politique engageant deux familles fortunées et réputées, mais aussi pour la séparation lorsque survient une grave perturbation dans la vie du couple. L’étude d’Aurélie Chatenet-Calyste, portant sur l’ensemble des femmes appartenant à la cour royale entre 1725 et 1789, montre que, bien que longues et coûteuses, ces procédures de séparation n’étaient pas rares dans ce milieu.

35Mariées souvent très jeunes, les femmes de la noblesse de cour, une fois acquise une certaine maturité, sont parfois conduites, après une dizaine d’années d’union, à lancer une procédure de séparation de biens et, éventuellement, de séparation de corps. En effet, pour qu’une telle action puisse être intentée, il est nécessaire que la femme soit en mesure de démontrer la mauvaise gestion par son mari des biens du couples et des siens propres en particulier. Les procédures montrent que c’est lorsque la dot amenée par l’épouse est menacée par le comportement dépensier du mari que la demande peut aboutir. En sus, la femme peut invoquer l’infidélité, les violences ou le comportement tyrannique du mari. Après la séparation, la femme noble doit parfois affronter une nouvelle situation inconfortable sur le plan financier et juridique. Elle ne possède qu’une capacité juridique d’action limitée, doit souvent recourir à des hommes de confiance pour la gestion de ses biens, et reste sous la puissance maritale pour aliéner ses biens ou faire une acquisition.

36En cela, le monde curial présente de nombreux points communs avec celui de la bourgeoisie : demande pouvant être initiée par la femme, motifs invoqués identiques, on-dits et atteintes à la réputation de la famille, problèmes matériels après la séparation, en particulier pour la femme qui ne peut pas se remarier et se trouve parfois dans une situation économique difficile. Comme l’écrit Aurélie Chatenet-Calyste, « la séparation de biens est aussi une affaire mettant aux prises les deux époux ainsi que leurs parents ». La grande différence réside néanmoins dans le fait que la vie privée des épouses de courtisans se mue bien souvent en affaire publique.

37Au sud-est du continent européen, de culture orthodoxe, l’île de Corfou est au xviiie siècle sous domination vénitienne, puissance catholique romaine. Coexistent donc, sur un même territoire, deux visions différentes de la latitude accordée aux couples de se séparer, situation particulièrement complexe pour les couples mixtes. Alors que l’Église catholique romaine n’admet la séparation définitive du couple, par l’annulation du mariage, que pour des motifs très restreints (non consommation du mariage, non consentement, empêchement canonique comme une parenté prohibée), la religion orthodoxe reconnaît la séparation et le divorce en admettant des causes plus nombreuses telles que les violences exercées sur l’un des conjoints, la conversion religieuse, la maladie, le mariage d’argent, l’impuissance sexuelle, l’entrée dans les ordres monastiques, l’absence de consentement de la part d’un des futurs conjoints, la prostitution et l’adultère. Katerina Konstantinidou nous rappelle que « l’Église orthodoxe de l’île n’opérait pas en totale indépendance mais bien à l’ombre de l’Église catholique locale, toujours prête à réagir ou à intervenir », ce qui explique probablement la fréquence des décisions d’annulation de mariage, atypiques dans le droit canonique orthodoxe, mais plus admissibles pour l’Église sœur catholique.

38La procédure était relativement simple et rapide. Le conjoint souhaitant demander le divorce devait déposer une « pétition » devant le tribunal ecclésiastique orthodoxe ; son conjoint devait alors déposer une « contre-pétition » s’il souhaitait réfuter les arguments ou donner une vision différente de la vie du couple. Après avoir entendu les deux parties, généralement soutenues par des avocats, le juge rendait sa décision.

39En utilisant quatre coupes chronologiques, Katerina Konstantinidou étudie les demandes de divorce déposées devant ce tribunal au cours de la période 1748-1791. Il apparaît que les demandes restent relativement rares (53 au cours des huit années étudiées). Les motifs invoqués par les femmes de Corfou, et plus rarement par les hommes, sont ceux que l’on trouve fréquemment ailleurs : abandon du domicile et disparition du conjoint, non consentement au mariage, adultère, maltraitance. La grande majorité des demandes provient des femmes (35). Probablement s’agit-il de femmes de condition sociale assez aisée pour engager cette procédure et assumer leur indépendance matérielle une fois la séparation prononcée, de nombreux couples désunis échappant probablement à la source car n’engageant pas cette procédure coûteuse. La plupart du temps le tribunal rend rapidement son verdict, et celui-ci est presque toujours en faveur de la demande, et donc du souhait de la femme.

