CAIRN.INFO : Matières à réflexion

1La population de l’Ouganda, notamment en milieu rural, est l’une des plus jeunes au monde : la fécondité par femme y était supérieure à sept enfants jusqu’aux années 2010. La région du Bunyoro [1], sur la rive est du lac Albert, à la frontière de la République démocratique du Congo, est longtemps restée éloignée des intérêts et du pouvoir en Ouganda. Elle est récemment devenue l’objet d’une attention nationale et internationale soutenue, avec l’exploration pétrolière qui a démarré en 2005 et les perspectives de production qui en ont découlé et à plusieurs reprises repoussées (la production est actuellement prévue pour 2020). La fragilité de la régulation étatique laisse la place à des pratiques corrompues (Anderson, Browne, 2011). Les effets à venir du développement du secteur pétrolier sur la population locale sont l’objet de débats (Vokes, 2012). Les médias nationaux répercutent les attentes insatisfaites des jeunes [2] et certains élus, représentant la jeunesse, affirment que les jeunes sont marginalisés, en particulier en termes d’accès à l’emploi ou à la formation.

2Au-delà de la définition d’une catégorie statistique fondée sur l’âge, la définition des « jeunes » pose la question d’un statut social. La notion de « cadet social » souligne la position spécifique des jeunes qui n’ont pas toujours à leur disposition les moyens de leur autonomisation (Boyer, Guénard, 2014 ; Bayart, 2006). Ils ne forment pas une mais plusieurs catégories sociales : entrepreneurs, conducteurs de motos-taxis, pêcheurs, scolarisés, prostituées, etc. Néanmoins, il convient de souligner l’émergence d’une catégorie statistique qui correspond à une demande internationale et nationale en matière de politique publique. La catégorie d’âge imposée par le haut est instrumentalisée par le bas et devient une catégorie de mobilisation politique dans le cas ougandais. Cependant, les discours cachent une grande variété de situations, liée aux mécanismes d’accès à la terre et à l’emploi, ce qui renvoie aux processus d’autonomisation économique, au sein des familles comme au-delà.

3Alors que le royaume du Bunyoro était une puissance régionale jusqu’au milieu du xixe siècle, les guerres de succession et les violents conflits qui l’ont opposé au royaume voisin du Buganda, puis par la suite la colonisation, ont laminé sa puissance (Kiwanuka, 1968). Le début de la période coloniale consacre la prédominance du Buganda sur le reste du pays (Médard, 2002). Jusqu’au début des années 1950, l’ancien royaume du Bunyoro est aux prises avec une crise démographique profonde caractérisée par une décroissance de la population (Doyle, 2000). Marginalisée politiquement et économiquement, éloignée de la capitale du pays, la région est depuis lors une zone de forte émigration, les jeunes quittant le Bunyoro pour suivre des études ou travailler dans d’autres parties du pays.

4Cette région de faible densité de population est néanmoins progressivement devenue un lieu de destination. Depuis les années 1960 jusqu’à aujourd’hui, le gouvernement y a facilité l’accès à la terre de migrants issus du sud du pays, plus densément peuplé, et de réfugiés internationaux. Ainsi, au cours des cinquante dernières années, les migrations ont façonné la structure de la population de la région avec une émigration forte vers la capitale, Kampala, et les principaux bassins d’emploi du pays, et une immigration également importante dans les secteurs de la pêche, de l’agriculture et de l’élevage. Une idéologie autochtoniste, fondée sur la distinction entre des catégories de natifs et de migrants, se renforce progressivement, en relation au contrôle de ces ressources variées. Avec l’exploration pétrolière récente, l’immigration s’est encore accrue au Bunyoro, ce qui contribue à une situation économique et politique tendue. Les attentes souvent déçues des jeunes quant au secteur pétrolier sont une source de frustration nouvelle et alimentent ces tensions.

5L’objectif de cet article est de documenter et de discuter les tensions autour de la jeunesse dans la région du lac Albert en Ouganda à partir de l’analyse de plusieurs séries d’entretiens réalisés dans le cadre du projet M-PRAM et de données secondaires (presse, statistiques, etc.). Les entretiens, qui avaient pour but d’appréhender les transformations sociales en cours dans la région, soulignent les attentes de la jeunesse. Ils ont été recueillis collectivement dans les chefs-lieux de Hoima et Buliisa, en juillet 2012, en zone rurale agricole, dans le district de Buliisa, en juillet 2012 également, et sur les rives du lac Albert, zone rurale de pêche et d’élevage, dans le district de Hoima, en décembre 2012 et décembre 2013. Ce dernier séjour était centré sur la pêche et construit sur un échange avec les écologues de l’équipe Kenweb [3]. Le corpus de données inclut soixante-six entretiens enregistrés, ainsi que deux discussions de groupe et des notes de terrain. Les entretiens ont été conduits auprès de personnels de l’administration, élus et nommés [4], de personnes impliquées dans des églises et des ONG locales, d’autres pratiquant l’agriculture, la pêche, le commerce ou des activités de service, auprès d’employés de bars, restaurants et hôtels, de même que des gens sans emploi. Les jeunes subissent le contrecoup d’une forte croissance démographique. Ils sont marginalisés dans un système économique aux mains de personnes plus âgées et bénéficiant de meilleurs appuis politiques, qui reproduit des inégalités et en crée de nouvelles face au développement d’une économie extractive. Horizons incertains et efforts de monopolisation de l’économie de la part d’acteurs étatiques ouvrent la voie à de fortes tensions identitaires. Pourtant, le développement des infrastructures entraîne une croissance économique importante, notamment dans le secteur des services, et ouvre également l’accès à de nouveaux marchés pour le secteur primaire.

La jeunesse, une catégorie politique fondée sur un constat démographique

6Dans les sociétés en présence, le statut d’« ancien », très valorisé, crée a contrario celui de « jeune », de dépendant, de cadet. Cette opposition demeure importante dans les représentations sociales, car associée à une notion de statut social.

7Au cours de nos enquêtes, nos interlocuteurs n’éprouvent pas toujours le besoin de définir les « jeunes ». Certains font néanmoins référence au cycle de vie, conçu de manière spécifique et changeante, que sous-tend une vision hiérarchisée de la société. Les « jeunes » sont ceux qui ne sont pas encore établis dans la vie, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas mariés, n’ont pas d’enfant dans le mariage, n’ont pas de situation ou, le cas échéant, n’ont pas fini leur scolarité. Le statut d’une personne semble dépendre de situations tranchées : soit la personne dispose d’une terre pour s’établir, soit elle n’en dispose pas ; soit elle est mariée, soit elle ne l’est pas. La jeunesse est définie par ces situations négatives, censées être de court terme. Pourtant, les situations réelles sont de moins en moins tranchées, avec des périodes de transition plus ou moins longues, comprenant nombre de situations intermédiaires et de retours en arrière. Une femme a un enfant mais n’est pas mariée, un couple cultive une terre mais n’a pas de garantie de pouvoir continuer à le faire à la saison suivante, etc.

8Au-delà de l’apparition de cette période de transition et de sa complexité croissante, bien documentée par des enquêtes biographiques conduites sur différents continents (Calvès et al., 2005), la scolarisation est devenue centrale dans ce remodelage de la jeunesse. Elle a des effets contradictoires, avec des jeunes qui occupent des places de responsabilité, car ils sont instruits, ou au contraire qui sont relégués au rang de mineurs car ils ne sont pas autonomes financièrement pendant la durée de leurs études et ont des perspectives limitées de trouver un emploi qui corresponde à leur qualification.

