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Quels sont les points communs entre le développement psychique du bébé et celui de l’adolescent ? Comment l’histoire du bébé influence-t-elle la construction de l’adolescent et comment l’adolescent revisite-t-il les souvenirs de l'enfance ? La narrativité constitue un fil rouge de l’histoire du sujet à partir duquel le Pr Bernard Golse nous ouvre à une compréhension renouvelée du bébé, de l’adolescent et des liens entre ces différents âges de la vie.
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Le Pr Bernard Golse s’inscrit dans la filiation des fondateurs de la pédopsychiatrie psychanalytique : Lebovici, Soulé, Diatkine.
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Dans trois domaines, le Pr Bernard Golse a apporté une contribution psychanalytique marquante :
- Le bébé, son développement et ses aléas psychopathologiques précoces.
- L’autisme
- L’adoption
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C’est le lien qui fait le lien entre ces trois domaines :
- La mise en place de l’appareil psychique du bébé comme l’étude de la manière dont le bébé va mettre en place ses premiers liens, comment il va se les représenter mentalement.
- L’autisme est une situation dans laquelle les enfants échouent, totalement ou partiellement à mettre en place ces liens avec leur environnement.
- L’adoption est une situation paradigmatique qui nous montre comment un enfant doit mettre en place ces fameux liens avec des adultes qui ne l’ont pas conçu mais qui vont se positionner pour lui comme ses parents la vie durant.
La thématique « Bébés/Ados »
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Du bébé à l’adolescent la question du lien est aussi centrale qu’énigmatique.
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Tout au long de sa vie, le sujet cherche à se séparer sans s’arracher, à être à deux sans se perdre dans la fusion.
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La narrativité inscrit le sujet dans son histoire. Le soin consiste à faire lien.
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La thématique dite « bébés/ados » cherche à approfondir la question des convergences qui existent entre le fonctionnement psychique des adolescents et celui des bébés.
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C’est une question qui intéresse de nombreux cliniciens, comme en témoigne le succès continu des différents colloques dits « Bébés/Ados » organisés en étroite collaboration par Alain Braconnier (spécialiste des adolescents), Manuelle Missonnier (au nom de la revue « Le Carnet-Psy ») et Bernard Golse lui-même.
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Il s’agit donc d’une thématique forte en rapport avec les effets d’après-coup inhérents au développement.
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Les bébés ne sont pas seulement de futurs adolescents, et les adolescents ne sont pas seulement d’anciens bébés.
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Les bébés ne savent pas qu’ils seront un jour des adolescents, et les adolescents ne pensent plus au bébé qu’ils ont été, d’où l’importance de la dynamique dialectique qui relie ces deux âges de la vie.
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La manière dont les adolescents entreront un jour dans la parentalité (soit les bébés qu’ils auront peut-être) dépend en partie de leur histoire précoce et des remaniements ultérieurs de celle-ci (soit les traces des bébés qu’ils furent).
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Parler des bébés aux adolescents semble donc utile non seulement pour les préparer au mieux à leur propre parentalité future éventuelle, mais aussi pour les rendre attentifs à l’importance de la vie psychique préverbale.
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Ceci ouvre ainsi à la fois sur une aide à l’accès à la parentalité, mais aussi à un respect de la vie psychique sous toutes ses formes.
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Du fait du mal-être social actuel, cette question est tout sauf superflue et il y a peut-être là une authentique possibilité de prévention de la violence qui est hélas devenue un authentique problème de santé publique (individuel et collectif).
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Par l’évocation de trois articles, difficiles à choisir parmi les 918 à ce jour du Pr Bernard Golse, nous tenterons de rendre hommage à une pensée qui décloisonne et crée du lien au service du soin.
Co-construire avec le bébé une histoire qui le précède
Créés en 2004 par Bernard Golse et Alain Braconnier, les colloques BB-Ados réunissent chaque année plusieurs centaines de cliniciens de la périnatalité, de l’enfance et de l’adolescence autour des liens entre la vie psychique des bébés et celle des adolescents.
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Suffit-il au bébé de naître pour exister ? Le bébé arrive dans un monde qui lui préexiste et son histoire en devenir s’inscrit dans une histoire, que l’adulte a pour précieuse mission de lui transmettre. Est-ce à dire que le bébé est un être passif qui écouterait cette histoire sans y participer ? Le bébé n’est pas simple nourrisson. Dès sa naissance, il s’ouvre au monde avec la curiosité d’un érudit, qui mesure l’étendue de ce qui lui reste à apprendre. Le visage de l’autre retient par exemple toute son attention.
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« Ce sont précisément ces rencontres qui font l’histoire de l’enfant, qui vont lui permettre d’écrire son histoire avec l’adulte comme co-auteur, c’est en ce sens que je parle de la rencontre entre l’adulte et le bébé comme d’un espace de récit » souligne Bernard Golse.
