Jusqu’à peu moins étudiée que l’aire paradoxale d’expérience (Winnicott, 1975), une autre acception du paradoxe a connu un destin parallèle dans la littérature analytique. Il s’agit de la paradoxalité pathologique, qui a trait aux situations de double bind étudiées par G. Bateson (1956), l’école de Palo Alto et l’école de Milan d’un point de vue systémique, puis reprise par J.-C. Racamier (1980) et D. Anzieu (1975) dans une perspective psychanalytique qui a ouvert la voie aux développements théoriques de R. Roussillon (1991). Dans quelle mesure la paradoxalité pathologique est-elle constitutive d’un effacement progressif des frontières entre l’adolescent et ses parents, ainsi que des limites internes du fonctionnement psychique, entravant de fait les processus d’individuation et de subjectivation ?
À partir d’un fragment clinique extrait d’un suivi en thérapie familiale, nous nous intéresserons à la psychopathologie d’une famille et plus particulièrement à la dynamique psychique de l’adolescent et ses parents, à l’occasion de l’entrée dans un processus de décompensation psychotique. Après avoir qualifié les spécificités transféro-contre-transférentielles de cette clinique, nous rendrons compte de l’organisation psychique paradoxale et pathologique à l’œuvre , pour penser les moyens et les dispositifs thérapeutiques adaptés à sa prise en charge.Arthur H., âgé de dix-sept ans, est reçu avec ses deux parents en raison de difficultés d’apprentissage. Dernier de sa fratrie, il doit prochainement entrer en Terminale et appréhende la rencontre avec ses pairs, avec lesquels il a du mal à tisser des liens depuis son entrée au lycée…