Devant l’hypothèse d’un continuum entre identité religieuse musulmane et risque de radicalisation, que pensent les enfants français issus de l’immigration de tradition musulmane ? La banlieue, son malaise dans la cité et les effets de la mondialisation seraient « un terreau » aux possibles candidats à la radicalisation ; ceux-ci, de par leur fragilité psychique protéiforme et multifactorielle, y trouveraient une issue à leurs problématiques internes (Guénoun, 2016). Qu’en est-il du point de vue du clinicien pour adolescents ? Quelle lecture à la fois psychanalytique, anthropologique et sociologique peut-on en donner ?
Le débat sur la place qu’il convient d’accorder à la dimension religieuse du jihadisme émerge depuis quelques années en France dans le monde de la recherche, mais aussi dans celui des médias. Les hypothèses paradigmatiques de G. Kepel et de O. Roy s’opposent – le premier mettant en avant « la radicalisation de l’islam », et le second, « l’islamisation de la radicalité » (Kepel, 2015 ; Roy, Seniguer, 2015) . Selon G. Kepel, il est nécessaire de prendre en compte l’idéologie religieuse qui guide les « fous de Dieu » pour comprendre le jihadisme. O. Roy parle lui de « nihilisme » et considère le terrorisme islamiste comme une révolte, certes dévoyée et dangereuse, mais une révolte tout de même des « damnés de la terre », pour reprendre les termes de F. Fanon, dénonçant leur marginalisation dans la société française. Dans cet affrontement idéologique, la question centrale est la suivante : le religieux est-il un élément incontournable dans l’analyse du radicalisme islamiste et du jihadisme …