L’élection présidentielle de 2022 puis les élections législatives n’ont eu qu’un seul véritable vainqueur : le Rassemblement national (RN). Si, avec 41 % de suffrages exprimés au second tour de la présidentielle, Marine Le Pen n’a pas réussi à prendre le pouvoir, elle a augmenté sa surface électorale de manière considérable en agrégeant sur son nom 1,5 million de voix de plus qu’en 2017. Les élections législatives ont vu arriver dans l’Hémicycle, pour la première fois sous la Ve République, 89 députés élus sous la bannière du RN, qui devient le premier groupe d’opposition face à un macronisme en déclin n’ayant pu obtenir la majorité absolue des sièges. Ce succès politique appelle l’analyse car il constitue un tournant historique. Le RN n’a pas conquis l’Élysée mais sa forte présence au sein d’une Assemblée nationale, à nouveau plongée dans les négociations d’un parlementarisme oublié depuis au moins les années Rocard, le met au centre du jeu. C’est un moment décisif pour la démocratie en France que de voir un parti encore considéré durant le premier mandat d’Emmanuel Macron comme une force extrémiste, périphérique, abonnée aux échecs électoraux, représenter l’un des principaux acteurs de la recomposition en cours du paysage politique.
Pourquoi un nouveau livre sur le RN alors que tant a déjà été écrit ? La quasi-totalité des grilles de lecture se réfugie derrière une pensée purement historique ou politique qui s’avère très juste. Sur le plan historique, le RN n’est plus le Front national créé par Jean-Marie Le Pen dans le sillage de la guerre d’Algérie, de l’OAS, des mouvances multiples et complexes d’une extrême droite antigaullist…