9Malgré cette complexité, la jeunesse est généralement définie par l’âge, avec des groupes différents selon les sources. Du fait de la croissance naturelle et de l’attractivité de la région, le nombre des « jeunes » ainsi définis croit rapidement. Les données statistiques ou la littérature apportent des connaissances hétérogènes mais qui montrent les transformations de cette catégorie dans la région, en termes d’instruction, d’activité ou d’emploi. De plus, les difficultés de la jeunesse sont instrumentalisées par différentes catégories d’acteurs comme par le gouvernement pour justifier revendications et décisions politiques.

10La jeunesse comme catégorie d’âge, un raccourci statistique. Impossible de traduire cette notion complexe en une catégorie statistique ; pourtant, définir les jeunes par un groupe d’âge est devenu une norme et contribue à faire exister cette représentation comme une réalité sociale.

11C’est le résultat paradoxal des efforts de l’État dans sa production statistique et dans les politiques mises en œuvre visant les jeunes. Si tous les documents officiels s’arrêtent à une définition de la jeunesse par groupe d’âge, c’est qu’il est difficile, avec une définition plus pertinente, de fournir des chiffres. Les âges-limites, généralement compris entre 12 et 35 ans, ne font pas l’unanimité et sont discutés à l’infini suivant les critères choisis, d’autant plus que les représentations sont changeantes. Les limites sont fixées également en fonction d’interventions spécifiques en matière de politique publique (éducation, santé, représentation politique). Elles varient parfois au sein d’une même publication.

12Ainsi, en 2001, la première synthèse d’orientation de politique publique Uganda National Youth Policy (Republic of Uganda, 2001), faisant déjà état de ce problème, accorde une rubrique entière à la définition de la catégorie « jeune », dans laquelle elle justifie l’utilisation du groupe des 12 à 30 ans, plus large que les définitions habituelles (par exemple, celle des Nations unies : 15-24 ans ; ou du Commonwealth : 15-29 ans). Dans ce même document, des données de cadrage sont au préalable fournies, pour certaines sur les 15-19 ans et pour d’autres sans précision du groupe de référence. Plus récemment, l’un des derniers documents en date exclusivement consacré à la jeunesse ougandaise est le Youth Map (International Youth Foundation, 2011), dans lequel les jeunes sont les 15-30 ans. Dans le recensement de 2014, les jeunes sont les 18-30 ans, et dans les enquêtes démographiques et de santé (la dernière conduite en 2011), les jeunes sont les 15-24 ans.

13Autant dire que les chiffres correspondant à ces catégories, et en particulier la part de la population totale concernée, varient beaucoup d’une source à l’autre, même si toutes s’accordent sur l’importance de ce groupe. Si l’on s’en tient aux 18-30 ans, selon le dernier recensement (UBOS, 2014b), les jeunes Ougandais sont près de 8 millions, c’est-à-dire 22,5 % de la population, une proportion proche de celle de 2002 [5].

14Au Bunyoro, dans les districts de Masindi, Hoima et Kibaale en 2002, la part des jeunes dans la population en 1991 et 2002 tourne autour de 20 %, une proportion inférieure à la moyenne nationale [6]. Les jeunes seraient environ 420 000 en 2014, alors qu’ils étaient 270 000 en 2002, un effectif en croissance rapide comme le reste de la population [7].

15Les déclarations sur le lieu de naissance montrent des transformations importantes de la migration. En effet, en 1991, 21 % des jeunes de 18 à 30 ans natifs du Bunyoro vivent ailleurs dans le pays, mais 32 % des jeunes vivant au Bunyoro n’y sont pas nés. Onze ans plus tard, en 2002, seuls 13 % des jeunes natifs du Bunyoro vivent ailleurs dans le pays, et au Bunyoro, 35 % des jeunes n’y sont pas nés. Dans la région, les années 1980-1990 ont donc été marquées à la fois par un recul de l’émigration et par une immigration soutenue, touchant en particulier les jeunes, ce qui montre que leur augmentation est due non seulement à la croissance naturelle, mais aussi à l’attrait que la région présente pour eux.

16Éducation et emploi des jeunes. Les données statistiques nous disent également que les 18-30 ans sont de plus en plus instruits. Au Bunyoro, à 20 ans, la proportion de jeunes femmes encore dans le système éducatif est passée de 5 % à 9 % entre 1991 et 2002, celle de jeunes hommes de 14 à 25 %. En parallèle, les taux d’activité stagnent, voire régressent, avec le temps. Selon le National Household Survey, le nombre de personnes actives (parmi les 14-64 ans) dans le centre-ouest de l’Ouganda a diminué de 4 % entre 2009 et 2012, en dépit de la croissance démographique (UBOS, 2014a, p. 45).

17Ce paradoxe entraîne un mal-être de la jeunesse qui fait consensus parmi les élus, au sein de l’administration comme de la population. Le chômage est le problème principal désigné à la fois par l’administration et par les jeunes eux-mêmes [8]. Malgré la scolarisation croissante, le système éducatif est souvent remis en question. Un jeune insiste sur le fait qu’il est difficile de finir ses études secondaires, à cause du coût des frais de scolarité, et que cela empêche d’accéder à l’emploi [9]. De son côté, l’administration regrette l’absence de formation technique qui permette de donner des qualifications aux jeunes qui quittent l’école, comme nous le confie un représentant du pouvoir central dans le district de Hoima : « Ici, à cause du manque de formation professionnelle, on trouve beaucoup d’abandons [scolaires]… […] Mais il y a des endroits, des districts, qui ont des lycées professionnels qui enseignent la menuiserie, la fabrication de briques et la conduite… […] C’est la demande du district, nous prônons l’ouverture […] de lycées professionnels qui puissent accueillir les nôtres [10]. » C’est une question qui se pose dans l’ensemble de la région et qui est confirmée par un élu du district de Hoima : « Notre système éducatif ici n’a pas aidé les nôtres […] pour les équiper avec suffisamment de compétences professionnelles. À présent, ces industries, […] elles ont besoin de plus de gens qualifiés ; vous savez, pour gérer les machines, diriger ceci [11]… »

18Ce décalage entre qualifications et marché de l’emploi local est identifié comme un facteur de chômage et de sous-emploi pour les jeunes (et comme un problème pour les employeurs) et fait l’objet de revendications. Il est répercuté par l’administration, mais nommés et élus soulignent leur impuissance.

19Le chômage n’est pas une spécificité locale, mais cette situation est renforcée dans le cas du Bunyoro par des attentes plus marquées du fait de l’ouverture soudaine d’opportunités liées à l’exploration pétrolière. Ainsi, une région accusant un retard par rapport aux autres en termes de développement, avec des taux d’activité qui régressent, se trouve brutalement projetée sur la scène économique nationale, créant des espoirs démesurés. Cependant, les jeunes sont mal équipés en termes d’éducation pour saisir les opportunités qui se présentent.

