Jean-Marie Mignon, La Découverte, coll. « Alternatives sociales », Paris, 2005, nouvelle édition, 175 p., 15 euros
1Jean-Marie Mignon, conseiller technique et pédagogique à la direction régionale de la jeunesse et des sports (DRDJS) de l’Île-de-France, enseignant à l’IUT « carrières sociales » de Paris-XIII et docteur en histoire, propose ici une édition actualisée d’un ouvrage que l’on pourrait situer à la croisée d’une description à visée informative de l’ensemble des métiers de l’animation et d’une réflexion sur le processus de « professionnalisation » ou d’« autonomisation » des activités d’animation. S’adressant aux animateurs « en formation ou déjà sur le terrain, à leurs employeurs [mais aussi] aux adultes, parents qui s’interrogent sur la façon dont les animateurs s’occupent de leurs enfants, travaillent avec les adolescents, ce qu’ils proposent aux personnes âgée », le livre présente au moins deux niveaux d’appréhension.
2Le lecteur soucieux de s’informer sur l’animation découvrira donc, exposées sur près d’un tiers de l’ouvrage (chapitre IV), des descriptions détaillées des différents diplômes (du BAFA au DEDPAD, en passant par les filières universitaires…), des conditions à remplir pour accéder aux formations et les perspectives d’emplois qu’elles ouvrent à ceux et celles qui les ont suivies. Les annexes présentent de surcroît des éléments d’usage pratique, comme la liste des coordonnées de DRJS et des IUT « carrières sociales », la grille de classification des emplois de la convention collective nationale de l’animation, un tableau présentant la filière animation de la fonction publique territoriale…
3Mais l’on n’a pas affaire ici à, pourrait-on dire, un « simple » guide. Ceux qui désireraient mieux connaître l’espace de l’animation, sa situation socio-économique et les évolutions historiques dont elle est le produit y trouveront des points de repères et des références bibliographiques. La présentation des diplômes s’organise ainsi selon un cheminement chronologique, les champs d’intervention des animateurs sont également resitués dans le cadre des politiques publiques d’aménagement du territoire, de la décentralisation… (chapitre II). Se dessine alors, en parallèle, le tableau de ce que l’auteur identifie comme les éléments spécifiques à l’animation : d’abord une histoire qui s’inscrit dans le prolongement de l’éducation populaire, mais aussi des manières de faire (ou plutôt d’« être animateur », comme l’annonce le titre du chapitre III) qui lui sont propres, reposant sur une « relation pédagogique » construite sur la « liberté » des agents d’y prendre part, sur un contenu « artistique, technique, scientifique, ludique ou physique » et enfin, sur l’« inscription de ses activités dans un projet de société ».
4C’est sans doute là le cœur de l’ouvrage, dans cette tentative de faire surgir une unité qui est pourtant, selon l’auteur, problématique. Le deuxième chapitre en est un bon exemple : reprenant les critères de la sociologie des professions (« la référence professionnelle, la capacité de parler au nom d’un corps de métiers : la représentativité et […] l’identité professionnelle »), l’auteur ne peut que constater que par son hétérogénéité et sa faible reconnaissance, l’animation peine à les satisfaire. Il ne reste plus, dès lors, que le « sentiment d’appartenance commune » des animateurs pour faire corps. Mais celui-ci est à son tour décrit comme faisant l’objet de transformations, les « militants » des premières heures laissant progressivement la place aux « professionnels » (chapitre I), les « fondateurs » aux « directeurs » puis aux « animateurs en direct » (chapitre III). Dans ces conditions, l’animation apparaît comme ballottée par les à-coups de l’histoire politique et sociale et semble chercher une place toujours refusée, que ce soit dans la reconnaissance de ses diplômes ou dans celle des connaissances spécifiques de ses agents.
5Comme pour d’autres avant lui, il y a sans doute, de la part de l’auteur, comme un coup de force symbolique dans le fait même d’aborder l’animation comme s’il s’agissait d’un sujet collectif, mais il est tempéré ici par une certaine honnêteté intellectuelle qui parait l’empêcher d’aller jusqu’aux discours revendiquant, au mépris des faits, l’unité de l’animation. Et c’est peut-être dans cette tension qui traverse tout l’ouvrage, entre la diversité objective de ses formes et le sentiment d’une certaine spécificité, que se dit le mieux la situation contemporaine de l’animation.