Cette recherche en sociologie a pour objectif de comprendre la place de la chambre connectée dans la manière dont les adolescents vivent, expriment et définissent le fait de devenir « grands ». Les usages de la chambre connectée rendent compte d’un processus identitaire qui se construit selon deux temporalités : celle du temps long de l’histoire biographique et celle d’un présent plus immédiat orchestré par la connexion et les pratiques du smartphone. Les deux sont articulées par une dynamique qui rend compte de tâtonnements : l’expérimentation identitaire. Dans ce processus, un mouvement d’actualisation régulier et continu est à l’œuvre que tente de décrire l’article.
Article
Cet article a pour objectif de comprendre la place de la « chambre connectée » (Ramos, 2018) dans la manière dont les adolescents vivent, expriment et définissent le fait de devenir « grands ». Les usages de la chambre connectée rendent compte d’un processus identitaire qui se construit selon deux temporalités : celle du temps long de l’histoire biographique et celle d’un présent plus immédiat orchestré par la connexion et les pratiques du smartphone.
La chambre est un lieu à soi qui s’inscrit dans un cadre parental et revêt deux caractéristiques : c’est un espace fini dont on pourrait faire l’inventaire et qui reste en partie sous contrôle. Cependant, l’utilisation d’écrans connectés permet aux jeunes gens d’être en contact avec un monde extérieur à l’espace familial, échappant en grande partie aux parents et participant de la construction du processus d’autonomie. La différenciation entre l’espace de la chambre et celui du numérique se dessine ainsi entre fixe et limité pour le premier, fluide et infini (ou presque) pour le deuxième. Mais, dans les deux cas, il s’agit d’espaces d’expérimentations identitaires qui s’inscrivent dans le processus de « l’entrée dans la vie » (Le Breton, 2008), de l’apprentissage du « être grand » (Singly, 2006) ou du « faire grand » (Metton-Gayon, 2009). L’adolescence se caractérise par un double souci de différentiation : se distinguer des « petits » (les plus petits que soi) et des « vieux » (les adultes) ; l’appropriation de la chambre permet d’une certaine manière ce travail de « tri » tout en gardant des traces de son passé (certains jeux, certaines peluches qui ont compté restent comme témoins d’un « moi » passé) mais en le renouvelant (avec de nouvelles photographies, de nouveaux posters, etc…
Résumé
Plan
- Chambre et numérique, des supports d’identités : « c’est à moi » et « il y a tout là-dedans »
- Le processus d’actualisation : « C’est une période où se crée sa personnalité. »
- Chambre et portable : pratique et expérimentation de soi
- La chambre et le portable complémentaires : un présent routinisé et un présent de l’actualité
- Se distinguer des adultes, des parents : « C’est des gens qui vivent lentement. »
- Retenir certains moments : une fonction mémorielle commune aux deux espaces
- Conclusion
Auteur
Thèmes de recherche : chez-soi, famille et individu, jeunesse et adolescence, mobilité et migration, autonomie, espace.
A notamment publié
Maunaye E., Ramos E. (dir.), 2022, « Le chez-soi et les limites de l’individualisation », Enfances Familles Générations, no 39.
Ramos E., 2018, « “Espace relationnel”, autonomie des acteurs et des groupes à l’adolescence », in Lenel (dir.), L’espace des sociologues. Recherches contemporaines en compagnie de Jean Remy, Toulouse, Érès, p. 167-188.
Ramos E., Singly F., 2016, « La construction d’un espace à “nous” : la mobilité spatiale à l’adolescence », Les annales de la recherche urbaine, no 111, 2016, p. 58-67.
Sur un sujet proche
- Mis en ligne sur Cairn.info le 27/10/2022
- https://doi.org/10.3917/agora.092.0041

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