20La mobilisation autour de la catégorie « jeunes ». Parler des « jeunes » renvoie aujourd’hui à une catégorie affirmée par l’État et entraîne des discours construits autour des problèmes et des besoins d’une jeunesse nombreuse, particulièrement en termes économiques. C’est de ce constat que part l’Uganda National Youth Policy de 2001 (Republic of Uganda, 2001), dont l’objectif est une meilleure intégration des jeunes au développement du pays. De fait, l’État, à travers son administration, s’efforce de coopter des jeunes. Depuis le National Youth Council Act [12] de 1993, qui a fait l’objet de plusieurs révisions depuis (2006, 2010, 2015), on peut noter par exemple l’apparition de cinq représentants des jeunes au parlement (Youth MPs de moins de 35 ans), chacun représentant une région, et de toute une hiérarchie d’assemblées de représentants des jeunes depuis le village jusqu’au district, chapeautée par un National Youth Council. L’attention électorale portée aux jeunes se retrouve également dans la mise place et le financement d’association d’épargne (Sacco, Savings and Credit Cooperative Organizations) [13].

21Dans la société civile, de nombreuses organisations existent et tentent de se coordonner. Rares sont celles qui sont ancrées dans les différentes régions du pays et en particulier au bord du lac Albert. Les grandes ONG internationales produisent des études sur la jeunesse à l’échelle du pays entier, comme par exemple Action Aid (AAU, DRT et UNNGOF, 2012). Là encore, les difficultés auxquelles font face les jeunes pour entrer sur le marché du travail dominent les discours.

22Alors que la jeunesse est officiellement une catégorie statistique, l’importance que le gouvernement lui accorde en fait aussi une catégorie politique. Localement, même si les jeunes, de plus en plus nombreux, sont davantage instruits, les possibilités de formation professionnelle ou supérieure et les opportunités d’emploi salarié demeurent limitées, ce qui induit une prise de conscience des difficultés économiques spécifiques à la jeunesse. Dans ce contexte, la catégorie « jeunes » est instrumentalisée par le régime pour obtenir leur adhésion et réappropriée par certains jeunes eux-mêmes pour négocier avec l’État.

Des jeunes marginalisés malgré le développement du secteur pétrolier

23Les jeunes expriment des difficultés à s’insérer comme ils le souhaitent sur le marché du travail. Nous aborderons dans cette partie les difficultés liées à l’activité dans le secteur primaire (agriculture, élevage, pêche), ainsi que les déficiences du marché de l’emploi dans le secteur pétrolier. Ces difficultés encouragent la corruption et entraînent un sentiment d’injustice et des tendances xénophobes, répercutés dans les médias.

24La progression de l’éducation véhicule avec elle des représentations sur des métiers plus « faciles », moins pénibles, où l’argent coule « à flots ». Ces métiers auxquels sont censés mener l’éducation, à l’image par exemple de ceux du service public, ne sont pas si accessibles que cela aux jeunes, mêmes instruits.

25Toutes proportions gardées, en dehors de ces métiers souvent inaccessibles, d’autres activités ne nécessitant pas d’être allé à l’école sont localement associées à un argent « facile » (par ceux qui ne les pratiquent pas). C’est le cas de la pêche ou de la prostitution, considérés comme des métiers de « flambeurs » menant à des dépenses de « loisirs » : boissons, vidéos, discothèques. En réalité, ces métiers sont caractérisés par une forte précarité, soulignée par la difficulté à mettre de l’argent de côté.

26La monétarisation de l’économie a transformé durablement les activités de pêche, d’élevage et d’agriculture. Des stratégies délibérées pour réinvestir dans une activité productive et/ou commerciale s’observent : fabriquer et transporter du charbon, planter une parcelle en cultures commerciales, etc. L’investissement en travail est élevé mais peut rapporter des bénéfices, en dépit des aléas. C’est dans ce contexte que les attentes autour de l’emploi créé par le pétrole sont fortes, même si la grande majorité des habitants, jeunes compris, dépendent à l’heure actuelle du secteur primaire.

27Un secteur primaire face à des blocages multiples. Les revenus et la subsistance de la vaste majorité des habitants du Bunyoro reposent sur des activités liées à l’agriculture, l’élevage et à l’exploitation directe de ressources naturelles (pêche, charbon de bois). Elles s’effectuent dans le cadre d’un fort contrôle à la fois administratif et politique sur l’accès à ces ressources, qui s’exerce non pas tant suivant une logique de protection environnementale que selon la logique patrimoniale et rentière des personnes occupant des postes administratifs et de pouvoir. Ce contrôle se fonde sur des passe-droits, des prélèvements et des taxes plus ou moins légaux, qui parfois encouragent des activités illégales en particulier dans le domaine de la pêche et de la fabrication du charbon de bois [14].

28Après des années de guerre civile (1979-1986), l’attractivité du secteur primaire dans la région s’est accrue. Elle est soulignée à partir des années 1990 par de nouveaux fronts de peuplement agricole qui empiètent notamment sur les forêts (Golaz et al., 2015). Les nouvelles installations sont le fait à la fois de natifs et de migrants en provenance de régions voisines, qui sont arrivés dans la région pour des raisons variées, comme les agriculteurs qui ont quitté le Kigezi densément peuplé, les éleveurs en provenance d’autres parties du pays à cause de la privatisation des terres et les pêcheurs issus des districts voisins ou de la République démocratique du Congo pour des raisons de sécurité. Certains se sont installés de manière permanente, d’autres circulent entre différents lieux. Les activités de pêche, d’agriculture et d’élevage sont associées dans les pratiques par le réinvestissement, par exemple, des bénéfices de la pêche dans le bétail.

29Dans la région, environ un tiers des terres sont protégées par l’État (forêts, parcs et réserves) et donc officiellement interdites pour l’installation et l’agriculture. La plupart des autres espaces ruraux sont régis par le droit coutumier. Cependant, le pouvoir central y intervient en introduisant à la demande des titres fonciers gérés au travers de son administration. La perspective de l’exploitation pétrolière a entraîné une spéculation accrue sur le marché foncier. Dès 2006, des rumeurs de « course à la terre » circulent autour de l’appropriation de terres accompagnée de la création de titres fonciers par des membres éminents du gouvernement ou des proches du pouvoir [15].

30Les enregistrements de titres aux District Land Boards de Hoima et Masindi ont explosé. En 2009, le gouvernement central ordonne l’arrêt des émissions de titres de propriété dans la région, sans que cette directive orale soit suivie d’effets [16]. Début 2017, le président Museveni réitère l’interdiction et annonce l’annulation des titres émis [17].

31Les jeunes sont à la fois victimes et acteurs dans ce processus. On ne leur confie plus de terres parce qu’ils sont susceptibles de les vendre, mais aussi parce que d’autres accaparent les terres disponibles, remettant en cause la gestion locale de la terre. Ainsi, du fait de la spéculation foncière, l’accès à la terre est de plus en plus difficile à négocier pour ceux qui n’en n’ont pas encore. Le rôle de l’État est à souligner à cet égard. Au lieu d’aplanir les inégalités, il contribue à les créer par son intervention. Il parvient même à prendre le contrôle de terres en gestion « communautaire » en en redéfinissant l’accès.