40Soulignons que la source est particulièrement riche et permet de percevoir les relations à l’intérieur du couple et des familles dans une société patriarcale, et que la figure masculine est parfois mise à mal par les déclarations des femmes voulant se séparer de leur mari. De manière intéressante, l’espace insulaire corfiote rejoue la circulation de l’information et le fort contrôle social qu’Aurélie Chatenet-Calyste observe dans l’espace curial versaillais, une séparation n’impliquant jamais uniquement un couple mais tout autant son entourage et son voisinage.

Divorces et divorcés au xixe et xxe siècles : Genève, banlieues parisiennes et villes d’Algérie

41Les trois textes suivants portant sur la période contemporaine présentent des traits méthodologiques communs, tant par leur approche quantitative agrégée que par les sources auxquelles ils recourent : l’état civil et, au sein de celui-ci, en particulier les actes de mariage et les mentions de divorce en marge de ceux-ci, ce qui autorise une analyse sérielle. Privilégiant une approche longitudinale, Guy Brunet recourt également aux actes de naissance afin de rechercher la descendance des couples divorcés.

42Les trois textes s’attachent à proposer une comparaison entre les futurs divorcés et l’ensemble des couples mariés afin de déceler, lors du mariage, d’éventuelles caractéristiques propres aux divorcés, ou plus fréquentes parmi eux que parmi l’ensemble des couples. Ce faisant, les chercheurs sont amenés à proposer un portrait des conjoints divorcés au xixe siècle et au début du xxe siècle.

43La dimension familiale du mariage, en tant qu’alliance entre deux lignées, a été soulignée par de nombreux auteurs, mais qu’en est-il de la dimension familiale du divorce ? Celui-ci est-il une affaire purement individuelle ou une affaire de famille, comme le suggère Aurélie Chatenet-Calyste pour les femmes de la cour de Versailles ? Sandra Brée et Vincent Gourdon soulignent que la famille peut apporter son soutien, matériel et affectif, au conjoint divorcé. Par ailleurs, la famille peut, en entourant le couple, éviter les mésententes, ou au contraire être partiellement responsable de celles-ci. Une autre perspective est proposée par Michel Oris : pour divorcer il faut être prêt à affronter cet événement et ses conséquences, le vouloir et être en mesure de le faire : ready-willing-able selon le modèle conçu par Ansley Coale pour expliquer le déclin de la fécondité et adapté par Simonsson et Sandström (2011) à l’analyse du divorce. Tous les conjoints vivant dans un couple désuni sont-ils en mesure de recourir au divorce ?

44Genève est une ville particulièrement intéressante à étudier car la législation sur le divorce a évolué au fil du temps selon une chronologie particulière. Ville calviniste, considérant le mariage comme un contrat civil, elle autorisait au xviiie siècle la rupture de celui-ci par la volonté des familles, en cas d’adultère ou d’abandon, tout en l’encadrant fortement pour préserver les règles sociales. L’occupation par les troupes françaises à partir de 1798 a introduit à Genève la loi de la Révolution française, et notamment la possibilité du divorce. Redevenu difficile à obtenir et de ce fait rare à partir de 1813, le divorce devient plus fréquent à la faveur de la loi fédérale sur le mariage et le divorce de 1874, qui établit de facto le divorce par consentement mutuel.

45Michel Oris nous propose le suivi chronologique de la pratique du divorce au cours de la période allant de 1800 à 1880, en puisant les informations dans l’état civil. Les divorces sont transcrits dans les registres de mariage et une mention est portée en marge de l’acte de mariage à partir de 1860. Après 1877, seules les mentions marginales de divorce subsistent. Si les transcriptions des jugements de divorce sont loin d’être complètes, les mentions marginales sont encore moins riches : le motif invoqué et l’identité du demandeur font défaut.

46De l’analyse de Michel Oris ressort un portrait collectif des divorcés genevois, dont de nombreux traits ressemblent à ceux déjà perçus dans les recherches antérieures. La jeunesse des épouses, et dans une moindre mesure des époux, lors du mariage apparaît comme source de fragilité de l’union. Mais les mariages tardifs sont également plus fragiles que la moyenne. Le milieu de la petite et de la moyenne bourgeoisie est le plus concerné par le divorce, car les femmes y bénéficient d’une position matérielle leur permettant de subvenir à leurs besoins. Les Genevois de naissance, majoritairement calvinistes, ont plus souvent recours au divorce que les immigrés, souvent en provenance de paroisses catholiques du canton de Genève, de France ou d’Italie. Il est cependant probable que des catholiques aient profité de leur présence à Genève pour obtenir un divorce que la législation de leur pays ne permettait pas.