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À l’adolescence, c’est le corps de l’adolescent qui devient énigmatique pour l’adolescent et ce ne sont plus, alors, les soins maternels mais ses propres fonctionnements corporels qui viennent réactiver chez lui cette situation de séduction originaire dont on sait la force d’attraction fondée à la fois sur des affects de fascination et d’effroi.
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On assiste ainsi à une sorte d’intériorisation progressive de l’énigme chez les adolescents, puisque l’énigme qui venait de la mère chez le bébé se trouve dès lors devenir une énigme venant du corps même de l’adolescent.
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Du bébé à l’adolescence, l’énigme fascine car elle soulève une question existentielle. Les tentatives de suicide à l’adolescence sont peut-être à appréhender comme une tentative d’échapper à la réponse saturante de l’énigme.
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Pour aller plus loin
« Nos histoires de bébés nous suivent jusque dans nos histoires d’amour »
Le bébé chef d’orchestre de son histoire et de son environnement. Image issue du site de Bernard Golse –
www.psynem.org/ 28
Que se passe-t-il dans la tête d’un bébé ? Quel chamboulement inouï que celui de la naissance. Le bébé arrive dans notre monde peuplé de personnes et d’objets. D’emblée, il est accueilli par une foule de personnes dans un environnement qu’il ne connaît pas.
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Qu’observe-t-il et qu’éprouve-t-il ? À quoi pense-t-il ? Dépassé est le temps, malheureusement pas si lointain, où certains se sont rassurés en pensant que le bébé ne pensait pas.
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Posture très défensive qui protège de l’idée que le bébé analyse son monde et qu’il en mémorise certaines intrigues.
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Le Pr Bernard Golse donne la parole aux bébés en leur reconnaissant une vie psychique. Accéder à la perception du monde du bébé « n’est possible que par le biais de nos identifications régressives à nos propres parties infantiles les plus archaïques » nous rappelle-t-il. À l’inverse, nos résistances à considérer le bébé comme une personne sont sans doute liées à la crainte de réveiller nos motions infantiles refoulées.
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La Sphinge pose une énigme à Œdipe. La mère, implicitement, en pose trois au bébé que Bernard Golse explicite ainsi :
- Est-ce qu’elle est aussi belle dedans que dehors ?
- Est-ce qu’elle est comme d’habitude ?
- Qu’est-ce que c’est que cet espace qui n’est ni-moi-ni-elle ?
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Ces questions déconcertent par leur pertinence existentielle mais elles sont moins surprenantes dès lors que l’on saisit les connaissances du bébé qu’elles mettent en jeu :
- Le nouveau-né découvre et rencontre sa mère immédiatement : le peau à peau, l’odeur, la voix sont l’occasion d’une rencontre au parfum de déjà éprouvé.
- Le bébé découvre progressivement que lui et l’autre font deux.
- Les interactions précoces révèlent au bébé que pour la mère un ailleurs existe. C’est la place du tiers, de l’autre. Nouvelle énigme pour le bébé qui se trouve en rivalité avec un tiers qu’il a du mal à identifier et ce d’autant plus qu’il en a fondamentalement besoin.
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Pour aller plus loin
Le droit à une histoire de l’enfant adopté ou les enjeux thérapeutiques de la narrativité
Gustav Klimt – Mother and child
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Ce superbe article théorico-clinique illustre les enjeux thérapeutiques des connaissances sur la narrativité. La quête des origines implique-t-elle une connaissance absolue des premiers temps de vie du bébé ? Vœu pieu que d’accéder au début de l’histoire d’un sujet. Où commencer, où s’arrêter ? La tentation « d’un temps zéro » existe pour les parents des enfants adoptés : une histoire qui commencerait avec l’adoption. Pour les parents, ce n’est pas tant faire fi de l’histoire antérieure de leur enfant, qu’un désir profond d’inscrire l’enfant adopté dans la lignée des parents adoptants.
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Toutefois, cela va à l’encontre d’une réalité psychique et sensorielle du bébé qui a commencé sa vie ailleurs, avec d’autres.
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Le travail thérapeutique va consister à apporter une continuité psychique aux sujets : tant pour l’enfant que pour les parents.
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Inscrire l’histoire du sujet dans un ailleurs lui permet de s’inscrire dans un maintenant. Et pour les parents il s’agira de leur permettre de sortir d’une rivalité symbolique de la légitimité du faire parent qui serait dans le fantasme ‘le présent depuis le début’.
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Une narrativité souple qui ne soit pas rigide.
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L’histoire du sujet, passée et à venir, n’est jamais écrite une fois pour toutes. L’espace thérapeutique peut être l’occasion d’une rêverie partagée sur les origines intégrant les zones d’ombre énigmatiques transformant la quête éperdue des origines en une reconquête de sa propre histoire.
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Pour aller plus loin