32Par conséquent, l’accès à la terre s’est précarisé, un phénomène qui touche tout particulièrement les jeunes et crée des contraintes particulières pour se lancer dans l’agriculture. Au-delà des jeunes eux-mêmes, l’administration est consciente de ce problème : « Certains se lanceraient dans la culture. Les plus âgés disent qu’il y a de la terre, mais où est la terre ? Quelqu’un donne de la terre pour une saison et puis on vous chasse [18]. »

33Si certains sont déterminés, malgré les contraintes, et se lancent dans la location de terres et les cultures commerciales, les difficultés détournent de nombreux jeunes du secteur agricole. Leurs ambitions ont changé avec l’éducation et de nouvelles perspectives économiques liées au pétrole et à l’urbanisation. À cet égard, les jeunes migrants n’ont pas forcément les mêmes attentes que les jeunes natifs. Néanmoins, certains jeunes s’installent en milieu rural et réussissent à y développer de nouvelles cultures, pour les marchés urbains par exemple, via l’horticulture ou la riziculture [19].

34Des politiques gouvernementales (dons de semences notamment) visent à les y encourager. Le soutien aux jeunes pour les activités agricoles est cependant ponctuel et la durabilité de ce type de politique pose question, surtout dans un contexte où de nouvelles semences doivent le plus souvent être acquises à chaque saison. De plus, la manière dont les semences sont distribuées laisse place à des pratiques clientélistes. Le partage est à la merci de l’administration locale, comme nous le confirment les dires d’un fonctionnaire en poste :

« Dans la dernière année budgétaire, nous leur avons donné environ huit à dix tonnes de semences […].
– Exclusivement aux jeunes ?
– Pour les jeunes seulement, et nous en avons donné à tous les subcounties. Cette fois, nous nous sommes dits “faisons venir le chef du subcounty, le président du conseil local et le représentant des jeunes, pour chaque subcounty dans le district”. […] Chaque subcounty en a reçu, on en a même donné aux personnes de la municipalité [de Hoima]. Ils ont de la terre au village. Donc, je pense que le partage était juste, mais il n’y en avait pas assez, voilà ce qu’ils me disent [20]. »

35Le souci d’équité affiché entraîne un partage des semences avec des circonscriptions comme la municipalité, dans lesquelles il n’y a pas de rizières, donc pas de jeunes agriculteurs. Plus globalement, le partage semble être dirigé par trois acteurs dans chacune des circonscriptions dont l’un seulement représente les jeunes. Tout ceci indique une appropriation possible des semences à différents niveaux, au détriment des cibles définies comme les bénéficiaires officiels.

36La pêche est un secteur convoité du fait de la présence du lac Albert et d’un marché frontalier important. Contrairement à l’agriculture, elle peut apporter des retours rapides. Un élu local résume la situation en comparant poisson et argent : « Ah, le poisson… Le poisson, c’est comme de l’argent à la banque. [Il rit.] Quelqu’un garde le poisson comme une carte bancaire, parce qu’il peut même décider de dormir avec son poisson dans la maison… […] Il y a de l’argent dans le poisson [21]… »

37Ainsi, la pêche est toujours associée à une image d’abondance et de richesse par certains acteurs. Néanmoins, les discours convergent vers le fait que la pêche est moins facile qu’avant. L’administration, les pêcheurs eux-mêmes, les acheteurs, tous se plaignent, à leur manière, des petites quantités de poisson pêchées. Pour l’administration, c’est un problème général dans les villages du bord du lac : « La pêche n’est plus une source de revenu pour beaucoup de gens ici et cela devient un problème. […] Les jeunes, ils vont au lac, au lieu d’attraper des poissons […]. Ces jours-ci, ils finissent par attraper des grenouilles. [Il rit.] Le lac n’est plus productif, il n’apporte plus autant de poisson qu’avant [22]. »

38Un jeune pêcheur a même pu nous chiffrer la baisse dont il a été témoin. La quantité de poisson aurait été selon lui divisée par six en dix ans : « En 2002, les affaires dans le poisson étaient florissantes et tous les bateaux partant sur l’eau revenaient […] avec presque cent à deux cents kilos de poisson. Mais, aujourd’hui, quand il y en a beaucoup, vous trouvez quinze à trente kilos de poisson, vous voyez, pour chaque bateau [23]. » Une jeune restauratrice livre un bilan comparable : « La pêche… Les pêcheurs vont pêcher et reviennent les mains vides [24]. »

39Que les pêcheurs se plaignent que la pêche est mauvaise est classique. La diminution des quantités de poisson pêchées est mentionnée sans lien établi avec l’exploration pétrolière. Les explications concernant la déplétion du poisson sont nombreuses. Les écologues insistent sur la détérioration des zones humides, la qualité de l’eau, la diminution du nombre d’hippopotames, tous liés aux activités humaines [25]. L’administration insiste sur la surpêche, le non-respect des restrictions (périodes de ponte, taille de maille de filets, pêche à la lanterne). Un jeune pêcheur attribue justement la diminution des prises aux restrictions et régulations de plus en plus nombreuses [26]. C’est effectivement un secteur particulièrement contrôlé par l’administration locale. Dans chaque village de pêcheur, une Beach Management Unit perçoit des taxes sur les bateaux, émet des licences et est censée contrôler les méthodes de pêche, ce qui crée des opportunités de corruption. Le contrôle territorial au niveau de la frontière internationale Ouganda/République démocratique du Congo, au milieu du lac, contraint également les déplacements des pêcheurs. La lutte contre leurs incursions dans les eaux territoriales étrangères, par exemple en cas de restriction de la pêche d’un côté ou de l’autre, peut entraîner des incidents extrêmement violents [27].

Ressources pétrolières et infrastructures routières dans la région du lac Albert

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Ressources pétrolières et infrastructures routières dans la région du lac Albert

Un développement encore inachevé
Dans la région du lac Albert, la volonté d’exploiter le pétrole a conduit le gouvernement à développer les infrastructures routières – dont le mauvais état a contribué à repousser les perspectives de production – avec le goudronnage des axes Kampala-Hoima (achevé en 2006), Hoima-Kaiso-Tonya (2014), Kyangwali-Kingfisher (2016), Houdain-Butiaba-Wanseko et Masindi-Hoima-Kyenjojo (ces deux derniers étant en cours mais controversés du fait de scandales de corruption).
EdiCarto, 06/2017.

40Le secteur primaire continue à occuper la première place dans l’économie locale. Le modèle économique fondé sur un front agricole et la possibilité d’étendre le domaine cultivé ou encore celui qui repose sur des ressources halieutiques abondantes s’épuise : les conditions ont changé. À la place, les entraves, à la fois familiales et administratives, se sont multipliées, limitant ou redéfinissant l’accès à la terre et aux ressources naturelles. Il s’agit dorénavant pour les jeunes de négocier au sein de leurs réseaux de relations des droits temporaires, dans un contexte de ressources de plus en plus limitées, de plus en plus monnayées. Autant dire que la perspective d’acquérir des emplois dans un secteur nouveau, celui du pétrole, a ouvert l’espoir à de nouveaux horizons.