47Au terme de son étude, Michel Oris en souligne les limites : en étudiant les couples désunis à partir de l’état civil nous ne percevons qu’une partie de ceux-ci. Nous échappent les couples rompus par le départ d’un homme ou d’une femme simplement parti.e refaire sa vie ailleurs, les « divorces avec les pieds » pour reprendre la formule utilisée dans sa conclusion. Quelle proportion des couples désunis peuvent-ils représenter, et leurs caractéristiques étaient-elles identiques à celles des couples officiellement divorcés ? Probablement concernaient-ils plutôt les milieux populaires, mais cela reste à mesurer.

48Le fait que le divorce ait été plus répandu dans les villes, et en particulier à Paris, que dans les régions rurales a été souligné depuis longtemps, mais aucune recherche n’a été menée sur ces zones intermédiaires que sont les banlieues. Sandra Brée et Vincent Gourdon se livrent à un travail ardu de défrichage de la question, et soulignent la grande hétérogénéité des communes de la périphérie de Paris à la charnière des xixe et xxe siècles. Elles diffèrent par l’effectif de leur population, leur rythme de croissance démographique et économique, les activités exercées par les habitants ou encore leur densité. Diffèrent-elles aussi en ce qui concerne le recours au divorce ?

49Après avoir caractérisé cette hétérogénéité, et établi que, globalement, les habitants de ces communes sont plus demandeurs de divorce que les autres urbains français (les communes à vocation industrielle ou résidentielle ont un niveau de divorce plus élevé que celles restées semi-rurales), les auteurs approfondissent l’étude de deux d’entre elles : Ivry-sur-Seine et Noisy-le-Sec.

50À Ivry comme à Noisy-le-Sec, environ 5 % des mariages conclus entre 1880 et 1884 se soldent par un divorce, et 13 % à Noisy contre 8 % à Ivry pour les mariages de la période 1910-1912. Les divorces sont relativement rapides (8 à 10 ans de vie commune).

51Pour mener leur étude, comme Michel Oris et Guy Brunet par ailleurs, les auteurs comparent les caractéristiques socio-démographiques des couples ayant divorcé à celles des couples n’ayant pas eu recours au divorce, afin de percevoir l’existence éventuelle de spécificités. L’emploi de méthodes statistiques fines leur permet ainsi de tester l’effet potentiel de nombreuses caractéristiques, parmi lesquelles l’âge au mariage et l’écart d’âge entre conjoints, l’état matrimonial antérieur, le niveau socio-économique, le lieu de naissance et le statut migratoire des conjoints, la présence plus ou moins forte de l’entourage familial, le fait de vivre encore chez ses parents lors du mariage ou d’avoir déjà expérimenté une certaine autonomie, la légitimation d’enfants nés avant le mariage, ou le fait d’avoir signé un contrat de mariage. Au terme de leur démonstration les auteurs parviennent à identifier quelques caractéristiques plus fréquentes parmi les divorcés : la précocité du mariage des femmes semble constituer un risque de fragilité du couple, tout comme le fait d’être né en dehors de la région parisienne. Les individus mobiles semblent plus enclins à demander le divorce en raison d’un détachement plus fort des pressions familiales et/ou communautaires. Mais à plusieurs reprises, les facteurs mis en évidence dans une commune ne se retrouvent pas dans l’autre. Par exemple les femmes mariées à Ivry et nées hors de la commune divorcent plus que les autres, mais cela ne se vérifie pas dans le cas de Noisy. Enfin, les auteurs soulignent l’existence d’un effet de genre en faveur des femmes dans le degré de significativité des variables.

52Il s’agit bien là d’un travail exploratoire, d’un « chantier entrouvert » pour reprendre l’expression des auteurs. Qu’en est-il par exemple du rôle de l’encadrement religieux et du recours au divorce parmi les catholiques ? L’étude des registres paroissiaux, rarement exploités pour la période contemporaine, peut être riche d’enseignement.

53Contrairement aux deux précédents, le texte de Guy Brunet privilégie une approche de statistique descriptive fondée sur des pourcentages. En revanche, il se distingue par le fait d’utiliser une approche longitudinale, en essayant de suivre la vie des couples du mariage au divorce, avec la recherche des circonstances entourant le mariage et la naissance d’enfants. Il tente même de prolonger l’observation au-delà du divorce en s’interrogeant sur le remariage des divorcé.e.s. La tentative de suivi des couples, du mariage au divorce, pose en creux la question de savoir si les caractéristiques des conjoints lors du mariage sont déterminantes sur le fait que le couple ait ultérieurement recours au divorce ou non. En effet, de nombreux événements, tels que la naissance d’enfants, le décès éventuel de ceux-ci, la survie ou le décès des parents des conjoints, l’éventuelle mobilité géographique du couple, la santé et la survie des conjoints eux-mêmes, peuvent influer et jouer un rôle aussi important que les caractéristiques socio-démographiques initiales des conjoints. La valeur explicative de celles-ci sur la survenue d’un divorce serait alors à relativiser.