41Le secteur pétrolier, une déconvenue. Le secteur pétrolier a pour l’instant été une déception en termes d’emploi. Ce sont de grandes compagnies internationales (Tullow Oil, Total et la China National Offshore Oil Company – CNOOC) [28] qui sont intervenues entre 2012 et 2016. Que ce soit dans l’exploration pétrolière elle-même, le développement des infrastructures en perspective de la phase d’exploitation ou toutes les activités économiques associées, les grandes compagnies internationales en présence ont principalement fonctionné par appel d’offres pour recruter des sous-traitants internationaux ou des petites entreprises nationales spécialisées selon leurs besoins techniques, comme Kasese Nail and Wood Ltd. La main-d’œuvre technique est venue d’autres régions. Le manque de qualifications sur place a laissé aux jeunes de la région des emplois non qualifiés et de court terme, à leur grand désarroi : « Ces compagnies pétrolières ont essayé d’aider un peu […]. Ces emplois non qualifiés, elles en donnent normalement, et ils sont… ils sont… Ils sont courts, ce ne sont pas des postes permanents [29]. »

42Un fonctionnaire dresse un bilan similaire et est bien conscient de l’enjeu politique que cela représente : « Quand il y a eu le relevé […] sismique, pour le pétrole, nous avions tellement de jeunes en emploi temporaire, mais quand on en vient au travail […] semi-qualifié […], ils sont exclus. Parce que la plupart d’entre eux ne sont pas […] qualifiés. C’est ça le gros problème ici ces jours-ci [30]. »

43Au-delà de ces difficultés liées au marché de l’emploi, les inégalités sont renforcées par la manière dont les recrues sont sélectionnées. Des intermédiaires contrôlent les nouvelles opportunités de travail salarié à tous les niveaux, qu’il s’agisse d’activités qualifiées ou de travail temporaire peu qualifié. Localement, les offres d’emploi passent en effet par le bouche à oreille. L’administration et les élus locaux, interfaces entre la population et les employeurs, jouent un rôle central dans la diffusion de l’information. Ils ont ainsi l’opportunité de placer les personnes de leur choix : l’un d’entre eux a réussi à obtenir un emploi qualifié pour son frère chez Tullow Oil [31], un autre, originaire d’un district voisin, fait venir différents membres de sa famille pour répondre à des demandes ponctuelles. Il explique que sur dix recrutements, il se sent obligé d’en proposer cinq ou six à d’autres que les membres de sa propre famille [32].

44Pour ceux qui n’ont pas d’appui au sein du pouvoir local, il est parfois possible d’obtenir un emploi contre de l’argent ou des services. C’est une pratique courante dans l’ensemble du pays, qui n’épargne pas le secteur pétrolier. « Il y a de la corruption ici, trouver du travail ici maintenant dans cette région… Le problème… J’entends qu’il faut… Il faut au moins être connu, et si ce n’est pas le cas, il faut donner quelque chose », dénonce un jeune mécanicien de Hoima [33].

45Ce système d’accès à l’emploi par relations contribue localement à donner un avantage à un réseau plutôt qu’à un autre. Ces réseaux sont souvent perçus, dans le contexte local, en termes ethniques. En raison du peuplement diversifié du Bunyoro, l’origine des politiciens qui parviennent à investir les postes de pouvoir joue parfois en faveur d’une communauté ou d’une autre.

46De l’instrumentalisation du mal-être des jeunes à la montée de la xénophobie. Les revendications des Banyoro constituent une stratégie délibérée pour contrôler l’accès à des ressources au nom de la réaffirmation d’une appartenance identitaire. Elles sont largement instrumentalisées par le pouvoir politique au moment des élections, et ce, encore plus dans la perspective de la manne pétrolière, suscitant une xénophobie opportuniste [34]. Elles se retrouvent dans les revendications formulées par les jeunes qui sont répercutées dans les médias nationaux et émises devant le parlement ou au cours de tables rondes locales organisées dans le cadre du développement de l’industrie pétrolière [35].

47Ces revendications qui portent sur le partage futur des dividendes du pétrole, l’accès à l’emploi et à la formation, ou simplement sur une compensation pour les pertes subies en termes de ressources naturelles (terres pour l’agriculture, eau pour la pêche), prennent une tournure autochtone. Elles sont souvent formulées à l’échelle du royaume du Bunyoro et par le roi lui-même [36]. Ce phénomène se décline également à une autre échelle, plus locale, parmi les Banyoro, avec des revendications autochtones émises au nom des Bagungu ou des Bakobya, par exemple [37]. Ces revendications en apparence contradictoires se complètent dans leur opposition au pouvoir central.

48Même si elles font état d’un réel problème d’accaparement de terres ou d’accès inégal à des emplois tant convoités, toutes tendent à exagérer les conséquences à court terme de l’exploration pétrolière, qui sert à cristalliser tous les mécontentements. Dans une stratégie instrumentalisant les identités nyoro, faisant également référence aux torts subis par le Bunyoro durant la période coloniale, les jeunes proches du royaume tentent d’acquérir une partie de la rente pétrolière, au détriment du reste de la population locale [38].

49La cristallisation identitaire qui découle de cette instrumentalisation de l’autochtonie est, elle, durable et de mauvais augure. Des violences ciblées ont lieu au moment des élections depuis le début des années 2000. En 2002, dans le district de Kibaale, les Banyoros s’opposent aux migrants du sud du pays (Bakiga et Bafuruki) autour de questions de pouvoir et d’accès à la terre [39]. En 2010, après trois années de tension, les pasteurs (Banyarwanda, Banyankole, Bahima) de Buliisa sont chassés des terres qu’ils avaient achetées (Médard et al., 2013 ; Muhereza, 2015). À Kigorobya, des conflits récurrents entre agriculteurs et pasteurs sévissent en 2007, 2008, 2012, 2014 et 2015 [40]. En 2014, ce sont Banyoro et Congolais ou Alur qui s’affrontent à Buseruka [41].

50Si c’est jusqu’à présent principalement autour de l’accès à la terre qu’apparaissent les violences, l’emploi semble être également un sujet explosif dans la région, qui risque de refaire surface régulièrement dans les années à venir.

51Néanmoins, de nombreuses revendications ne se placent pas sur le registre de l’autochtonie, comme le souligne la mobilisation autour de la catégorie des jeunes. Les jeunes du Bunyoro, d’origines diverses, ne se référent pas systématiquement au royaume lorsqu’ils exigent de l’État des opportunités dans le domaine de l’éducation et de l’emploi, et des compensations correctes pour la terre en cas d’éviction. Ils choisissent souvent de passer par les canaux mis en place par l’État. Les élus locaux organisent la parole des jeunes et la répercutent pour aborder, entre autres, la question des dividendes de l’exploitation pétrolière.

52En fin de compte, la difficulté pour trouver un emploi dans le secteur pétrolier ou dans les activités associées à son développement renvoie à la qualité variable et au nombre de ces emplois. Au problème de la formation des jeunes, en particulier pour les emplois qualifiés, s’ajoute celui du mode de recrutement clientéliste pour tous les emplois, mêmes précaires. Qu’il s’agisse de l’accès à l’emploi ou à la terre, le rôle-clé du gouvernement est souligné.

53Les personnes occupant des postes de pouvoir se positionnent en intermédiaires obligés, contrôlent la ressource et prélèvent leur rente. Paradoxalement, les privilèges et les passe-droits sont dénoncés dans le langage de l’autochtonie et détournent les accusations. Au lieu de s’élever contre les agissements de responsables politiques et administratifs, ce sont les étrangers, les migrants, qui sont désignés comme boucs émissaires. Les tensions autour du recrutement et de l’accès à la terre contribuent à envenimer les relations entre voisins et à élever des barrières durables au sein de la population locale. Située au départ sur un autre registre, la cause des jeunes est également relayée politiquement et finit par être teintée par les discours xénophobes ambiants.

Le dynamisme économique des jeunes en marge du secteur pétrolier

54La région se transforme rapidement, au-delà des discours, des revendications emblématiques centrées sur la rente pétrolière et des stratégies de captation. Comment les jeunes s’en sortent-ils ? Dans cette partie, nous verrons que certains, malgré des contraintes fortes, savent rebondir avec ou sans soutien. Si l’emploi lié à l’exploration pétrolière n’a pas satisfait les attentes, une grande partie des jeunes bénéficie du dynamisme économique de la région et en sont eux-mêmes acteurs.

55Avec le développement des infrastructures dans l’ensemble de la région (routes, électricité), de nouvelles opportunités dans le secteur agricole et dans les transports et les services sont apparues. Le marché du poisson, par exemple, s’est ouvert à l’ensemble du pays, en compétition avec le marché frontalier liant les deux rives du lac, à l’interface entre la République démocratique du Congo et l’Ouganda.

56L’urbanisation rapide des petites villes s’est accompagnée de la croissance du nombre de petits commerces et des services. Les opportunités en réserve pour les jeunes n’ont pas vraiment vu le jour là où elles étaient attendues. Bien que la perspective d’accéder à une partie du revenu pétrolier ait contribué à la recherche de rentes de situation parmi les jeunes comme parmi les moins jeunes, certains ont su saisir les véritables opportunités qui ont vu le jour dans la région.

57Croissance urbaine et développement régional. Même si l’économie locale se développe au rythme des activités pétrolières et de ses à-coups, de nouvelles opportunités sont apparues avec la construction d’infrastructures routières et l’urbanisation induite. Parmi les jeunes, certains réussissent grâce à un coup de pouce, d’un parent, d’un réseau politique, d’autres s’en sortent par leurs propres efforts et la force de leur travail sans appui extérieur. Parfois, c’est effectivement un emploi dans le secteur pétrolier (même éphémère) qui suffit pour mettre le pied à l’étrier, acheter une moto ou commencer un commerce de tissus en provenance du Congo.

58La perspective de la mise en exploitation des ressources pétrolières de la région a entraîné un développement marqué des infrastructures, qui accusaient jusqu’alors un retard par rapport au reste du pays. Ainsi, l’axe Hoima-Kampala a enfin été goudronné en 2006, mettant la capitale à quatre heures de route seulement du centre de la région pétrolière, au lieu d’une douzaine d’heures. Depuis lors, d’autres routes ont été goudronnées, comme l’axe Hoima-Kaiso-Tonya, au cœur de la future zone d’exploitation du pétrole, achevé en 2015, désenclavant une partie du littoral du lac Albert et des zones agricoles entières, dont certaines à fort potentiel.

59Le produit de la pêche est plus facilement écoulé vers un marché urbain et même la capitale Kampala, réorientant partiellement les flux commerciaux qui s’effectuaient par bateau et en direction de la République démocratique du Congo. La tendance a été notée avant même l’achèvement des routes [42]. Côté électricité, la mise en service de la centrale hydroélectrique de Buseruka, fin 2012, a été suivie par l’électrification de toute la côte, jusqu’à Buliisa.

60Le secteur des services connaît également un fort développement. Les villes moyennes de la région débordent de vie, principalement autour de l’activité hôtelière, des marchés et des transports. Les jeunes y trouvent du travail et l’accès à une activité urbaine demeure un symbole de réussite, comme nous le confirme un fonctionnaire de l’administration : « Mais la plupart d’entre eux ont réussi, certains sont en ville maintenant, et ils vivent là-bas, ils font des affaires. On voit des boda-boda [moto-taxi], beaucoup de boda-boda, ceux-là ont même vendu la terre de leurs parents pour venir ici pour le boda-boda, on voit des commerçants ambulants [43]… »

61Les jeunes eux-mêmes pensent que cette croissance va durer : « Voilà, cette question du pétrole attire beaucoup de gens à venir faire des affaires ici. […] Maintenant, les affaires ici vont être florissantes, cela n’est pas fini ; […] la population va continuer à croître [44]. » Dans un village de pêcheurs, un jeune entrepreneur nous explique que les emplois temporaires pourvus dans le secteur pétrolier ont transformé la vie localement, pour les personnes concernées, mais également pour le reste de la population, en dynamisant le marché [45].

62Des jeunes qui voient (trop) grand ? Conscients du décalage de modes de vie et de revenus au sein de la population, certains jeunes espèrent gagner beaucoup d’argent très vite. Le développement de la région et les discussions sur la production pétrolière encouragent ces rêves. Les activités agricoles sont par conséquent moins attractives. La pêche représente toujours pour quelques-uns le moyen de réaliser des gains rapides sur les rives du lac Albert, alors que pour d’autres les conditions de vie sont devenues plus difficiles à accepter.

63L’administration et les notables, faute de trouver une solution pour créer de l’emploi, critiquent les aspirations de ceux qui voudraient réussir sans efforts. Un fonctionnaire décrit ce problème : « Ils ne veulent pas s’engager dans des emplois douloureux, qu’ils soient formels ou informels. Ils veulent de l’argent rapide et ils veulent un style de vie qui est, je pense, au-dessus de leurs moyens, et donc cela […] crée une montagne de problèmes en termes de subsistance [46]. » Dans un élan d’humour, un élu local mime les jeunes avides d’emplois qualifiés pour lesquels ils n’ont pas d’expérience préalable : « Nous, nous voulons des emplois qualifiés, nous voulons aller voir Tullow et devenir le chef comptable [47] ! »

64C’est avant tout l’accès au capital qui pose problème à des jeunes qui ont de l’ambition, qui veulent tout de suite être en mesure de démarrer une activité à leur propre compte [48]. La manière de se constituer un capital est une clé dans la réussite. La promotion des associations d’épargne (ACCO) et les fonds attribués dans certains cas par l’État, comme en période électorale, contribuent à la mobilisation des jeunes en faveur du régime. Le besoin de capital est l’une des causes de ventes de terres qui participe au cycle d’exclusion des jeunes du secteur agricole que nous avons déjà évoqué.

65Dans l’ensemble, les moyens des jeunes ruraux pour s’en sortir restent modestes : ils demeurent à l’affût de toute opportunité pour gagner de l’argent. Leur réactivité lorsqu’une occasion se présente, comme faire payer les gens pour les aider à traverser une rivière en période de crue [49], illustre leur disponibilité et leur besoin d’argent.

66Certains réussissent à se faire une place. Les trajectoires professionnelles des jeunes qui ont réussi montrent une accumulation progressive et une réussite principalement fondée sur l’expérience et la confiance. La possibilité d’une extension de leurs activités est liée à l’ouverture de l’économie locale.

67Georges a perdu son père très jeune [50]. Adolescent, il gardait des troupeaux dans la région et vendait du lait au bord de la route. En économisant sur ses salaires, en investissant tour à tour dans le bétail ou la terre au fil des rentrées d’argent et en les revendant selon les occasions, il a réussi à vivre, à se faire connaître et à s’établir. Il est en 2012, à 32 ans, l’un des fournisseurs de lait frais de la plupart des hôtels de la ville. Il ne possède pas de vaches lui-même mais s’approvisionne auprès d’éleveurs situés à proximité. Il est en permanence à la recherche de nouveaux contrats. La demande croît avec la ville.