54Cette recherche porte sur les trois principales villes du territoire algérien au cours des premières décennies de la Troisième République. Rappelons que l’administration française avait défini plusieurs groupes au sein de la population vivant dans les trois départements du nord : les citoyens français, de naissance ou naturalisés, et les étrangers nés sur le continent européen ou de parents en étant venus, étaient considérés comme « européens ». Les membres de la communauté juive vivant depuis des générations en Algérie, qui jusqu’en 1871 étaient considérés comme des « indigènes israélites », sont à partir de cette date des citoyens français mais leur religion en fait une catégorie à part. Tous sont pris en considération dans les registres de mariage et, pour eux, le divorce est autorisé en fonction du Code civil. Reste la catégorie dite des « indigènes musulmans » qui sont « sujets » français, sans posséder les droits de citoyenneté et qui, ne relevant pas du Code civil, n’apparaissent pas dans les documents d’état civil.

55Ce travail est le premier à étudier le divorce au sein de cette société coloniale et permet d’affirmer que les citadins d’Alger, de Constantine et d’Oran recourent au divorce à peu près avec la même fréquence que les citadins de métropole. Il confirme également ce qui était pressenti, à savoir que le divorce est plus répandu parmi les « Israélites » que parmi les « Européens », et que parmi ces derniers il est plus fréquent parmi les citoyens d’origine française que parmi les immigrés venus d’Espagne.

56Se gardant de tout déterminisme, et soulignant que les circonstances propres à chaque mariage et à la personnalité des conjoints peuvent être la cause du divorce, Guy Brunet pointe, comme les auteurs précédents, la précocité du mariage des femmes comme une possible cause de fragilité des unions. Il évoque également le fait que l’épouse soit plus âgée que son mari comme source de fragilité, point qui ne se retrouve pas dans les études portant sur les banlieues parisiennes.

Un motif de séparation renouvelé : la nuit de noces aux sources du divorce

57En conclusion de ce dossier, le texte d’Aïcha Salmon présente des caractéristiques originales par son approche centrée sur la nuit de noces. L’autrice nous rappelle le rôle fondamental de la première nuit mettant en présence charnelle les conjoints, de cet instant particulier qui constitue, selon ses termes, « un moment crucial de construction ou de dislocation du lien conjugal ». En cela, la manière dont se déroule la première nuit commune, qui marque alors souvent la première expérience sexuelle complète pour l’épousée, avec la réalisation du « devoir conjugal », le debitum, peut être lourde de conséquences sur la vie commune future, voire responsable d’un divorce demandé et prononcé plus ou moins rapidement.

58Aïcha Salmon croise des sources de différentes natures pour aborder son sujet. Les œuvres littéraires ou les textes émanant de médecins ou de juristes sont nombreux au cours des dernières décennies du xixe siècle et au début du xxe siècle, alors que les débats sont vifs autour de la législation sur le divorce. Des témoignages issus de lettres envoyées aux journaux par des lecteurs complètent ces textes. Mais les mots les plus forts sont sans doute ceux prononcés par les époux eux-mêmes, hommes et femmes, devant les juridictions, religieuses ou civiles, amenées à délibérer sur ces demandes.

59En effet, pour les couples, le mariage civil est obligatoire, et peut donner lieu à une séparation ou, à partir de 1884, à un divorce, voire, dans des circonstances particulières et très limitées, à une annulation. Mais les couples mariés religieusement peuvent également solliciter la nullité de leur union, sans que cela fasse disparaître le lien conjugal contracté civilement ou en complément de sa rupture. Les époux sont donc face à deux juridictions indépendantes l’une de l’autre, et dont les règles sont différentes. Les motifs permettant le divorce ou ceux pouvant déboucher sur une annulation du mariage par le Vatican ne sont pas les mêmes. La présentation faite par les époux devant ces deux juridictions et les arguments avancés par l’un ou par l’autre varient dès lors, de manière à présenter leur demande de manière recevable.