68Au bord du lac, Paula est elle aussi devenue chef d’entreprise [51]. Jeune fille, elle vendait le poisson comme sa mère avant elle. Puis, face au besoin d’argent pour élever ses enfants, elle a décidé qu’elle devait trouver une solution. Grâce à son père, elle a acheté un bateau. Une quinzaine d’années plus tard, fin 2012, elle possède et gère deux bateaux de pêche. Elle salarie des pêcheurs, leur fournit le matériel et revend le poisson à leur retour.

69En ville, une jeune coiffeuse, Abby [52], et un conducteur de moto-taxi, Dominic [53], pratiquent depuis quelques années leurs activités respectives avant d’obtenir un prêt qui leur permet de s’installer à leur propre compte. Elle paie ainsi le loyer de son salon de beauté et parvient à acheter du matériel moderne (séchoirs, etc.) grâce à l’aide de ses frères. Lui obtient de l’argent d’un groupe d’épargne local qui lui permet d’acheter sa propre moto. Cette possibilité existe en ville mais également dans certains villages de pêcheurs.

70Ces exemples soulignent le rôle de l’accès à un capital, par héritage, par des économies personnelles ou par l’accès à un emprunt. Ils montrent aussi l’importance de l’expérience, d’un apprentissage progressif et de la persistance dans les efforts. Les opportunités se multiplient avec le développement progressif de la région. Un appui financier ne suffit pas. Tous ceux qui ont bénéficié d’un avantage du fait de relations familiales ou politiques ne se montrent pas capables de réinvestir. Certains adoptent clairement la position de rentiers, se servant en premier lorsqu’ils sont en position de le faire ou attendant de bénéficier de largesses considérées comme un dû, mais dans les récits nos interlocuteurs insistent sur leur travail.

Conclusion

71Au Bunyoro, les débats autour de politiques à mettre en œuvre pour promouvoir les jeunes se réfèrent à la marginalisation historique de la région et au revirement récent provoqué par l’exploration pétrolière. La mise en valeur économique de la région renvoie à des enjeux migratoires et au travail des jeunes. La découverte du pétrole est présentée comme une chance pour les jeunes de vivre et travailler au pays. Des revendications autochtones autour d’un contrôle des ressources économiques et politiques sont apparues et ces logiques se surimposent à une mobilisation autour de la catégorie des « jeunes ».

72Des aides spécifiques en faveur des jeunes du Bunyoro, destinées à leur autonomisation, sont mises en œuvre, envisagées ou revendiquées. Elles ont du mal à échapper aux logiques de dépendance : le régime donne et en échange reçoit le soutien de la jeunesse, des associations de motos-taxis ou d’épargne, etc. Les attributions ne sont pas transparentes et sont réparties inégalement au sein de la jeunesse comme dans d’autres cercles, créant privilèges et dispositifs de rente. Une conception rentière de l’économie n’est ni le propre de la jeunesse ni du Bunyoro, mais la ressource pétrolière contribue à l’exacerbation de cette tendance localement et à sa démocratisation.

73Réclamer son dû contraste avec les efforts pour joindre les deux bouts, le petit entrepreneuriat dans le transport, le commerce, les services qui accompagnent le développement urbain lié aux nouvelles activités dans le secteur pétrolier et aux investissements de l’État dans les infrastructures. En pratique, différents acteurs interviennent suivant leurs moyens et possibilités, avec des stratégies rentières et productives qui en règle générale se chevauchent, mais dans des proportions variées. En jouant sur un accès privilégié à des ressources de différents types, à un moment donné, certains tirent profit d’un avantage indu pour se lancer en affaires.

74Les jeunes dans ce contexte ne sont pas avantagés, ils souffrent d’un manque de reconnaissance, de formation et de difficultés d’autonomisation. La prise de conscience du problème de l’emploi des jeunes est perceptible dans le cadre de l’élaboration de politiques publiques ciblées (accès au crédit, semences), mais les mesures prises sont loin d’être à la hauteur du défi posé par une insertion économique plus équitable. En attendant, ils ne sont pas à l’abri d’une instrumentalisation politique de leur promotion : certains réclament des subsides au nom des jeunes pour les capter. Le discours en faveur des jeunes est omniprésent en Ouganda et il est réapproprié par les intéressés ou par d’autres de façon souvent opportuniste.

75Les possibilités d’emploi salarié ouvertes par l’exploration pétrolière ont jusqu’à présent été peu nombreuses et temporaires. Au-delà des discours, le dynamisme économique local repose sur les initiatives plurielles de différents acteurs, jeunes y compris. Un réel potentiel est déjà présent avec le développement de la région en termes d’infrastructure et l’ouverture récente de nouveaux marchés. Les opportunités réelles découlent de la croissance globale de la région plus que du secteur pétrolier. Ainsi, malgré les lenteurs et les incertitudes qui marquent les perspectives d’exploitation pétrolière, malgré les contraintes fortes, à la fois démographiques, sociales et économiques, il est possible de construire des trajectoires ascendantes. L’appât de gains rapides, exacerbés par la perspective d’une activité pétrolière, fait cependant émerger des stratégies contrastées.