60La parole des époux, telle que recueillie par les magistrats et consignée dans les archives mobilisées par Aïcha Salmon, n’est donc pas une parole spontanée. Elle apporte toutefois des éléments extrêmement concrets et souvent touchants sur ce révélateur que constitue la nuit de noces. Les témoignages présentés ici font mesurer la différence de perception quant aux attentes de ce rite de passage et au déroulement concret de cette nuit qui marque une découverte de l’autre, sur le plan sexuel mais pas uniquement. Le corps, si complètement masqué au quotidien, est enfin dévoilé, avec ses attraits mais aussi parfois avec ses défauts ou ses laideurs, et il en va de même du caractère du partenaire qui peut se révéler tyrannique ou violent. La nuit de noces, lorsqu’elle se déroule mal, peut être source de déception, de frustration, de douleur. L’exercice du « devoir conjugal » est une révélation pour de nombreuses jeunes femmes ignorantes des réalités de la sexualité. Les mots des femmes confrontées au « viol légal », qui correspond au caractère non consenti de la relation sexuelle lors de cette première nuit, résonnent fortement.

61De la nuit de noces au divorce, dans les cas très minoritaires présentés ici, il n’y a parfois qu’un pas, ce qui fait de la nuit de noces un enjeu bien plus crucial pour la pérennité du mariage ou pour son échec, que sa représentation traditionnelle n’invite à l’envisager.

Notes

  • [1]
    Dans la religion juive, en revanche, il est possible de divorcer. La Torah reconnaît le droit au divorce, mais le divorce civil n’est pas suffisant pour établir une rupture du lien marital ; l’époux doit donner le ghet à sa femme pour que le mariage religieux soit dissout (Rabello, 2002).
  • [2]
    C’est seulement après 1918 qu’est créée une « Commission des mariages » qui devait statuer en cas de demande de remariage après un divorce, et seul le conjoint « non coupable » était autorisé à se remarier au temple, qu’il ait été ou non marié au temple la première fois.
  • [3]
    Lors de la première publication de ce Fragment se trouvait à la suite un texte intitulé « Du divorce », mémoire rédigé par un de ses amis avocat favorable au divorce.
  • [4]
    À l’échelle nationale, on compte environ un millier de séparations de corps par an vers 1850, 2 000 dans les années 1870 et 3 000 en 1883 (Brée, 2021a).
  • [5]
    La démence, la folie ou la fureur d’un des époux ; une condamnation à une peine afflictive ou infamante ; les crimes, sévices ou injures graves ; le dérèglement de mœurs notoire ; l’abandon ; l’absence sans nouvelle depuis cinq ans ; l’émigration. Le divorce est ensuite autorisé, par la loi du 4 Floréal an II, pour abandon du conjoint de plus de six mois.
  • [6]
    Les taux de divortialité sont deux fois plus élevés dans le département de la Seine que dans le reste des villes et sept fois plus que dans les zones rurales (Brée, 2021b).
  • [7]
    Le nombre de séparations de corps et de divorces connaît une chute pendant les deux guerres mondiales suivi par un rattrapage lors des après-guerres. L’analyse des divorces de la Première Guerre montre que ce ne sont pas les jeunes couples séparés par la guerre qui divorcent mais des couples plus âgés. Au sortir du conflit, le rattrapage est important mais si l’on s’en tient strictement aux chiffres, le « rattrapage » des divorces de l’après-guerre ne comble pas le « déficit » des divorces pendant le conflit, et le rythme de la divortialité de l’entre-deux-guerres est finalement moins soutenu que pendant la période 1900-1913 (Brée, 2020).
  • [8]
    Il serait intéressant de savoir s’ils varient également selon les niveaux socioéconomiques par exemple, étude qui n’a pas encore été menée.
  • [9]
    En 1986, un projet de loi sur le divorce avait été repoussé par 60 % des électeurs. En 1995, le projet n’a été approuvé que par une très courte majorité (50,5 % des suffrages exprimés).
  • [10]
    Ce colloque s’est tenu du 27 au 29 décembre à Lyon, à la Maison des Sciences de l’Homme de Lyon et Saint-Etienne.
  • [11]
    Une autre sélection de textes présentés lors du colloque de la Société de démographie historique, centrée sur des problématiques de genre et fondée sur des approches plus qualitatives, doit paraître à la fin de l’année 2021 dans la revue Genre & histoire, sous la responsabilité de Claire Chatelain, Carole Avignon, Sandra Brée et Guy Brunet.

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Sandra Brée
CNRS, LARHRA (UMR 5190)
Guy Brunet
Université de Lyon 2
CNRS, LARHRA (UMR 5190)
Mis en ligne sur Cairn.info le 11/05/2021
https://doi.org/10.3917/adh.140.0001
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