Notes

  • [1]
    Le terme « Bunyoro » est utilisé dans cet article pour qualifier la région et correspond aux districts de Masindi, Hoima et Kibaale de 2002. Les « Banyoro » (sg. Munyoro, adj. nyoro) sont aujourd’hui en revanche non pas les habitants de la région, mais les personnes qui s’identifient ou ont été identifiées à ce groupe ethnique particulier.
  • [2]
    F. Mugerwa, F. Basiime, “Bunyoro Youth Want Oil Shares”, Daily Monitor, 21 décembre 2011.
  • [3]
    Kenya Wetlands Biodiversity Research Team, basée au National Museum of Kenya, Nairobi. Voir le site : https://www.facebook.com/Kenweb-254203431354628/.
  • [4]
    En Ouganda, des élus jouent un rôle dans l’administration locale, en parallèle aux agents de l’administration territoriale mise en place par le pouvoir central.
  • [5]
    Même si le rapport du recensement de 2014 donne 20 % pour 2002, c’est bien 22,4 % qui est mentionné dans celui du recensement 2002 (UBOS, 2005).
  • [6]
    19,7 % en 1991, 20,1 % en 2002. Calcul des auteurs. Les données pour 2014 ne sont pas encore disponibles.
  • [7]
    Estimation des auteurs à partir de l’hypothèse qu’ils forment 20 à 23 % de la population du pays (389 000 à 447 000).
  • [8]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR15) ; entretien avec un jeune homme, Buliisa, août 2012 (HR29).
  • [9]
    Entretien avec un jeune mécanicien, ville de Hoima, juillet 2012 (HR18).
  • [10]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Buliisa, août 2012 (HR24).
  • [11]
    Entretien avec un élu, Hoima, août 2012 (HR31).
  • [12]
  • [13]
    Par exemple, sur les associations de motos-taxis à Kampala, voir Titeca (2014).
  • [14]
    Par exemple, sur les forêts, voir F. Kivalubya, “Rampant Forest Encroachment Attracts Anti-Corruption Bodies”, Uganda Radio Network, 15 février 2012. Uganda Radio Network est un site Internet d’informations régionales qui présente des articles écrits et des entretiens enregistrés, financé entre autres par des institutions étrangères promouvant la démocratie.
  • [15]
    Y. Mugenyi, “No Land Problem in Hoima”, New Vision, 21 août 2006.
  • [16]
    F. Basiime, “Ban on Bunyoro Land Titles Provokes High Emotions”, Daily Monitor, 20 février 2012 ; F. Mugerwa, “Bunyoro Rejects Ban on Processing Land Titles”, Daily Monitor, 31 mars 2012. Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, août 2012 (HR32).
  • [17]
    I.A. Manzil, “Government Cancels Land Titles Issued in the Past 7 Years”, Daily Monitor, 6 mars 2012.
  • [18]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR20).
  • [19]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR15).
  • [20]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR20).
  • [21]
    Entretien avec un élu, Hoima, décembre 2012 (KR 10).
  • [22]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Buliisa, juillet 2012 (HR22).
  • [23]
    Entretien avec un jeune responsable local, village de pêcheurs, décembre 2012 (KR2).
  • [24]
    Entretien avec une jeune restauratrice, village de pêcheurs, décembre 2012 (KR13).
  • [25]
    Communication de l’équipe Kenweb (2013).
  • [26]
    Entretien avec un jeune homme, village de pêcheur, décembre 2012 (KR6).
  • [27]
    F. Mugerwa, “L. Albert. Lucrative but Deadly”, Daily Monitor, 16 juillet 2011 ; A. Bagala, “4 policemen Shot Dead at DRC Border”, Daily Monitor, 23 mai 2016.
  • [28]
    Tullow Oil est une compagnie britannique, Total française et CNOOC chinoise. Chacune détenait un tiers des concessions dans cette phase d’exploration. Tullow est actuellement en train de se retirer, au bénéfice de Total et de CNOOC.
  • [29]
    Entretien avec un jeune homme, Buliisa, août 2012 (HR29).
  • [30]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Buliisa, août 2012 (HR24).
  • [31]
    Entretien avec un élu, Hoima, août 2012 (HR31).
  • [32]
    Entretien avec un élu, Hoima, décembre 2012 (KR10).
  • [33]
    Entretien avec un jeune mécanicien, Hoima, juillet 2012 (HR18).
  • [34]
    Sur le lien entre citoyenneté et xénophobie en Afrique, voir Médard (2008), Fourchard (2015), Médard (2016).
  • [35]
    M. Mulondo, “Bunyoro Youth Petition Parliament on Oil Exclusion”, New Vision, 24 août 2014.
  • [36]
    V. Kibego, “Bunyoro King Tasks Oil Companies On Fish And Cultural Preservation”, Uganda Radio Network, 23 mars 2012 ; O. Nakatudde, “Environmental Protection. Bunyoro Youth Petition Speaker”, Uganda Radio Network, 21 août 2014.
  • [37]
    J. Akweteireho, “Oil Discovery in Hoima Ignites Hopes, Fears”, Uganda Radio Network, 28 janvier 2009.
  • [38]
    R. Mubiri, “Bunyoro Youth Petition Parliament On Oil”, Uganda Radio Network, 25 janvier 2012.
  • [39]
    Voir, par exemple, Green (2006) et Rugadya (2009).
  • [40]
    F. Kivalubya, “Tension in Hoima as Cultivators, Cattle Keepers Clash Again”, Uganda Radio Network, 18 mai 2015.
  • [41]
    “Stop Endless Land Fights in Bunyoro”, Daily Monitor, éditorial, 9 décembre 2014.
  • [42]
    F. Kivalubya, “Hoima-Kaiso-Tonya Road Eases Access to Lake Albert”, Uganda Radio Network, 4 décembre 2014.
  • [43]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR20).
  • [44]
    Entretien avec un jeune homme, micro-finance, Hoima, juillet 2012 (HR21).
  • [45]
    Entretien avec un jeune chef d’entreprise, Hoima, décembre 2012 (KR9).
  • [46]
    Entretien avec un fonctionnaire de l’administration, Hoima, juillet 2012 (HR7).
  • [47]
    Entretien avec un élu, Hoima, juillet 2012 (HR31).
  • [48]
    Entretien avec un jeune homme, micro-finance, Hoima, juillet 2012 (HR21).
  • [49]
    F. Kivalubya, “Heavy Rains Wash Away Another Bridge On Hoima-Masindi Road”, Uganda Radio Network, 9 septembre 2011.
  • [50]
    Entretien avec un chef d’entreprise, Hoima, juillet 2012 (HR2). Les noms ont été modifiés pour préserver l’anonymat des enquêtés.
  • [51]
    Entretien avec un chef d’entreprise, Hoima, décembre 2012 (KR7).
  • [52]
    Entretien avec une coiffeuse, Hoima, juillet 2012 (HR1).
  • [53]
    Entretien avec un conducteur de moto-taxi, Hoima, août 2011 (HO15).
Français

La rive est du lac Albert, en Ouganda, fait l’objet d’une attention nouvelle du fait de l’exploration pétrolière récente. Les médias nationaux font écho à l’insatisfaction des jeunes, que ce soit au sujet de compensations pour leur terre ou des opportunités de formation et d’emploi. Cet article montre comment la catégorie « jeunes » est instrumentalisée politiquement et que les processus d’autonomisation des jeunes sont transformés par la perspective d’un renouveau économique. En dépit des attentes, les opportunités réelles découlent de la croissance globale de la région plus que du secteur pétrolier.

Mots-clés

  • Ouganda
  • jeunesse
  • autochtonie
  • migration
  • formation
  • terre
  • emploi
  • rapports de pouvoir
  • pétrole

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Valérie Golaz
Valérie Golaz est chargée de recherche à l’Institut national d’études démographiques (INED), en accueil au LPED (UMR 151, IRD-Aix-Marseille Université).
Claire Médard
Claire Médard est chargée de recherche à l’IRD, URMIS (Université Paris-Diderot-Université de Nice-IRD, UMR 205, CNRS UMR8245).
Susan Mwangi
Susan Waiyego Mwangi est maître de conférences à Kenyatta University, Nairobi, Kenya.
Equipe M-PRAM
M-PRAM est un projet de recherche collaboratif du Centre for Population and Applied Statistics (CPAS), Makerere University, Ouganda. Il porte sur la pauvreté, l’accès aux ressources et la mobilité spatiale en Afrique de l’Est. L’équipe est composée de Faith Atuhumuze (Makerere University), George Bogere (ACODE-Uganda), Valérie Golaz (INED), Fredrick Kisekka-Ntale (DRASPAC), John Mushomi Atwebembeire (Makerere University), Claire Médard (IRD), Susan Waiyego Mwangi (Kenyatta University), Gordon Omenya Onyango (Kenyatta University), Gideon Rutaremwa (UNECA), Stephen Ojiambo Wandera (Makerere University) et Peter Wafula Wekesa (Kenyatta University).
Cette publication est la plus récente de l'auteur sur Cairn.info.
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Mis en ligne sur Cairn.info le 26/09/2017
https://doi.org/10.3917/afco.259.0095
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